samedi 15 février 2020

Sur le blog de Maxime: MANIFESTE ANTICLÉRICAL (sic)


Au nom de tous les pécheurs dont je suis le premier, qui aiment et vénèrent notre Sainte Église, Corps du Christ, et qui ont besoin d'avoir, en toute confiance et abandon, recours à elle pour être soignés, guéris et sauvés de tous leurs péchés, leurs maux et leurs afflictions spirituels, douloureusement et profondément blessés par tout ce qui se passe chez ceux qui sont censés transmettre fidèlement et par l'exemple de leur propre vie, la vivifiante Tradition orthodoxe et guider le peuple des fidèles sur le chemin du salut, voici quelques questions : 

Qu’avons-nous à faire, nous Orthodoxes, d’une institution avec un chef appelé Patriarche ? 

Quel peut être l’objectif d’une institution si ce n’est de se perpétuer elle-même ? 

Le Seigneur, a-t-Il créé une institution ? Quel est ce mensonge ? Ses apôtres, avaient-ils formé une hiérarchie avec « un Primus inter pares », ou pire un « Primus sine paribus », (Lui qui s’est voulu le serviteur de tous) un bureau, des employés, des secrétaires, des ambassadeurs etc. ? C’était, c’est, et ce sera toujours le Christ Lui-même, notre Seigneur et Maître, le seul chef de l’Église. Inutile de se revêtir d’habits prestigieux aussi riches soient-ils matériellement que symboliquement, à l’instar des prêtres du Temple de Jérusalem et de procéder à des liturgies épiscopales qui finissent par devenir « pontificales » sur le modèle romain. Qu’ont-elles de supérieur à une Divine Liturgie célébrée par un saint prêtre si ce n’est une pompe superflue pour impressionner les fidèles ? 

Faut-il conserver le statut d’évêque ? Avons-nous besoin d’évêques quand ils ne sont que des apparatchiks d’un système bureaucratique à vocation administrative, oppressive de surcroît. Dieu a-t-Il besoin d’une administration ? Qu’est-ce qu’on administre d’ailleurs ? 

Nous avons besoin de Pères spirituels et disons-le carrément quand un évêque est un spirituel, ce n’est pas son statut d’évêque qui impose notre respect, c’est sa spiritualité. 

Qu’avons-nous à faire qu’il nous « représente » paraît-il dans les instances officielles, les organisations mondaines, les régimes politiques. Ont-ils besoin d’un statut reconnu pour enseigner ? Les Orthodoxes n’ont pas l’habitude d’attendre qu’un Pape fût-il oriental leur désigne officiellement, après procès, un saint homme pour les autoriser à le fréquenter, le consulter, le vénérer et en demander l’intercession ? 

Qu’est-ce qui est profitable pour nous pieux fidèles : la sainteté d’un saint évêque ou son statut d’évêque qui n’apporte rien de plus à sa sainteté ? Sa capacité à administrer ou sa capacité à transmettre la voie du salut ? 

Disons-le clairement ; ce que nous aimons, respectons et vénérons chez un saint évêque ce n’est pas qu’il ait de beaux habits et qu’il parle la langue de bois religieuse et diplomatique au mieux moraliste du « politiquement correct ». D’ailleurs au lieu de le surcharger en tâches bureaucratiques qui risquent de lui faire perdre son âme, ne devrait-on pas favoriser, directement nous-mêmes, fidèles désirant de tout notre être le chemin du salut, l’exercice de maître spirituel ? Que nous importe que l’Église orthodoxe soit « visible » ? Que nous importe les visites plus ou moins rares d’un hiérarque condescendant accompagné d’un plus ou moins imposant équipage ? Que nous importe qu’il rassemble le clergé local et par une table réservée au dit clergé qu’il fasse bien comprendre aux simples fidèles qu’ils appartiennent à une caste fermée ? On est bien loin des noces de Cana ? Quelle misère ! 

Les religions connaissent leurs dernières heures et cela pourrait être bien comme ça. Jusqu’à présent je n’étais pas amateur de différence entre spiritualité et religion mais quand une religion devient une institution, elle relève plus du politique que de la transmission spirituelle. Les derniers exploits du « Patriarche œcuménique » – excusez du peu – ont provoqué tellement de malheurs, de contre-témoignages, de divisions et de déchirures… alors on va le prendre au mot puisqu’il s’intitule le « primus sine paribus » et qu’il est soi-disant le chef suprême de l’Église orthodoxe ; c'est ainsi qu'il transforme, par le moyen de toutes sortes de manœuvres politiciennes, par le fait même, toute la Tradition orthodoxe en simple institution religieuse mondiale qui n’offre plus le moindre intérêt pour qui a le souci de son salut. Il ne nous fait plus prendre « des vessies pour des lanternes » et comme il n’a aucunement l’intention de regretter ses méfaits et encore moins de démissionner en suivant l’exemple d’un récent ex-pape romain ou de convoquer un concile panorthodoxe authentique, il a, aux yeux du monde qui s’intéresse encore à ce genre d’activité et de croyance, définitivement rangé l’Orthodoxie avec sa cohorte de carriéristes sans scrupules sur les étagères des institutions totalitaires à éviter (l’exercice particulièrement autoritaire de son prétendu pouvoir ne saurait le contredire) dont plus personne ne veut, pour ne pas dire qu’il a jeté l’Orthodoxie dans les poubelles de l’Histoire. 

Bel ouvrage en vérité ! 

Même si l’obéissance à une hiérarchie inique a tracé le chemin de sainteté à des St Nectaire d’Égine, il ne faudrait pas confondre l’obéissance à un apparatchik malveillant avec l’obéissance monastique à un père spirituel expérimenté et avéré comme guide sûr sur le chemin du salut. L’obéissance aveugle à un hiérarque de l’administration ecclésiastique est plutôt une perversion de la vertu d’obéissance à un starets qui mène à la vraie liberté, comme c’est une perversion de transformer des conseils spirituels de mise en garde, par les Saints Pères comme Évagre, des passions à combattre, en péchés capitaux par le juridisme de l’Église romaine. 

Qui osera dire qu’il s’agit alors de l’intervention de l’Esprit saint ? 

Mais il nous reste le Christ et les amoureux du Christ, ceux qui l’ont goûté, l’ont expérimenté, ceux qui marchent au rythme de leur cœur ardent, les yeux à la fois baissés sur leur condition de pécheur et le regard intérieur orienté vers la beauté de leur Seigneur et Maître, ceux que nous appelons les saints. Nous laisserons l’amour mondain des éphèbes aux clergés célibataires carriéristes qui veulent montrer à leur maman comme ils ont réussi dans la vie en gravissant par tous les moyens (voire en utilisant « la promotion canapé ») les échelons de la hiérarchie ecclésiastique. À suivre ? 

Providence et Miséricorde de Dieu



Une poignée de sable
Jetée dans la mer,
Voilà ce qu'est le péché
comparé à la Providence
Et à la Miséricorde 
de Dieu!

Saint Isaac le Syrien
***
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le bulletin paroissial 
de l'Eglise de la Mère de Dieu 
Joy of All Who Sorrow, 
Mettingham, Grande Bretagne 

Selon le site grec Romfea, la rencontre panorthodoxe en Jordanie est maintenue


Le Métropolite de Volokolamsk Hilarion, qui s’exprimait hier devant les journalistes à Rome, a mentionné que le Patriarche Cyrille se rendrait en Jordanie. Le métropolite Hilarion a également révélé que le patriarche de Jérusalem avait envoyé une deuxième lettre invitant à nouveau les primats à participer à la rencontre. Commentant le refus du patriarche œcuménique Bartholomée d’y participer, le Métropolite Hilarion a souligné que « le patriarche Bartholomée ne montre aucun désir de résoudre le problème qu’il avait créé lui-même, tout en s’efforçant de convaincre les Églises à reconnaître son iniquité. »

vendredi 14 février 2020

Métropolite Antoine : Chaque chrétien est un combattant pour l'unité de l'Eglise

Métropolite Antoine de Boryspil et Brovary (Pakanich), 
Chancelier de l'Eglise orthodoxe ukrainienne canonique. 
Photo : YouTube

*
L'unité de l'Église est basée sur le fait que le Chef de notre Église est notre Seigneur Jésus-Christ, a noté le hiérarque de l'Eglise orthodoxe ukrainienne canonique.

L'unité est l'un des principes fondamentaux de l'existence de l'Eglise, et chaque chrétien est un combattant pour elle, a expliqué le Chancelier de l'Eglise orthodoxe ukrainienne canonique, le Métropolite Antoine [Pakanich] de Boryspil et Brovary .

"Toute personne qui non seulement sait théoriquement quelque chose sur l'Église mais qui vit sa vie en faisant partie intégrante de l'Église elle-même comprend qu'il est possible de vivre seulement dans l'unité. Et l'unité de l'Eglise est basée sur le fait que le Chef de notre Eglise est notre Seigneur Jésus-Christ", a souligné Vladyka Antoine dans un message vidéo à ses ouailles, publié sur sa chaîne YouTube.

Il a rappelé que toute division est une propriété du péché, qui déchire et divise tout autour. Par conséquent, un vrai chrétien se bat pour l'unité en surmontant son propre péché.

"Une personne qui mène une vie chrétienne, vit selon les commandements de Dieu, essaie simplement, tout d'abord, en surmontant le péché, d'unir en elle toutes les propriétés de la nature humaine en une seule harmonie afin d'avoir un lien direct avec Dieu", a déclaré le hiérarque de l'Eglise orthodoxe ukrainienne canonique. "Et dans une telle manifestation extérieure, bien sûr, chaque chrétien est un combattant pour l'unité de l'Eglise".

Le Métropolite Antoine a expliqué que la lutte pour l'unité n'est pas une activité extérieure.

"En fait, un vrai chrétien est un combattant avec lui-même. Et quand nous dépassons le péché, nous dépassons cette fragmentation de la vie humaine", a-t-il dit à ses ouailles.

Selon l'évêque, le péché cherche toujours à pénétrer dans le corps de l'Église et à fragmenter les gens. Pour une telle dissociation, le péché utilise souvent des catégories significatives, sociales et nationales, en essayant de changer le sens de la vie de l'Église et de convaincre les gens que l'Église devrait construire "le paradis sur terre".

"En fait, l'Eglise devrait toujours témoigner seulement qu'il y a un Dieu qui prend constamment soin de l'âme humaine", a conclu Vladyka Antoine.

Auparavant, il a parlé des trois étapes à franchir pour parvenir à la paix dans le Donbass.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

jeudi 13 février 2020

Saint Père Païssios et la mort


Saint Païssios (1924-1994), né Arsenios Eznepidis, était un ascète bien connu du Mont Athos. Il était très respecté et aimé pour ses conseils spirituels et sa vie d'ascète. 

De nombreuses personnes dans le monde entier vénèrent le staretz Païssios, en particulier en Grèce et en Russie, et ses dits, documentés par ses disciples dévoués, sont devenus omniprésents dans les maisons orthodoxes. Les paroles de saint Païssios, inhabituelles par leur simplicité, leur chaleur et leur réalisme, semblent être exactement ce dont les gens modernes ont désespérément besoin. 

- Geronda ["geronda" est le mot grec pour "staretz"], le diagnostic final a été établi. Ta tumeur est cancéreuse et elle est agressive.

- Apportez-moi un mouchoir pour que je puisse danser sur l'air : "Je te dis adieu, ô pauvre monde !" Je n'ai jamais dansé de ma vie, mais je vais maintenant danser de joie à l'approche de ma mort.

- Geronda, le médecin a dit qu'il voulait d'abord utiliser des radiations pour réduire la tumeur et ensuite faire une opération.

- Je comprends ! L'armée de l'air bombardera d'abord l'ennemi, puis l'attaque commencera ! Je monterai alors et je vous apporterai des nouvelles ! Certaines personnes, même les personnes âgées, lorsque le médecin leur dit : "Vous allez mourir" ou "Vous avez cinquante pour cent de chances de survivre", sont très angoissées. Elles veulent vivre. Et puis quoi ? Je me le demande ! Maintenant, si quelqu'un est jeune, eh bien, c'est justifiable, mais si quelqu'un est vieux et essaie encore désespérément de s'accrocher, eh bien, je ne comprends pas. Bien sûr, c'est tout à fait différent si quelqu'un veut suivre une thérapie pour gérer la douleur. Il n'est pas intéressé par la prolongation de la vie, il veut seulement rendre la douleur un peu plus supportable afin de pouvoir prendre soin de lui jusqu'à sa mort - c'est logique.

- Geronda, nous prions pour que Dieu te donne une prolongation de ta vie.

- Pourquoi ? Le psalmiste ne dit-il pas : "Les jours de nos années sont soixante ans et dix ans" ?

- Mais le psalmiste ajoute : "Pour les plus robustes , quatre-vingts... "

- Oui, mais il ajoute : "Et le surplus n'est que peine et douleur..."  auquel cas il vaut mieux avoir la paix de l'autre vie.

- Geronda, quelqu'un peut-il, par humilité, se sentir spirituellement non préparé pour l'autre vie et souhaiter vivre plus longtemps pour s'y préparer ?

- C'est une bonne chose, mais comment peut-il savoir que, même s'il vit plus longtemps, il ne deviendra pas spirituellement pire ?

- Geronda, quand peut-on dire que quelqu'un est réconcilié avec la mort ?

- Quand le Christ vit en lui, alors la mort est une joie. Mais il ne faut pas se réjouir de mourir simplement parce qu'on s'est lassé de cette vie. Quand on se réjouit de la mort, au sens propre, la mort s'en va pour trouver quelqu'un qui a peur ! Quand on veut mourir, on ne le fait pas. Celui qui vit la vie facile a peur de la mort parce qu'il se réjouit de la vie mondaine et ne veut pas mourir. Si les gens lui parlent de la mort, il réagit par le déni : "Va-t'en d'ici !" Cependant, celui qui souffre, celui qui est dans la douleur, voit la mort comme une libération et dit : "Quel dommage, Charon n'est pas encore venu me prendre... Il a dû être retenu !"

Rares sont les personnes qui accueillent la mort. La plupart des gens ont une affaire inachevée et ne veulent pas mourir. Mais le Bon Dieu pourvoit à la mort de chaque personne lorsqu'elle a atteint sa pleine maturité. En tout cas, une personne spirituelle, qu'elle soit jeune ou âgée, devrait être heureuse de vivre et de mourir, mais ne devrait jamais poursuivre la mort, car c'est un suicide.

Pour quelqu'un qui est mort aux affaires du monde et qui a été spirituellement ressuscité il n'y a jamais d'agonie, de peur ou d'anxiété, car il attend la mort avec joie parce qu'il sera avec le Christ et se réjouira de Sa présence. Mais il se réjouit aussi d'être en vie, encore une fois parce qu'il est uni au Christ dès maintenant et qu'il éprouve une partie de la joie du Paradis ici sur terre et se demande s'il n'y a pas une joie plus grande au Paradis que celle qu'il ressent sur terre. De telles personnes luttent avec philotimo et abnégation ; et parce qu'elles placent la mort devant elles et s'en souviennent chaque jour, elles se préparent plus spirituellement, en luttant avec audace et en vainquant la vanité.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


NOTE:

Philotimo Sur le blog de Maxime:



Dans une note extraite du livre St Arsène de Cappadoce par le père Païssios traduit et édité par le monastère St Jean le Théologien Souroti de Thessalonique (où repose Père Païssios) on peut lire cette définition plus spécifiquement chrétienne orthodoxe :

φιλότιμο = noblesse d’âme, bonté, reconnaissance, amour purifié exempt de tout retour sur soi, de celui qui ne regarde jamais son propre intérêt mais ne cherche qu’à être agréable à Dieu, le Père Païssios considérait cette vertu comme le fondement du progrès dans la vie spirituelle. 

À propos de philotimo, Père Païssios disait :

"Le juste chrétien ne pratique pas de bonnes actions pour son propre bénéfice, c’est-à-dire pour être récompensé ou pour éviter l'enfer et gagner le paradis, mais plutôt parce qu'il préfère le bien au mal. Tout le reste est une conséquence naturelle du bien qui remplit notre âme sans l’avoir demandé. De cette façon, le bien a de la dignité, sinon, il provient de l'attitude à bas prix du 'donner et prendre'." (Version française par Maxime le minime)

mercredi 12 février 2020

Kirill Aleksandrov : Metropolitan Fund of State Dept (Le fonds métropolitain du Département d’Etat [américain]) : pourquoi « l’église orthodoxe ukrainienne » schismatique a créé une structure caritative

Le primate 
de« l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique 
Epiphane Doumenko.
Photo : Union des Journalistes Orthodoxes

 11 février 2020
Les États-Unis ont commencé à utiliser ouvertement « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique à des fins géopolitiques.

Le 4 février 2020, Epiphane Doumenko a officiellement présenté la création de la fondation caritative "Fond métropolitain de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique" sous l'égide de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique. La charité, c'est bien sûr bien, mais certaines nuances amènent à se demander : ce fonds sera-t-il vraiment engagé dans ce que le chef de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique a déclaré ? Quelles sont les questions qui se posent au fonds et quelles conclusions peut-on en tirer si, en dehors des paroles officielles de Doumenko, on creuse un peu plus ? 

Capture d'écran du site pomisna.info
Doumenko a présenté sa fondation dans le cadre des célébrations de l'anniversaire de sa propre intronisation. Cependant, ils ont créé cette structure en octobre 2019 spécifiquement pour la visite de Doumenko aux États-Unis. Le site pomisna.info rapportait le 3 février : "Dans le cadre de la rencontre du primate de l'Eglise orthodoxe d'Ukraine, Sa Béatitude le « métropolite Epiphane de Kiev et de toute l'Ukraine », avec le Secrétaire d'Etat américain Michael R. Pompeo, la conversation s'est poursuivie sur le Fonds Métropolitain de l'Eglise Orthodoxe d'Ukraine, qui a été présenté au Secrétaire d'Etat en octobre 2019 à Washington lors de la visite officielle du métropolite Epiphane aux Etats-Unis".

Par conséquent, près de quatre mois se sont écoulés entre le moment où la fondation a été présentée en Amérique et celui où elle a été présentée à la société ukrainienne. Mais si le fonds a été créé en Ukraine pour les besoins de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique ou de la société ukrainienne, alors pourquoi ce fait a-t-il été caché au grand public pendant quatre mois ? Pourquoi a-t-il été soumis pour la première fois à l'approbation d'un autre pays ? Quelles questions concernant ce même pays ont été abordées par les dirigeants de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique ? Pour qui, dans ce cas, le fonds a-t-il été créé : pour le Département d'État américain ou la société ukrainienne ? Et quels intérêts sera-t-il censé servir en fin de compte ?

Epiphane a très bien décrit les buts et les objectifs de la fondation : "La Fondation métropolitaine aidera l'Église dans ses activités quotidiennes. Il s'agit de s'occuper des pauvres, des malades, de ceux qui sont dans le besoin. C'est le Fonds qui aidera l'église à atteindre les croyants qui sont basés là où il n'y a pas de paroisses. C'est le Fonds qui aidera l'Église à éduquer les croyants. C'est le Fonds qui aidera les monastères à devenir autosuffisants, tandis que les prêtres acquerront également les compétences de gestion dont ils auront besoin dans leur service quotidien. C'est le Fonds qui aidera à restaurer et à réparer les temples, notamment en aidant les bâtiments d'église à devenir économes en énergie. C'est le Fonds qui permettra à l'orthodoxie ukrainienne d'être moins vulnérable à la menace d'injections financières déstabilisatrices et politiquement motivées de la part de la Russie".

Si la Fondation a été créée en Ukraine pour les besoins de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique ou de la société ukrainienne, alors pourquoi ce fait a-t-il été caché au grand public pendant quatre mois ?

La première chose qui saute aux yeux, c'est la phrase selon laquelle le Fonds "aidera les monastères à devenir autonomes". Mais qu'est-ce que l'autosuffisance du monastère ? Dans le monde des affaires, il existe un concept d'autosuffisance. Mais un monastère n'est pas une entreprise. Ou est-il encore associé aux affaires dans l'esprit de Doumenko ? Même si nous nous éloignons de la composante économique, les monastères n'existent pas grâce à des fonds (d'autant plus qu'ils ne sont pas "bénis" par le Département d'Etat), mais grâce aux moines qui y travaillent. Et « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique a de gros problèmes avec cela .

En octobre 2019, Doumenko a écrit qu'il y a 77 monastères dans « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique. Cependant, le nombre de moines y est d'environ 250, soit un peu plus de 3 par monastère. Mais si nous regardons les statistiques du monachisme de « l’église orthodoxe ukrainienne »  et du « patriarcat de Kiev » schismatiques par diocèses, nous pouvons découvrir que, par exemple, 5 monastères et 3 moines étaient enregistrés dans le diocèse de Ternopil en 2016 ! Il est juste de parler de leur autosuffisance.

Epiphane a déclaré que le Fonds aidera "les prêtres à acquérir les compétences de gestion dont ils auront besoin dans leur service quotidien". Il est significatif que le primate d'une organisation religieuse parle de l'acquisition de compétences managériales. Cela signifie que dans leur "ministère" quotidien (probablement, il est plus correct de dire "activité"), les prêtres de« l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique ne fournissent pas de conseils spirituels à leur troupeau, ne le conduisent pas au Royaume des Cieux, mais le gouvernent.

Le passage sur les bâtiments d'église économes en énergie est plutôt un hommage à l'agenda environnemental du patriarche Bartholomée de Constantinople qu'il a recyclé sur la scène internationale. En outre, si le temple n'est pas moderne, il est extrêmement difficile de le rendre économe en énergie sans endommager l'architecture du temple.
L'expression "injections financières déstabilisantes et politiquement motivées du côté russe" mérite une attention particulière. Les confessions schismatiques d'Ukraine et ceux qui sympathisent avec elles tout le temps font la promotion du mythe selon lequel l'argent que les croyants de l'Église orthodoxe ukrainienne donnent aux temples où ils se rendent est emporté à Moscou presque après chaque office. Le "métropolite" Mikhaïl Zinkevitch en est venu à l'absurdité que l'argent des cierges, achetées dans les temples de l'Eglise orthodoxe ukrainienne canonique, sert à acheter des balles pour tuer les soldats ukrainiens dans la zone ATO.

A ce moment-là, Epiphane déclare le contraire : ce n'est pas l'argent ukrainien qui circule de l'Ukraine vers la Russie, mais plutôt de la Russie vers l'Ukraine. Vous auriez mieux fait de prendre une seule décision, messieurs, sur qui donne de l'argent à qui pour ne pas vous contredire.

Quant aux véritables "injections financières du côté russe", il s'agit d'environ 1 milliard de dollars par an, que les travailleurs migrants ukrainiens ne transfèrent de Russie que selon les statistiques officielles. Le produit réel, selon la méthode de calcul de la NBU, peut être deux fois plus élevé. Et il ne s'agit pas de rentrées de fonds "déstabilisantes, à motivation politique". C'est l'argent qui aide les familles des migrants, que la politique économique incompétente des autorités ukrainiennes a obligés à travailler dans un autre pays, pour survivre.

Néanmoins, les paroles d'Epiphane sur les objectifs du Fonds métropolitain ne sont que de belles paroles. À son tour, le secrétaire d'État américain Mike Pompeo, qui s'est récemment rendu à Kiev, a expliqué précisément ce que ce fonds est censé faire. Le site pomisna.info a déclaré que "Avec l'aide du Département d'État, la Fondation prévoit de mettre en œuvre un certain nombre de projets sociaux, visant notamment à la réintégration du Donbass".

Pourtant, la réintégration du Donbass n'est pas une sphère ecclésiastique ou même sociale mais une sphère politique. En outre, nous parlons de réintégration, ce qui signifie que le fonds n'opérera pas dans les territoires contrôlés par Kiev, car ils ne peuvent pas être réintégrés en Ukraine, car ils y sont déjà, mais dans les territoires [séparatistes] de la RDP et de la RPL non reconnus.

Les buts et objectifs du fonds sont maintenant lentement clarifiés. La présence de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique dans la RDP et la RPL est, bien sûr, minime, mais elle est toujours là. Par exemple, le diocèse de Donetsk de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique, dont le centre diocésain se trouve à Donetsk, compte, selon Wikipedia, 78 paroisses, 2 monastères et 36 "prêtres". Et c'est la seule faille par laquelle l'influence des États-Unis sur la population des territoires de l'Ukraine non contrôlés par Kiev peut être mise en œuvre d'une manière ou d'une autre. En fait, tout le monde sait comment l'administration américaine est capable d'influencer la société civile de différents pays par l'intermédiaire de toutes sortes de fondations et d'organisations non gouvernementales.

Et même si nous supposons que la Fondation d’Epiphane va effectivement réaliser certains projets sociaux dans les Donbass, cela ressemblera toujours à une tentative de saisir l'initiative de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] dans sa mission de maintien de la paix dans l'est de l'Ukraine.

Récemment, lors d'un téléthon en direct  Noël. Des gens au lieu de la guerre. Enfants du Donbass", Sergey Sivokho, conseiller du secrétaire du NSDC, a admis que l'Eglise orthodoxe ukrainienne peut jouer un rôle extrêmement important dans la résolution du conflit : "Tous les peuples veulent la paix. L'Église, bien sûr, en tant qu'institution qui opère de tous les côtés du conflit, a sa propre voix et a toujours été une assistante et se distingue par la charité et le maintien de la paix. Par exemple, le monastère de Sviatogorsk accueillerait des milliers de réfugiés dans les moments les plus difficiles en Ukraine. L'Église peut agir en tant que médiateur (du conflit ). Ce que l'Église exprime est bon : tous les messages sont pacifiques".

Et même l'activité minimale de la Fondation d’Epiphane avec une promotion médiatique compétente peut permettre au chef de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique de déclarer une "mission de maintien de paix" comme étant l'apanage de son organisation.

Même si l'on suppose que la Fondation d’Epiphane va effectivement mener à bien certains projets sociaux dans les Donbass, cela ressemblera à une tentative de saisir l'initiative de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique dans sa mission de maintien de la paix dans l'est de l'Ukraine.

Maintenant, l'essentiel, c'est le financement. Après tout, il est de notoriété publique que l'on danse sur la musique de celui qui paie le joueur de cornemuse. Le principal bailleur de fonds de la Fondation métropolitaine de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique sera apparemment le Département d'État américain lui-même ou des structures qui lui sont affiliées. Selon le site web pomisna.info, afin de travailler avec la Fondation de Pompeo, il a été demandé de créer un groupe de travail spécial composé d'employés du Département d'État et de l'ambassade des États-Unis en Ukraine.

Dans certains pays, comme la Grèce, l'Église est financée par l'État. Mais lorsqu'une organisation religieuse est salariée par un État étranger, cela en dit long.

L'archiprêtre Nikolai Danilevitch, chef adjoint du DECR de l’Eglise orthodoxe
ukrainienne   canonique, a commenté la création du fonds comme suit : "C'est assez étrange, mais d'un autre côté, c'est révélateur. Notre Église est souvent accusée du fait que Moscou nous aurait versé de l'argent, bien qu'il n'y ait pas une seule preuve. Et ici, l'Amérique est prête à verser de l'argent à« l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique de manière absolument ouverte et sans cérémonie - et ce n’est pas un problème ! Il s'agit de deux poids, deux mesures lorsqu'ils font ouvertement ce dont ils accusent injustement les autres".

Et enfin, il y a la question de savoir qui va distribuer l'argent du Fonds métropolitain. Lors de sa présentation, Doumenko a déclaré : "Ce n'est pas la fondation du métropolite Epiphane. C'est le Fonds Métropolitain de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique. Ici, le chef de« l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique a dit un autre mensonge flagrant. C'est précisément son fonds : Sergey Petrovitch Doumenko figure dans le registre d'État comme son unique propriétaire.

Capture d'écran du site opendatabot.ua
Cela signifie que les Etats-Unis s'appuient sur Epiphane plutôt que sur Mikhaïl Zinkevitch ou sur l'ex-Métropolite de l'Eglise canonique Siméon (Tchostatski). Ce sont les mains de Sergei Doumenko qui distribueront l’argent aux bénéficiaires des subventions du Fonds Métropolitain.

Dans la lutte pour le pouvoir au sein de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique, les tarifs d'Epiphane ont augmenté de manière significative. En témoigne le fait que le "métropolite" Mikhaïl Zinkevitch a été publiquement et manifestement désavoué par le Synode de« l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique. Le même jour où Doumenko a présenté le Fonds, c'est-à-dire le 4 février 2020, le Synode a reconnu la célébration de Noël le 25 décembre et le 7 janvier, qui avait été proposée auparavant par Michael Zinkevich, comme non canonique et causant une séparation, bien que de nombreux "hiérarques" de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique, dont Doumenko lui-même, aient exprimé à plusieurs reprises leur souhait de voir la célébration de Noël avec toute "l'Europe éclairée". De plus, cette fête du 25 décembre, outre Zinkevitch, a été célébrée par deux autres "évêques" de « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique. Cependant, lui seul "a reçu le coup de fouet."

Tout cela nous permet de conclure que le Département d'État américain a commencé à utiliser spécifiquement « l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique pour mettre en œuvre ses objectifs géopolitiques. Parler de charité n'est que de belles paroles destinées à dissimuler l'essence de ce qui se passe.
Il en va de même pour les paroles des politiciens américains sur l'égalité, avec en toile de fond une réunion du chef du Département d'État américain avec le seul Epiphane Doumenko au lieu de tous les chefs religieux d'Ukraine.

La visite de Mike Pompeo en Ukraine a clairement montré que c'est l'Amérique qui agit derrière le projet de l’« l’église orthodoxe ukrainienne »  schismatique et qu'elle va donc payer pour cela le prix fort.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après



mardi 11 février 2020

Sur le blog de Maxime: RICHES ET PAUVRES DE TOUJOURS, un choix de textes des Pères de l'Église

Lien pour lire le choix de textes:




Nous ne sommes que des gérants

Grégoire de Nazianze, Homélie sur l’amour des pauvres :

« Frères bien-aimés, ne soyons pas les mauvais économes des biens que l’on nous a confiés. »

La parabole du mauvais riche et du pauvre Lazare
1886.


MATTHEW NAMEE : Déclarations de loyauté du patriarche Athénagoras envers l'Amérique

Patriarche  Athénagoras

Grâce à mon collègue Aram Sarkisian, je suis récemment entré en possession du premier lot d'une série de documents du Département d'État américain relatifs à l'Église orthodoxe - et en particulier au Patriarcat œcuménique - au début des années 1950. Il me faudra des mois - voire des années - pour passer au crible tous ces documents et partager mes découvertes. Cet article représente un petit pas en avant.

Le patriarche œcuménique Athénagoras est l'une des figures les plus importantes de l'histoire orthodoxe moderne. Après 17 ans à la tête de l'archidiocèse grec d'Amérique du Nord et du Sud, il fut élu patriarche œcuménique en 1948, au moment où la guerre froide commençait. Lorsque nous parlons d'Athénagoras et du gouvernement américain, le contexte est d'une importance vitale, car si certaines déclarations d'Athénagoras sont alarmantes quel que soit le contexte, nous ne pouvons pas oublier que nous sommes au début de la guerre froide. De nombreuses personnes - y compris le patriarche - ont considéré qu'il s'agissait d'une guerre entre le Bien et le Mal. Et les États-Unis étaient, aux yeux du patriarche Athénagoras et de millions et de millions d'autres personnes, l'agent évident de tout ce qui était bon, contre la menace existentielle du communisme soviétique.

Pendant son séjour aux États-Unis en tant qu'archevêque, Athénagoras a fait la connaissance des deux présidents Roosevelt et Truman, et comme je l'ai expliqué dans un article précédent, il était désireux d'aider les responsables des services de renseignement américains pendant la Seconde Guerre mondiale (par exemple, en 1942, il a dit à un agent de l'OSS : "Tous ceux qui sont sous mes ordres sont sous les vôtres. Vous pouvez les commander pour tout service dont vous avez besoin. Aucune question ne sera posée et vos instructions seront exécutées fidèlement").

Après l'élection d'Athénagoras comme patriarche, dans une manifestation de soutien très publique, le Président Truman a fait venir le Patriarche élu à Istanbul dans l'avion présidentiel (ce qui serait aujourd'hui connu sous le nom d'Air Force One). Staline considérant désormais le Patriarcat de Moscou comme un outil à des fins géopolitiques soviétiques, l'Amérique avait son propre patriarche orthodoxe à Constantinople. L'Orthodoxie est devenue le sujet (ou, pourrait-on dire, la victime) d'une des nombreuses guerres par procuration entre les États-Unis et les Soviétiques à cette époque.

Rien de tout cela n'est nouveau. Ce qui est nouveau, c'est que nous disposons désormais de documents déclassifiés du Département d'État attestant de la nature précise des relations entre les États-Unis et le patriarche Athénagoras. Ces documents présentent Athénagoras comme étant disposé et désireux de collaborer avec le gouvernement américain. Loin d'être une marionnette, il semble s'être considéré comme un partenaire clé dans la guerre de l'Amérique contre le communisme.

Dans ce premier article, je vais partager une partie de la documentation sur les relations entre Athénagoras et le Département d'État. À l'avenir, il y a beaucoup de pistes à suivre et d'histoires à explorer, mais nous commencerons ici, avec la compréhension de base de l'arrangement, tel que présenté par le Département d'État dans ses propres documents de 1950-51.

***

8 février 1950 Mémorandum du vice-consul James Gustin au consul général à Istanbul concernant une conversation entre le patriarche, le consul Merrill, et moi-même le 1er février 1950 (source)

... Athénagoras semblait très heureux de rencontrer M. Merrill, et a dit que je pouvais transmettre le message à l'Amérique que lui, le patriarche, travaillait sans relâche à la cause de l'Amérique. Il a déclaré que les États-Unis étaient l'espoir du monde et qu'il serait toujours très fier de l'occasion qu'il avait eue de connaître personnellement le président Roosevelt depuis sa nomination au poste de gouverneur de l'État de New York jusqu'à sa mort, puis de connaître personnellement le président Truman. Il a également exprimé sa reconnaissance pour l'étroite coopération qu'il a reçue dans le passé de la part du Département d'État. Il a également mentionné la grande courtoisie qui lui avait été témoignée à Ottawa lorsqu'il s'y était rendu pour renoncer à sa citoyenneté américaine, et combien la gentillesse personnelle de l'ambassadeur l'avait touché.

[Note : Athénagoras a dû renoncer à sa citoyenneté américaine pour devenir un citoyen turc lors de son élection en tant que patriarche œcuménique. Il l'a fait parce que les États-Unis n'autorisaient pas, à l'époque, la double citoyenneté, et que le Patriarche œcuménique devait être citoyen de la République de Turquie].

***

26 mai 1950 Mémorandum sur la conversation entre le patriarche et le Consul général LeVerne Baldwin le 1er février 1950 (source)

... Il [Athénagoras] a souligné son américanisme, sa foi dans la politique de bon voisinage, dans les méthodes démocratiques, et dans le courage et la franchise de l'Amérique, qu'il s'est efforcé de mettre en œuvre dans sa politique en tant que patriarche. Il a demandé si le gouvernement américain estimait qu'il était sur la bonne voie dans son approche du gouvernement turc et dans la manière dont il traitait son patriarcat...



... Le patriarche Athénagoras a déclaré qu'il serait heureux de tenir le consul général Lewis informé, par les voies actuelles, des communications qu'il pourrait recevoir et qui, selon lui, pourraient nous intéresser ; je l'avais remercié pour ses actions passées à cet égard.

***

22 septembre 1950 Mémorandum du Consul général Frederick Merrill sur un entretien avec le patriarche œcuménique (source)

... Athénagoras a également parlé longuement de la situation de l'Église orthodoxe au Moyen-Orient. Le point faible de tous, a-t-il dit, est Alexandrie et la seule solution qui reste est d’en faire expulser le patriarche. Bien que Chrystophe soit un vieil homme, il est encore vigoureux et extrêmement dangereux, dans la mesure où il est certainement influencé par des agents communistes et qu'il prévoit un voyage aux États-Unis, via le Canada, où (Canada) il est en contact avec un agent communiste. Il insista à nouveau pour que les gouvernements grec et américain interviennent directement auprès de lui, Athénagoras, afin de lui donner l'excuse nécessaire pour corriger la situation à Alexandrie. Athénagoras saisit toutes les occasions pour parler de ce problème particulier - qui semble l'inquiéter grandement.

[À l'avenir, j'écrirai davantage sur toute cette affaire d'Alexandrie et sur les tentatives d'Athénagoras de faire expulser le patriarche avec l'aide des États-Unis et de la Grèce].

***

Mémorandum du 4 avril 1951 de F.T. Merrill au Consul général concernant un entretien avec Sa Sainteté le patriarche œcuménique, Athénagoras (source)

... Athénagoras semblait beaucoup plus optimiste quant à ses divers projets visant à rapprocher les églises orthodoxes du Proche-Orient du Phanar à Istanbul, et de l'"Amérique", comme il l'a ajouté. Comme d'habitude, il a longuement parlé de sa conviction que les États-Unis doivent rester au Proche-Orient pendant plusieurs siècles pour remplir la mission qui leura été donnée par Dieu de donner la liberté, la prospérité et le bonheur à tous les peuples, etc...

... Un autre plan, qu'il a dit avoir retourné dans son esprit, était de placer le Mont Athos sous la "bénédiction culturelle" de l'Institut byzantin de Washington. Il ne semblait pas savoir comment il s'y prendrait. Son désir est évidemment d'attirer un soutien financier au monastère et d'ouvrir ses archives, sa bibliothèque, etc. à l'Institut byzantin et à d'autres chercheurs américains.

[Je souligne, car, bien que j'essaie de présenter tout ce matériel de la manière la plus impartiale possible, la déclaration d'Athénagoras sur les États-Unis au Proche-Orient est assez remarquable et semble rester significative jusqu'à aujourd'hui].

***

C'est tout ce que j'ai aujourd'hui, mais il y a beaucoup plus d’autres choses à venir.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après

lundi 10 février 2020

Jean-Claude LARCHET/ Recension: Seÿna Bacot, « Saint Ménas, soldat et martyr. Sa vie, ses miracles, son sanctuaire »



Seÿna Bacot, « Saint Ménas, soldat et martyr. Sa vie, ses miracles, son sanctuaire », Éditions Lis & Parle, Bagnolet, 2020, 112 p. + 1 cahier d’illustrations de 8 p.


Saint Ménas est un saint très vénéré dans l’Église orthodoxe, et aussi un saint majeur de l’Église copte. Soldat et martyr, de nombreux miracles se produisirent auprès de ses reliques peu de temps après sa mort, dans le siècles qui suivirent. Aujourd’hui, il est surtout invoqué pour les oublis et les pertes de mémoire, où son action se révèle d’une très grande efficacité, comme le soulignait encore récemment le regretté père Placide Deseille.


On trouvera un résumé de sa Vie dans le Synaxaire du Père Macaire de Simonos Petra en date du 11 novembre, jour de sa commémoration dans l’Église orthodoxe.


Issu d’une famille originaire de l’ancienne Nicopolis, ville du Delta du Nil, Ménas serait né vers 275 en Phrygie où son père était préfet. Enrôlé dans l’armée romaine sous l’empereur Dioclétien, il fut nommé rapidement chef de la cohorte des Rutiliaques, de la ville de Koutayia. Lorsque Dioclétien édicte de nouvelles règles de persécution des chrétiens, Ménas fit don aux pauvres des biens qu’il avait hérités de ses parents et se retira dans le désert pour y mener une vie d’ermite.


Après cinq années de solitude, il quitta en 296 sa retraite et se rendit à Cothyée, en Phrygie, un jour de grande fête où le peuple était rassemblé dans l’amphithéâtre. Il s’avança dans l’arène pour proclamer publiquement sa foi chrétienne. Le préfet fit amener cet inconnu, lui fit subir un long interrogatoire et après l’avoir torturé, le fit décapiter.


Conformément au souhait du martyr d’être enterré dans son pays, sa dépouille fut chargée sur le dos d’un chameau pour être transportée en Égypte. Près du lac Maréotis (Mariout), à environ 70 km au sud-ouest d’Alexandrie, l’animal s’arrêta et refusa obstinément d’aller plus loin. Les caravaniers y virent un signe du ciel: c’est là que le corps de Ménas fut enseveli.


Quelque temps plus tard, un berger constata que l’un de ses moutons, malade de la gale, avait été guéri après avoir traversé le lieu. Il prit de la terre de cet endroit, y mêla de l’eau et en enduisit tous les agneaux galeux ou atteints d’une autre maladie. Ils guérirent tous ! La nouvelle s’étant répandue dans l’ensemble du pays, la fille de l’empereur byzantin, gravement malade, fit le déplacement jusqu’au lieu de la sépulture miraculeuse et fut elle aussi guérie.


C’est alors que fut bâtie la première église (la “chapelle du tombeau”), dédiée à celui qui fut désormais considéré comme saint Ménas.


Un four de potier fut également construit près de la basilique pour la fabrication de petites fioles en terre cuite servant au transport de l’eau de la source voisine, aux vertus curatives. Elles furent marquées à l’effigie du saint: ”La représentation de Ménas est invariable, précise le site internet du Musée du Louvre sur sa page consacrée aux ampoules à eulogie dont il conserve quelques exemplaires: debout, vêtu de la tunique courte à manches longues maintenue à la taille par un ceinturon, les épaules couvertes de la cape militaire et les pieds chaussés de brodequins lacés. Face au spectateur, il lève les bras en signe de prière, flanqué de deux chameaux agenouillés, dans la symétrie la plus stricte. (…) La fabrication, presque industrielle, des ampoules de saint Ménas marcha bon train aux IVe et Ve siècles : les pèlerins venus des quatre coins de l’Empire achetèrent et disséminèrent cette production.”


Autour du sanctuaire et de la source, des maisons, des thermes et des cimetières furent ensuite implantés, permettant l’installation d’une population locale et le déroulement d’un pèlerinage qui connut son apogée du Ve au VIIe siècle, mais se prolongea jusqu’au XIe siècle au moins. Pour diverses raisons, le sanctuaire déclina, et au XIVe siècle les reliques du saint furent transportées dans un quartier du Vieux-Cire où fut construite une église qui lui fut dédiée. De nos jours cependant, un monastère perpétue la vénération du saint près des ruines de l’ancien sanctuaire.


Ce livre de Seÿna Bacot – diplômée de l’École des Langues et Civilisations du monde Ancien [ELCOA] en égyptien, copte et grec biblique, dont les recherches portent principalement sur des textes documentaires et des textes littéraires coptes – propose d’abord une courte étude qui introduit le lecteur à la vie de saint Ménas, à l’histoire du sanctuaire et du pèlerinage dont il fut l’objet, et à la diffusion des « ampoules à eulogie » fabriquées à l’effigie du saint.


On est un peu déçu par le manque de détails sur la vie du saint, mais ce livre a pour objet principal de présenter douze de ces miracles que les pèlerins racontaient à leur retour et qui nous ont été transmis dans deux manuscrits à l’écriture et à l’ornementation particulièrement soignées. Ils ont été rédigés en langue copte, et six d’entre eux sont traduits ici pour la première fois en français. Ces courts récits décrivent avec précision le quotidien des pèlerins dans un environnement historique et géographique bien défini. La langue et le style de ces textes pleins de vie, mélanges de spontanéité et de sérieux, traduisent fort bien la dévotion simple mais profonde des pèlerins de ce saint lieu.


Deux miracles plus récents, qui ne figurent pas dans ce livre (où sont seulement traités des manuscrits anciens) méritent d’être signalés :


Pendant les troubles qui suivirent la révolution grecque et les sanglantes répressions déclenchées par les Turcs (1826), certains Turcs d’Héraklion en Crète décidèrent de massacrer les chrétiens qui s’étaient rassemblés dans la cathédrale dédiée à saint Ménas pour célébrer la fête de Pâques. Alors qu’ils s’apprêtaient à entrer dans l’église, saint Ménas leur apparut sous l’aspect d’un cavalier redoutable brandissant une épée. Il sema la panique parmi les Turcs et délivra les chrétiens. En signe de reconnaissance, les fidèles d’Héraklion célèbrent chaque année ce miracle le mardi de Pâques.


Plus récemment, pendant les combats qui eurent lieu en Afrique du Nord (1942), les troupes nazies commandées par le général Rommel, en route pour Alexandrie, firent halte près d’un lieu nommé El-Alameïn (déformation arabe du nom de saint Ménas), où se trouvaient les ruines d’une ancienne église qui lui était dédiée. En face des milliers de soldats allemands puissamment armés, se trouvaient de faibles forces alliées, parmi lesquelles figuraient quelques Grecs. L’issue de l’affrontement qui se préparait semblait certaine. Or, la nuit venue, saint Ménas apparut au milieu du camp allemand à la tête d’une caravane de chameaux, exactement comme il était représenté sur une des fresques de l’église. Cette apparition jeta la stupeur, puis la panique parmi les Allemands, et atteignit si fort leur moral que les alliés remportèrent brillamment la victoire. En reconnaissance, on restaura l’église du saint et l’on fonda sur les lieux un petit monastère.


Jean-Claude Larchet

dimanche 9 février 2020

Saints Nouveaux Martyrs et confesseurs de Russie


Tropaire des Saints Nouveaux Martyrs 
et Confesseurs de la terre russe, 
Ton 4

Ô fleurs du pré spirituel de la Russie, qui avez surgi admirablement au temps des amères persécutions, Nouveaux Martyrs et Confesseurs innombrables, vous qui avez souffert la passion : Pontifes, Souverains et Pasteurs, Moines et laïcs, hommes, femmes et enfants, vous qui avez apporté au Christ le bon fruit de votre patience, priez-Le comme votre Divin Semeur afin qu’Il libère Son peuple des athées et des hommes mauvais, afin que s’affermisse l’Église russe par votre sang et vos souffrances pour le Salut de nos âmes.


Kondakion des Saints Nouveaux Martyrs 
et Confesseurs de la terre russe, 
Ton 2

Ô Nouveaux Martyrs qui avez parcouru le chemin terrestre en confessant le Christ, par vos souffrances vous avez acquis de la hardiesse, priez Celui Qui vous a fortifiés, afin qu’à l’heure où l’épreuve viendra sur nous, nous recevions le divin don du courage. Vous êtes un exemple pour ceux qui vénèrent votre exploit spirituel car ni l’affliction, ni le tourment, ni la mort, n’ont pu vous séparer de l’Amour de Dieu.

Marier le physique et le spirituel


Trop de religion, c'est beaucoup trop cérébral.  Pour beaucoup de gens, tout dépend de ce que vous pouvez croire, du nombre de faits que vous pouvez apprendre pour prouver votre point de vue par rapport à celui de quelqu'un d'autre, de la diligence avec laquelle vous plaidez votre cause.  L'entreprise vient essentiellement de l'hémisphère gauche du cerveau: ordonnée, systématique, rationnelle et logique.

Le revers de la médaille est l'anti-intellectualisme américain, qui est également "gaucher", mais d'une manière un peu tordue.   Je soupçonne qu'il y a un lien entre le manque de curiosité intellectuelle et l'insécurité qui vient du fait de ne pas vraiment affirmer, au fond, ce que vous dites croire.  Si vous devez le prouver encore et encore, sans aucune avancé au-delà de votre point de départ, peut-être que quelque chose ne va pas dans votre approche.

Je veux aller au-delà de ces deux points sur la boussole religieuse.  Je cherche un équilibre.  J'ai longtemps été convaincu que l'ancien concept romain "un esprit sain dans un corps sain" est encore aujourd'hui porteur de sagesse pour nous.  Il y a, ou il peut y avoir, une spiritualité musculaire, une physicalité intellectuelle qui vous attend si vous êtes prêt à la poursuivre.  L'esprit et le corps sont liés, et la jointure pour eux pourrait bien être le cœur.

Considérez ceci : depuis des années, les chercheurs en physiologie et en psychologie travaillent avec un concept qui a été étiqueté "flux".  C'est un mot simple qui décrit un processus complexe, à savoir la sensation spirituelle que nous éprouvons lorsque l'ensemble de notre système psychophysique fonctionne au maximum de ses capacités.  Super!  Cela semble prétentieux.  Mais la plupart d'entre nous ont connu cette expérience si nous avons participé à pratiquement n'importe quel exercice physique avec un véritable engagement.  Parfois, nous appelons cela "être dans la zone."

Je fais du vélo sans effort depuis quelques jours et je dis à mon compagnon : "Tu sais, c'est un de ces jours où, si je n'avais pas quelques responsabilités, je dirais simplement, rattrape-moi sur la route à environ mille kilomètres".  Le temps, la route et le rythme : ils travaillent ensemble avec mon corps pour créer une expérience parfaite.  Vous savez qu'à l'intérieur, "il n'y a rien de mieux que ça".

Mon ami bien-aimé, le diacre Michael Sawarynski, de retour à la paroisse de Pennsylvanie, disait, après une Liturgie particulièrement émouvante et spéciale : "Ils étaient tous ici aujourd'hui : les anges, les archanges, toute l'armée céleste - et nous."  Et vous saviez ce qu'il voulait dire ; il y avait un sentiment d'harmonie parfaite dans l'air, comme si le ciel et la terre se touchaient pendant un bref instant.  C'est le flux dans un cadre religieux.

Voici la mise en garde : Je ne suggère pas que nous passions simplement d'une position du cerveau gauche à une position du cerveau droit.   Rappelez-vous que le cerveau droit régit les aspects synthétiques, créatifs, chaotiques et intuitifs de notre pensée.  Nous n'allons pas laisser tomber le côté intellectuel et rationnel de la vie.  Ce n'est pas le flux.

Le flux ne s'obtient pas en passant d'un côté du cerveau à l'autre.  Lorsque vous êtes "dans la zone", lorsque le flux est le nom de l'expérience, les deux côtés du cerveau fonctionnent au mieux.  Vous devenez une personne à part entière parce que droite et gauche, physique et psychique, corps et âme sont réunis dans une expérience harmonieuse.  Vous le savez quand vous l'avez, et je soupçonne que la plupart de mes lecteurs connaissent cette expérience.  C'est un petit bout de paradis sur terre.

Le flux vous apprend que vous pouvez rester vous-même quand vous libérez l'égocentrisme pervers qui nous ronge.  La plénitude est atteinte, curieusement, en s'oubliant soi-même lorsque nous laissons l'expérience du moment nous submerger.  Pour moi, c'est une expérience spirituelle qui prouve l'enseignement de la foi.

Version française  Claude Lopez-Ginisty
d'après