Les
Latins, menés en 1054 par le cardinal Humbert de Silva Candida, avaient deux
arguments principaux pour la défense de leur propre pratique. Le premier était
que le mot "levain" dans le Nouveau Testament avait de mauvaises plutôt que de bonnes,
connotations, comme lorsque le Seigneur parla de "levain des
Pharisiens", ce qui signifiait l'hypocrisie (Matthieu 16,6). Encore une fois
saint Paul exhortait les Corinthiens à "jeter le vieux levain, afin que vous
soyez une pâte nouvelle, puisque vous êtes vraiment sans levain. Car en effet
le Christ, notre Pâque a été immolé pour nous. Par conséquent nous gardons la
fête, non avec du vieux levain, non avec un levain de malice et de méchanceté,
mais avec les pains sans levain de la sincérité et de vérité."(I Corinthiens
5,6 à 7). Si le pain sans levain signifiait la sincérité et la vérité, raisonnait Humbert, n'était-il pas plus approprié pour le Corps de la Vérité Lui-même d'être fait de pain sans levain?
Cependant, le levain a une signification symbolique très différente dans la parabole suivante
du Seigneur: "Le royaume des cieux est semblable à du levain qu'une femme a pris et mis dans trois mesures de farine, jusqu'à ce que la pâte soit toute levée. (Matthieu 13,33). Ici le levain indique le Royaume des cieux, qui est, Grâce, et qui, lorsqu'il est mélangé avec la pâte de la nature humaine dans trois
mesures, correspondant aux trois Personnes de la Sainte Trinité, lève.
Et ceci est précisément ce que le pain de l'Eucharistie fait, en unissant le
Feu Divin de la Sainte Trinité et de la virilité parfaite et complète de
l'Homme-Dieu, à notre nature humaine, l'élevant ainsi au Royaume d'en haut.
Comme l'écrit l'archevêque Averky: "Dans l'âme de chaque membre
individuel du Royaume de Christ, la puissance de la grâce invisiblement, mais progressivement et activement commence à posséder tous les pouvoirs de son esprit, et les sanctifie et les transfigure. Certains interprètent les trois mesures comme
étant les trois puissances de l'âme: L'esprit, le sentiment et la volonté
"[11]
Confronté au fait du double symbolisme du levain dans le Nouveau Testament,
l'argument latin se révèle ne pas être décisif. Nous devons donc revenir sur le fait
que le levain a été utilisé dans la Cène selon les évangélistes et saint Paul.
Et nous devons supposer que son symbolisme, a été positif...
Toutefois, à ce stade, le deuxième argument latin de plus de poids entre en jeu. Selon les Latins,
"αρτος" dans les Evangiles a dû vouloir dire des pains sans levain,
car, selon les mêmes évangélistes, le Seigneur comme gardien fidèle de
la Loi et homme parfaitement sans péché, n'aurait pas transgressé l'ordonnance de
la loi relative à la célébration de la fête juive de Pâques sur le pain sans
levain. En outre, les évangélistes synoptiques (mais pas Jean) appellent ces
jours précisément "la fête des pains sans levain."
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
le texte de Vladimir Moss
publié le 19 juin/ 2 juillet 2015
en la fête du saint apôtre Jude
et de saint Jean [Maximovitch]
Notes:
[11] Averky, op. cit., p. 135.
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