"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 13 novembre 2021

Staretz Cléopa: La crainte et l'amour de Dieu



Question: Père Cléopa, quel rapport y a-t-il entre la crainte de Dieu et l'amour de Dieu ?

Réponse: La crainte de Dieu, selon les saints Pères, ainsi que le prophète David, est le " commencement de la sagesse " - en d'autres termes, le début de toute vertu, tandis que l'amour de Dieu est la perfection et le point culminant de la vertu. La crainte de Dieu, par conséquent, constitue le commencement du salut, tandis que l'amour de Dieu, qui bannit la crainte (I Jean 4:18 ), est le point culminant du salut, car celui qui aime, vit seulement pour Dieu Qui est Amour (I Jean 4:8).

Mais nous ne devons pas avoir une crainte de Dieu telle, qu'elle l'emporte sur notre amour pour Dieu. Saint Basile dit que celui qui fait le bien, par peur des tourments de l'enfer ou de la punition, est celui qui est assimilé à un esclave, celui qui fait de bonnes œuvres pour être remboursé - avoir ses désirs accomplis sur cette terre ou être récompensé dans le ciel, est comme un serviteur qui sert son maître afin d'être rémunéré avec de l'argent, mais celui qui fait des actions vertueuses pour l'amour de Dieu et non à cause de la peur ou du désir de recevoir une récompense, est un fils de Dieu.

Ainsi, celui qui fait des actes vertueux purement par amour a atteint l'état de perfection et il est appelé fils de Dieu.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
citant les Conseils Spirituels
du staretz Cléopa 
de bienheureuse mémoire

vendredi 12 novembre 2021

Anges incognito

 


Il n'est pas un seul d'entre de nous, dans une semaine donnée, qui ne rencontre quelqu'un qui a besoin d'encouragement, d'amour et de miséricorde. Ce sont souvent les mères, dont les enfants vont au lit le soir avec la faim au ventre, par manque d'argent pour la nourriture. Les femmes âgées, dont les maris sont partis depuis longtemps, et dont les enfants sont trop occupés pour venir les voir. Le jeune étudiant au bout du couloir dans le dortoir, qui n'a aucun endroit où aller pour Noël, pas de famille aimante qui veuille le voir. Il y a la vieille dame solitaire au sac, assise sur un banc de parc qui regarde tout le monde l'éviter.


Le monde est plein de gens seuls qui ont besoin de gentillesse, de bonté, de miséricorde. Et le vieux voisin grincheux qui est toujours à froncer les sourcils? N'est-il pas possible que ses froncement de sourcils cachent la douleur d'une femme perdue, ou d'un fils qui a tourné le dos à son père? Il y a le policier qui vous a arrêté pour avoir dépassé la limite de vitesse, et qui a été plutôt abrupt avec vous? Y a-t-il une chance qu'il ait des problèmes conjugaux, et qu'il soit de mauvaise humeur?



Toutes ces personnes peuvent avoir besoin d'une parole de gentillesse, d'un doux sourire et d'une parole d'encouragement. Pouvez-vous imaginer l'impact sur la journée de l'agent, si vous, après avoir reçu la contravention, vous le remerciez de rendre nos routes plus sûres, et éventuellement de sauver votre vie en vous rappelant votre conduite dangereuse? Et si vous vous asseyiez à côté de la vieille dame et que vous lui demandiez comment elle va? Et si vous offriez de l'emmener dans un café pour un dîner de Noël avant la date? Et si vous faisiez une assiette pleine de biscuits pour le vieux grincheux? Et si vous  demandiez à vos parents si vous pouvez inviter la jeune homme solitaire au bout du couloir pour Noël dans votre maison?

Et si tranquillement vous payiez pour l'épicerie de la jeune femme derrière vous dans la queue à la caisse? Et si vous ramassiez tous les vieux jouets laissés par vos enfants, et les donniez à un refuge pour femmes battues? Et si vous donniez une centaine de dollars en billets de dix dollars à des SDF? Et si vous commandiez un hamburger et des frites supplémentaires, et que vous donniez ce sac à un SDF à l'entrée du magasin de restauration rapide, et que vous y ajoutiez un billet de vingt dollars comme don supplémentaire?

Et si vous faisiez un pacte avec vous-même de faire sept actes de bonté, chaque jour, sans jugement. Et si vous jouiez incognito le rôle d'un ange?

N'oubliez pas l'hospitalité; car, en l'exerçant, quelques-uns ont logé des anges, sans le savoir.
 (Hébreux 13:2).

Avec amour en Christ,
Higoumène Tryphon

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

jeudi 11 novembre 2021

St Hiérarque Théophane de Poltava: Sur la différence entre une vie naturellement bonne et une vie chrétienne

 

Vous demandez, quelle est la différence entre une vie naturellement bonne et une vie chrétienne ?

La différence est grande. 

Le chrétien vit une vie de Grâce, tandis qu'une personne qui est juste bonne par nature est sans Grâce. 

Nous voyons à quel point cette condition est importante par le fait que nous sommes sauvés par la Grâce de Dieu, pas par de bonnes actions. Les bonnes actions qui sont accomplies pour l'amour du Christ et dans l'esprit de ses commandements nous permettent de recevoir la Grâce de Dieu. 

Sans la Grâce de Dieu, quelle que soit la qualité d'une personne, elle ne peut pas être sauvée. Corneille le Centurion a accompli de nombreuses bonnes actions, mais il lui a été révélé qu'il ne pouvait être sauvé que lorsque le Saint-Esprit descendrait sur lui par l'intermédiaire de l'apôtre Pierre. 

Ce concept est développé simplement et en profondeur dans le dialogue Dialogue bien connu de saint Séraphim de Sarov avec Motovilov : "Sur l'acquisition de l'Esprit Saint"

Essentiellement, sans la grâce de Dieu, il ne peut y avoir de vraies bonnes actions. On peut en dire autant en partie des larmes. Alors qu'une personne est imparfaite, ses larmes sont imparfaites. Il existe différents types de larmes. Parfois, elles proviennent de la sensibilité, parfois du chagrin, parfois de la colère - ce ne sont pas des larmes chrétiennes. 

Les larmes véritables ne se produisent que lorsque l'on pleure pour ses péchés ou par gratitude envers notre Seigneur pour Sa bonté envers nous et pour Ses miséricordes. 

Pour vivre une vie pleine de Grâce, il faut éviter les distractions et préserver la paix du cœur. Il est donc plus bénéfique pour celui qui désire une vie de Grâce de vivre une vie plus isolée,

mercredi 10 novembre 2021

L'hérésie délétère dénoncée par le Pape orthodoxe Grégoire le Grand

 


***


Quiconque se déclare pontife universel, 

ou 

bien désire ce titre, 

est 

par son orgueil 

le précurseur 

de 

l'Antéchrist!

*

Saint Grégoire le Grand

Pape orthodoxe de Rome

(540-604)

*

mardi 9 novembre 2021

Saint-Jean de Changhaï et San Francisco: La vie après la mort



Notre tristesse pour les proches qui meurent, aurait été sans limite et sans consolation, si le Seigneur ne nous avait donné la Vie Eternelle. 

Notre vie serait inutile si elle se terminait par la mort. Quel serait alors le bénéfice de la vertu et de la bonne action ? Alors ils auraient raison de dire : "Mangeons et buvons, car demain nous mourrons !" Mais l'homme a été créé pour l'immortalité, et par Sa résurrection, Le Christ a ouvert les portes du Royaume céleste, de la béatitude éternelle pour ceux qui ont cru en Lui et ont vécu dans la justice. 

Notre vie terrestre est une préparation à la vie future, et cette préparation se termine par notre mort. "Il est réservé à l'homme de mourir une seule fois, mais après cela le Jugement" (Hébreux 9:27). Alors un homme quitte tous ses soucis terrestres ; le corps se désintègre, afin de ressusciter à la résurrection générale. Souvent, cette vision spirituelle commence chez les mourants avant même la mort, et tout en voyant ceux qui les entourent et même en leur parlant, ils voient ce que les autres ne voient pas.

Mais quand elle quitte le corps, l'âme se retrouve parmi d'autres esprits, bons et mauvais. Habituellement, elle est encline à aller  vers ceux qui lui sont plus semblables en esprit, et si, dans le corps, elle était sous l'influence de certains, elle restera dépendant d'eux lorsqu'elle quittera le corps, aussi désagréables qu'ils puissent s'avérer être lorsque elle les rencontrera.

Pendant deux jours, l'âme jouit d'une liberté relative et peut visiter des endroits sur terre qui lui étaient chers, mais le troisième jour, elle se déplace dans d'autres sphères. A ce moment (le troisième jour), elle passe par des légions d'esprits maléfiques qui entravent son chemin et l'accusent de divers péchés, pour lesquels ils l'avaient eux-mêmes tentée. 

Selon diverses révélations, il y a vingt de ces obstacles, les soi-disant "péages aériens", dans chacun desquels l'une ou l'autre forme de péché est mise à l'épreuve ; après avoir traversé l'un, l'âme tombe sur le suivant, et ce n'est qu'après avoir traversé avec succès toutes ces choses que l'âme peut continuer Que ces démons et leurs péages soient terribles peut être vu dans le fait que Mère de Dieu elle-même, informée par l'archange Gabriel de sa mort imminente, le Seigneur Jésus-Christ lui-même, répondant à sa prière, est apparu du ciel pour recevoir l'âme de Sa Mère Très Pure et la conduire au Ciel. Terrible en effet est le troisième jour pour l'âme des défunts, et pour cette raison, elle a surtout besoin de prières pour elle-même.

Puis, après avoir traversé avec succès les péages et s'être prosternée devant Dieu, l'âme visite pendant 37 jours de plus les habitations célestes et les abîmes de l'enfer, ne sachant pas encore où elle restera, et ce n'est que le quarantième jour que sa place est désignée jusqu'à la résurrection des morts. 

Certaines âmes se trouvent (après les quarante jours) dans un état où elles ont un avant-goût de la joie et de la béatitude éternelles, et d'autres de la peur des tourments éternels qui viendront pleinement après le Jugement dernier. Jusque-là, des changements sont possibles dans la condition des âmes, en particulier en leur offrant le sacrifice non-sanglant (commémoration à la Divine Liturgie), et également par d'autres prières.

L'importance de la commémoration à la Liturgie peut être vue dans l'événement suivant : Avant la découverte des reliques de saint Théodose de Tchernigov (1896), le hiéromoine (le célèbre Starets Alexis de l'ermitage Goloseyevsky, de éa Laure des Cavernes de Kiev, décédé en 1916) qui effectuait l'habillement des reliques, étant fatigué assis près des reliques, s'assoupit et vit devant lui le saint, qui lui dit : "Je te remercie de travailler avec moi. Je te prie aussi, lorsque tu serviras la Liturgie, de commémorer mes parents" - et il donna leurs noms (Prêtre Nikita et Maria). "Comment peux-tu, ô saint, demander mes prières, alors que tu te tiens toi-même au trône céleste et que tu accordes aux gens la miséricorde de Dieu ?"  demanda le hiéromoine. « Oui, c'est vrai », répondit saint Théodose, "mais l'offrande à la Liturgie est plus puissante que ma prière".

Par conséquent, les pannikhides (c'est-à-dire les prières du Trisagion pour les morts) et la prière à la maison pour les morts leur sont bénéfiques, tout comme les bonnes actions faites en mémoire d'eux, telles que l'aumône ou les contributions à l'Eglise. Mais la commémoration à la Divine Liturgie est particulièrement bénéfique pour eux. 

Il y a eu de nombreuses apparitions de défunts et d'autres événements qui confirment à quel point la commémoration des défunts est bénéfique. Beaucoup de ceux qui sont morts dans la repentance, mais qui n'ont pas pu le manifester de leur vivant, ont été libérés de tortures et ont obtenu le repos. Dans l'Église, des prières sont toujours offertes pour le repos des défunts, et le jour de la descente de l'Esprit Saint, dans les prières agenouillées aux vêpres, il y a même une pétition spéciale "pour ceux qui sont en enfer".

Chacun d'entre nous qui désire manifester son amour pour les défunts et leur apporter une aide réelle peut le faire de son mieux par la prière pour eux, et en particulier en les commémorant à la Liturgie, lorsque les particules qui sont taillées pour les vivants et les morts tombent dans le Sang du Seigneur avec les paroles : "Lave, Seigneur, les péchés de ceux qui sont ici Nous ne pouvons rien faire de mieux ou de plus pour les défunts que de prier pour eux, en leur offrant une commémoration à la Liturgie. Ils en ont toujours besoin, et surtout pendant ces quarante jours où l'âme du défunt se dirige sur son chemin vers les habitations éternelles. Le corps ne ressent alors rien : il ne voit pas ses proches qui se sont assemblés, ne sent pas le parfum des fleurs, n'entend pas les oraisons funéraires. Mais l'âme sent les prières offertes pour elle et est reconnaissante à ceux qui les font et qui leur sont spirituellement proches.

Ô parents et proches des défunts ! Faites pour eux ce qui leur est nécessaire et en votre pouvoir. Utilisez votre argent non pas pour la parure extérieure du cercueil et de la tombe, mais pour aider ceux qui sont dans le besoin, en mémoire de vos proches défunts, pour les églises, où des prières pour eux sont offertes. 

Montrez de la miséricorde aux défunts, prenez soin de leurs âmes. 

Devant nous, il y a pour tous le même chemin, et comment nous souhaiterons alors qu'on se souvienne de nous dans la prière ! Soyons donc miséricordieux envers les morts. 

Dès que quelqu'un a reposé, appelez ou informez immédiatement un prêtre, afin qu'il puisse lire les prières désignées pour être lues sur tous chrétien orthodoxe après sa mort. Essayez, s'il est possible, d'avoir des funérailles à l'église et de faire lire le psautier pour le défunt jusqu'aux funérailles. 

Organisez à la fois le service du mémorial de quarante jours, c'est-à-dire la commémoration quotidienne à la Liturgie pendant quarante jours. (REMARQUE : Si les funérailles ont lieu dans une église où il n'y a pas de services quotidiens, les parents devraient prendre soin d'ordonner le mémorial de quarante jours partout où il y a des services quotidiens.) Il est également bon d'envoyer des contributions pour la commémoration aux monastères, ainsi qu'à Jérusalem, où il y a une prière constante dans les lieux saints. 

Prenons soin de ceux qui sont partis dans l'autre monde avant nous, afin de faire pour eux tout ce que nous pouvons, en nous souvenant de la Parole" Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde".


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


UN HIÉRARQUE GREC PROTESTE CONTRE LA VISITE DU PAPE LE MOIS PROCHAIN

Romfea

Romfea

Konitsa, Grèce, 8 novembre 2021     

Son Éminence le métropolite Andreas de Konitsa de l'Église orthodoxe de Grèce ne se réjouit pas que le pape François doive se rendre dans le pays orthodoxe le mois prochain.

Le chef de l'église catholique romaine se rendra à Chypre du 2 au 4 décembre, suivi de la Grèce du 4 au 6 décembre, a confirmé vendredi le Vatican.

En réponse, le Métropolite Andreas a envoyé une lettre au Saint-Synode grec, publiée sur Romfea, soulignant qu'il ne s'inquiète pas de la façon dont l'État, qui a invité le pape pour le 200e anniversaire de la révolution grecque, gère la visite, mais de la façon dont l'Église orthodoxe répond : "Je suis très intéressé par ce que l'Église grecque fera lorsque l'hérétique du Vatican marchera sur le sol sanctifié de notre patrie grecque, qui est arrosée du sang de nombreux martyrs et héros".

Le Synode participera-t-il aux événements en l'honneur du Pape ? Le désignera-t-il comme un « frère bien-aimé en Christ ? » se demande le hiérarque. Cela provoquerait certainement un scandale dans l'Église, affirme le Métropolite Andreas.

Le pape s'est rendu pour la dernière fois en Grèce en avril 2016, lorsqu'il s'est rendu dans un camp de réfugiés sur l'île de Lesbos avec l'archevêque Ieronymos d'Athènes et le patriarche Bartholomée.

Ailleurs, il note que "la papauté hérétique n'a jamais aidé la nation grecque ou l'Orthodoxie. Au contraire, elle semblait particulièrement nuisible, si l'on rappelle les atrocités des Latins pendant la chute de Constantinople et les martyres auxquels les orthodoxes ont été soumis lors du tristement célèbre concile de *Ferrare-Florence", entre autres événements tragiques.

Ainsi, le Métropolite Andreas "proteste fermement contre la venue de l'hérésiarque Francis Bergolio en Grèce orthodoxe", ce qui ne pouvait que nuire à l'Église.

Le Métropolite Andreas faisait partie des quatre métropolites qui se sont prononcés en faveur de l'Orthodoxie et ont appelé en 2019 les primats de l'Église à convoquer un concile pour traiter de l'invasion anticanonique de l'Ukraine par le Patriarcat de Constantinople.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

ORTHOCHRISTIAN

dimanche 7 novembre 2021

Saint Père Païssios: « Que votre discours soit toujours gracieux, assaisonné de sel »

 


aîné de

C'était en février 1988. Assez froid à Karyes [Capitale de la Sainte Montagne]. C'est à assez haute altitude et c'est humide, ce qui rend les choses plus difficiles. Mais le temps était sec ce jour-là. Il y avait un peu de brise et si vous étiez habillé chaudement, c'était assez agréable. C'était en fin d'après-midi et le soleil venait de tomber derrière la colline. Je marchais le long d'un chemin avec le père Païssios, et en route, nous avons rencontré Père Callinique de la  Skite de Koutloumousiou.

Nous sommes arrivés au petit pont en bois. Il y avait des noisetiers tout autour, avec juste des branches nues.

« Qui est parti apporter des mandarines ? », demanda le père Païssios avec surprise.

Beaucoup plus loin, à une soixantaine de mètres, il y avait la porte de sa cour et quelque chose en bas, qui aurait pu être orange. De cette distance, il n'était pas possible d'en dire plus.

Nous sommes bientôt arrivés et, en effet, nous avons vu un grand sac en plastique, de couleur orange, plein de mandarines. Comment diantre les avait-il vues ? Comment savait-il qu'il s'agissait de mandarines et non d'oranges ? Étant donné que le sac était orange, il aurait pu contenir n'importe quoi, des pommes, par exemple.

« J'aime vraiment les mandarines », déclara-t-il, faisant semblant d'être gourmand. « J'en garderai trois pour moi... Non, mieux vaut en prendre cinq... Non, maintenant j'ai la chance d'en prendre sept », déclara-t-il avec un grand sourire et il s'arrêta au chiffre de sept.

« Fais passer le reste à frère Joseph, Père Callinique ».

Le Père Callinique prit sa bénédiction et partit. Père Païssios et moi sommes entrés dans sa petite maison. Nous nous sommes assis dans une cellule et il m'a demandé de lire quelques un de ses textes manuscrits.

Une vingtaine de minutes s'étaient écoulées lorsque quelqu'un a frappé à la porte, voulant le voir.

« Devrais-je répondre à la porte, Géronda? », ai-je demandé.

« Mieux vaut ne pas le faire. S'ils sont curieux, ils partiront. S'ils ont vraiment besoin de me voir, ils ne le feront pas.

Nous avons continué à lire, et après quelques minutes, on a frappé de nouveau.

« Maintenant, que faisons-nous, Géronda ? »

Au lieu de rideaux, il y avait un morceau de drap au-dessus de sa fenêtre.

« Jette un coup d'œil, sans qu'ils ne te voient et dis-moi combien ils sont».

« Je ne peux pas le dire, parce que je ne peux pas les voir »

« Ne peux-tu même pas les compter ? Qu'as-tu fait toutes ces années en Amérique ? Nous attendrons et ils frapperont à nouveau.

Bien sûr, après un certain temps, ils ont de nouveau frappé.

« Maintenant, je vais voir si je peux les compter. Je n'ai peut-être pas terminé l'école primaire, mais je verrai ce que je peux faire ».

Il s'est levé et a ouvert la porte.

« Qu'est-ce qui se passe, les gars ? Regardez l'heure. Pourquoi êtes-vous venus ? »

« Père, nous voulons te voir un peu. Est-ce possible ? »

« Certes, vous pouvez me voir, mais que trouverons-nous à vous offrir ? Combien êtes-vous ? Laisse-moi compter. Sept. Voyons ce qu'il y a dans la boutique à cette heure de la journée ».

Il entra et est revint avec les sept mandarines.

J'ai été absolument étonné par cet homme. Comment savait-il combien de mandarines garder ? Le savait-il à l'avance ? Dieu le lui avait-il montré, sans qu'il s'en rende compte ?

« D'où venez-vous ? », demanda-t-il avec intérêt.

« Nous sommes d'Athènes. Et Bruce et John viennent d'Amérique ».

D'Amérique? Si je leur donne  simplement une mandarine à chacun, ils se moqueront de nous. Voyons s'il y a quelque chose d'américain au supermarché ».

Il retourna à l'intérieur et revint avec un paquet de biscuits américains et une boîte de noix Planters. Ils furent étonnés et impressionnés.

« Père », demanda l'un d'eux, « que symbolise le talanto [Planche servant à appeler les frères dans un monastère. On la frappe avec un maillet voir photo ci-après] sur lequel on frappe dans les monastères ? »

talanto dans

Je ne sais pas ce que cela symbolise et ce n'est pas important. Ce qui compte, ce n'est pas de frapper le talanto dans un monastère, mais de multiplier le talent que Dieu vous a donné*. Écoutez. À cause du temps, vous devez partir. Je n'ai qu'une seule chose à vous dire. Le problème avec les Américains est qu'en anglais, "I" [Je] est toujours écrit avec une majuscule, alors qu'ici en Grèce, nous écrivons parfois "εγώ" avec un petit "ε".

Ils ont ri de sa plaisanterie et les Américains ont demandé : "Qu'est-ce que cela signifie ? Que devrions-nous faire ? »

« Débarrassez-vous de « I » de votre vocabulaire. L'égoïsme est notre grand ennemi. Nous devons tous, sans exception, lutter contre cela ».

Il y a une courtoisie à propos de la sainteté, une délicatesse, une grâce. Il n'a rien dit de sage ou de théologique, ni fait de révélations impressionnantes. Mais il leur a rempli le cœur. 

Il savait qu'ils viendraient, mais il leur a caché ça. Il a fait plaisir à chacun de ses visiteurs, il ne ressemblait à personne d'autre dans son comportement, édifiant dans son discours et relaxant par sa présence. 

Sans essayer de persuader personne de quoi que ce soit, il a convaincu tout le monde des choses les plus importantes. Avec lui, on était illuminés, on trouvait la joie et le repos. On se sentait comme Marie aux pieds du Christ. Comme les apôtres du Mont Thabor à la Transfiguration, on ne voulait  jamais partir.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

PEMPTOUSIA


NOTE: 

*Un autre des célèbres jeux de mots de saint Païssios. En grec, le mot Talento [« longeron en bois »] et le mot « talent » dans Matthieu, 25, 14-30) sont les mêmes.