samedi 13 avril 2019

Hiéromartyr du XXe siècle canonisé par l'Église tchécoslovaque: Saint martyr Stanislav Nasadil




L'Église des Terres tchèques et de Slovaquie célébrera la canonisation d'un hiéromartyr du XXe siècle en juin. Le nouveau martyr Stanislav Nasadil, qui a souffert et est mort dans un camp de concentration de Gospić, en Croatie, en 1941, a récemment été ajouté au calendrier de l'Eglise.

La canonisation locale du hiéromartyr aura lieu le 9 juin à la cathédrale de la Dormition et de Saint Jon le Miséricordieux à Košice, en Slovaquie. Le service sera dirigé par Sa Béatitude le Métropolite Rostislav, primat de l'Eglise orthodoxe des Pays tchèques et de Slovaquie, rapporte l'Agence de presse de la Basilique en référence au site de la Cathédrale des Saints Cyrille et Méthode à Prague.

Le nouveau martyr Stanislav sera célébré chaque année le 20 juin, jour de son repos en  martyr.

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Saint Stanislav est né le 20 octobre 1907 dans la ville de Loštice, dans l'ancienne Tchécoslovaquie.

Il a étudié la théologie en Serbie de 1923 à 1928 et a ensuite été prêtre à Lička Jesenica en Croatie. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Père Stanislav a été l'une des milliers de victimes du mouvement séparatiste Oustachi en Croatie.

Il fut arrêté le 17 juin 1941 à Plaški, en Croatie, et tué à coups de marteau dans le camp de Gospić trois jours plus tard. Son corps fut découvert dans une fosse commune dans les grottes de Jadonovo, selon Petr Balcárek de l'Institut d'études chrétiennes byzantines et orientales.

Il a été canonisé par l'Église serbe en 1961. L'Église en Tchécoslovaquie faisait partie de l'Église orthodoxe serbe à l'époque du martyre de Stanislav.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

vendredi 12 avril 2019

Anna Stickles: CONTEXTUALISER L'AUTORITÉ DES CONSEILS ŒCUMÉNIQUES : QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LES COMMENTAIRES DU METROPOLITE HIÉROTHÉOS



Récemment, Son Éminence le Métropolite Hiérothéos de Nafpaktos a fait le commentaire que "tous les autres Patriarcats ne portent le titre que par l'économie et le bon plaisir de Constantinople. En un sens, ce ne sont pas des Églises autocéphales pleines et complètes, car elles existent à la discrétion du Patriarcat de Constantinople et leur existence n'ont jamais été ratifiées par aucun Concile œcuménique".

Cela ne reflète pas exactement la structure d'autorité de l'Église, ni le contexte des conciles œcuméniques. La déclaration du Métropolite suppose que les décisions des conciles œcuméniques sont la plus haute autorité dans l'Église. Le Patriarche de Serbie, cependant, a plus raison d'affirmer dans sa lettre au Patriarche Bartholomée (13 août 2018) que les autocéphalies des Églises sont fondées sur des circonstances historiques et sur l'accord pan-orthodoxe de toutes les Églises, les reconnaissant comme l'autorité principale.

Le Métropolite Hiérothéos ne reconnaît pas qu'un Concile œcuménique n'a pas d'autorité propre. IL reçoit son autorité comme "œcuménique" en vertu du fait que toute l'Église l'accepte comme faisant autorité. Si toute l'Église accepte les autocéphalies actuelles comme authentiques, alors aucun Concile œcuménique n'est nécessaire. Si Constantinople veut changer ou abolir l'ordre actuel, il va à l'encontre d'un accord qui existe déjà. Ainsi, son nouvel ordre sera celui qui ne sera pas substantiel et qui n'existera pas comme "plein" sans l'approbation de toutes les autres Églises. Le Métropolite Hiérothéos inverse les choses et place le "bon plaisir" de Constantinople au-dessus du "bon plaisir" de l'ensemble. Historiquement et ecclésiologiquement, aucune partie de l'Église n'a l'autorité absolue ou le dernier mot, seulement avec l'accord de l'ensemble. Souvent le premier mot d'autorité vient d'un endroit inattendu, quelqu'un qui n'est pas immédiatement responsable (un diacre d'Alexandrie, un évêque d'Ephèse, un moine dans le désert) et puis le final est élaboré avec le temps comme quelque chose de conciliaire. La vie, l'ordre et la vérité de l'Église ne sont pas du ressort d'un seul Patriarcat ni d'un seul Concile. Constantinople a peut-être émis les différents Tomoi, mais ce sont les circonstances historiques et la reconnaissance des autres Églises qui ont pris la décision finale.

J'aimerais souligner qu'il y a deux ecclésiologies différentes qui flottent en ce moment, et que tout le monde n'a pas vraiment examiné les implications ou les sources des points de vue qu'elles défendent, alors il est bon de les mettre davantage en lumière. Le premier point de vue est ce que l'on pourrait appeler la vision institutionnelle politique de l'autorité dans l'Église. La source de ce point de vue est l'exemple du fonctionnement des organisations politiques dans le monde. Par exemple, dans le monde, l'autorité finale appartient à un président et à un congrès, ou à une cour suprême dans le domaine judiciaire, ou encore à un autocrate de quelque sorte. Ce qui est commun à tout cela, c'est que l'autorité finale repose sur un homme ou un groupe d'hommes au sommet d'une sorte de structure d'autorité artificielle.

Le point de vue politique et institutionnel de l'Église postule une telle structure d'autorité. L'autorité repose sur une structure hiérarchique-synodale panorthodoxe particulière, telle qu'un concile œcuménique ou panorthodoxe, ou dans le domaine judiciaire, elle repose sur le Patriarcat de Constantinople, ou dans l'Église catholique, elle repose sur le Pape comme autocrate. Alors que dans une nation, cela reflète la compréhension de soi-même du système juridique d'une nation, l'Église a une compréhension différente d'elle-même.

L'autre ecclésiologie comprend l'Église comme une structure spirituellement centrée sur la Christologie. L'autorité finale n'incombe pas à un évêque suprême, mais à l'esprit de l'Église dans son ensemble, qui est l'esprit du Christ. Cet esprit devient évident au fil du temps au fur et à mesure qu'une lutte se déroule pour se soumettre à la vérité de Qui le Christ est, et de Ses buts, moyens et opérations.

Qu'est-ce que cela signifie dans la vie réelle ? Eh bien, dans l'ordre des choses du monde, la décision d'un organe suprême donné est l'ordre des choses le plus élevé. Si la Cour suprême se réunit et décide de ce que la loi signifie, c'est la fin de l'histoire. Le seul recours est la soumission ou la révolution.

Cependant, l'Église n'a jamais eu de "loi suprême" - pas même les conciles panorthodoxes. Parmi les conciles panorthodoxes convoqués par les empereurs à des occasions spéciales, certains ont été rejetés comme des conciles de brigandage, et d'autres ont été acceptés comme "œcuméniques", c'est-à-dire comme exprimant la vérité universelle de l'Église. Quelle autorité a pris la décision de savoir quel concile accepter et lequel rejeter ? Qui décide quelle est la vérité universelle de l'Église ? Pas le concile lui-même. Pas d'Église locale en particulier. Au contraire, un concile n'a reçu l'autorité comme oecuménique qu'après avoir obtenu l'accord de l'Église dans son ensemble. Cet accord est le fruit d'une démarche organique et non institutionnelle.  Comme le note saint Justin Popovitch, l'Église est un organisme divino-humain, et non une institution humaine.

Il convient également de noter que les décisions d'un Concile œcuménique ne sont pas rendues définitives par les conciles ultérieurs, mais que les conciles ultérieurs ne font que confirmer ce qui est déjà reconnu et accepté.

Le terme "Theotokos" est-il devenu un terme faisant autorité pour la Vierge seulement après avoir été confirmé au concile ? Ou bien était-ce d'abord l'autorité par l'usage traditionnel et l'accord général, et le concile l'a simplement reconnu au milieu de la confusion créée par Nestorius? De même avec les canons. La vie disciplinaire de l'Église n'est pas propagée par les conciles comme une sorte de précédent juridique. La vie disciplinaire de l'Église fait plutôt partie de sa vie pastorale et pratique fondatrice, et les canons disciplinaires sont présentés comme des réponses à des situations historiques particulières afin d'aider à maintenir cette vie droite et en ordre. Contrairement à une cour suprême ou à une décision du Congrès, les Conciles ne sont pas une source de législation, mais plutôt un centre de vérité autour duquel des éclaircissements peuvent être apportés en pleine confusion.

Dans l'Église, il y a de la place pour que le Christ agisse. Il n'y a pas une seule source politique suprême d'autorité pour créer l'ordre, mais plutôt l'ordre du Christ en tant que Logos est la base de la vie de l'Église Son ordre construit dans la création et qui trouve sa plus parfaite expression dans les saints, et qui est une présence active et vivante dans la vie de l'Église. Dans l'Église, cet ordre n'est pas promulgué comme une loi faite par un homme, mais il est reconnu et soumis comme venant du Christ et par le Christ. Il y a une reconnaissance mutuelle du Christ en chacun et en tous - des personnes qui reconnaissent le Christ dans les évêques et qui leur obéissent, et des évêques qui reconnaissent le Christ les uns dans les autres, et de tous qui reconnaissent l'exemple et l'enseignement que le Christ et les saints nous ont laissé sur ce que nous sommes comme Ecclesia.

Les circonstances historiques font aussi partie de l'autorité providentielle de Dieu qui intervient dans l'ordre administratif de l'Église. Constantinople a été élevé au second rang contre la volonté de Rome, mais cet ordre a finalement été accepté comme faisant partie des circonstances historiques. Les différents changements de frontières, la perte et la réinstitution des autocéphalies ont été, dans une large mesure, motivés par les circonstances politiques. L'Église fait ce qu'elle peut pour assurer à la fois la stabilité et la flexibilité afin qu'elle puisse mieux vivre son dessein de sanctifier les peuples parmi lesquels elle demeure. Mais cette compréhension pastorale et spirituelle de l'organisation de l'Église est très différente d'une compréhension politique de son organisation.

L'objectif d'une organisation politique est l'auto-préservation et l'augmentation de son propre pouvoir. Elle s'organise pour promouvoir cet objectif, et cette auto-conservation est comprise en termes de certains pouvoirs matériels, de structures et de ressources. Le but de l'Église est de réaliser la déification de l'humanité et, en fin de compte, de toute la création. Elle s'organise de manière à atteindre cet objectif. Ainsi, une partie de ce qui détermine l'organisation de l'Église est l'économie divine.

L'économie n'est pas simplement une sorte de condescendance de la part d'une autorité à l'égard de ceux qui sont inférieurs. L'économie est plutôt la bonne gestion domestique de Dieu pour réaliser le salut de l'humanité. Elle opère dans le cadre et en dépit de l'évolution de la situation politique. La flexibilité de cette économie est démontrée par la façon dont l'Église russe s'est épanouie spirituellement, même lorsque les tsars ont aboli le Patriarcat en faisant une Église synodale, et elle a continué à produire des saints lorsque les communistes ont aboli toute la structure hiérarchique du pouvoir. Cette économie a fonctionné même sous les manières contre nature des Ottomans de mettre en place et de se débarrasser de divers patriarches. La sainteté y vivait encore et s'y épanouissait. Aucune structure administrative n'est absolue dans la vie de l'Église. Au contraire, il y a toujours un ajustement aux circonstances, bonnes ou mauvaises, dans lesquelles l'Église se trouve. Ce qui est cohérent, ce n'est pas une structure institutionnelle-administrative ou une source d'autorité, mais plutôt un certain mode de vie dans le Christ. C'est le manque de connaissance de cette Voie qui peut causer tant de confusion.


En résumé, nous pouvons dire que les Églises autocéphales actuelles existent à la discrétion et au bon plaisir du Christ. Leur existence a été réalisée sous la providence de Dieu en raison de circonstances historiques. Elles existent selon l'économie de Dieu - selon Sa décision qui est la meilleure façon de témoigner et d'apporter le salut pour ceux qui sont sous Sa garde. 

L'action du Patriarcat de Constantinople a joué un rôle de premier plan dans ce soin. Cependant, les nouvelles Églises autocéphales n'existent pas seulement selon le bon plaisir et la reconnaissance de Constantinople, mais aussi selon le bon plaisir et la reconnaissance mutuelle les unes envers les autres. Ces trois éléments : les circonstances historiques, la reconnaissance mutuelle et le leadership de Constantinople sont à l'origine de la situation actuelle. Si Constantinople retire son approbation, cela n'invalide pas l'existence d'une Église autocéphale, mais met simplement les choses dans une situation confuse comme un tabouret à trois jambes avec une jambe cassée qui n'est plus stable. Un concile n'est pas nécessaire pour approuver ce qui existe déjà et qui fait l'objet d'un accord, et il n'y a aucune contestation à ce sujet. Un concile n'est nécessaire que lorsqu'il y a confusion, et alors le travail du concile est d'identifier et de retenir la source de la confusion, en protégeant le bon ordre et la vérité de l'Église.

Je peux sympathiser avec le Métropolite. Il ne fait aucun doute que Constantinople pourrait faire beaucoup de ravages dans l'Église grecque et c'est peut-être ce que le Métropolite Hiérothéos essaie de dire. Il craint que si son Eglise ne coopère pas, le Patriarcat de Constantinople puisse même décider de révoquer son Tomos. 

Gardons nos frères et sœurs grecs dans la prière, car trop de pression s'exerce sur eux, et espérons aussi que Dieu les guidera. Je suis le premier à admettre que je ne comprends pas les tenants et aboutissants des luttes internes qui s'y déroulent. Mais en fin de compte, le Christ soutiendra ceux qui luttent vers Lui, et il gardera tous ceux qui sont à Lui.

Version française  Claude Lopez-Ginisty
d'après

jeudi 11 avril 2019

Sur Orthodox England: L'Église schismatique en Ukraine tombe dans l'hérésie



En dépit du fait qu'en janvier, la nouvelle " Très Sainte Eglise en Ukraine ", parrainée par le Phanar, s'est vue expressément interdire d'ouvrir des églises en dehors de l'Ukraine, elle a maintenant ouvert une église en Slovénie. 

Son premier culte a eu lieu le 31 mars dans l'église catholique de St Urch près de Ljubljana. Le service a été concélébré par un prêtre catholique, Alesh Tomasevic, et un " prêtre " ukrainien appelé Vasily Kuchirka. 

Pour autant que nous le sachions, c'est la première fois que le groupe ukrainien concélèbre avec des catholiques, bien qu'il ait mentionné l'avoir fait dès sa fondation en janvier de cette année. Bien entendu, cela compromet encore davantage le Patriarcat de Constantinople, jadis respecté aux yeux du monde orthodoxe.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
et

Serge Govoroun : INDULGENCES DANS L'HISTOIRE DE L'ÉGLISE GRECQUE

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En ces temps d'actions délétères du Patriarcat d'Istanbul, et du fait de son comportement de plus en plus papal, il se peut que cette pratique contestable revienne au goût du jour pour renflouer les caisses patriarcales!
Pour les lecteurs désirant une autre étude plus complète (en anglais)  de cette aberration inspirée par Rome, est disponible en ligne sur internet: lancer une recherche avec le titre suivant: 



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Aux XVIe-XVIIIe siècles, l'Église grecque, bien que limitée dans ses contacts avec le monde extérieur jusqu'aux frontières de l'Empire ottoman, subit une grande influence du christianisme occidental - plus grande que l'Église russe. Ici, la propagande catholique travailla plus efficacement, surtout avec la fondation en 1622 de la Sacrée Congrégation de la Propagande de la Foi, car tant les érudits grecs que les théologiens avaient des contacts croissants avec l'Occident et la plupart d'entre eux y étudiaient. Ces facteurs et d'autres conduisirent l'Église grecque en grande partie à subir une métamorphose occidentale, selon l'expression du Père George Florovsky.
Une des manifestations d'une telle métamorphose fut l'introduction de la vente des indulgences chrétiennes dans la pratique de l'Église grecque[1]. Il s'agissait de véritables indulgences : des certificats qui absolvaient les péchés, que n'importe qui pouvait obtenir, souvent pour une certaine somme d'argent. L'absolution accordée par ces documents, selon Christos Yannaras, n'avait aucun rapport avec la participation des fidèles au Mystère de la Pénitence, ni au Mystère de l'Eucharistie[2].

Il est difficile de déterminer quand les Grecs vivant sous le joug turc commencèrent à utiliser des indulgences. Elles étaient assez répandues au XVIe siècle. Au début du XVIIIe siècle, le Patriarche de Jérusalem, Dosithée Notaras, écrit des indulgences selon une tradition ancienne et bien connue. "Nous avons la coutume et l'ancienne tradition, qui est connue de tous, que les très saints Patriarches donnent aux gens de l'Église un certificat pour l'absolution de leurs péchés (Sinhorohartion)"[3].

La pratique des indulgences, qui existait au début officieusement, fut officiellement confirmée par le Concile de Constantinople en 1727. Ce Concile fut appelé en réponse à la propagande latine croissante, qui se répandait principalement en Syrie, en Mésopotamie, en Palestine et en Égypte, et c’était également la suite du Concile de Constantinople de 1722.4] Ce Concile publia "La Confession de Foi"[5], dont le texte fut compilé par le Patriarche de Jérusalem Chrysanthe (+ 1731), et signé par ces patriarches : Païssi II de Constantinople, Sylvestre d'Antioche, et Chrysanthe de Jérusalem, ainsi que les hiérarques situés à cette époque à Constantinople et participant au Concile

Ainsi, dans la 13e clause du document, il est dit : "La puissance du pardon des péchés, que l'Église orientale du Christ appelle "certificats d'absolution" lorsqu'ils sont donnés par écrit, mais par les Latins [id est par les catholiques] "indulgences", est donnée à la Sainte Église par le Christ. Ces certificats d'absolution sont délivrés dans toute l'Église catholique par les quatre très saints Patriarches: Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem"[6].

Comme on le voit dans les deux sélections, du Patriarche Dosithée et du Concile Constantinopolitain, la délivrance des indulgences était liée au pouvoir des Patriarches orthodoxes. L'attribution aux Patriarches (et seulement à eux, comme on peut le voir dans le texte de la "Confession") du pouvoir de pardonner les péchés et de délivrer des certificats spéciaux était une déformation des rudiments de l'ancienne institution de la Pentarchie, qui fut formulée après le IVe Concile œcuménique et subit une crise indubitable à l'époque du gouvernement turc et de la diffusion de l'influence latine. Dans la conscience des Grecs de l'époque, qui s'étaient alors habitués aux stéréotypes occidentaux, le pouvoir des patriarches orthodoxes était en grande partie associé au pouvoir du Pape romain.

Dans leur polémique avec la latinité, les Grecs n'ont pas tant mis en doute le phénomène des indulgences, mais plutôt le fait que les Papes romains s'attribuaient exclusivement à eux-mêmes ce droit de pardonner les péchés.  Ainsi, dans la 13e clause de la confession du Concile, il est dit, "dire que le pouvoir de délivrer (les indulgences) est possédé uniquement par le Pape de Rome, est un pur mensonge"[7].

Il est remarquable que même un théologien et expert de la tradition canonique de l'Église comme le Vénérable Nicodème de la Sainte Montagne ne se soit pas seulement opposé à la pratique des indulgences, mais y ait participé. Ainsi, dans sa lettre à Païssi, évêque de Stagonas, qui vivait alors à Constantinople, datée d'avril 1806, il lui demande d'obtenir un certificat d'absolution au Patriarcat pour un moine "vivant", également appelé Nicodème, et de le lui envoyer. Il lui promet qu'il lui enverra l'argent nécessaire pour acheter le certificat dès qu'il saura combien il en coûtera[8].

Les indulgences comme moyen d'enrichissement ont été condamnées au Concile de Constantinople en 1838. Ce Concile, comme le Concile de l'année 1727, était consacré à l'extermination des dogmes et usages latins. Son thème principal était l'Uniatisme. Une encyclique, publiée par le Concile, fut signée par le Patriarche de Constantinople, Grégoire VI et le Patriarche de Jérusalem, Athanase, ainsi que par onze responsables du Synode Constantinopolitain. Le texte fut également envoyé aux Patriarches absents, Hiérothée d'Alexandrie et Méthode d'Antioche[9].

Dans la neuvième clause de l'encyclique, on condamne "l'usage horrible et inouï d'un usage maléfique, provenant de l'arrogance, par lequel les évêques de Rome utilisent les articles les plus sacrés et les plus impressionnants de la sainte foi chrétienne comme moyen de recueillir des fonds"[10] La seule chose à laquelle cette condamnation s'attaque est la prise d'argent pour la réparation des péchés, même seulement dans les années Jubilaires.
L'existence d'indulgences en soi, une fois de plus, ne fait pas l'objet d'une évaluation théologique nécessaire par un Concile. De même, dans cette encyclique, la pratique de l'Église grecque, analogue à celle condamnée par le Concile, n'est ni mentionnée ni condamnée. En outre, il était difficile, même pour les décisions du Concile, d'éliminer une pratique aussi enracinée dans la population. L'enracinement populaire de cette pratique est attesté par le fait que les "certificats d'absolution" ont duré en Grèce jusqu'au milieu du XXe siècle[11].

Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après

NOTES :
1] Il existe une étude spéciale à ce sujet de Philip Ilios : Sygkhorokhartia : The History, Athènes, vol. 1 (1983) pp. 35-84, vol. 3 (1985), pp. 3-44. Voir également Chr. Yannaras, Orthodoxia kai Dysi sti Neoteri Ellada (L'orthodoxie et l'Occident dans la Grèce des temps les plus récents).

2] Christos Yannaras. Op. cit. 31996, p. 150

3] A. Papadopoulos-Kerameus, Symvolai eis tin istorian tis arkhiepiskopis tou orous Sina (Towards a History of the Archbishopric of Sinan). Saint-Pétersbourg, 1908. p. 133.

4] Pour le texte de l'encyclique publiée par le Concile de 1722, voir I. Karmiris : Ta Dogmatika kai Symvolika mnimeia tis Orthodoxou Katholikis Ekklisias (Les monuments dogmatiques et symboliques de l'Église catholique orthodoxe) Graz, Autriche, 21968, pages 822-859

5]I. Karmiris. Op. cit. 21968, pp. 861-870

6] I. Karmiris. Op.cit, 21968, pp.867-868.

7] I. Karmiris. Op.cit. 21968, p. 868

8] Philip Ilios : Sygchorochartia // Ta istorika, Athènes. Vol. 3 (1985), 22-23.

9] Son texte a été publié dans : I. Karmiris, op. cit. p. 894 à 902.

10] I. Karmiris. Op. cit. p. 898.

Ainsi, par exemple, Philip Ilios produit une indulgence datée de 1955 !

Serge Halimi & Pierre Rimbert: Le plus gros bobard de la fin du XXe siècle

Il y a vingt ans, le 24 mars 1999, treize États membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), dont les États-Unis, la France et l’Allemagne, bombardaient la République fédérale de Yougoslavie. Cette guerre dura soixante-dix-huit jours et se nourrit de bobards médiatiques destinés à aligner l’opinion des populations occidentales sur celle des états-majors. Les Serbes commettent un « génocide », « jouent au football avec des têtes coupées, dépècent des cadavres, arrachent les fœtus des femmes enceintes tuées et les font griller », prétendit le ministre de la défense allemand, le social-démocrate Rudolf Scharping, dont les propos furent repris par les médias ; ils ont tué « de 100 000 à 500 000 personnes » (TF1, 20 avril 1999), incinéré leurs victimes dans des « fourneaux, du genre de ceux utilisés à Auschwitz » (The Daily Mirror, 7 juillet). Une à une, ces fausses informations seront taillées en pièces — mais après la fin du conflit —, notamment par l’enquête du journaliste américain Daniel Pearl (The Wall Street Journal, 31 décembre 1999). Tout comme se dégonflera l’une des plus retentissantes manipulations de la fin du XXe siècle : le plan Potkova (« fer à cheval »), un document censé prouver que les Serbes avaient programmé l’« épuration ethnique »du Kosovo. Sa diffusion par l’Allemagne, en avril 1999, servit de prétexte à l’intensification des bombardements. Loin d’être des internautes paranoïaques, les principaux désinformateurs furent les gouvernements occidentaux, l’OTAN ainsi que les organes de presse les plus respectés (1).

mercredi 10 avril 2019

Staritza Marie Madeleine [Le Beller] Ermite du Sinaï ( +2013)


La très vénérable staritza, Marie Madeleine La Beller, connue dans le monde sous le nom de Marie Madeleine Le Beller, venait de Paris et elle alla en pèlerinage en Terre Sainte et fut baptisée chrétienne orthodoxe en 1986 au Jourdain, quand elle avait quarante ans. Là, elle pria saint Jean Climaque, pour qu'il lui montre le chemin de son salut et le lieu de sa vie solitaire de dévouement total à Dieu. Elle se rendit dans le désert du Sinaï, et vécut près de la grotte de saint Jean Climaque dans la vallée de Tholas (Wadi Et-Tlah) à environ 8 km du monastère Sainte Catherine au pied du mont Sinaï (à environ 100 minutes de marche du monastère).

Pendant les six premiers mois au Sinaï, Marie-Madeleine dormit dehors parmi les énormes rochers et les pierres, n'ayant qu'un sac de couchage, avec pour seuls compagnons, des scorpions et des serpents venimeux. Beaucoup la considéraient comme une femme folle et délirante. Elle avait vendu sa maison à Paris et acheté un terrain à un bédouin juste en dessous de la grotte de saint Jean-Climaque. Il y avait déjà un caroubier et un puits. Elle construisit cinq cellules, une petite chapelle sur le rocher, planta des oliviers et quelques pommiers, une vigne, un jardin, et construisit une petite citerne. Elle construisit aussi un mur tout autour. En ce lieu, Marie-Madeleine mena une vie simple, s'occupant de son jardin, fabriquant des chapelets de prière, et plus tard dans sa vie, elle s'occupa à faire des sculptures sur bois qu'elle utilisait pour décorer d'icônes sa chapelle. Au début, elle allait au monastère tous les dimanches, mais plus tard, elle y allait tous les quinze jours et les grands jours de fête pour recevoir la Sainte Communion.


Quelques pères du monastère de Sainte Catherine eurent pitié d'elle et la protégèrent, mais beaucoup la rejetèrent et lui rendirent la vie difficile. Un jour, ils interdirent au Père Pavlos d'accepter sa confession et ne lui permirent pas d'avoir l'hospitalité gratuite au foyer pour femmes. Elle avait une foi profonde et se souvenait de la bénédiction d'être là qu'elle avait reçue du staretz Sophrony, de saint Porphyrios et de Matoushka Loubouska la folle-en-Christ de Saint Petersbourg. Il semble que les Pères qui ne l'aimaient pas pensaient qu'elle ne devait pas vivre seule dans le désert, et qu'elle aurait dû rester au monastère féminin de Faran, où elle aurait dû d'abord vivre au moins un an et demi en obéissance. Saint Païssios l'Athonite, lors de sa dernière visite au Sinaï, lorsqu'il visita le monastère de Faran, donna à la moniale Marie-Madeleine sa bénédiction pour vivre dans le désert après l'avoir examinée et avoir béni sa règle de prière.


Elle allait à Jérusalem toutes les semaines saintes et les semaines lumineuses, puis retournait dans sa cellule du Sinaï. Après la Pâque de 2009, elle ne se rendit plus à Jérusalem.

Le 18 novembre 2012, un dimanche, elle se rendit en Crète pour être examinée à l'hôpital Venizelos, et on lui diagnostiqua un cancer avancé de l'intestin.

De là, elle se rendit à Moscou où elle connut l'évêque qui supervisait l'hôpital de l'Église russe. Là, ils firent des examens médicaux prolongés et lui demandèrent de subir une chirurgie et une chimiothérapie dans le plus grand centre médical contre le cancer en Russie. Mais elle n'accepta pas, désirant mourir dans sa skite bien-aimée. Elle se rendit à l'ermitage de Saint Séraphim de Sarov, se lava à la source [miraculeuse du saint], et prit un grand courage.



Elle retourna au Sinaï via l'Italie, où elle visita l'église Saint-Nicolas à Bari, où elle rencontra une femme russe nommée Euphrosyne, à qui elle demanda de s'occuper d'elle au Sinaï. Euphrosyne répondit positivement et l'accompagna au Sinaï, où elle s'occupa gracieusement de la staritza jusqu'à la fin. Euphrosyne était un don de Dieu parce qu'elle ne parlait que le russe, que Marie parlait et comprenait à peine. Mais elles eurent une excellente coopération et elle fut une bonne gardienne pour elle (pendant une dizaine de mois), gagnant l'amour et le respect des Pères.



Après Pâques de 2013, Marie pouvait à peine bouger, encore moins aller au monastère, mais elle portait la croix de sa maladie douloureuse avec beaucoup de courage et de patience, sans assistance médicale ni soins hospitaliers.

Le 12 décembre 2013, un jeudi, à 13 heures, la Sœur Marie reposa dans le Seigneur dans sa cellule, près de la grotte de saint Jean Climaque. Le Père Pavlos du Sinaï se précipita vers elle et servit une Divine Liturgie dans sa skite pour la communier avant son bienheureux repos en Christ.



Le lendemain, après que le Père Pavlos eut servi une autre Divine Liturgie, ils firent amener son corps à l'hôpital local pour confirmer sa mort. Elle y resta en chambre froide jusqu'à la délivrance d'un permis d'inhumation par le consulat de France. Puis une chose étrange se produisit, qui suscita l'admiration de ceux qui étaient là. Une tempête de neige s'abattit couvrant la région sous la neige blanche. Le monastère envoya donc quatorze ouvriers, tous chrétiens coptes, pour transporter son corps sur le terrain accidenté au milieu d'un blizzard jusqu'à sa skite. Bien qu'il faille deux heures pour atteindre sa skite depuis l'autoroute (ce qui, dans des conditions normales, prendrait une heure), lorsqu'ils soulevèrent sa relique sacrée, il ne leur a fallu que 45 minutes pour parcourir la même distance, et un flocon de neige ne les toucha même jamais. Lorsque son corps fut placé dans la voiture, quelques minutes plus tard, la tempête de neige recommença.



La permission de l'enterrer fut donnée dans la nuit du 17 décembre 2013. Elle fut enterrée le lendemain, un mercredi, au cimetière du monastère féminin du prophète Moïse à Faran, selon la volonté des Pères du monastère de Sainte Catherine, même si son désir était d'être enterrée à sa skite. Personne qui lui était cher ou proche d'elle np'assista à son ensevelissement si ce n'est
Euphrosyne, qui l'avait servie avec beaucoup d'abnégation. Une obstétricienne allemande qu'elle connaissait changea ses vêtements pour l'enterrement et resta debout toute la nuit pour lire le Psautier sur son corps, mais elle partit pour Jérusalem avant les funérailles.

L'archevêque Damianos du Sinaï et les hiéromoines Michael et Eugenios célébrèrent les funérailles, avec quatre moniales du monastère de Faran.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Où l'on voit tout le sérieux des actions désastreuses du "patriarche de Constantinople en Ukraine!!!



Texte sur orthodoxie.com

Une lettre ouverte du métropolite de Belgorod et Oboïansk Joasaph (nouvelle Église autocéphale d’Ukraine [non canonique!]) sous le titre « Je ne peux me taire ! » a été publiée sur le site officiel du « Patriarcat de Kiev » avec la bénédiction du « patriarche d’honneur » Philarète (Denisenko). Le correspondant du site « Credo.Press » considère que le contenu très radical de ce texte, publié précédemment sur le blog du métropolite, a été perçu dans la nouvelle Église autocéphale comme la manifestation du passage du « patriarche » Philarète à « l’opposition » et même comme le choix d’une position politique dans le contexte des élections présidentielles en Ukraine. Le métropolite Joasaph commence son appel en exprimant « le poids insupportable qui, depuis deux mois déjà, consume et ronge » son âme. 

Selon lui, « on commet manifestement des iniquités » dans la nouvelle Église d’Ukraine. Le métropolite Joasaph, ancien membre permanent du Synode du « Patriarcat de Kiev », écrit que « sous nos yeux, avec notre participation involontaire, s’est produit un coup d’État » au cours duquel « on a changé par la tromperie non seulement le Primat de l’Église, mais aussi l’Église elle-même qui a été dirigée sur un faux chemin ». Le métropolite critique le fait de la préparation même de l’octroi du Tomos d’autocéphalie qui « a été mené dans une sorte de campagne secrète dans l’entourage du patriarche – le métropolite Épiphane, les archevêques Eustrate et Agapit. Tout ce qui s’est produit était présenté comme des semi-rumeurs, des semi-hypothèses fragmentaires, personne ne connaissait exactement la situation. Il est vrai que déjà alors « la presse ennemie » avait écrit que le jeune entourage du patriarche avait un plan secret d’éloigner celui-ci de la direction de l’Église, mais personne ne l’a cru ». 

L’interdiction au patriarche Philarète de présenter sa candidature aux élections du primat de la nouvelle Église, selon le métropolite Joasaph, contredit les canons du fait « que tous les évêques ont le droit d’être élus ». D’après le métropolite Joasaph, l’accord d’accepter le métropolite Épiphane par le « patriarche » est expliqué par les garanties reçues, selon lesquelles « ils -– le patriarche Philarète et le métropolite Épiphane dirigeraient ensemble l’Église ». Le métropolite Joasaph considère aussi l’adoption des statuts de la nouvelle Église comme non canonique : « on ne les avait pas vu une seule fois, nous n’avions entendu que des bruits de la part de l’archevêque Eustrate, des fragments d’informations venus d’internet. Le projet de texte tel qu’il a été adopté, nous l’avons reçu deux heures avant le vote ». Le métropolite s’arrête sur le problème des paroisses de la nouvelle Église dans la diaspora qui, conformément au Tomos et aux statuts, doivent être transmises à la juridiction du patriarcat de Constantinople. « D’après les bruits, témoigne l’auteur de l’appel, venant des participants aux négociations (le métropolite Épiphane et l’archevêque Eustrate), la question de la diaspora a été résolue de la façon suivante : bien que cette exigence figure dans les statuts, elle ne sera pas traduite dans les faits, la diaspora restera dans tous ses droits dans l’Église ». Ensuite, le métropolite Joasaph critique la composition et l’activité du Synode, qui a été constitué assez arbitrairement, à la discrétion du primat, ce qui amène « à écarter le principe de conciliarité ». Le métropolite est troublé par la division interne au sein de la nouvelle Église, étant donné que la partie minoritaire des hiérarques, lors des célébrations solennelles, concélèbre avec le « patriarche » Philarète en la cathédrale Saint-Vladimir, tandis que la majorité concélèbre avec le métropolite Épiphane au monastère Saint-Michel. C’est en raison de son désaccord que le patriarche était absent à l’intronisation du métropolite Épiphane en tant que primat. Le métropolite Joasaph expose ses impressions de la première session du Synode de la nouvelle structure : « Nul ne connaissait sa composition. La liste n’était ni annoncée, ni imprimée. On a demandé, on a questionné, on était perplexe. J’ignorais moi-même si je resterai dans le Synode. On ne pouvait demander à personne. J’ai décidé d’aller au début de la session du Synode et de questionner le primat lui-même sur mon cas personnel. 

Le Synode a été fixé à 11h. Je suis arrivé en avance et la session avait déjà commencé. Et je fus involontairement témoins de cette première session du Synode. J’ai tout entendu. Dire que j’étais choqué par ce qui se passait au Synode est un euphémisme !!! » L’auteur de l’appel se concentre sur la question de la nomination du patriarche Philarète comme administrateur des ex-paroisses du Patriarcat de Kiev dans cette ville : « On a commencé à tout simplement se moquer du vieux métropolite ! Le métropolite Syméon et l’évêque Germain se sont distingués, le métropolite Macaire y a participé. Sur un ton irrespectueux pour ne pas dire comme des mufles, ils ont exigé d’enlever au patriarche le droit d’administrer les paroisses de Kiev. Les évêques de l’ex-Patriarcat de Kiev ont gardé le silence, donnant ainsi la possibilité de se moquer du patriarche. Vous avez lu dans les protocoles du Synode les mots « le patriarche d’honneur Philarète est confirmé dans ses fonctions d’administrateur des paroisses de Kiev ». En réalité, il a été confirmé seulement après avoir déclaré qu’il voulait quitter la séance du Synode et s’adresser à l’opinion publique par une déclaration ». 

L’appel se termine par des accusations à l’endroit des jeunes hiérarques de la nouvelle Église qui, selon le métropolite Joasaph, ont trahi leur patriarche et sont coupables du péché de mensonge. Plusieurs évêques de l’ex-Patriarcat de Kiev ont émis des critiques au sujet de la position du métropolite Joasaph. En partie, un autre hiérarque russe de la nouvelle structure, le métropolite de Bogorodsk Adrien (Starine) considère que le métropolite avait été vexé en raison du fait que pendant 20 ans il avait été membre permanent du Synode, avait reçu la fonction d’exarque en Russie de la nouvelle structure et était habitué à un statut élevé dans l’Église. Le métropolite d’Ivano Frankivsk Joasaph (Vasilikiv) a exprimé la préoccupation que la polémique publique autour du statut de la nouvelle Église et de sa direction risquait de provoquer « le rappel du Tomos ». Le porte-parole de la nouvelle Église, l’archevêque Eustrate (Zorya), dans son blog, sans mentionner expressément le nom de Philarète et du métropolite Joasaph, constate le début d’une campagne « de discréditation de tous les gens et institutions liés à l’octroi et à la réalisation » du Tomos. Le but de cette campagne est considéré par l’archevêque comme destiné à contraindre le patriarche de Constantinople « à annuler sa décision concernant l’Ukraine », en rendant la résolution ultérieure de « la question ukrainienne » dépendante de la position du Patriarcat de Moscou dans le cadre « du consensus panorthodoxe ». En outre, écrit Eustrate, « la dévalorisation de la signification du Tomos est déjà utilisée et sera par la suite utilisé comme un élément du combat politique ».

Communiqué de l’Assemblée des évêques de l’Église orthodoxe de Pologne au sujet de l’autocéphalie ukrainienne



Communiqué de l’Assemblée des évêques de l’Église orthodoxe de Pologne au sujet de l’autocéphalie ukrainienne


« La sainte Assemblée des évêques de l’Église orthodoxe de Pologne a pris connaissance de la correspondance concernant l’autocéphalie en Ukraine, reçue de : Constantinople, Alexandrie, Russie, Serbie, Roumanie, Albanie, Bulgarie, République Tchèque, Ukraine, de l’Organisation de l’ONU pour les droits de l’homme, ainsi que des lettres de groupes de fidèles de l’Église orthodoxe autocéphale de Pologne.

Il a été décidé que :

La sainte Assemblée des évêques de l’Église orthodoxe autocéphale de Pologne maintient sa position concernant la situation ecclésiale (l’autocéphalie) en Ukraine, exprimée dans les résolutions du 9 mai 2018, n°340 p. 3 et du 15 novembre 2018, n°341 p. 9, et dans les lettres de Mgr Sawa, métropolite orthodoxe de Varsovie et de toute la Pologne, envoyées au nom de la sainte Assemblée des évêques aux fidèles intéressés par cette question. Il était dit que :

« Au nom de la sainte Assemblée des évêques de l’Église orthodoxe autocéphale de Pologne, en réponse à votre lettre au sujet de l’autocéphalie de l’Église orthodoxe en Ukraine, je vous informe sans ambiguïté que l’Église orthodoxe autocéphale de Pologne était et est en faveur de l’octroi de l’entière indépendance – l’autocéphalie – de l’Église orthodoxe en Ukraine.

Je l’ai dit en tant que chef d’Église lors de mon intervention en Crète [au saint et grand Concile de 2016, ndt]. La position de l’Église orthodoxe autocéphale de Pologne est claire et conforme à l’enseignement de l’Église orthodoxe. L’autocéphalie de l’Église en Ukraine doit être donnée en fonction des normes dogmatiques et canoniques de toute l’Église, et non d’un groupe de schismatiques. Ceux qui ont quitté l’Église, dépourvus d’ordination sacerdotale, ne peuvent représenter un organisme ecclésial sain. C’est un acte non canonique, violant l’unité eucharistique et inter-orthodoxe. C’est ce que doivent savoir les auteurs des lettres [qui nous sont parvenues]».

L’Église orthodoxe autocéphale de Pologne collabore avec les autres Églises orthodoxes, au niveau international pour régulariser la vie ecclésiale en Ukraine. Elle prie dans cette intention et y appelle tous ceux à qui est cher l’amour de l’unité de l’orthodoxie et la paix entre les hommes, afin que Dieu accorde cette unité au pays frère d’Ukraine. À tous ceux qui se soucient de la vie ecclésiale, je demande, au nom de la sainte Assemblée des évêques, de renforcer la prière pour l’intention susmentionnée, + Métropolite Sawa, 14 mars 2019 ». En outre, en raison de la fausse information au sujet des sacres épiscopaux reçus par les ex-évêques au Portugal, la sainte Assemblée épiscopale déclare que les évêques ayant reçu leur ordination épiscopale des mains des évêques vieux-calendaristes de Grèce, et qui ont été accueillis sur leur demande, dans notre Église, y ont été reçus par une nouvelle ordination effectuée par les hiérarques de l’Église orthodoxe autocéphale de Pologne. De cette façon l’ordre dogmatique et canonique de l’Église orthodoxe a été préservé.

C’est ainsi que :

– S.E. Gabriel, évêque de Lisbonne, a reçu l’ordination épiscopale le 28 août 1990 à Varsovie (consécrateurs : Son Éminence le métropolite Basile, Leurs Excellences : l’archevêque Sawa, l’archevêque Simon, l’archevêque Jérémie, l’évêque Abel)

– S.E. Théodore, évêque d’Evora, a reçu l’ordination épiscopale le 11 novembre 1990 à Lisbonne (consécrateurs : Leurs Excellences l’archevêque Sawa, l’archevêque Simon, le métropolite Gabriel).

– S.E. Jan, évêque de Silves a reçu l’ordination épiscopale le 14 décembre 1997 à Lisbonne (consécrateurs : le métropolite Gabriel, l’archevêque Simon, l’évêque Théodore).

NDLR : l’évêque Gabriel de Lisbonne (Eduardo Henrique Pinto da Rocha, +1997) avait été reçu en 1990 au sein de l’Église orthodoxe de Pologne après avoir été membre du groupe vieux-calendariste grec de l’archevêque Auxence (Pastras, +1994), duquel il avait reçu un premier sacre épiscopal, reconnu non valide par l’Église orthodoxe de Pologne. Les précisions données ici par l’Église orthodoxe de Pologne sont une réponse aux allégations des partisans de l’autocéphalie selon lesquels différentes Églises locales ont reçu des évêques issus de groupes non canoniques sans réitération de leurs ordinations).

mardi 9 avril 2019

Père John Breck:Dormition & Assomption


Dans notre tradition orthodoxe nous prenons généralement bien soin de distinguer entre la "Dormition " de la Mère de Dieu et son "Assomption" au ciel. Le premier terme, à notre avis, est bien orthodoxe, tandis que le second nous apparaît comme une désignation purement occidentale, dérivée d'un "malentendu" catholique sur la signification de cette fête, universellement célébrée le 15 août.

Il est vrai que certaines interprétations très sincères, mais erronées de la mort de [la Vierge] Marie et de son exaltation se trouvent aussi bien dans les écrits spirituels catholiques et dans les icônes contemporaines de l'Ouest: une tendance, par exemple, à exalter la Sainte Vierge à un niveau de "divinité" qui efface de manière efficace la distinction essentielle et absolue entre la vie humaine et divine. Les théologiens orthodoxes insistent pour que la "déification" (theosis) connue par la Mère de Dieu, n'engage en aucune façon une transformation ontologique de son être, de l'humanité créée à la divinité. Elle a été et restera toujours une créature humaine: la plus exaltée de toutes celles qui portent l'image de Dieu, mais toujours un être humain, dont la gloire apparaît dans son humilité, dans son simple désir d'accepter "que cela soit", selon la volonté divine.

Les icônes orthodoxes traditionnelles de son «endormissement», par conséquent, se concentrent particulièrement sur sa mort et mise au tombeau. Les disciples, "rassemblés de toutes les extrémités de la terre", l'entourent, dans une attitude de douleur et de lamentation. Derrière le cercueil sur lequel elle est posée, là est son Fils glorifié, tenant dans ses bras un enfant vêtu d'habits blancs radieux, image de l'âme de Sa mère. C'est un thème inverse. Sur tous les iconastases orthodoxes, on trouve une image sacrée de la Mère de Dieu, tenant dans ses bras son enfant nouveau-né, l'Homme-Dieu qui "a pris chair" pour sauver et sanctifier un monde déchu, pécheur, brisé. Ici, dans l'icône de la Dormition, le Fils tient dans Ses bras et offre à ce monde Sa sainte Mère, comme elle le faisait avec Lui à l'époque de sa Nativité. Lors de sa dormition, il reçoit son âme, sa vie, afin de l'exalter en Lui et avec Lui, pour la gloire, la beauté et la joie de la vie éternelle.

Dans de nombreuses icônes orthodoxes, toutefois, cette image primaire est complétée par une autre: la représentation de la Mère de Dieu montant au Ciel, accompagnée par une foule d'anges. Nous trouvons ce double motif notamment dans les icônes post-byzantines telles que la Koimesis (Dormition) du monastère de Koutloumousiou au Mont Athos, datée d'environ 1657. (Vladimir Lossky note d'autres représentations semblables dans son commentaire sur la Dormition, in Meaning of Icons (Signification des Icônes), Boston, 1969, p. 215.) Doit-on en conclure que ce double thème, qui représente à la fois la Dormition et l'Assomption de la Mère de Dieu, est simplement le résultat de l'influence occidentale?

En fait, si nous l'étiquetons "Assomption" ou "Ascension" de la Mère de Dieu, cette image complète celle de la Koimesis d'une manière qui est en parfait accord avec la théologie orthodoxe. Tout comme le Christ est mort et reposait dans la tombe, pour être ressuscité et élevé au ciel, ainsi Sa sainte Mère "s'endort", pour être élevée par son Fils et exaltée avec Lui dans le Ciel. Par Sa Résurrection et l'Ascension, il fournit les moyens par lequels la "Mère de la Vie", avec tous ceux qui demeurent en Lui, peuvent être ressuscités des la morts et élevés à la Vie transcendante.

Si nous comprenons "l'Assomption" de la Mère de Dieu à la lumière de l'Ascension de son divin Fils, nous pourrons alors apprécier la double représentation de la Dormition et de l'Ascension que l'on retrouve dans nombres de nos icônes orthodoxes. La Sainte Mère de Dieu, la Théotokos ou "Génitrice de Dieu", est le premier des fruits de l'accomplissement eschatologique qui amèneront toute l'œuvre créatrice et rédemptrice de Dieu à sa fin. Elle est le vaisseau dans lequel la Deuxième Personne de la Sainte Trinité "a pris chair" et est devenu (un) homme, afin de donner le salut à la race humaine. Son sein, "plus vaste que les cieux", contenait l'Incirconscrit. Il a pris Son existence humaine d'elle, et elle l'a accompagné avec amour et prière pendant toute la durée de son ministère terrestre, jusques au pied même de la Croix. Elle partagea pleinement Sa souffrance, supportant Sa crucifixion et Sa mort dans les profondeurs de son âme. Par conséquent, elle est l'image parfaite de l'Eglise, la communion éternelle de tous ceux qui vivent et meurent dans le Christ.

Ils seront, comme elle, ressuscités en Lui et exaltés à la même gloire à laquelle il a élevé et transformé leur nature humaine déchue. Elle est ainsi un précurseur de leur salut, une image prophétique de la vie glorifiée qui attend tous ceux qui portent le Christ dans les profondeurs intérieures de leur être, comme elle L'a porté au plus profond de ses entrailles.

Pourtant, elle est plus que cela. Elle n'est pas seulement un modèle de la communauté de destin du peuple chrétien. Elle l'accompagne également à toutes les étapes de son voyage, lui offrant , nous offrant, sa prière et son amour incessants. Dans sa Dormition et dans son élévation au ciel, elle "n'abandonne pas le monde", mais reste, comme les hymnes liturgiques de la fête le proclament, la Mère de la Vie, qui est "constante dans la prière" et "notre ferme espérance, "qui, par ses prières" délivre nos âmes de la mort! "



Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

N.B. : Le dictionnaire Slavon/Grec/Latin du XVIIIème siècle (Leksikon treïa Zîtchnii/ Lexikon Triglotton/ Dictionarium Triolingue) publié à Moscou en 1707, traduit le terme slave Ouspénié ou grec Koimisis, non par le latin Assumptio, mais par le terme Obdormitio, qui semble oublié à présent. (C. L.-G.)

Métropolite Kallistos [Ware]à propos de l'Ukraine et de Constantinople



Dans une interview accordée à la chaîne de télévision ukrainienne "Inter", le métropolite Kallistos de Diokleia (Patriarcat de Constantinople) a déclaré : 

"La situation actuelle en Ukraine, à mon avis, est vraiment très grave et ce ne sont pas seulement les chrétiens orthodoxes en Ukraine qui sont concernés. 

Cette situation concerne toute l'Église orthodoxe. Nous savons qu'il existe aujourd'hui un schisme entre le Patriarcat de Constantinople et le Patriarcat de Moscou, qui ne sont pas en communion. 
Le Patriarcat de Constantinople a accordé, comme il l'affirme lui-même, l'autocéphalie à l'Église orthodoxe ukrainienne, mais cela n'est reconnu ni par Moscou ni par aucune autre Église orthodoxe

Personne n'a soutenu le Patriarcat de Constantinople. Maintenant, le Patriarcat de Moscou a cessé de communier avec le Patriarcat de Constantinople. Nous, du côté du Patriarcat de Constantinople, nous n'avons rompu la communion eucharistique avec personne, mais la situation est très grave. De plus, à mon avis, et non de celui du Patriarcat, tout en respectant profondément le Patriarche Bartholomée, je suis en désaccord avec sa décision. 

Il est clair que depuis plus de 300 ans l'Ukraine fait partie de l'Eglise russe, c'est un fait historique, nous ne pouvons pas changer le passé. C'est pourquoi je pense que le Patriarcat de Constantinople a eu tort d'intervenir dans les affaires du territoire qui fait partie de l'Église russe. 

Je suis très préoccupé par l'usage de la force et je pense que nous ne parviendrons pas à une solution par la violence ou l'oppression. Pour moi, ce serait un désastre et un grand scandale si, par exemple, les moines de la Laure des Grottes de Kiev ou de Potchaev étaient chassés avec violence. 

J'espère et je prie pour que cela n'arrive pas. 

Quel est le chemin vers une solution ? 

Les deux parties, le Patriarcat de Constantinople et le Patriarcat de Moscou, ont adopté une position diamétralement opposée : comment trouver un compromis ? Je n'ai pas une idée claire de la meilleure façon de parvenir à une solution, mais il pourrait s'agir d'une discussion sur les problèmes de l'Ukraine lors d'une réunion pan-orthodoxe des primats. 

On pourrait même convoquer un nouveau Saint et Grand Concile comme celui qui s'est tenu en Crète en 2016 et auquel, malheureusement, l'Eglise russe n'était pas représentée. 

Mais nous pourrions convoquer à nouveau le Concile et j'espère que, par la grâce de Dieu, elle y participera. Nous appelons l'Église orthodoxe "conciliaire" (sobornaya), et le "sobornost" est le respect de l'autre, la capacité à écouter l'autre. Écoutons-nous donc les uns les autres, avec honnêteté et vérité, mais avec l'amour du Christ".

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après