Une fois, alors que je me trouvais à Broşteni, je partis pour fêter
Pâques à la maison, et je me suis rappelé nos habitudes chrétiennes alors que
j’étais enfant. Je pus lui parler et j’ai compris la profondeur de sa vie chrétienne.
Le Grand Jeudi, elle partit le matin et lorsqu’elle revint, je lui
demandai où elle était partie. J’appris alors avec grand étonnement qu’elle
était allée visiter une voisine malade pour lui faire un cadeau, pour lui laver
les pieds en souvenir de l’humilité de notre Seigneur avant la Cène. « Le
Seigneur a lavé les pieds de Ses disciples, et je ne ferais rien pour
Lui ? » me répondit-elle. « J’ai fait moi-aussi quelque chose de
semblable » ajouta-t-elle. « J’ai lavé les pieds de Marie et de
Gabriel, qui est malade et alitée, et je lui ai apporté une paire de
chaussettes, des nôtres, toute neuves ».
Le Grand Vendredi, elle avait les yeux remplis de larmes toute la
journée. « Lorsque je pense », me disait-elle, « ce qu’a
supporté notre Seigneur Jésus-Christ pour nous, j’en viens à pleurer et à
soupirer de peine ».
Le Grand Samedi, lorsque nous étions en admiration devant les gâteaux
de Pâques qu’elle nous préparait, elle nous disait : « Je les ai fait
aussi bien, non pour que vous ayez du plaisir à les manger, quant à moi je ne
les touche même pas, mais je les ai fait comme cela d’abord pour la gloire de
notre Seigneur, qui ressuscitera demain ».
Dans sa vieillesse, bien qu’elle
souffrît de maladies, elle ne manquait jamais d’aller à l’église. Les
maîtresses de maison observaient l’usage d’embrasser la main des vieillards et
des veuves, et de leur donner de l’argent dans la main. Une fois, elle me demanda
si elle fait bien d’accepter cet argent. Elle me dit : « Jamais, je
ne dépense cet argent pour moi, mais j’achète avec des cierges et je les allume
devant la Mère de Dieu, et à la maison, pour chaque sou, je fais dix métanies,
pour la santé de celui qui me l’a donné ».
Une autre fois, je voulais apprendre
ce que savait ma mère sur l’enseignement de l’Église. Elle me récita alors le
Credo et d’autres prières. Elle connaissait aussi des textes entiers du Saint Évangiles
et des Psaumes. Elle me récita le psaume 49. Elle savait par cœur beaucoup de
prières, de tropaires, de stichères des fêtes, qu’elle apprenait à l’église.
J’étais en admiration, parce qu’elle ne m’avait jamais donné l’impression
qu’elle les savait. Elle les gardait en elle avec beaucoup d’attachement.
Elle priait tout le temps. Avant que
nous sortions de la maison, nous la voyions se diriger vers les icônes. Elle
faisait le signe de Croix, quelques métanies et commençait ses travaux. Elle
prononçait le nom de Jésus Christ et de la Mère de Dieu avec beaucoup de
chaleur naturelle, de confiance et avec un espoir inébranlable dans l’aide de
Dieu.
Version Française Bernard Le Caro
d'après
« Εἰκόνες πραότητος »,
Editions
« Orthodoxos Kypseli »,
Thessalonique.
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