mercredi 11 octobre 2023

“Les Beatitudes” de saint Païssios l'Athonite

Saint Païssios l'athonite 
aux pieds de saint Arsène de Cappadoce

*

Lettre de Père Païssios au monastère de Sourit

Le Seigneur dit aux Judéens qui étaient venus vers Lui: Mais, malheur à vous, riches, car vous avez votre consolation! Malheur à vous qui êtes rassasiés, car vous aurez faim! Malheur à vous qui riez maintenant, car vous serez dans le deuil et dans les larmes! Malheur, lorsque tous les hommes diront du bien de vous, car c'est ainsi qu'agissaient leurs pères à l'égard des faux prophètes!

Mais je vous dis, à vous qui m'écoutez: Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous maltraitent. Si quelqu'un te frappe sur une joue, présente-lui aussi l'autre. Si quelqu'un prend ton manteau, ne l'empêche pas de prendre encore ta tunique. Donne à quiconque te demande, et ne réclame pas ton bien à celui qui s'en empare. 

Luc 6:24-30


Sœur higoumène Philothée, donne la bénédiction,

Aujourd'hui, une sorte de folie s'est emparée de moi et j'ai pris la plume, tout comme le fou qui écrit ses divagations sur le mur avec du charbon de bois, et je me suis assis pour écrire mes propres choses sur le papier comme un fou, et, encore une fois, comme un fou, pour vous les envoyer par écrit. Je fais cette dernière folie à cause de beaucoup d'amour pour mes sœurs, afin qu'elles puissent être édifiées, même si ce n'est qu'un peu.

La raison de la folie initiale était à cause de cinq lettres, l'une après l'autre, de diverses parties de la Grèce sur une variété de sujets. Alors que les événements décrits étaient de grandes bénédictions de Dieu, ceux qui m'ont écrit étaient tombés dans le désespoir parce qu'ils les traitaient à la manière du monde.

Après avoir répondu en conséquence à leurs lettres, j'ai pris la plume comme un fou, comme je l'ai dit, et j'ai écrit cette épître. Je crois que même une pièce de cinquante centimes de votre frère voyageur sera quelque chose comme un silex pour chacune des sœurs afin d'allumer un petit cierge dans sa cellule et d'offrir sa doxologie à notre Dieu Bon.

Je ressens une grande joie quand chaque sœur, avec sa croix particulière, mène la lutte équivalente avec philotimo*.

C'est une petite chose de donner au Christ un cœur de taille égale et aussi lumineux que le soleil par gratitude pour Ses grands dons, et surtout pour l'honneur particulier qu'Il nous a montré, moines, en nous enrôlant par des convocations personnelles dans Son Ordre angélique..

Un grand honneur appartient également aux parents qui ont ainsi été rendus dignes de devenir liés à Dieu. Malheureusement, cependant, la plupart des parents ne s'en rendent pas compte et, au lieu d'être reconnaissants à Dieu, sont furieux, etc., car ils voient tout d'une manière mondaine, comme ces personnes que j'ai mentionnées plus tôt, qui sont devenues la raison pour moi de prendre la plume et d'écrire tout ce qui suit.

Saint Païssios l'Athonite avec son staretz Papa Tikhon


1. Bienheureux ceux qui aiment le Christ plus que toutes les choses du monde, et vivent loin du monde, et près de Dieu, avec les joies célestes sur la terre.

2. Bienheureux ceux qui parviennent à vivre dans l'obscurité et à acquérir de grandes vertus, mais qui n'ont pas acquis, même une petite renommée pour eux-même.

3. Bienheureux ceux qui parviennent à passer pour fous, et ainsi protègent leur santé spirituelle.

4.Bienheureux ceux qui ne prêchent pas l'Evangile avec des mots, mais qui le vivent, et le prêchent par leur silence, avec la Grâce de Dieu, qui révèle leur action.

5. Bienheureux ceux qui se réjouissent quand ils sont accusés injustement, plutôt que de se réjouir quand ils sont légitimement loués pour leur vie vertueuse.

 Voici les signes de sainteté, non pas dans l'épuisement de l'ascétisme corporel, et le grand nombre de combats ascétiques, qui lorsqu'ils sont faits avec humilité et dans le but de se dépouiller du vieil homme, ne créent qu'illusion.

6. Bienheureux ceux qui préfèrent être lésés plutôt que de faire du tort aux autres, et qui acceptent les injustices sereinement et silencieusement.

Ainsi, ils révèlent, en pratique, qu'ils croient en "un Dieu, le Père Omnipotent", et attendent d'êtres justifiés par Lui , et non par des êtres humains qui se remboursent dans cette vie par la vanité.

7. Bienheureux ceux qui sont nés estropiés ou le sont devenus à cause de leur propre négligence, mais qui ne maugréent pas, mais glorifient Dieu.

Ils auront la meilleure place au Paradis avec les confesseurs et les martyrs qui donnèrent leurs mains et leurs pieds pour l'amour du Christ et qui maintenant baisent constamment les mains et les pieds du Christ avec dévotion au Paradis. 

8. Bienheureux sceux qui naquirent laids et sont méprisés ici-bas sur terre, car ils ont droit à la très belle place au Paradis, s'ils glorifient Dieu et ne se plaignent pas.

9. Bienheureuses sont ces veuves qui se vêtent de noir dans cette vie, même involontairement, mais qui vivent une vie spirituelle claire et glorifient Dieu sans se plaindre, plutôt que les misérables qui portent des vêtements assortis et mènent une vie maculée.

10. Bienheureux et trois fois bénis sont les orphelins qui ont été privés de la grande affection de leurs parents, car ils sont parvenus à avoir Dieu comme Père dès cette vie. En même temps, ils ont l'affection dont ils furent privés de la part de leurs parents, dans la banque spirituelle d'épargne de Dieu, et cela, avec intérêt!

11. Bienheureux sont ces parents qui évitent d'utiliser les mots  [fais pas...] avec leurs enfants, mais les préservent du mal par leur sainte vie, vie que les enfants imitent, suivant joyeusement le Christ avec une spirituelle bravoure.

12.Bienheureux sont ces enfants qui sont nés saints depuis le sein de leur mère [Cf. Matthieu 19:12], mais encore plus bienheureux sont ceux qui sont nés avec toutes les passions héritées du monde, qui ont lutté avec effort pour les déraciner, et ont hérité du Royaume de Dieu à la sueur de leur visage [Genèse 3:19]

13: Bienheureux sont ces enfants qui vécurent dès l'enfance dans un environnement spirituel, et ainsi avancèrent sans peine dans la vie spirituelle.

Trois fois bienheureux cependant sont ceux qui oont été maltratés, qui n'ont pas du tout été aidés (qui furent, au contraire, poussés au mal), mais dès qu'ils entendirent parler du Christ, leurs yeux brillèrent, et se tournant à 180 degrés, ils firent aussi briller leur âme. Ils quittèrent l'attraction de la terre et se mirent dans la sphère spirituelle.

14. Les gens chanceux, disent les gens du monde, sont les astronautes qui sont capables de tourner dans les airs, d'orbiter autour de la lune ou même de marcher sur la lune.

Bienheureux, cependant, sont les « nains du Paradis » immatériels, qui montent souvent vers Dieu et voyagent au Paradis, leur lieu de résidence permanente, avec les moyens les plus rapides et sans beaucoup de carburant, sans rien de plus qu'une croûte de pain.

15. Bienheureux ceux qui glorifient Dieu pour la lune qui brille pour qu'ils puissent marcher la nuit.

Plus bienheureux, cependant, sont ceux qui en sont venus à comprendre que ni la lumière de la lune ne vient pas de la lune, ni la lumière spirituelle de leur âme d'eux-mêmes, mais que toutes deux viennent de Dieu. Qu'ils puissent briller comme un miroir, une vitre ou le couvercle d'une boîte de conserve, si les rayons du soleil ne tombent pas sur eux, il est impossible pour eux de briller.

16. Les gens du monde nous disent que sont chanceux ceux qui vivent dans des palais de cristal et ont toutes sortes de commodités.

Bienheureux, cependant, sont ceux qui ont réussi à simplifier leur vie et à se libérer du réseau du développement de ce monde de nombreuses commodités (c'est-à-dire de nombreux inconvénients), et qui ont été libérés du stress effrayant de notre époque actuelle.

17. Les gens chanceux, disent les gens du monde, sont ceux qui peuvent profiter des biens du monde.

Bienheureux, cependant, sont ceux qui donnent tout pour le Christ et sont privés même de toute consolation humaine pour le Christ. C'est ainsi qu'ils parviennent à être trouvés nuit et jour près du Christ et de Sa consolation divine, qui est souvent si grande qu'ils disent à Dieu : "Mon Dieu, Ton amour ne peut pas être enduré, parce qu'il est grand et ne peut pas s'adapter dans mon petit cœur".

18. Les gens chanceux, disent les gens du monde, sont ceux qui ont les plus grands emplois et les plus grandes demeures, car ils possèdent toutes les possibilités et vivent confortablement.

Bienheureux, cependant, selon le divin Paul, sont ceux qui n'ont qu'un nid dans lequel se percher, un peu de nourriture et quelques couvertures, car, de cette façon, ils ont réussi à s'éloigner du monde vain, en utilisant la terre comme un repose-pied, comme enfants de Dieu, et leur esprit se trouve constamment proche de Dieu, leur Bon Père.

19. Bienheureux sont ceux qui deviennent généraux et ministres du gouvernement dans leur tête en buvant beaucoup (même si ce n'est que pour quelques heures), avec la joie mondaine qui en découle.

Bienheureux, cependant, sont ceux qui sont dépouillés du vieil homme et sont devenus incorporels, réussissant à être des anges terrestres avec le Saint-Esprit. Ils ont trouvé la source divine du Paradis et y boivent et sont continuellement en état d'ébriété à cause du vin céleste.

20. Bienheureux ceux qui sont nés fous et qui seront jugés fous, et qui, de cette façon, entreront sans passeport au Paradis.

Bienheureux et trois fois bénis, cependant, sont les très sages qui font des bêtises pour l'amour du Christ et se moquent de toute la vanité du monde. Cette folie pour l'amour du Christ vaut plus que toutes les connaissances et la sagesse des sages de ce monde.

*

Saint Père Païssios, prie Dieu pour nous!

Je supplie toutes les sœurs de prier pour que Dieu me donne, ou plutôt me prenne mon petit esprit, et, de cette façon, m'assure le Paradis en me considérant comme un fou. Ou, de me rendre fou par Son amour, afin que je sorte de moi-même, hors de la terre et de son attraction, car, sinon ma vie de moine n'a aucun sens. Je suis devenu blanc à l'extérieur en tant que moine. Au fur et à mesure que je vais, je deviens noir intérieurement en étant un moine négligent, mais je me justifie comme un moine malsain, quand il se trouve que je le suis ; d'autres fois, je m'excuse à nouveau d'être malade, même si je vais bien, et je mérite donc d'être complètement battu. Priez pour moi.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

THE ORTHODOX WORD

Note sur le Philotimo:


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