J'ai compris toute la logique des paroles de Prochor Alexandrovitch, mais, bien sûr, une conversation de quelques minutes ne pouvait pas implanter en moi une croyance en ce que je n'avais pas été habitué à croire, et ma conversation avec lui pour l'essentiel servit seulement à manifester mon opinion sur une certaine question importante, un point de vue, que jusque-là, je ne connaissais pas bien moi-même parce que je n'avais eu aucune occasion de l'exprimer, et parfois même moins d'occasion pour y réfléchir.
Mon incrédulité évidemment inquiéta sérieusement Prochor Alexandrovitch: plusieurs fois au cours de la soirée il revint à ce thème, et quand je me préparais à partir, il a rapidement choisi plusieurs livres de sa grande bibliothèque et en me les donnant, il a déclaré:
"Lisez-les, sans faillir lisez-les, parce qu'on ne peut pas quitter ce sujet de cette manière, là où il en est dans son état actuel. Je suis certain que vous allez bientôt comprendre rationnellement et devenir convaincu de l'absence totale de fondement de votre incrédulité, mais il est nécessaire pour transmettre cette conviction de l'esprit au cœur, il est nécessaire que le cœur comprenne, sinon dans une heure ou une journée, elle va s'évaporer et être oubliée, parce que l'esprit est un tamis à travers lequel des pensées différentes passent seulement, et l'entrepôt pour elles n'est pas là. "
J'ai lu les livres. Je ne me souviens pas maintenant si je les ai tous lus, mais il s'est avéré que l'habitude a été plus forte que la raison. J'ai reconnu que tout ce qui était écrit dans ces livres était très convaincant, mais en raison de l'exiguïté de ma compréhension en matière religieuse, j'ai été incapable de soulever la moindre des objections sérieuses à l'argumentation qu'ils contenaient, mais la foi, néanmoins, n'apparut pas en moi. J'ai reconnu que ce n'était pas logique, je pense que tout ce qui était écrit dans ces livres était la vérité, mais il n'y avait aucun sentiment de foi en moi et la mort continua dans ma compréhension qu'elle était la finale absolue de l'existence humaine, après quoi la seule décomposition s'ensuivait.
Malheureusement, il est arrivé que peu de temps après la conversation ci-dessus avec Prochor Alexandrovitch, j'ai dû quitter la ville dans laquelle il vivait, et nous ne nous sommes pas revus une autres fois. Je ne sais pas, peut-être comme homme intelligent et possédant le charme d'un homme intensément convaincu, il aurait réussi au moins dans une certaine mesure à approfondir mes vues et mes relations sur la vie et des choses en général, et à travers cela aussi à introduire certains changements dans ma compréhension de la mort, mais laissé à moi-même et par nature n'étant pas un jeune homme particulièrement sérieux, je n'étais en aucune façon intéressé à ces questions détournées, et à cause de mon étourderie, peu après je n'ai même pas donné une once de pensée aux paroles de Prochor Alexandrovitch, qui traitait de la gravité de l'insuffisance de ma foi et la nécessité de m'en débarrasser.
Et à la suite de cela, les changements de résidence, des rencontres avec des gens nouveaux, non seulement cette question disparut de de ma mémoire, mais la conversation avec Prochor Alexandrovitch aussi, et même son image mentale et ma brève rencontre avec lui.
Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life
Vol. 26, No. 4
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
USA
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