Patriarche Pavle de Serbie. Photo: Reuters
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En mémoire du Patriarche Pavle ( Paul)
Que son âme demeure avec les justes!
L'auteur Youri Maximov se souvient
de sa Sainteté le Patriarche Pavle de Serbie.
Je n'ai jamais vu personnellement le Patriarche Pavle, même si j'ai longtemps entendu parler de lui. J'ai d'abord visité la Serbie à l'automne 2006. J'avais très envie de voir Sa Sainteté, en particulier parce que, d'après ce que je savais, il était tout à fait normalement accessible. Ce n'est pas que je m'attendais à avoir un auditoire, mais j'espérais tout simplement voir de mes propres yeux un saint homme de notre temps et recevoir sa bénédiction, et cela seul aurait été une joie. Mais cela ne se produisit pas. À l'automne 2006, sa santé s'est aggravée, et lors de mes visites plus tard, elle est devenue encore pire. J'étais clairement indigne de voir Sa Sainteté Pavle.
Pendant que j'étais en Serbie, j'ai entendu auprès de personnes de confiance, beaucoup d'histoires remarquables à son sujet que je tiens à partager. Sa Sainteté le Patriarche Pavle, est un phénomène unique à notre époque, donc, bien sûr, il serait inutile d'en faire la mesure des autres patriarches, tout comme, par exemple, de faire de saint Philarète le Miséricordieux ou de saint Alexis l'homme de Dieu, la mesure de la majorité des laïcs contemporains. Chacun a ses propres normes et son propre genre d'exploit spirituel (podvig). Il me semble que l'on doit se réjouir tout simplement que de notre vivant une telle personne était et est encore dans l'Église orthodoxe.
Il est bien connu que le Patriarche serbe, même après sa prise de position de haut rang, a poursuivi ses podvigs ascétiques et qu'il s'efforçait de vivre modestement - bien que pour lui, tout cela était tout à fait naturel, sans aucune affectation délibérée. Il allait en ville à pied ou prenait les transports publics réguliers parmi les foules de gens, n'avait pas l'esprit de possession, et mangeait aussi peu que les Anciens Pères du désert, simplement parce que c'était sa manière d'être.
Madame Jana Todorovitch m'a raconté une histoire qui concernait sa sœur. Pour quelque raison, elle était à une réception chez le Patriarche. Discutant de diverses affaires, elle regarda fortuitement les pieds du patriarche et fut choquée à la vue de ses chaussures: elles étaient vieilles, avaient été déchirées puis réparées. Cette femme pensa: "Quelle honte pour nous Serbes, que notre Patriarche aille partout avec des chaussures usées; quelqu'un ne pouvait-il pas lui donner de nouvelles chaussures?" Le Patriarche dit alors joyeusement: "Regardez comme j'ai de bonnes chaussures! Je les ai trouvés près des poubelles quand je suis allé au patriarcat. Quelqu'un les avait jetées, mais elles sont en cuir véritable. Je les ai réparées un peu et, regardez, elles peuvent encore servir longtemps. "
Une autre histoire est liée à ces mêmes chaussures. Une certaine femme vint au patriarcat en demandant à parler avec le Patriarche au sujet d'une affaire urgente, dont elle avait besoin de lui parler personnellement. Cette demande était inhabituelle et elle ne fut pas admise immédiatement, mais l'insistance de la visiteuse porta ses fruits, et une audience eut lieu. Voyant le patriarche, la femme dit avec beaucoup d'enthousiasme que cette nuit elle avait rêvé de la Mère de Dieu, qui lui avait dit d'apporter de l'argent au Patriarche pour qu'il puisse s'acheter de nouvelles chaussures. En disant cela, la visiteuse sortit une enveloppe pleine d'argent. Le patriarche Pavle, ne prenant pas l'enveloppe, répondit affectueusement, "À quel moment vous êtes-vous allongée pour dormir?" La femme, surprise, demanda: «Eh bien ... autour d'onze heures." "Vous savez, je me couche tard, vers quatre heures du matin ", répondit le Patriarche," et j'ai rêvé moi aussi de la Mère de Dieu, qui m'a demandé de vous dire de prendre l'argent et de le donner à ceux qui en ont vraiment besoin. "Il ne prit pas l'argent.
Un jour, s'approchant du bâtiment du Patriarcat, Sa Sainteté Pavle, a remarqué de nombreuses voitures près de l'entrée et s'est intéressé de savoir à qui elles étaient. On lui a dit que ces voitures appartenaient à des évêques. A cela, le Patriarche a répondu avec un sourire: «Si eux qui savent le commandement du Sauveur à propos de l'esprit de pauvreté, ont de telles voitures, imaginez quel genre de voitures ils auraient si ce commandement n'existait pas!"
Un jour, le patriarche était en avion, allant quelque part en visite. Pendant qu'ils survolaient la mer, l'avion est entré dans une zone de turbulence et s'est mis à trembler. Un jeune évêque qui était assis à côté du patriarche a demandé ce qu'il penserait si l'avion venait à tomber. Sa Sainteté Pavle, répondit calmement: «En ce qui me concerne personnellement, je prendrais cela comme un acte de justice: J'ai mangé tant de poisson dans ma vie que ce ne serait pas une surprise si jamais ils me mangeaient maintenant."
Ce ne serait pas une mauvaise idée de citer un passage d'une conversation entre Nicolas Kokoukhine et le diacre Neboicha Topolitch:
"Par la miséricorde de Dieu nous avons un pasteur spirituel comme Sa Sainteté le Patriarche Pavle... Il mène une vie d'ascète et est l'exemple vivant d'un pasteur évangélique. Il vit dans le Christ, dans le plein sens de cette parole... En tant que moine orthodoxe, il jeûne, c'est-à-dire, ne mange pas de viande, et garde un très jeûne strict, les lundis, mercredis, et vendredis... Il sert la Liturgie chaque matin dans une petite chapelle dans le bâtiment du Patriarcat. Il n'y a pas de chœur, et seuls les paroissiens chantent...
"Il s'habille seul avant l'office et se dévêt seul après l'office, il confesse et donne lui même la Communion aux paroissiens. Il porte la même riassa et la même soutane de l'époque de sa tonsure dans l'ordre angélique (et c'était il y a cinquante ans). Il ne les remplace pas. Il les lave, les repasse et les reprise lui-même. Il prépare sa propre nourriture. Un jour, il m'a dit qu'il s'était fait une paire de bonnes chaussures avec des chaussures pour dames. Il a tous les instruments pour réparer les chaussures, il peut réparer toutes les chaussures. Il dessert fréquemment différentes églises, et quand il voit que le prêtre a une riasa ou un phélonion déchirés, il lui dit: "Apporte-le, et je vais le repriser''... Être auprès d'une telle personne est un grand avantage pour l'éducation de l'âme, et pour la croissance spirituelle. "
Et avec tout cela, le patriarche Pavle est docteur en théologie (il a reçu ce titre avant de devenir Patriarche), et il est l'auteur de plusieurs livres: une monographie sur le Monastère de Saint-Joannice de Dévitch, et de trois volumes Pour clarifier certaines questions de la foi, dont plusieurs extraits sont récemment parus en traduction russe.
Le Patriarche Pavle en est maintenant à sa 95e année. En raison de sa mauvaise santé, il a été à l'hôpital pendant un certain temps. Le Synode de l'Eglise orthodoxe serbe exerce désormais les fonctions de l'administration ecclésiastique. Le Patriarche Pavle a maintes fois demandé à être mis à la retraite pour raisons de santé, mais le dernier Conseil des Evêques a décidé qu'il restera le chef spirituel de l'Eglise Serbe, jusqu'à sa mort.
Le Patriarche Pavle était très proche du peuple, et le peuple l'aimait beaucoup. Il est un personnage unique, même pour l'Eglise serbe et bien sûr, le prochain Patriarche, sera différent.
Predrag Miodrag, qui connaît bien le Patriarche, dans un autre court article sur Sa Sainteté, a déclaré ce qui suit:
"Il est très accessible. Quand sa sœur était en vie, il allait souvent chez elle à pied. En général, il aimait y aller à pied, sans escorte. Tout le monde peut l'approcher et lui parler. Il reçoit les visiteurs tous les jours à sa résidence. Les gens vont à lui avec leurs besoins et leurs petites questions, et il trouve une parole de consolation réconfortante pour chacun d'eux.
Il se lève très tôt et, quand tout le monde dort encore, il sert la Liturgie, la prière pour l'ensemble du peuple serbe. Toute la Serbie est dans son cœur. Il est petit de taille, mais grand par l'esprit. Il a des doigts minces, mais quand il fait avec ces doigts le signe de la Croix, des légions de démons fuient; il porte de fins vêtements de coton, mais sous ces vêtements se cache l'âme d'un brave guerrier. Les gens disent: "C'est notre ange qui nous protège et nous défend."
Youri Maximov
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après