"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 23 juillet 2011

Un événement vrai, mais incroyable pour beaucoup (V)



Il advint à cette période de ma vie que mon travail m'amène à K., et j'y tombai gravement malade.

Comme je n'avais ni parents, ni même un serviteur à K., je dus aller à l'hôpital. Les médecins trouvèrent que c'était une pneumonie.

Au début, je me sentais si bien que pas une fois je n'ai pensé qu'il était nécessaire de résider dans un hôpital en raison d'une telle bagatelle, mais comme la maladie se développa et la température  commença à augmenter rapidement, j'ai compris qu'avec une telle "bagatelle", il ne serait pas du tout être sage de rester seul au lit dans une chambre d'un quelconque hôtel.

Les longues nuits d'hiver dans un hôpital furent particulièrement ennuyeuses pour moi, la fièvre ne me permettait pas du tout de dormir, parfois il était même impossible de rester étendu, et être assis dans mon lit était à la fois inconfortable et fatigant: je n'avais pas envie ou n'était pas capable de me lever et de marcher à travers la salle, alors je ne tournais, m'étendais, me redressais, mettais mes jambes hors du lit et à nouveau les remettais dans le lit, et pendant tout ce temps je continuais à écouter attentivement: quand l'horloge commencerait-elle à sonner! J'attendais, attendais et elle semblait faire exprès de sonner seulement deux ou trois fois, cela signifiait une éternité entière à attendre avant l'aube. Et comme est déprimant pour un homme malade l'effet de ce sommeil commun avec beaucoup de gens, dans le calme de la nuit. On se sent littéralement  dans un cimetière en compagnie d'hommes morts.

Le degré de ma maladie devint critique, à ce même degré je suis devenu de plus en plus mal et me suis senti pire. À certains moments j'ai eu des crises telles que les conditions désagréables ordinaires devinrent imperceptibles, et je ne remarquais pas l'effet lassant des nuits interminables. Mais je ne sais pas vraiment à quoi attribuer cela : est-ce parce que je me suis toujours considéré comme un homme très fort et très sain, ou était-ce parce que jusques à ce moment-là je n'avais jamais été une seule fois gravement malade, et ces pensées tristes qui sont parfois le lot des maladies graves étaient étrangère à mon esprit - cependant, peu importe comment je me sentais mal à certains moments, peu importe comment brutalement les crises de ma maladie advinrent, non pas une fois l'idée de la mort n'entra dans mon esprit.

J'attendais avec confiance qu'aujourd'hui ou demain un changement pour le mieux prenne place, et avec impatience a chaque fois que le thermomètre était enlevé de sous mon bras je demandais quelle était ma température. Mais après avoir atteint un certain niveau, elle s'est littéralement figée à ce niveau, et à mes questions j'ai constamment entendu la réponse: "Quarante et huit dixièmes" "40 et neuf dixièmes», «41»,

"Ah que c'est lent! " disais-je avec déception, puis je demandais au docteur si mon rétablissement allait se poursuivre au rythme de la tortue.

En voyant mon impatience, le médecin me calma et dit qu'à mon âge et avec ma santé, il n'y avait rien à craindre, que la reprise ne serait pas longue, que dans des circonstances favorables, après chaque maladie, on peut récupérer en quelques jours seulement.

J'ai cru cela de tout cœur et j'ai raffermi ma patience avec cette pensée, qu'il ne restait qu'à attendre la crise, et alors tout deviendrait immédiatement tout à fait normal.

Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life 
Vol. 26, No. 4 
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
USA

L'Ermitage du cœur (212)


Laisse le passé
Comme le vieil homme mort
Et renais dans le pardon
A la vie inexhaustible

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

vendredi 22 juillet 2011

Un événement vrai, mais incroyable pour beaucoup (IV)





Plusieurs années passèrent. À mon grand regret, je dois admettre que moralement j'ai changé très légèrement au cours de ces années. Bien que je fusse déjà un homme à mi-chemin de ma vie, c'est-à-dire que j'étais un homme d'âge moyen, ni dans ma relation à la vie elle-même, ni à moi-même il n'y avait une once de gravité. Je ne comprenais pas le sens de la vie, une sorte de connaissance étonnante de moi-même restait pour moi lA même "chimérique" invention, comme le raisonnement d'un métaphysicien bien-connu dans une fable du même nom, et je vivais, dirigé par les mêmes intérêts vides et bruts, par cette même conception très fausse et moyenne du but de la vie par laquelle la majorité des gens laïcs de ma classe et de mon éducation vivaient.


Mon rapport à la religion était aussi resté inchangé, c'est-à-dire, comme précédemment je n'étais ni athée, ni à aucun degré un homme consciemment religieux. Comme précédemment, par habitude, de temps en temps, j'allais à l'église me confesser une fois par an,par habitude encore,  je me signais par habitude, quand il était bien de le faire, et c'était là toute la religion pour moi. Je n'étais pas intéressé à des questions traitant de religion et ne comprenais même pas qu'il y avait quelque chose d'intéressant là-bas, en dehors, bien sûr, des conceptions les plus élémentaires. Je ne savais pas quoi que ce soit dans ce domaine, et il me semblait que je connaissais et comprenais tout, et que tout était si simple et "dépourvu de toute ruse," que là un homme "éduqué"  n'avait là rien dont il devait charger son esprit. Une naïveté qui atteint des proportions ridicules, mais, malheureusement, très caractéristique de gens "éduqués" de notre époque. 

Il est bien évident, avec la manifestation de ces faits, il ne pouvait y avoir la possibilité soit de tout progrès dans mon sentiment religieux, ou d'un élargissement de la portée de mes conceptions dans ce domaine.



Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life 
Vol. 26, No. 4 
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
USA

L'Ermitage du cœur (211)


Ni le temps ni l'espace
N'échappent un seul instant
A la Grâce sanctifiante
Dans laquelle tu te meus sans le savoir

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

jeudi 21 juillet 2011

Un événement vrai, mais incroyable pour beaucoup (III)



J'ai compris toute la logique des paroles de Prochor Alexandrovitch, mais, bien sûr, une conversation de quelques minutes ne pouvait pas implanter en moi une croyance en ce que je n'avais pas été habitué à  croire, et ma conversation avec lui pour l'essentiel servit seulement à manifester mon opinion sur une certaine question importante, un point de vue, que jusque-là, je ne connaissais pas bien moi-même parce que je n'avais eu aucune occasion de l'exprimer, et parfois même moins d'occasion pour y réfléchir.

Mon incrédulité évidemment inquiéta sérieusement Prochor Alexandrovitch: plusieurs fois au cours de la soirée il revint à ce thème, et quand je me préparais à partir, il a rapidement choisi plusieurs livres de sa grande bibliothèque et  en me les donnant, il a déclaré:

"Lisez-les, sans faillir lisez-les, parce qu'on ne peut pas quitter ce sujet de cette manière, là où il en est dans son état actuel. Je suis certain que vous allez bientôt comprendre rationnellement et devenir convaincu de l'absence totale de fondement de votre incrédulité, mais il est nécessaire pour transmettre cette conviction de l'esprit au cœur, il est nécessaire que le cœur comprenne, sinon dans une heure ou une journée, elle va s'évaporer et être oubliée, parce que l'esprit est un tamis à travers lequel des pensées différentes passent seulement, et l'entrepôt pour elles n'est pas là. "

J'ai lu les livres. Je ne me souviens pas maintenant si je les ai tous lus, mais il s'est avéré que l'habitude a été plus forte que la raison. J'ai reconnu que tout ce qui était écrit dans ces livres était très convaincant, mais en raison de l'exiguïté de ma compréhension en matière religieuse, j'ai été incapable de soulever la moindre des objections sérieuses à l'argumentation qu'ils contenaient, mais la foi, néanmoins, n'apparut pas en moi. J'ai reconnu que ce n'était pas logique, je pense que tout ce qui était écrit dans ces livres était la vérité, mais il n'y avait aucun sentiment de foi en moi et la mort continua dans ma compréhension qu'elle était la finale absolue de l'existence humaine, après quoi la seule décomposition s'ensuivait.

Malheureusement, il est arrivé que peu de temps après la conversation ci-dessus avec Prochor Alexandrovitch, j'ai dû quitter la ville dans laquelle il vivait, et nous ne nous sommes pas revus une autres fois. Je ne sais pas, peut-être comme homme intelligent et possédant le charme d'un homme intensément convaincu, il aurait réussi au moins dans une certaine mesure à approfondir mes vues et mes relations sur la vie et des choses en général, et à travers cela aussi à introduire certains changements dans ma compréhension de la mort, mais laissé à moi-même et par nature n'étant pas un jeune homme particulièrement sérieux, je n'étais en aucune façon intéressé à ces questions détournées, et à cause de mon étourderie, peu après je n'ai même pas donné une once de pensée aux paroles de Prochor Alexandrovitch, qui traitait de la gravité de l'insuffisance de ma foi et la nécessité de m'en débarrasser.

Et à la suite de cela, les changements de résidence, des rencontres avec des gens nouveaux, non seulement cette question disparut de de ma mémoire, mais la conversation avec Prochor Alexandrovitch aussi, et même son image mentale et ma brève rencontre avec lui.

Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life 
Vol. 26, No. 4 
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
USA

L'Ermitage du cœur (210)


C'est l'innocence souvent
Et l'enthousiasme parfois
Qui manquent à ta foi
Pour qu'elle rayonne

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

mercredi 20 juillet 2011

Un événement vrai, mais incroyable pour beaucoup (II)



Un état exactement identique d'incompatibilité des idées entre elles, s'installa en moi, et, à cause de l'insouciance de ma part, se tissa elle-même un nid douillet dans mon esprit.

Je semblais croire en Dieu comme il se doit, c'est-à-dire que je Le comprenais comme un être personnel, tout-puissant, éternel, je reconnaissais que l'homme était Sa création, mais je ne croyais pas en l'au-delà.

Une bonne illustration de l'esprit volage de nos relations à la fois à la religion et à notre état spirituel est considéré dans la suite: je ne connaissais pas ce grave manque de foi en moi jusques à ce que, semblable à mon collègue mentionné ci-dessus, une certaine circonstance, le mit en lumière.

Le destin m'a amené dans l'amitié d'un homme sérieux et très bien éduqué; en outre, il était extrêmement sympathique et solitaire, et j'aimais lui rendre visite de temps en temps. Un jour, lui ayant rendu visite, je l'ai trouvé lisant le catéchisme.

"Qu'est-ce que cela, Prochor Alexandrovitch" - c'est ainsi que mon ami s'appelait - "vous préparez-vous à devenir  pédagogue?" demandai-je, étonné en pointant vers le livre.

"Mon cher ami, qu'entendez-vous par pédagogue! Ce serait bien si je pouvais devenir un étudiant passable. Elle est bien loin de moi l'idée d'enseigner aux autres. Je dois me préparer à l'examen. Eh bien, regardez mes cheveux gris, ils augmentent avec chaque jour, et avant qu'on ne le sache, on est appelé  à rendre compte de tout cela, dit-il avec son habituel sourire de bon cœur ".

Je n'ai pas pris ses paroles littéralement, pensant que puisque qu'il était homme à lire toujours beaucoup, il avait simplement constaté la nécessité d'une sorte de correction dans la catéchèse. Lui, évidemment désireux d'expliquer cette lecture qui était étrange pour moi, déclara:

On lit beaucoup de toutes sortes d'ordures contemporaines, et bien, ici, je vérifie moi-même que je ne m'égare pas sur une fausse piste. Car, vous le savez, l'examen qui nous attend est sévère, il est sévère, en cela qu'aucun réexamen ne sera donné.

"Mais croyez-vous vraiment cela?"

"Vraiment, comment peut-on ne pas croire en cela? Que vais-je devenir, essayons de  trouver? Pensez-vous vraiment [que l'on comptera] un, deux, trois et que je me transformerai en poussière. Et si je ne retourne pas à la poussière, alors il ne fait aucun doute que je vais être appelé à répondre. Je ne suis pas de l'écume, j'ai une volonté et un esprit, j'ai vécu consciemment et … j'ai péché... "

"Je ne sais pas, Prochor Alexandrovitch, comment et d'où notre croyance en la vie après la mort aurait pu se produire, il est naturel de penser qu'un homme meurt . Et, bien, ça se termine ici, on le voit gisant et il ne respire pas, tout cela se désintègre, quelles sont les idées d'un certain type de vie qu'il peut y avoir ici, dans cet état? " ai-je dit aussi, exprimant exactement ce que je ressentais, dans l'ordre où ces idées devaient avoir préalablement surgi et formé ma compréhension.

"Permettez-moi, et que pensez-vous que je devrais faire avec Lazare de Béthanie. Car, vous savez que c'est en réalité un fait, et il était aussi un homme, moulé à partir de la même argile que moi"

J'ai regardé mon interlocuteur avec une franche surprise. Est-il possible que cet homme instruit croit ces choses incroyables?

Et Prochor Alexandrovitch, à son tour me regarda fixement pendant une minute environ, puis, après avoir baissé sa voix, dit:

"Ou, êtes-vous incroyant?"

"Non, pourquoi dites-vous cela? Je crois en Dieu, répondis-je."

"Et dans l'enseignement divinement révélé vous ne croyez pas? Mais alors, aujourd'hui, Dieu est compris de différentes façons, et pratiquement chaque individu commence à se fabriquer un enseignement divinement révélé pour satisfaire ses besoins personnels, on trouve des classifications mises en place ici; En cela, alors, vous devez croire, mais en ceci, vous pouvez ou ne pouvez pas croire, et en cela vous n'avez pas à croire du tout! Comme s'il y avait plusieurs vérités, et pas une seulement. Et ils ne comprennent pas que, ce faisant, ils croient déjà dans les produits de leur propre esprit et imagination, et si tel est le cas, alors, bien sûr, il n'y a pas de place ici pour la croyance en Dieu. "

"Mais on ne peut pas tout croire. Parfois on rencontre des choses très étranges".

"C'est-à-dire, pas comprises correctement? Faites-vous comprendre. Si vous ne réussissez pas, alors vous devez admettre en vous-même que la faute réside ici en vous, et vous devez céder sur ce point. Commencez par raisonner comme un homme ordinaire sans instruction concernant la quadrature du cercle, ou sur quelque autre sagesse des mathématiques supérieures, et vous verrez qu'il ne comprend également rien de cela, mais à partir de cela, il ne s'ensuit pas que l'on doive nier l'étude des mathématiques elle-même. Bien sûr, il est plus facile de renoncer, mais ce n'est pas toujours… approprié.

"Réfléchissez bien à ce que vous avez dit, en substance, une absurdité: Vous dites que vous croyez en Dieu, mais qu'il n'y a pas de vie après la mort. Mais Dieu n'est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Sinon quel type de Dieu est-ce?  Le Christ Lui-même a parlé de la vie après la mort? Pensez-vous vraiment qu'Il a dit des contrevérités? Pourquoi même Ses pires ennemis ne sont-ils pas en mesure de prouver cela? Et pourquoi donc est-Il venu et a-t-Il souffert, si notre avenir tout entier se résume seulement à être réduits en poussière?

«Non, ce n'est pas juste Vous devez, par tous moyens, par tous les moyens" - il a soudainement parlé avec intensité -  vous corriger! Vous devez comprendre combien cela est important. Une  telle foi devrait jetter une lumière entièrement nouvelle dans votre vie, lui donner un but différent, donner une toute nouvelle direction à l'ensemble de votre travail. Ce sera une révolution morale complète pour vous. Dans cette foi, nous prenons un fardeau, mais en même temps, nous avons une source de consolation et de soutien pour lutter contre les malheurs de la vie qui sont inséparables d'elle pour tout le monde. "

Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life 
Vol. 26, No. 4 
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
USA

L'Ermitage du cœur (209)


Dans ta foi ardente
Tu n'aboliras jamais
Ton intelligence 
Mais ton seul esprit de contradiction

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

mardi 19 juillet 2011

Un événement vrai, mais incroyable pour beaucoup (I)



Ce récit fut publié dans le Journal de Moscou, à la fin du XIXème siècle. En 1916, l'archevêque Nicon, membre du Saint Synode reproduisit cet article dans "Les Pages de la Trinité" après avoir correspondu avec l'auteur et s'être assuré de sa validité et du fait qu'il ne contenait rien de contraire à l'enseignement de l'Eglise concernant le mystère de la mort et de la vie dans l'au-delà.

Je ne vais pas ici me consacrer à une description générale de ma personnalité, car elle n'a aucune incidence sur la question devant être présentée, mais je vais essayer de me décrire pour le lecteur seulement en termes de ma relation à la religion.

Ayant grandi dans une famille chrétienne orthodoxe plutôt pieuse, et par la suite ayant étudié dans un type d'établissement où l'incrédulité religieuse n'était pas respectée comme un signe de génie estudiantin, je ne me suis pas révélé être un véhément et fieffé mécréant, comme l'était la majorité des jeunes gens de mon temps. En substance, je me suis révélé être quelque chose de très indéterminé: je n'étais pas athée, et en aucune façon je ne pouvais me considérer comme ayant été à aucun degré un homme religieux, et puisque ces deux états mentaux ne sont pas le résultat de mes convictions, mais furent, pour ainsi dire, passivement superposés sur moi par des forces précises de l'environnement, je demanderai au lecteur de se trouver une classification appropriée pour ma personnalité à l'égard de cette situation.

Officiellement, je porte le nom de chrétien, mais sans doute ne me suis-je  jamais demandé si j'avais vraiment droit à ce qualificatif. Je n'ai même jamais eu la moindre inclination à vérifier ce que la vocation d'un chrétien demandait de moi et si je répondais à ces exigences. J'ai toujours dit que je croyais en Dieu, mais si on me demandait comment je croyais, comment l'Église orthodoxe à laquelle j'appartenais enseignait qu'il fallait croire, sans doute, me serais-je trouvé dans une ornière. Si on m'avait en outre demandé plus en détail, si je croyais, par exemple, en notre salut par l'Incarnation et de la souffrance du Fils de Dieu, en sa Parousie [Seconde Venue] en tant que juge, ce que ma relation à l'Eglise était, si je croyais en la nécessité de Sa fondation, en Sa sainteté et au salut pour nous à travers Ses sacrements et ainsi de suite, je ne peux imaginer quelles absurdités j'aurais donné comme réponses. Voici un exemple:

Un jour que ma grand-mère, qui observait toujours strictement les jeûnes, m'a réprimandé de ne pas observer les carêmes.

"Tu es toujours fort et sain, tu as bon appétit, il s'ensuit que tu es en mesure de très bien t'entendre avec la nourriture de carême. Comment se fait-il que l'on n'observe pas ces lois de l'Église, qui ne sont même pas difficiles pour nous?"

"Mais grand-mère, c'est une loi complètement déraisonnable", objectai-je. "Car tu manges, pour ainsi dire, mécaniquement, par habitude, et personne avec un peu d'intelligence ne va se soumettre à une telle coutume."

"Pourquoi déraisonnable?"

"Eh bien, ça fait aucune différence pour Dieu ce que je mange? Du jambon ou des poissons fumés"

(N'est-ce pas vrai dans ce cas, quel exemple nous avons  ici en profondeur de la compréhension de l'essence du jeûne par un homme instruit!).

"Comment se fait-il que tu parles de telle manière?" continua grand-mère. "Peut-on dire: une loi déraisonnable, quand le Seigneur Lui-même a jeûné?"

Je fus frappé par une telle réponse, et c'est seulement avec l'aide de ma grand-mère que je suis parvenu à retenir la narration évangélique concernant le jeûne. Mais le fait que je l'avais complètement oublié, comme vous le voyez, ne m'a empêché en aucun cas de me jeter dans l'opposition, qui prit un caractère plutôt hautain.

Et ne croyez pas, lecteur, que j'étais plus stupide ou volage d'esprit que les autres jeunes gens de mon entourage.

Voici un autre exemple.

Il fut demandé à un de mes collègues dont on considérait qu'il était éduqué: croyait-il en Christ comme Homme-Dieu? Il répondit affirmativement, mais immédiatement après, la conversation révéla ensuite qu'il niait la résurrection du Christ.

"Permettez-moi, pourquoi dites-vous quelque chose de très étrange", objecta une vieille dame. "Selon votre croyance, qu'arriva-t-il au Christ après Sa mort? Si vous croyez en Lui comme Dieu, comment pouvez-vous vous permettre simultanément de penser qu'il est mort complètement, c'est-à-dire que Son être  finit complètement?"

Nous attendions une sorte de réponse scabreuse de notre être intelligent, quelques subtilités dans la conception de la mort, ou une nouvelle explication de la question en discussion. Pas du tout, il répondit simplement:

"Oh! Je n'ai pas réalisé cela. J'ai dit ce que j'ai ressenti."

Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life 
Vol. 26, No. 4 
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
USA

L'Ermitage du cœur (208)


Tu es pèlerin sur terre
Pour chercher 
Les lisières du Royaume

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)


lundi 18 juillet 2011

Saint Jean Chrysostome: Sur la richesse & la Pauvreté


St John Chrysostom

Devons-nous attendre des rois et princes de mettre fin aux inégalités entre riches et pauvres?

Aurions-nous besoin de soldats pour venir s'emparer de l'or du riche et pour le distribuer parmi ses voisins démunis?

Faut-il supplier l'empereur d'imposer aux riches une taxe si grande qu'elle les réduise au niveau des pauvres, et qu'ensuite on partage le produit de cette taxe entre tous?

L'égalité imposée par la force ne servirait à rien, et ferait beaucoup de mal. Ceux qui combinent en eux à la fois un coeur cruel et un esprit avisé parviendraient bientôt à trouver des façons de redevenir riches.

Pire encore, les riches, dont l'or aurait été pris se sentiraient amers et rancuniers, tandis que les pauvres qui auraient reçu la médaille d'or des mains de soldats, ne ressentiraient aucune gratitude, car aucune générosité n'aurait incité à faire ce don.

Loin d'apporter du bénéfice moral à la société, cela ferait effectivement du mal.
moralement

La justice matérielle ne peut pas être accomplie par la contrainte, un changement de cœur ne suivra pas. La seule façon d'obtenir une vraie justice est de changer d'abord le cœur des gens, et ensuite ils  partageront joyeusement leurs richesses.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

L'Ermitage du cœur (207)


Il y a dans ton cœur
Le Royaume dont parlait le Christ
Et tu as la clé de la prière
Pour ouvrir ses portes à deux battants

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

Jean-Claude LARCHET: Recension/ « L’Antichrist »

BIB04
« L’Antichrist ». Anthologie introduite par Cristian Badilita, Paris, Éditions Migne, 2011, 428 p. (collection « Bibliothèque »).
Cristian Badilita, qui a publié une thèse sur les « Métamorphoses de l’Antichrist chez les Pères de l’Église » (éd. Beauchesne, Paris, 2005), a coordonné cette anthologie dont les textes en sont à la fois les sources et les illustations. Il a rédigé l’introduction générale et les introductions des extraits des divers auteurs retenus, traduits par une dizaine de collaborateurs.
Cette anthologie, la première de ce genre en langue française, met à la disposition du grand public tous les textes significatifs de l’Antiquité chrétienne sur l’Antichrist, depuis les épîtres de Jean jusqu’à Théodoret de Cyr (5e s.), en passant par Irénée de Lyon, Hippolyte, Lactance, Cyrille de Jérusalem, Augustin et quelques autres auteurs de moindre importance.
C. B. fonde sa démarche sur cette citation de saint Augustin dans son commentaire de la première épître de saint Jean: « Le mot "antichrist" ne veut pas dire, comme certains l’ont pensé, “celui qui doit venir avant (ante) le Christ”, autrement dit, celui après lequel le Christ doit venir; non, l’Antichrist, c’est celui qui est contre le Christ ». Cette perspective est intéressante parce qu'elle permet de comprendre non seulement les différentes approches des Pères, mais l'actualité de cette réalité pour chaque époque, y compris la nôtre, au lieu de la situer dans un avenir incertain.

dimanche 17 juillet 2011

Romanòs: Premier Chrétien





Je parie que l'Evangéliste Jean, le disciple le plus jeune et bien-aimé du Christ, aurait été surpris s'il avait su que sa lettre très personnelle à son cher ami Gaïus serait un jour incluse dans les Écritures, reprise par Dieu pour être une expression de Sa Sainte et Divine Parole.

Il n'y a en elle rien de particulièrement doctrinal. Il n'énonce pas une explication des choses divines. Il ne nous donne pas de détails supplémentaires au sujet de son Maître et le nôtre, le Christ Jésus. Aussi profonde que soit l'écriture de l'Évangile de Jean, cette lettre à Gaïus semble très banale.

Eh bien, oui, et c'est pourquoi, je pense, qu'elle a été incluse dans la Parole écrite de Dieu. Elle démontre que le Seigneur est présent et intimement intéressé par tous les détails de notre vie, par tout ce que nous pensons, disons et faisons, par nos réussites et nos échecs, nos amours et, oui, nos haines.

Elle démontre aussi que l'Église, dès le début, n'était pas parfaite, n'était pas unifiée, souffrait dès ses premiers jours des mêmes soucis et conflits auxquels elle est confrontée aujourd'hui. Rien ne change. Nous sommes encore  pécheurs, même dans le meilleur de la vie, et l'Église est encore le lieu où nous œuvrons à notre salut.

Écoutez, et soyez un des premiers chrétiens, et sentez la chaleur et les soucis du disciple bien-aimé Jean dans sa vieillesse. Non pas qu'il s'inquiète sans foi ni espoir, mais même les saints ont des problèmes, et comme chacun de nous aujourd'hui, le Seigneur nous dit comment les gérer, et ils [les saints] nous transmettent cet enseignement.

La troisième lettre de Jean, c'est-à-dire, la troisième que nous avons, pensez combien il doit en avoir écrites, et combien ce serait merveilleux de les avoir et de les lire! Mais la Sainte Mère Eglise cependant, instruite par l'Esprit qui vit en elle, a sauvegardé ou sélectionné ces trois lettres, c'est l'économie!

Jean écrit:

L'ancien, à Gaïus, le bien aimé, que j'aime dans la vérité.

Bien-aimé, je souhaite que tu prospères à tous égards et sois en bonne santé, comme prospère l'état de ton âme.
J'ai été fort réjoui, lorsque des frères sont arrivés et ont rendu témoignage de la vérité qui est en toi, de la manière dont tu marches dans la vérité.
Je n'ai pas de plus grande joie que d'apprendre que mes enfants marchent dans la vérité.
Bien-aimé, tu agis fidèlement dans ce que tu fais pour les frères, et même pour des frères étrangers,
lesquels ont rendu témoignage de ta charité, en présence de l'Église. Tu feras bien de pourvoir à leur voyage d'une manière digne de Dieu.
Car c'est pour le nom de Jésus Christ qu'ils sont partis, sans rien recevoir des païens.
Nous devons donc accueillir de tels hommes, afin d'être ouvriers avec eux pour la vérité.
J'ai écrit quelques mots à l'Église; mais Diotrèphe, qui aime à être le premier parmi eux, ne nous reçoit point.
C'est pourquoi, si je vais vous voir, je rappellerai les actes qu'il commet, en tenant contre nous de méchants propos; non content de cela, il ne reçoit pas les frères, et ceux qui voudraient le faire, il les en empêche et les chasse de l'Église.
Bien-aimé, n'imite pas le mal, mais le bien. Celui qui fait le bien est de Dieu; celui qui fait le mal n'a point vu Dieu.
Tous, et la vérité elle-même, rendent un bon témoignage à Démétrius; nous aussi, nous lui rendons témoignage, et tu sais que notre témoignage est vrai.
J'aurais beaucoup de choses à t'écrire, mais je ne veux pas le faire avec l'encre et la plume.
J'espère te voir bientôt, et nous parlerons de bouche à bouche. 
Que la paix soit avec toi! Les amis te saluent. Salue les amis, chacun en particulier.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après



Ρωμανός ~ Romanós

in 

L'Ermitage du cœur (206)


Paysage étale des Vigiles
Encens et Lumière dorée
La nuit orante lentement
S'ouvre à l'orée du Royaume

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

Radio (France culture): « Saint Maxime le Confesseur » (deuxième partie), avec Jean-Claude Larchet



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L’émission de radio Orthodoxie, sur France culture, du dimanche 17 juillet, à partir de 8 heures, sera de nouveau consacrée à saint Maxime le Confesseur, à l’occasion de la parution du premier volume des « Questions à Thalassios » dans la collection « Sources chrétiennes ». Au cours de cette deuxième partie d’un entretien avec Alexis Chryssostalis, Jean-Claude Larchet, auteur de l’introduction et des notes, fera une présentation générale des « Questions à Thalassios » et évoquera plusieurs thèmes majeurs de la pensée de saint Maxime présents dans cette œuvre importante pour la théologie et la spiritualité chrétiennes.
L'émission pourra être écoutée en direct par l’Internet sur le site de France culture, puis, ensuite, sur cette page où se trouvent également les précédentes émissions en podcasts.