dimanche 18 juin 2023

2ème DIMANCHE APRÈS LA PENTECOTE, commémorant Tous les saints qui ont brillé sur la terre russe


Tous les saints de la Terre Russe

Compte tenu des sensibilités nationalistes actuelles, cette désignation pourrait être considérée comme controversée. Le baptême de la Rus' en 988 après J.-C., à l'instigation du prince Vladimir, eut lieu à Kiev.  L'ancienne Rus' était l'ancêtre commun de trois nations, la Russie, l'Ukraine et la Biélorussie. Dans les vêpres, nous trouvons ce qui suit : 

Réjouis-toi, ô prince Vladimir le plus riche et le plus croyant ! Réjouis-toi, ô élue Olga ! Car vous avez été nos premiers médiateurs auprès du Maître de tous, les initiateurs de l'Orthodoxie et les guides de la foi véritable!

Ste Olga égale aux apôtres

Sainte Olga, baptisée à Constantinople, morte en 969, était la grand-mère de Vladimir. Sa vie et son témoignage sont antérieurs à la conversion de la Rus'. Bien que tous les saints glorifiés fassent l'objet de commémorations individuelles tout au long de l'année, comme dimanche dernier, nous nous souvenons de tous les saints, y compris ceux qui ne sont connus que de Dieu. Cependant, contrairement à la Toussaint de dimanche dernier, la commémoration d'aujourd'hui n'a pas une aussi longue histoire.

Avec la bénédiction de l'archevêque Macaire de Novgorod, le moine Dosithée Toporkov, neveu de saint Joseph de Volokolamsk, travaillait à une révision du Patericon du Sinaï dans les années 1528 et 1529. Il s'aperçut alors que les saints et les ascètes russes n'étaient pas codifiés de la même manière. Sous la direction de l'archevêque Macaire, ce grand travail fut entrepris entre 1529 et 1541 et publié sous la forme d'un menaion en douze volumes sous forme de calendrier. L'archevêque Macaire devint métropolite de toute la Russie en 1542 et convoqua un concile local à Moscou en 1547, puis un autre en 1549, pour traiter de la glorification des saints russes. 

La fête de tous les saints russes fut instituée le 17 juillet et un office complet en l'honneur des saints fut rédigé par le moine Grégoire du monastère Saint-Euthyme de Souzdal. Au début, cet office était largement utilisé, mais son usage diminua à la fin du XVIe siècle. Ce déclin se poursuivit tout au long de la période synodale jusqu'à ce que, à la fin du XIXe siècle, l'office ne soit plus utilisé que par les Vieux Croyants. En 1908, NicolasOsipovich Gazukin écrivit au synode pour demander la restauration de la fête de tous les saints russes, mais cette demande fut rejetée.

St Patriarche Tikhon

La question fut soulevée une nouvelle fois, cette fois lors du Convile local de l'Église orthodoxe russe de 1917-1918, par deux membres du Concile, Boris Turaev, professeur à l'université de Petrograd, et le hiérarque Athanase Sakharov. Le rapport du professeur Turaev fut accepté par le concile et il fut décidé que la fête serait rétablie, mais célébrée le dimanche suivant la Toussaint. Il fut convenu que l'officice original de Grégoire devait être révisé et un nouveau texte fut approuvé par le saint Patriarche Tikhon en 1918. Les années suivantes de persécution bolchevique  perturbèrent l'ordre normal de la vie de l'Eglise, mais le texte de l'office fut finalement publié par le patriarcat en 1946 et il est actuellement largement utilisé. 

St Jean de Changhaï

St Luc le Chirurgien

Il s'agit bien entendu d'un sujet en pleine expansion. Saint Jean de Changhai et de San Francisco, mort en 1966, et saint Luc de Simferopol, mort en 1961, sont tous deux aimés et vénérés bien au-delà des frontières de la Russie. Cette année, la fête de saint Luc, dans le calendrier des saints, a coïncidé avec la Toussaint (dimanche dernier). Aujourd'hui, il fait l'objet d'une seconde commémoration avec tous les saints russes.

Il est né à Kertch en 1877 et s'appelait à l'époque Valentin Felixovitch Voino-Yassentsky. À l'adolescence, Valentin étudie à l'Académie des beaux-arts de Kiev. Cependant, il choisit d'étudier la médecine plutôt que l'art, qu'il considère comme plus utile aux pauvres. En 1903, à l'âge de 26 ans, il obtient son diplôme et commence à travailler comme médecin généraliste. Plus tard, comme il était exceptionnellement doué et apprenait vite, il étudia l'ophtalmologie. Il était marié et père de quatre enfants mais, après la mort de son épouse Anna, il ne souhaita pas se remarier. Sa carrière médicale est exceptionnelle. Après avoir publié de nombreux articles scientifiques, il devint en 1917 chirurgien en chef et professeur de chirurgie à l'hôpital de Tachkent. La révolution et la guerre civile apportèrent de nombreux changements. Valentin soignait tous les malades, y compris les bolcheviks, mais refusa en toutes circonstances d'opérer sans la présence d'une icône de la Mère de Dieu dans la salle d'opération. Cette politique lui valut un conflit permanent avec les autorités civiles, qui s'aggrava encore en 1921 lorsque, à l'âge de 44 ans, il fut ordonné prêtre. 

Le père Valentin fut finalement emprisonné à trois reprises pour son attitude intransigeante à l'égard de l'athéisme de l'État. C'était un chirurgien incroyablement doué, ce qui lui valait le respect des autorités, mais il portait toujours sa riassa (habit clérical/ soutane) à l'hôpital, ce qui n'était pas conforme aux attitudes soviétiques. Voyant les dons spirituels du père Valentin et son approche intrépide, l'évêque André d'Ufa le tonsura moine, lui donnant le nom approprié de Luc en l'honneur du saint évangéliste Luc, et facilitant ainsi son ordination épiscopale. Dans les années 1930, il continua à publier divers ouvrages sur la chirurgie, tout en poursuivant son travail médical et pastoral. Il prenait manifestement au sérieux les paroles du Seigneur : "Ce que vous avez fait au plus petit de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait". Ce véritable serviteur du Christ consacra toute sa vie à servir le peuple, physiquement et spirituellement. 

Vladika Luc fut nommé archevêque de Simferopol en 1946. Il ne cessa jamais de prêcher la foi et quelque 750 de ses sermons ont été publiés en douze volumes. Il rejoignit le Seigneur en 1961 et, sachant à quel point le peuple l'aimait, le régime soviétique voulut que ses funérailles soient discrètes et passent inaperçues. Malgré tous les stratagèmes et les préparatifs, les fidèles vinrent en grand nombre prier pour le repos de l'âme du chirurgien et archipasteur bien-aimé. Bien que les autorités aient souhaité un événement silencieux, la foule immense qui accompagnait le cercueil au cimetière chanta, selon la tradition, "Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous". En 1996, la dépouille de saint Luc fut exhumée et inhumée dans l'église de la Sainte-Trinité de Simferopol, en présence de quelque 40 000 personnes. Le témoignage de ce remarquable serviteur de Dieu montre que la foi peut triompher même face à l'opposition la plus impie. La vie et les écrits de saint Luc de Simféropol ont été traduits en grec, en anglais et dans de nombreuses autres langues, inspirant des milliers et des milliers d'âmes pieuses.       

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Nous entrons maintenant dans une période qui est parfois décrite comme les "dimanches de saint Matthieu", car tous les textes de l'Évangile de la liturgie dominicale, tout au long de l'été, sont tirés de l'Évangile de saint Matthieu.  

La lecture de l'Évangile de ce dimanche est Matthieu 4, 18-23 et la lecture pour les saints est le passage suivant, Matthieu 4, 25 - 5, 12.  

La lecture commence avec le Christ marchant le long du rivage de la mer de Galilée et appelant Pierre et son frère André, qui étaient des pêcheurs. Ces frères avaient été disciples de saint Jean le Précurseur, mais après son arrestation, ils étaient retournés à la pêche. Le Seigneur leur dit : "Je vous ferai pêcheurs d'hommes" et ils le suivirent sans hésiter. Le Christ rencontra ensuite deux autres frères, Jacques et Jean, les fils de Zébédée. Le fait qu'ils soient occupés à réparer des filets suggère qu'ils étaient trop pauvres pour investir dans de nouveaux filets. Ils avaient la foi et, quittant leur père, ils suivirent le Christ. Dans le commentaire, Théophylacte suggère que Zébédée n'était pas dans le même état d'esprit. Comme nous l'avons entendu dimanche dernier, celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi. Jacques et Jean auraient pu faire passer le devoir filial avant l'obéissance au Christ, mais ils ne l'ont pas fait. Ils ont quitté leur père et sont devenus disciples du Seigneur, qui enseignait dans les synagogues pour montrer qu'il n'était pas opposé à la loi, et qu'il était même venu pour l'accomplir.

Le Christ guérit les malades et cela eut manifestement une grande influence sur les gens. Chaque maladie se réfère à des maladies chroniques et chaque infirmité comprend des troubles corporels temporaires. C'est ainsi que la nouvelle se répandit, amenant des gens de Galilée, de Décapole, de Jérusalem, de Judée et d'au-delà du Jourdain. En d'autres termes, ils venaient de toutes les directions pour entendre Son enseignement. Il est vrai que les signes et les prodiges impressionnent toujours les gens et que beaucoup étaient peut-être venus pour voir des miracles. Le Christ, après avoir guéri les corps de beaucoup de ceux qui venaient à Lui, porta son attention sur leurs âmes afin que nous puissions tous apprendre qu'Il est le Créateur des corps et des âmes.

C'est ainsi que l'Évangile nous donne les Béatitudes. Une fois encore, nous constatons que chaque mot et chaque phrase sont significatifs. Il ouvrit la bouche peut sembler superflu, mais ce n'est pas le cas. Le Christ enseigna également par l'exemple de Sa vie et par Ses miracles. Le psalmiste David commence par "Bienheureux l'homme..." (Ps 1:1) et le Christ utilisa les mêmes mots d'introduction "Bienheureux."


Sermon sur la Montagne, Béatitudes

Bienheureux les pauvres en esprit... Le Seigneur pose ici le fondement de notre vie, à savoir l'humilité. Quelle était la cause de la rébellion de Lucifer contre Dieu, ou la raison de notre nature humaine déchue ? L'arrogance et l'orgueil. Comme le dit le commentaire : Les "pauvres en esprit" sont ceux dont l'orgueil est écrasé et qui ont l'âme contrite.

Bienheureux ceux qui pleurent... Ici, le Christ ne fait pas référence aux pertes dans cette vie, comme dans le deuil, mais au deuil de nos péchés et, en fait, des péchés de toute l'humanité. La conscience de cette nécessité apporte le réconfort, c'est-à-dire la joie spirituelle.

Bienheureux les doux... D'une certaine manière, la terre [dont ils hériteront] est un euphémisme. Les doux sont privés de richesses, mais ils peuvent, dans l'éternité, hériter de tout. Si les gens se contentent de tout accepter, cela pourrait signifier qu'ils sont apathiques et insensibles. Au contraire, ils ont la capacité d'éprouver des sentiments forts, mais ils les contrôlent, ne cédant pas à la colère et au ressentiment.   

Bienheureux ceux qui ont faim et soif de justice... Il s'agit ici de l'aumône, de la générosité et de la bonté. Il y a là une vertu, à condition que nous ne donnions pas ce que nous avons obtenu par des moyens peu vertueux. 

Bienheureux les miséricordieux... poursuit la même idée. Nous faisons preuve de miséricorde en faisant l'aumône, mais nous pouvons aussi le faire par des paroles et des actions bienveillantes. Nous prions constamment le Seigneur d'avoir pitié parce que nous savons à quel point nous dépendons de la miséricorde de Dieu. Le message qui nous est adressé est donc le suivant : allez et faites de même.

Bienheureux les cœurs purs... Cela nous rappelle que nos attitudes et nos actions doivent être en harmonie. Il est tout à fait possible de faire quelque chose qui semble vertueux mais qui est fait pour des motifs indignes.

Bienheureux les artisans de paix... L'irritation et l'animosité peuvent se transformer en haine. Être pacifique et chercher à réconcilier ceux qui sont en désaccord, c'est l'œuvre de Dieu.

Bienheureux ceux qui sont persécutés pour la justice... "Justice" signifie toute vertu. Si nous faisons ce qui est juste et vrai, nous pouvons être persécutés par les puissances de ce monde ; Dieu jugera. Les méchants peuvent être persécutés, mais ils ne sont pas bénis. 

Bienheureux serez-vous lorsque les hommes vous insulteront... Ce texte reprend le même thème, mais il ajoute "à cause de moi". Cela avertit les disciples que les ennemis païens du Christ peuvent persécuter et persécuteront ses disciples. 

Réjouissez-vous et soyez dans l'allégresse... Supporter patiemment l'injure est une chose difficile, mais qui n'a rien de nouveau. Même les prophètes, plusieurs siècles avant l'Incarnation, furent souvent  injuriés, critiqués et persécutés. Non seulement nous sommes appelés à vivre selon cet idéal élevé, mais nous recevons un rappel constant parce que les Béatitudes sont chantées dans la plupart des liturgies.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après


in Mettingham. 

ENGLAND

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