Saint Dorothée de Gaza ajoute encore la pensée
véritablement terrifiante que «les âmes des morts se souviennent de tout ce qui
s'est passé ici... [elle] se souvient des passions qu’elle a eues et des péchés
qu'elle a commis et des personnes avec lesquelles elle les a commis" et
"elle est seule avec ses propres passions et, en bref, elle est tourmentée
par elles». [7] saint Ephrem de Syrie enseigne de même que lors de la mort, l'âme
voit "toutes les oeuvres qu'elle a réalisées, bonnes et mauvaises, de jour
et de nuit ". [8] C'est pourquoi les Pères nous encouragent à nous
rappeler le jour de notre mort imminente, car ceux qui s’adonnent en vérité au
souvenir de la mort ne pécheront jamais. [9]
Il convient de noter que pour le juste, la
séparation de l'âme et du corps n'est pas effrayante, mais c'est en fait
joyeux, car il a déjà commencé à goûter à la vie spirituelle et l'âme va
demeurer dans la béatitude de la lumière du Christ. Encore une fois, saint
Ephrem enseigne que «le juste et le saint, et les ascètes se réjouissent à
l'heure de la mort et de la séparation... Leurs âmes bondissent car ils sont
prêts à sortir de leur corps pour leur repos», et saint Séraphim de Sarov
s'exclame: «Quelle joie, quelle exultation attendent l'âme quand les anges de
Dieu viennent la prendre.» [10] Le psalmiste déclare: «Précieuse, aux yeux du
Seigneur est la mort de Ses saints» (Psaume 115:6). Mais pour ceux qui ne se sont
pas eux-mêmes totalement unis au Christ dans cette vie, la séparation de l'âme
et du corps est redoutable, car elle n'est pas naturelle, et en outre, parce
qu’à la mort, par la suite l'âme est entourée et attaquée par des démons
horribles. "Le mal tue le méchant », dit le roi David (Psaume 33:22).
Cette réalité est rappelée à plusieurs reprises dans notre riche tradition
liturgique. Tous les soirs aux Petites Complies l'Eglise prie: «Et au moment de
mon départ de cette vie, prends soin de mon âme misérable et éloigne d'elle les
formes ténébreuses des mauvais démons», [11] et à l'Office de la séparation de
l'âme et du corps, nous prions: «Ô refuge réputé des pécheurs et de ceux qui
sont contrits, fais-moi connaître ta miséricorde, ô Toute Pure, et délivre-moi
des mains de démons: carr beaucoup de chiens m'ont entouré »[12 ] Ce ne
sont que deux des innombrables exemples qui pourraient être mis en avant. [13]
Par ces attaques de démons, est accompli le
jugement particulier dont saint Paul a écrit: "Et comme il est réservé aux
hommes de mourir une fois, après quoi vient le jugement» (Hébreux 09:27). Saint
Ignace Briantchaninov écrit que depuis l'époque de la chute d'Adam jusques à la
destruction de l’Hadès par le Christ, Satan se tenait sur le chemin vers le
Paradis bloquant l'entrée de chaque âme, et après la résurrection du Christ, il
continue à prendre ces âmes qui s'inclinent vers lui. Il poursuit:
Tous ceux qui ont ouvertement rejeté le Rédempteur
constituent l'héritage de Satan: leurs âmes, après la séparation du corps, descendent
tout droit en enfer. Mais les chrétiens qui sont enclins au péché sont aussi
indignes d'être immédiatement traduits de la vie terrestre à l'éternité
bienheureuse. La justice elle-même exige que ces inclinations au péché, ces
trahisons du Rédempteur doivent être pesées et évaluées. Un jugement et une
évaluation sont nécessaires afin de définir le degré d'inclinaison d'une âme
chrétienne au péché, afin de définir ce qui prédomine en elle - la vie
éternelle ou la mort éternelle. Le Jugement de Dieu sans hypocrisie attend
chaque âme chrétienne après son départ du corps. [14]
Version française Claude Lopez-Ginisty
D’après
Notes :
[6] The
Lenten Triodion, Seminary Press Saint-Tikhon (1994), p. 144.
[7] Discourses
and Sayings, Cisterna Publications (1977), pp 185 184.
[8] The
Ascetic Works, dans la version en grec moderne par Mark D. Sakkorrafos,
Athènes 1964, p. 155, QTD. dans Cavarnos, Future
Life, p. 22.
[9 St. John Climacus, The Ladder of Divine Ascent, 6:24.
[10] St. Ephraim, The
Ascetic Works, p. 9, and Cavarnos and Zeldin, St. Seraphim of Sarov, in
Modern Orthodox Saints V (1980), p. 47; tous deux cités in Cavarnos, The
Future Life, pp. 22, 23.
[11] Prière à la Mère de Dieu par le moine Paul
[12] Office at the
Parting of the Soul from the Body, Canon of Prayer to the All-undefiled
Birth-giver of God, on behalf of a man whose soul is departing, and who cannot
speak, in Hapgood, Service Book of the Holy
Orthodox-Catholic Apostolic Church (1965), p. 361.
[13] The Office at
the Parting of the Soul from the Body alone contains
eight references to the assault of demons upon the newly-departed soul.
Additionally, from the Menaion for Sept 3rd, the Theotokion on the Praises:
“Carelessly reclining in the bed of languor and heedlessness, I most slothfully
pass through life; and I fear the hour of death, lest that wicked serpent, like
a savage lion, in snatching up my lowly soul, rend it asunder with ruthless
villainy; O blameless Theotokos, in thy goodness, hasten before the end to
bestir me and raise me up to repentance and change of life,” Holy
Transfiguration Monastery, p. 60.
[14] Bishop
Ignatius, Collected Works, vol. III, p. 136, cité in Fr. Seraphim Rose, Soul After
Death, p. 65. Je
souligne - pour mettre en évidence que les questions des péages aériens ne sont
pas une affaire juridique d'inspiration latine, mais sont plutôt un moyen
permettant de déterminer l'amour pour Dieu, ou son absence, dans l'âme de
l'homme. Mgr Ignatius, Œuvres, vol. III, p. 136, QTD. en Fr. Seraphim Rose, âme
après la mort, p. 65.
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