25 décembre
/ 7 janvier
NATIVITÉ DU CHRIST
Lectures : Galates IV, 4-7 ;
Matthieu II, 1-12
LA NATIVITÉ DE NOTRE SEIGNEUR
JÉSUS-CHRIST[1]
Q
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uand, à
l’apogée de son règne, César Auguste (30 av. J.-C. à 14 après J.-C.), le
premier empereur romain, après avoir soumis tous les peuples du monde connu
sous une seule autorité, décida de procéder à un vaste recensement de ses
sujets, il devint sans le vouloir le docile instrument de la réalisation du
dessein de Dieu. Rassemblant en effet dans l’unité et l’harmonie de son immense
empire tant de peuples aux mœurs et aux langues si variées, il les préparait à
recevoir la révélation du Dieu unique en trois Personnes et ouvrait ainsi la
voie à la proclamation universelle de l’Évangile, selon la promesse
divine : Je te donnerai les nations
en héritage (Ps II, 8) ; si
bien que ce premier recensement devint l’annonce prophétique de l’inscription
des élus dans le Livre de vie (cf. Phil IV, 3 ; Ap XXI, 27) et de la disparition du polythéisme. Par ailleurs, le
décret de l’empereur, parvenu en Palestine alors que Quirinus était gouverneur
de la province de Syrie, permit la réalisation de la prophétie selon laquelle le
Messie devait naître de la lignée de Juda, à Bethléem, la patrie du roi David (Mi V, 1). Car Joseph, qui se
trouvait alors avec Marie à Nazareth en Galilée, dut prendre la route pour se
faire inscrire dans la patrie de ses pères, Bethléem, malgré l’état avancé de
la grossesse de celle qui passait aux yeux de tous pour son épouse. Quand ils
parvinrent à destination, ceux qui étaient comme eux venus de toutes parts pour
le recensement étaient en si grand nombre qu’ils ne purent trouver à se loger
dans l’hôtellerie et furent contraints de se réfugier pour la nuit, un peu
en-dehors du bourg, dans une grotte qui servait d’étable pour les animaux.
Marie sentit alors que le moment de sa délivrance était venu. Joseph l’installa
comme il put dans la paille, auprès de l’âne et du bœuf qu’ils avaient trouvés
là, puis il sortit en hâte pour aller quérir une sage-femme. Or, sur le chemin,
il constata que la nature s’arrêtait soudain, comme saisie de stupeur :
les oiseaux restaient immobiles, suspendus en l’air en plein vol, les hommes et
les bêtes étaient figés dans leur mouvement, le cours des eaux s’était lui
aussi interrompu. Ce flux incessant du mouvement qui mène toute chose de la
naissance à la mort et l’enferme dans la vanité (Ps XXXVIII, 6-7 ; 102, 15 ; Eccl Isv ; Is
XL, 6) était comme tenu en arrêt, car en cet instant l’Éternel pénétrait
au cœur du temps. Le Dieu d’avant les siècles se faisait enfant nouveau-né. Une
nouvelle dimension du temps et de l’histoire était inaugurée. Après cette
interruption fugitive du temps, tout reprit bientôt son cours normal, Joseph
trouva une sage-femme qui descendait de la montagne et l’amena vers la grotte,
lui rapportant qui était celle qui devait enfanter. Instruit auparavant par un
ange que la Vierge avait conçu le Sauveur par l’opération du Saint-Esprit (Mt I, 21), Joseph contemplait et adorait
en silence ce petit enfant couché dans la paille comme le Messie attendu et
annoncé par ses pères depuis tant de générations. Quoi de plus stupéfiant en
effet que ce spectacle et comment l’exprimer par des paroles ? Le Dieu
Tout Puissant et Créateur du monde se fait créature humble et fragile, Il
devient petit enfant étranger et sans toit, sans pour cela cesser d’être Dieu
infini. Le Verbe divin s’appesantit de la chair et revêt notre humanité pour
s’en faire un ornement royal. Celui que l’univers entier ne peut contenir, qui
est assis impassiblement sur son trône céleste et que glorifie sans cesse la
cour innombrable des puissances angéliques, se laisse contenir dans une grotte
étroite et obscure, objet du mépris de tous. Lui qui est de condition divine S’humilie, S’anéantit Lui-même, prenant condition
d’esclave et devenant semblable aux hommes (Phil II, 7), afin de relever par son humilité ceux qui étaient
tombés. Il se fait pauvre pour nous
enrichir par Sa pauvreté (II Cor
VIII, 9). L’intangible accepte d’être enveloppé de langes pour délier nos
péchés et pour couvrir de gloire divine ceux qui étaient dans la honte. Le Fils
Unique de Dieu, Celui qui est de toute éternité dans le sein du Père, devient
Fils de l’homme et fils de la Vierge sans cesser d’être Dieu, afin de devenir le premier-né d’un grand nombre de frères
(Rm VIII, 29), accordant aux hommes
la dignité de fils adoptifs de Dieu (Jn
I, 11 ; Lc VI, 35 ; Gal IV, 4-7, etc.). Il est couché dans
une crèche et contemplé par l’âne et le bœuf, accomplissant ainsi les
prophéties qui annonçaient : Entre
deux animaux Tu seras connu (Hab
III, 2 lxx), Le bœuf connaît Celui qui l’a créé et l’âne la mangeoire de son
Seigneur (Is I, 3 lxx). Dans cette scène, on pouvait
contempler, disent les saints Pères, une image de l’Église : la crèche est
le calice contenant Celui qui se fait chair aujourd’hui et se donne en
nourriture pour la vie du monde, la
Vierge est à la fois son trône et l’autel du sacrifice, la grotte, un
temple ; les anges, Joseph et les bergers, servent de diacres et
d’acolytes, et le Seigneur Lui-même est le Grand Prêtre qui célèbre cette
Divine Liturgie. Ce prodige extraordinaire, accompli aujourd’hui dans l’humble
grotte de Bethléem, est l’accomplissement de tous les oracles accordés aux
prophètes d’Israël, l’aboutissement de tant de siècles d’une patiente
préparation de l’humanité depuis David, Abraham, Noé et Adam. En ce jour, en ces temps qui sont les derniers, Dieu
nous envoie son Fils unique, par qui Il a
fait tous les siècles (Hb I, 2)
et révèle ainsi au monde le Grand Mystère
de notre Salut, enveloppé de silence
et tenu secret dans le conseil ineffable des trois Personnes de la Sainte
Trinité, avant même la création du monde (Rm
XVI, 25 ; I Cor II,
7 ; Éph III, 5, 10 ; Col I, 26). C’est pour voir luire ce
jour, que le soleil, la voûte du ciel, la surface de la terre et tous les êtres
ont été créés. Mystère étrange, incompréhensible, insaisissable à toute pensée
humaine et même à l’intelligence des anges : le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous (Jn I, 14). Lui, qui est Dieu par nature,
prend sur lui notre humanité, l’assume dans le sein de la Vierge, s’en revêt comme
d’un vêtement pour nous faire communier à sa divinité. Dieu et homme, une seule
Personne, Jésus-Christ, « connue en deux natures » qui sont unies en
Lui « sans mélange, sans division et sans séparation » (définition du
Concile de Chalcédoine). Dieu se fait homme aujourd’hui dans la grotte de
Bethléem, « pour que l’homme devienne Dieu »[2].
Telle est la fin et le but ultime pour lequel Dieu a fait sortir toutes choses
du néant et les a amenées à l’existence : pour que le Verbe, la Seconde
Personne de la Sainte Trinité, descende jusqu’à nous, prenne sur lui notre
humanité vieillie et déformée par le péché, pour qu’Il guérisse nos blessures
par Ses souffrances, pour qu’Il purifie son image souillée, pour qu’Il nous
rénove en Lui (Éph II, 15), nous
relève du gouffre de la mort où nous étions tombé et nous fasse monter dans les
hauteurs, plus haut que toutes les puissances célestes, jusqu’à nous faire
siéger avec Lui en Dieu (Éph II,
6 ; Ap III, 21). Jésus-Christ,
le Sauveur, l’Emmanuel — Dieu avec
nous (Is VII, 14 ; Mt I, 23) — naît en ce jour comme
un fragile nourrisson sur qui les anges se penchent avec admiration. La Lumière véritable qui éclaire tout homme
venant en ce monde (Jn I, 9) luit
dans l’obscurité d’une pauvre étable, et le temps de la mort et de la
corruption touche à sa fin. Salomon n’a plus aucune raison de se lamenter en
s’écriant : Rien de nouveau sous le
soleil (Eccl I, 9), car ce petit
enfant est le second Adam qui vient
inaugurer une nouvelle création, un homme
nouveau (Éph II, 15 ; IV, 24),
prémices de notre nature restaurée et déifiée. Désormais, en suivant le Christ,
en obéissant à Ses commandements, en souffrant avec Lui pour ressusciter par
Lui, les hommes sont appelés à jouir de l’immortalité.
Chant d’entrée
Lors de l’entrée dans le Sanctuaire avec le saint
Évangile, après l’ecphonèse
« Sagesse, debout ! », le diacre déclame le verset suivant :
Изъ чре́ва
пре́жде денни́цы poди́xъ Тя́, кля́тся Го́сподь и не раска́ется : Tы
іере́й во вѣ́къ по чи́ну Мeлхiceде́ковy.
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De mon sein
je T’ai engendré avant l’étoile du matin. Le Seigneur l’a juré et Il ne s’en
repentira pas : Tu es prêtre pour les siècles selon l’ordre de
Melchisédech.
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L’étoile du matin est la
première annonciatrice de la lumière du jour, considérée comme la première
création Divine. Le prophète voulait dire par cela que le Fils de Dieu est né
(non créé) de Dieu le Père avant cette première création, c’est-à-dire avant
tous les siècles. Quant à Melchisédech, étant roi et prêtre, il est la
préfiguration du Christ. Il est « le roi de Salem » (roi
de la paix), et apporte « du pain et du vin »,
étant « le prêtre du Dieu Très-Haut » (Genèse, XIV,18-20). Par
Sa nativité selon la chair, le Seigneur Jésus Christ est prêtre, c’est-à-dire
qu’Il intercède auprès de Dieu le Père pour les péchés des hommes (cf. Hébr. VII,
17-28), et ce éternellement, et non pas de façon éphémère, comme les prêtres
mortels. Le Christ ne fut pas prêtre selon l’ordre d’Aaron, qui offrait des
sacrifices sanglants, mais selon celui de Melchisédech, qui offre « le
pain et le vin » (la préfiguration de l’Eucharistie).
Tropaire de la
Nativité, ton 4 :
Рождество́ Твое́ Христе́ Бо́же на́шъ, возсiя́ мíрови свѣтъ ра́зума: въ не́мъ бо звѣзда́мъ служа́щiи, звѣздо́ю уча́хуся, Тебѣ́ кла́нятися Со́лнцу пра́вды, и Тебе́ вѣ́дѣти съ высоты́ Восто́ка: Го́споди сла́ва Тебѣ́.
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Ta Nativité, Christ notre Dieu, a fait luire dans le
monde la lumière de la connaissance ; en elle, en effet, les adorateurs
des astres ont appris d’une étoile à T’adorer, Soleil de justice, et à
reconnaître en Toi l’Orient descendu du ciel, Seigneur gloire à Toi !
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Kondakion, ton 3
Дѣ́ва дне́сь Пресу́щественнаго ражда́етъ, и земля́ верте́пъ Непристу́пному прино́ситъ: а́нгели съ па́стырьми славосло́вятъ, волсви́ же со звѣздо́ю путеше́ствуютъ: на́съ бо ра́ди роди́ся Oтроча́ мла́до, Превѣ́чный Бо́гъ.
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La Vierge, en
ce jour, met au monde Celui qui surpasse toute essence créée et la terre
offre une grotte à l’Inaccessible ; les anges chantent Sa gloire avec
les pasteurs, et les mages cheminent avec l’étoile ; car pour nous est
né petit enfant, le Dieu d’avant les siècles.
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Au lieu du
trisagion :
Eли́цы во Xpиста́ крести́теся, во Xpиста́
облеко́стеся ; Аллилу́iя.
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Vous tous, qui avez été baptisés
en Christ, vous avez revêtu le Christ, Alléluia !
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Dans les temps anciens, on procédait aux baptêmes lors
des plus grandes fêtes. Toutefois, le chant ci-dessus ne constitue pas
seulement un vestige archaïque. En effet, lors de ces grandes fêtes, les
fidèles ressentent plus fortement leur proximité du Christ et, par le carême
et la Sainte Communion, ils
renouvellent en eux la grâce du Baptême. En
outre, ce chant correspond plus à la joie de la fête que le trisaghion, qui se
termine par les paroles « aie pitié de nous ».
Au
lieu de « Il est digne en vérité... » : ton 1.
Велича́й
душе́ моя́, честнѣ́йшую
и
сла́внѣйшую
го́рнихъ
во́инствъ, Дѣ́ву
пречи́стую
Богоро́дицу. Люби́ти
у́бо
на́мъ, я́ко
безбѣ́дное
стра́хомъ
удо́бѣе
молча́нiе, любо́вiю
же
Дѣ́во
пѣ́сни
тка́ти
спротяже́нно
сложе́нныя, неудо́бно
е́сть: но
и
Ма́ти
си́лу, ели́ко
е́сть
произволе́нiе, да́ждь.
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Magnifie, mon
âme, Celle qui est plus vénérable et plus glorieuse que les armées d’en haut,
la Très-pure Vierge, la Mère de Dieu. Il serait plus aisé, parce que sans
péril, de garder un silence craintif, ô Vierge, mais Te composer par amour
des hymnes constitués avec soin est œuvre difficile. Toutefois, Tu es aussi
notre Mère ; donne-nous l’inspiration à la mesure de notre dessein.
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