dimanche 23 avril 2017

FEUILLETS LITURGIQUES DE LA CATHÉDRALE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX

10/23 avril
  Dimanche de l’apôtre Thomas « Antipâques »

Saints Térence, Pompée, Africain, Maxime, Zenon, Alexandre, Théodore et leurs 33 compagnons, martyrs à Carthage (249-251) ; saints Jacques, prêtre, Azadan et Audice, diacres, martyrs en Perse (vers 380) ; saint Pallade, évêque d'Auxerre (vers 658) ; saint Grégoire V, Patriarche de Constantinople, néo-martyr grec (1821) ; saints néo-martyrs de Russie : Phlégonte (Ponguilsky), prêtre (1938) ; Démètre (Vdovine), martyr (1942).
Lectures : Actes V, 12 - 20 / Jn. XX, 19-31


AU SUJET DU DIMANCHE DE THOMAS

N
ous commémorons ce dimanche l’apparition du Seigneur aux apôtres, après Sa Résurrection, et le toucher de Ses plaies par l’apôtre Thomas. L’apparition du Seigneur ressuscité à l’apôtre Thomas et aux onze autres disciples est fixée le premier jour suivant la semaine pascale, parce que les circonstances de cette apparition constituent une preuve incontestable de la Résurrection du tombeau, « comme de la chambre nuptiale, avec Sa chair immaculée ». Le huitième jour après Pâques, comme achèvement des solennités de la Semaine Lumineuse, constituait depuis les temps anciens une solennité particulière. Le dimanche de Thomas est également appelé « antipâques », ce qui signifie « au lieu de Pâques », parce que l’Église a transféré à ce dimanche une partie des antiques matines pascales, qui furent remplacées par celles de St Jean Damascène que nous célébrons de nos jours. Depuis ce jour commence le cycle des dimanches et des semaines de toute l’année. Selon l’usage de l’Église Russe, on commémore les défunts le mardi suivant le dimanche de Thomas. La raison en est que le typicon autorise de nouveau, la commémoraison des défunts à partir du lundi de Thomas. C’est ainsi que les croyants se rendent sur la tombe de leurs proches pour annoncer la joyeuse nouvelle de la Résurrection du Christ. De là vient l’appellation de ce jour « radonitsa » en russe (radost’ = la joie). La commémoraison des défunts après Pâques remonte aux temps les plus anciens. St Ambroise de Milan, dans l’une de ses homélies dit : « Il est digne et juste, après les solennités pascales que nous avons célébrées, de partager notre joie avec les saints martyrs, et de leur annoncer la joie de la Résurrection du Christ, à eux en tant que participants aux souffrances du Seigneur ». Ces paroles de St Ambroise, bien que se rapportant aux martyrs, peuvent confirmer notre usage de commémorer les défunts après Pâques, eu égard au fait que, dans les temps anciens, on enterrait les défunts parmi les martyrs.

Tropaire, ton 5
Хpистócъ вocкpéce изъ ме́ртвыхъ, cме́ртію cме́рть попра́въ и су́щымъ во гробѣ́xъ живо́тъ дарова́въ.
Le Christ est ressuscité des morts, par Sa mort Il a vaincu la mort, et à ceux qui sont dans les tombeaux, Il a donné la vie.

Tropaire du dimanche de Thomas, ton 7
Запеча́тану гбу, живо́тъ отъ гбa возсія́лъ ecи́ Xpисте́ Бо́же, и двépeмъ заключе́ннымъ, ученико́мъ предста́лъ ecи́, вcѣ́xъ вocкpecéнie : ду́хъ пра́вый тѣ́ми обновля́я на́мъ, по вели́цѣй Твое́й ми́лости.
Le sépulcre étant scellé, Toi qui es la Vie, ô Christ Dieu, Tu t’es levé du tombeau, et les portes étant fermées, Toi, la Résurrection de tous, Tu t’es présenté devant Tes disciples, par eux renouvelant en nous un esprit droit, dans Ta grande miséricorde.
Kondakion du dimanche de Thomas, ton 8
Любопы́тною десни́цею, жиз-нопода́тельная Tвоя́ péбра Фомá испыта́, Xpисте́ Бо́же : coзаключе́ннымъ бо двépeмъ я́ко вше́лъ ecи́, съ про́чими апо́столы вопiя́ше Тебѣ́ : Го́сподь еси́ и Бо́гъ мо́й.
Voulant s’assurer de Ta Résurrection, Thomas scruta de sa droite curieuse Ton côté vivifiant, ô Christ Dieu ; aussi, lorsque Tu entras, les portes étant fermées, il Te clama avec les autres apôtres : Tu es mon Seigneur et mon Dieu.
Au lieu de « il est digne en vérité » ton 1:
А́нгелъ вопiя́ше Благода́тнѣй: Чи́стая Дѣ́во, ра́дуйся, и па́ки реку́: Ра́дуйся! Тво́й Сы́нъ воскре́се тридне́венъ отъ гро́ба и ме́ртвыя воздви́гнувый: лю́дiе веселит́еся. Свѣти́ся, свѣти́ся Но́вый Iерусали́ме, сла́ва бо Госпо́дня на Тебѣ́ возсiя́. Лику́й ны́нѣ и весели́ся, Сiо́не. Ты́ же, Чи́стая, красу́йся, Богоро́дице, о воста́нiи Рождества́ Твоего́.
L’Ange dit à la Pleine de grâce : Vierge pure, réjouis-toi, et je te dis à nouveau : réjouis-toi ! Car ton Fils est ressuscité du Tombeau le troisième jour et a relevé les morts, peuples réjouissez-vous. Resplendis, resplendis, Nouvelle Jérusalem, car la gloire du Seigneur a brillé sur toi. Danse et crie de joie, Sion, et toi, Pure Mère de Dieu, réjouis-toi de la Résurrection de Ton Fils.

VIE DU hiÉromartyr GRÉGOIRE V, patriarche de CONSTANTINOPLE[1]  

Né en 1745 au sein d’une famille pauvre de Dimitsane, dans le Péloponnèse, saint Grégoire reçut sa première éducation de son oncle hiéromoine, puis alla s’installer avec lui à Smyrne. Devenu moine au monastère de l’île des Strophades, il compléta ses études théologiques à Patmos. De retour à Smyrne, le métropolite Procope, qui lui montrait une paternelle affection, le fit archidiacre puis l’ordonna prêtre, et lors de son élévation à la dignité patriarcale (1788), il fit sacrer Grégoire pour lui succéder. Pendant douze ans, le saint hiérarque gouverna avec sagesse et zèle apostolique la grande et riche cité de Smyrne, métropole de l’hellénisme en Asie Mineure. Il y fit reconstruire diverses églises, fonda des écoles et organisa un système de bienfaisance pour les déshérités. En 1797, il fut élu patriarche œcuménique et entreprit aussitôt de relever la dignité patriarcale en faisant reconstruire le palais du Phanar. Il fonda aussi une imprimerie dans laquelle on éditait des livres en langue vulgaire, qui contribuèrent grandement au réveil culturel et spirituel du peuple grec. Le saint hiérarque veillait à la stricte observance des canons ecclésiastiques et à la rigueur morale du clergé. En ces temps agités, où les Grecs, tenus depuis près de quatre siècles sous le joug ottoman, s’échauffaient et se préparaient au soulèvement général, le patriarche, conscient de ses responsabilités de pasteur, s’efforçait de tempérer les esprits téméraires, en consolidant toutefois en secret le sentiment national.

Après un an et demi seulement, il fut dénoncé au sultan par des évêques qu’il avait blâmés pour leur conduite et fut exilé à Chalcédoine, puis au monastère d’Iviron sur la Sainte Montagne. Pendant ce séjour forcé à l’Athos, le saint visita tous les monastères, prêcha la parole de Dieu et fut pour tous un modèle de vie monastique. Il donna alors sa bénédiction à saint Euthyme [22 mars] pour aller s’offrir au martyre et exprima sa joie et sa fierté à la nouvelle du martyre de saint Agathange [19 avr.], montrant ainsi qu’il considérait la mort par amour du Christ comme le but suprême et le couronnement de la vie chrétienne.

Rappelé au Patriarcat en 1806, il fut reçu avec enthousiasme par le peuple chrétien de Constantinople, et reprit courageusement son œuvre pastorale et de correction des mœurs ecclésiastiques. Mais, en 1808, un coup d’état ayant amené au pouvoir le sultan Mehmed II, on le contraignit à démissionner et à se retirer dans l’île de Prinkipo, puis de nouveau au Mont Athos où il reprit ses études patristiques et ses exercices ascétiques, tout en se tenant informé de la situation de l’Église et du peuple.

En 1818, il fut contacté par les membres de la Société Amicale, société secrète qui préparait la Révolution en essayant de réunir et de coordonner les forces dispersées. Grégoire montra avec enthousiasme son soutien pour la cause de la liberté ; mais, jugeant que le temps n’était pas encore mûr, il leur conseilla la patience. Peu de temps après, il fut rappelé pour la troisième fois sur le trône œcuménique et reprit son activité, encourageant en particulier la fondation des écoles où les enfants pouvaient recevoir une formation hellénique. Il organisa aussi une Caisse de la Miséricorde, qui recevait les fonds de Grecs fortunés pour l’assistance aux chrétiens en difficultés.
Lorsque commença, dans le plus grand manque d’organisation, l’insurrection des Grecs des principautés danubiennes (1er février 1821), il s’en suivit aussitôt de terribles et sanglantes répressions à Constantinople et dans tous les grands centres de l’empire ottoman. Tous les notables ayant des liens avec les principautés furent exécutés et quatre évêques furent arrêtés. Comme le gouvernement avait donné l’ordre de rassembler au Phanar toutes les familles des notables grecs de Constantinople, le patriarche, en vue d’éviter le massacre, se porta garant auprès de la Sublime Porte de leur fidélité. Non content de cette déclaration, le sultan contraignit saint Grégoire à signer l’excommunication du chef de l’insurrection, Alexandre Hypsilantès, et de ses compagnons.

Le 31 mars, on annonça le soulèvement général du Péloponnèse et, trois jours plus tard, le Grand Lundi, le Grand Interprète, représentant de la communauté grecque à la cour du sultan, fut exécuté avec d’autres notables. Prévoyant quel serait son sort et refusant les propositions de fuite, le patriarche disait : « Comment abandonnerais-je mon troupeau ? Si je suis patriarche, c’est pour sauver mon peuple, non pour le livrer aux glaives des janissaires. Ma mort sera plus utile que ma vie, car par elle les Grecs lutteront avec l’énergie du désespoir qui souvent procure la victoire. Non, je ne deviendrai pas la risée du monde en prenant la fuite, de sorte qu’on me montre du doigt en disant : “Voilà le patriarche assassin !” ».

Le jour de Pâques, 10 avril, saint Grégoire célébra, avec calme et grandeur, la Liturgie de la Résurrection, interrompu seulement par ses sanglots. À l’issue de la cérémonie, on lui confirma la nouvelle de la révolution dans le Péloponnèse. Il répondit alors : « Que maintenant comme toujours, la volonté du Seigneur soit faite ! » Quelques heures plus tard, on venait lui annoncer sa déposition et des janissaires le traînèrent sans ménagement en prison. Soumis à l’interrogatoire et à la torture, il gardait un majestueux silence qu’il ne rompait que lorsqu’on lui proposait de renoncer à sa foi, disant alors : « Le patriarche des chrétiens doit mourir en chrétien ! » Peu après, une fois son successeur élu par les membres du saint Synode, il fut pendu au portail d’entrée du Patriarcat, qui depuis reste fermé en commémoration de ce sinistre événement. Au dernier moment, saint Grégoire leva les mains vers le ciel, bénit les chrétiens présents et dit : « Seigneur Jésus-Christ, reçois mon esprit ! » Pendant que les Turcs et les Juifs lançaient des pierres sur le cadavre du patriarche, le magistrat qui avait été chargé de l’exécution se tenait assis devant lui en fumant.

On laissa le corps exposé pendant trois jours, avec, suspendu au cou, le document contenant son chef d’accusation. Finalement des Juifs l’achetèrent pour 800 piastres et le traînèrent par les rues, au milieu des quolibets et des cris de triomphe, puis ils le jetèrent à la mer. Malgré la lourde pierre qu’on y avait attachée, il surnagea et fut récupéré par un navire grec sous pavillon russe, qui le déposa à Odessa. Vénérée par la foule pendant plusieurs jours, la sainte relique ne montra aucun signe de corruption. En 1871, à l’occasion du cinquantenaire de la Révolution grecque, le corps du saint patriarche fut transféré à Athènes et déposé avec les plus grands honneurs dans la métropole.




[1]. Tiré du Synaxaire du hiéromoine Macaire de Simonos Petras.

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