samedi 14 septembre 2024

Hiéromoine Damascene: Quelques dangers pour les convertis à l'orthodoxie

Hiéromoine Damascene [Christensen]

 
1. Du protestantisme

En parlant des convertis protestants à l'orthodoxie, nous ne parlons pas de tout le monde, ni même de tout le protestantisme. Nous ne parlons que des pires tendances du protestantisme, et des problèmes qui se posent lorsqu'elles entrent dans l'Église orthodoxe.

Le protestantisme trouve son origine dans le désir louable de trouver une solution à l'hypocrisie religieuse et à la corruption, et de cultiver une relation personnelle avec Jésus-Christ. Cependant, en raison de la nature humaine déchue, l'hypocrisie et la corruption elles-mêmes sont rapidement entrées dans le protestantisme lui-même, de sorte que, pour beaucoup,  leur motivation principale est l'esprit de protestation, le désir d'avoir plus « raison » que les catholiques, en s'appuyant sur une certaine opinion humaine.

Si telle est leur motivation, les protestants qui deviennent orthodoxes le font dans le désir continu d'avoir raison. Au lieu d'être des experts dans la citation des Écritures pour prouver leurs propres opinions privées, ils deviennent maintenant des experts dans la citation des Saints-Pères, des canons et des dogmes dans le même but ; au lieu de ridiculiser et de combattre les catholiques, ils combattent et ridiculisent maintenant les catholiques et leurs ex-frères protestants ; au lieu de s'impliquer dans des guerres entre dénominations protestantes, ils s'impliquent maintenant dans des guerres entre juridictions orthodoxes. Ils essaient d'avoir plus raison, non seulement que les catholiques et les protestants, mais aussi que les autres orthodoxes. De là naissent leurs protestations continues au sein de l'Église orthodoxe. Comme ils n'ont pas de transmission directe par des instructeurs saints, leurs paroles n'ont pas de pouvoir expérientiel, mais restent dans le domaine bidimensionnel de l'opinion humaine.

Il y a beaucoup de protestants qui sont de bien meilleurs chrétiens que leurs frères qui sont devenus orthodoxes. Dans cette optique, les convertis protestants à l'orthodoxie feraient bien d'écouter la conviction protestante évangélique selon laquelle un homme doit renaître, non seulement dans le baptême, mais dans un processus de conversion radicale qui le transforme de l'intérieur et le rend hors de ce monde. Il y a beaucoup de vérité dans cette croyance. Les problèmes surviennent lorsque les chrétiens « nés de nouveau » arrivent à l'orthodoxie sans être vraiment nés : quand ils sont des protestants ratés, ils sont encore de ce monde, et ils veulent compenser leur manque de profondeur spirituelle en montrant qu'ils ont raison, plus que toutes les dénominations protestantes réunies. Dans de tels cas, leurs conversions restent en grande partie intellectuelles.

Un protestant ne peut pas être vraiment orthodoxe s'il n'est pas né de nouveau, exactement de la même manière que les protestants disent qu'il doit renaître. Lorsque vous vous êtes véritablement converti au Christ, ce n'est qu'alors que vous pourrez vraiment vous convertir à l'orthodoxie. Il pourra comprendre la profondeur de l'orthodoxie et entrer dans son essence, comme l'ont déjà fait de nombreux honnêtes protestants convertis.

2. Du catholicisme romain

Alors que la mauvaise motivation du protestantisme est d'avoir raison, la mauvaise motivation du catholicisme romain est l'autorité. Grâce à son accent sur l'autorité extérieure absolue et l'infaillibilité de l'institution ecclésiastique, l'Église catholique romaine a conservé le plus ancien empire vivant du monde - mais à un prix élevé. Dans l'Église orthodoxe, lorsqu'un évêque ou un patriarche tombe dans l'hérésie, les fidèles n'ont pas besoin de le suivre. Dans le catholicisme romain, cependant, il n'y a pas d'échappatoire. Si le pape prend les positions les plus erronées et proclame les hérésies les plus dangereuses – et s'il convoque un concile comme celui de Vatican II – les fidèles doivent le suivre, sinon ils ne peuvent plus continuer à être catholiques. La raison dominante d'être catholique romain n'est pas de soutenir des doctrines particulières ; c'est plutôt de se soumettre à l'autorité du pape et d'être reconnu par elle. On en voit une preuve simple chez les catholiques de rite byzantin, qui ne sont pas tenus d'accepter la doctrine catholique du filioque tant qu'ils acceptent l'autorité du pape.

Pour la plupart, les catholiques romains qui sont entrés dans l'Église orthodoxe au cours des dernières décennies l'ont fait à la suite de la faillite spirituelle provoquée par Vatican II. En faisant cela, cependant, certains n'ont fait qu'échanger un culte de l'autorité pour un autre. Tout en critiquant le catholicisme, ils portent avec eux la même mentalité papale dans l'Église orthodoxe. Leur Orthodoxie consiste avant tout à être soumis et reconnus par une autorité ecclésiastique qui est elle-même reconnue à un niveau plus large. Pour conserver ce statut de reconnaissance, ils seront prêts à déformer leurs consciences et à faire tout ce qu'ils peuvent, car la reconnaissance leur donne ce sentiment sûr de protection institutionnelle qu'ils avaient sous le catholicisme romain ; et ils paniqueront littéralement lorsque leur statut sera même légèrement menacé.

Être orthodoxe, c'est en partie être sous la protection d'un évêque orthodoxe, mais ce n'est pas la base de l'orthodoxie, comme c'est le cas dans le catholicisme romain.. Lorsque les catholiques romains qui sont esclaves de cette mentalité se convertissent à l'orthodoxie, ils en infectent l'air d'une ecchlésiologie étrangère. Encore une fois, nous ne parlons pas de tous les convertis catholiques à l'orthodoxie, mais seulement de leurs dangers possibles. Beaucoup de ces convertis font honte aux orthodoxes "de naissance" par la profondeur de leur piété. Lorsqu'ils se sont vraiment convertis à l'orthodoxie, et qu'ils n'ont pas simplement changé d'alliance pour une autorité différente, ils ornent l'Église comme de merveilleux chrétiens orthodoxes.

Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

"The Sunrise of the East",

 in The Orthodox Word Vol. 32, No.5 (190)

cité par 

Ortodossiatorino


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire