"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 21 décembre 2019

Serge Guerouk: BIENHEUREUSE OLGA, FOLLE-EN-CHRIST DU COUVENT FLOROVSKY DE KIEV, UNE "FOLLE POUR LE CHRIST" [2/4]

Le couvent Florovsky aujourd'hui.
 
"Un jour, Mère Olga m'a critiqué comme mangeur de poulets ", se souvient le Père Méthode. "A cette époque, j'étais novice à la Laure et je ne mangeais pas de viande. Et après la fermeture du monastère, j'ai vécu dans un appartement, et quand je suis tombé malade, le médecin m'a conseillé de manger du bouillon de poulet. Alors la propriétaire me prépara un bouillon avec de jeunes coqs. Lors de la rencontre suivante, Olga m'a dit : "Méthode, tu ne manges pas de viande, n'est-ce pas ?""Non, matouchka, je n'en mange pas. Eh bien, tu t'abstiens de viande à l'exception des jeunes coqs ", répondit-elle avec un sourire. Et elle ajouta : " Oui, fais-le maintenant. "Nous devons obéir aux médecins."

Pendant les persécutions antireligieuses de Khrouchtchev, lorsque les monastères et les églises furent fermés en grand nombre, le couvent de l'Ascension Florovski  fut également menacé. La police inspecta les quartiers d'habitation et essaya de chasser les moniales du couvent, en disant : "Le couvent sera bientôt fermé. Partez !" La veille au soir, la bienheureuse Olga courait dans les couloirs et frappait à la porte de toutes les sœurs avec ces paroles : "Laissez-moi entrer ! Laissez-moi entrer ! Je n'ai nulle part où passer la nuit !"

Les sœurs âgées qui vivent actuellement au couvent se souviennent d'elle portant des "vêtements royaux" - c'est ainsi que la bienheureuse Olga les appelait elle-même : une jupe rembourrée, un vieux foulard et une paire de bottes en caoutchouc qu'elle portait depuis de nombreuses années. La moniale mégaloschème Epistimie, quatre-vingt-treize ans, qui ne reçoit pas de visiteurs, nous a dit par l'intermédiaire de la moniale Théoctiste [Zeldis] qu'il y a de nombreuses années, quand elle arriva au couvent, la bienheureuse Olga vint vers elle et lui prédit toutes ses obédiences futures en disant : "Tu vivras une longue vie et tu vivrez dans l'isolement comme une moniale recluse." Et cette prophétie s'accomplit.

Trois ans avant sa mort, Mère Olga avait prédit qu'elle mourrait à la fin de l'automne, "et l'higoumènee Animanisa me suivra bientôt, et nous serons couchées l'une à côté de l'autre". En effet, l'higoumène mourut trois jours après la bienheureuse Olga et fut enterrée à vingt mètres d'elle au cimetière de Zverinets. "Je ne vous abandonnerai pas, venez sur ma tombe", dit-elle à ses enfants spirituels. Au-dessus de la pierre tombale, sous une croix, on peut voir le portrait en pied de la bienheureuse, installé à la demande de ses enfants spirituels, qui la représente dans ses "vêtements royaux" : veste matelassée, vieux foulard et galoches... Ainsi Mère Olga marche vers le Royaume céleste dans la pauvreté, l'humiliation et la "folie [en Christ]".

Les moniales âgées se souviennent aussi des histoires de leurs prédécesseurs, qui ont vécu avant la Révolution et leur ont raconté l'arrivée de la bienheureuse Olga au couvent.

En 1905, un propriétaire foncier de la province de Tchernigov Ivan Katchanovsky amena sa fille Olga, dix-huit ans, au couvent Florovsky. Elle était "d'une beauté saisissante et avait un air de majesté", portait une robe luxueuse, un chapeau avec un voile et des chaussures chères. D'ailleurs, le couvent Florovsky n'a jamais été, et n'est toujours pas, cénobitique ; c'est plutôt une sorte de couvent " idiorhythmique ", et les femmes de familles riches pouvaient y acheter des cellules.


Le couvent de l'Ascension Florovsky au début du XXe siècle.
    
Il faut souligner qu'au cours des siècles passés, la communauté comprenait des moniales issues de familles nobles et célèbres de Russie : Moniale mégaloschème Nectaria (nom séculier : Natalia Borisovna Dolgorukova ; fille du maréchal Boris Petrovich Cheremetev, ami de l'empereur Pierre I) ; Higoumène Parthenia (nom séculier : Apolinaria Alexandrovna Adabash, issue d'une famille noble moldave).

La Vénérable Hélène de Kiev.

C'est au couvent Florovsky que la VénérableHélène  de Kiev (nom séculier : Ekaterina Alekseevna Bekhteeva) reposa dans le Seigneur dans la première moitié du XIXe siècle (elle fut glorifiée comme sainte en 2009). Elle naquit dans une famille aisée de la ville de Zadonsk en 1756. Le saint Hiérarque Tikhon de Zadonsk et Voronège (1724-1783 ; fête : 13/26 août) était l'ami de la famille Bekhteev, et c'est à cause de son influence que le jeune Ekaterina décida d'adopter le monachisme. Le saint évêque légua son cercueil à la sainte femme. C'est au couvent Florovsky que sainte Alexandra (nom séculier : Agafya Semyonovna Melgunova +1789, fête: 13/26 juin), fondatrice du couvent Diveyevo, reçut la tonsure monastique. Selon la tradition, le jeune Prokhor Mochnine, le futur Vénérable Séraphim de Sarov, visita le couvent Florovsky avant sa tonsure.

Version française Claude Lopez-Ginisty

Aucun commentaire: