Le Tessin
Conseils aux jeunes gens
Vous vivez dans les Alpes suisses entouré d'un silence absolu et des bruits de la nature. Comment un jeune (ou une personne de tout âge) vivant dans l'agitation d'une immense mégalopole et entouré de nombreuses tentations peut-il entendre l'appel de Dieu ? Quelle est la meilleure façon de maintenir notre véritable but dans la vie ?
Pour être exact, je vis aux contreforts des Alpes dans le canton du Tessin, en Suisse, à dix à quinze minutes d'un petit village de 100 personnes. Un sentier escarpé à travers une châtaigneraie mène chez moi à partir de ce village. Les bâtiments de la skite ne sont que des huttes de village construites au milieu d'une petite ouverture. Je suis le premier homme à vivre ici. En effet, en général, c'est absolument silencieux, ce qui facilite grandement la concentration de mon esprit. C'est la raison pour laquelle j'ai déménagé ici en 1980. Cependant, ce serait une illusion (déception spirituelle) de croire que cette distance physique des grandes mégalopoles bruyantes protégerait automatiquement les moines de toute tentation !
Evagre le Pontique a noté à juste titre que les laïcs sont tentés par les démons principalement par des objets matériels du monde, tandis que les moines vivant dans un cénobium sont tentés par des moines négligents et généralement par des conflits qui surgissent entre les gens.
Les ermites, qui sont pour la plupart libérés de ces deux tentations, ils sont tentés par des démons - qui sont les mêmes partout - par des "pensées", ces traces indiscernables qui sont laissées dans nos esprits après des contacts avec la réalité matérielle. Parfois les démons apparaissent même "exposés", sans masque pour dissimuler leur présence. Evagre le Pontique avait raison de dire qu'aucun homme ne peut être aussi amer et mauvais qu'un démon !
Cette connaissance est plus facile à acquérir dans la solitude que dans un tourbillon de la vie mondaine. Vivre dans la solitude facilite vraiment une grande clarté de pensée, mais seulement lorsque les canons des saints Pères sont observés. Ceci est mentionné dans les textes écrits par les saints Pères. Ceci est également pertinent pour la vraie foi. Dans "la vie mondaine", tout semble plus enchevêtré et ambigu. L'agitation de la vie quotidienne empêche la plupart des laïcs de voir clairement à travers le chaos de leur vie et de comprendre les raisons de leurs problèmes.
La vie spirituelle est la même pour les moines et les laïcs, bien qu'elle soit vécue différemment.
C'est un fait qu'aucun homme n'est une île comme l'a noté un auteur occidental. Nous constituons tous une Église Sacrée Uniforme du Christ. Ainsi, les laïcs bénéficient de la vie désintéressée des moines vivant dans un cénobium et de la sagesse des ermites, tandis que les moines ou ermites cénobitiques ne pourraient pas se maintenir sans le soutien généreux des laïcs. Les chrétiens orthodoxes vivant "dans le monde" le savent très bien, et l'on peut dire qu'ils le savent instinctivement. En effet, le monachisme orthodoxe est au cœur de l'Église. En tant que chrétien orthodoxe, je le ressens tous les jours.
Pour surmonter des afflictions parfois très difficiles, les chrétiens orthodoxes sollicitent spontanément l'aide de moines et d'ermites. Non seulement les moines, mais aussi les laïcs aiment lire les livres des saints Pères, qui nous donnent la sagesse des anciens. Cependant, tout comme l'Esprit Saint est un en beaucoup d'hypostases, la vie spirituelle est la même pour les moines et les laïcs, même si, en comparaison, ils la vivent différemment.
Père Gabriel, merci beaucoup pour cette conversation intéressante. Que recommanderiez-vous à nos lecteurs en cette période de jeûne ?
Rien de spécial ! Je recommanderais simplement de passer cette période, en participant autant que possible aux célébrations liturgiques, en se préparant à la confession et en participant aux saints sacrements, et en réservant du temps pour lire des livres spirituels. Ici, comme partout ailleurs, la quantité n'est pas aussi importante que la qualité. Il est préférable de lire attentivement quelques pages, plutôt que de lire un livre entier de manière distraite.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après