lundi 20 décembre 2010

Molly Sabourin: La Confession








Je suis assise sur un banc de bois, attendant mon tour pour l'absolution. J'ai redouté ceci toute la journée, et maintenant avec seulement deux personnes en face de moi et le cœur chargé de bagages, j'aimerais que tout soit fini avant même que cela ait commencé. Nerveusement, je sors de ma poche, une demi-feuille de papier pliée, et je l'examine pour la centième fois. Ma propre écriture, à peine lisible, précise l'état réel de ma pathétique position.

Je suis une experte auto-proclamée en hypocrisie. Je sais quoi dire, comment faire basculer ma tête avec bienveillance, quand sourire, et où me tenir, la nuque inclinée, en signe de révérence. Chaque fois que je libère ma langue pour le commérage, ou avec jalousie dans une louange légitime, que j'exaspère mon enfant en assumant qu'il est en faute sans en comprendre les circonstances; quand je dépense de l'argent que nous n'avons pas à calmer mon propre stress, que j'évite les yeux pour échapper à la conversation, que j'évite le travail ennuyeux et monotone, ou que j'écoute distraitement afin de faire valoir mes propres opinions, je pousse ces actes d'égoïsme hors de vue, mais pas hors de l'esprit, jusqu'à ce que je sois prête à éclater sous leur poids.

Je suis relativement neuve à cet égard. Il y a dix ans j'étais très contente de me repentir devant Dieu au temps qui me convenait, et dans l'environnement de mon choix. L'idée d'annoncer officiellement mes fautes en face d'un témoin semblait sec et tout à fait inutile, comme de réciter à haute voix la liste d'épicerie de cette semaine à mon mari. Mon style de vie était relativement inoffensif, et je ne pouvais pas comprendre quel genre de péchés il serait utile de mentionner lors d'un tel événement solennel. De combien de façons pourrais-je éventuellement raconter la paresse?

Jamais auparavant, je n'avais eu l'occasion de m'asseoir, Les Béatitudes* à la main, afin de faire l'inventaire spirituel de mon âme. "Heureux les pauvres en esprit", ainsi commence le Sermon sur la Montagne. Bienheureux sont ceux qui reconnaissent leur dépendance complète du Christ, et la confiance n'est pas en leurs propres forces ou capacités. Comment ai-je prié authentiquement les paroles: "Que ta volonté soit faite?" Ai-je insisté pour cheminer selon mes propres plans, à la recherche de Dieu seul pour vérification? De quelles façons ce jour-là, cette semaine, ou même ce mois m'étais-je refusé quelque chose? Chaque question posée, mettait à jour les habitudes profondément enracinées barricadant ma volonté loin de la soumission et entravant ma croissance spirituelle.

L'homme à côté de moi se lève de notre banc partagé, et marche doucement vers une petite alcôve avec un tableau portant une croix et l'Evangile. Au-dessus, il y a des icônes du Christ, de la Mère de Dieu et des saints. Leurs visages austères, intolérants au mal et aux ravages qu'il sème dans les cœurs des hommes, tirent des confesseurs des méditations sur l'éternité généralement étouffées par les distractions terrestres. Notre prêtre sourit chaleureusement, entoure d'un bras les épaules de mon collègue paroissien et, ensemble, les têtes jointes en collaboration, ils commencent le travail de purification. La Grâce a inculqué le désir de rechercher la sainteté, et la réponse dans l'amour de ce jeune homme a été mise en avant dans son effort pour purger son âme des transgressions.

Je passe en revue dans ma tête la liste de blanchisserie des raisons pour lesquelles je suis assise ici, dans l'obscurité, un samedi soir. Je suis gênée de dévoiler mes mêmes mesquines et puériles tendances manipulatrices, et je souhaite, juste pour une fois, avoir un péché épique de passion à offrir, comme assassiner par amour, ou voler à cause de la faim. Ce sont cependant ces  comportements tranquilles, sans prétention, centrés sur moi, qui adhèrent comme de la colle, à mon personnage et ingénieusement me distraient de la voie du salut. Ce n'est que lorsque je suis le menton dans la fondrière, dans mes propres incohérences et misérablement gêné par ma faiblesse que je suis en mesure de me rendre, en désespoir de cause, à mon vrai but en tant que serviteur, pauvre en esprit, mais riche en miséricorde.

Mon tour est venu. C'est maintenant moi qui marche sur la pointe des pieds, portant mes péchés à la table. Je pense toujours a des façons d'être honnête au sujet de mes défauts, tout en permettant juste une touche de validité pour adoucir la présentation. Ma propre épaule sent l'étreinte chaleureuse de mon père spirituel, et mes yeux rencontrant le regard perçant du Christ et de ses saints, s'humectent de larmes avec étonnement devant cette foule sacrée réunie avec sollicitude bienveillante pour une brebis égarée. Me tenant ici, mon programme change brusquement. Je ne suis plus préoccupée par mon statut ou sa réputation. En face de Dieu, de Son témoin sacerdotal, et de Son église, je veux me retourner, révélant chaque grain de poussière qui trouble mon âme. Cette remise officielle d'un fardeau est un don au-delà de toute explication. L'Eglise, en reconnaissant combien peut être difficile un voyage sur la "route la moins fréquentée", met en place une oasis de fraîcheur à la disposition de nous tous, si nous acceptons seulement d'y venir et d'y boire.

Je m'agenouille, avec ma tête sous l'épitrakhelion et la main ferme de mon prêtre, alors qu'il récite la prière d'absolution tant attendue. Alors que je me relève, il donne sa bénédiction, et cette bénédiction finale:

"Maintenant, ne te préoccupe plus des péchés que tu as confessé, tu peux aller en paix."

Ma soif étanchée et ma force renouvelée, je pars.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Sur le blog Close to Home


*Certains se préparent à la confession avec la lecture des Dix Commandements, d'autres avec la vision de la Bienheureuse Théodora, d'autres encore avec les Béatitudes...

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