samedi 20 mai 2023

Dr. Nikolaos Koios: L'attitude de la théologie orthodoxe envers les animaux




La théologie orthodoxe maintient une attitude de respect envers les animaux, comme elle le fait envers l'ensemble de la création, reconnaissant en elle les paroles de Dieu Lui-même qu'Il a prononcées en la formant. Comme l'a enseigné saint Silouane l'Athonite, les gens dont le cœur a ardemment aimé le Créateur ne peuvent s'empêcher de brûler de compassion pour tout ce qui a été créé.


Nous voyons une perception similaire dans les enseignements et aussi dans le comportement personnel de nombreux Pères et Saints de l'Église. Cependant, cette approche ne conduit pas à des positions dogmatiques ou idolâtres à l'égard de la création, animée ou inanimée, végétale ou animale. L'Église considère la création avec respect. Les hommes doivent "sauvegarder" la création, mais, en même temps, ils doivent vivre en elle et à partir d'elle.

Les plantes et les animaux servent de sources de nourriture, d'aides dans notre travail, et tous méritent d'être respectés. Ainsi, les saints et les Pères eux-mêmes, tout en exprimant leur amour et leur respect pour la nature, ne condamnent ni n'interdisent la consommation de viande, de poisson ou de tout autre comestible, ni l'utilisation d'animaux au travail. Bien que nous voyions de nombreux cas dans la vie des saints où ils ont cultivé une interaction spéciale, souvent merveilleuse, avec les animaux, ils ne reconnaissent jamais que ces derniers ont des droits souverains, ce qui les mettrait sur un égalité avec les êtres humains. En général, il n'y a pas de tradition biblique ou patristique pour soutenir les points de vue extrêmes proposés par certaines organisations de bien-être animal ou écologiques.

Naturellement, le fait que la création soit inégale ne signifie pas que la théologie morale, en termes orthodoxes, peut accepter les mauvais traitements infligés aux animaux ou la cruauté à leur égard. L'abandon des animaux dans les rues, qui se traduit par un grand nombre d'animaux errants, les mauvais traitements cruels et provocateurs allant jusqu'à leur mise à mort, les conditions de vie misérables des animaux destinés à l'alimentation, la manière dont ils sont élevés et abattus, tout cela témoigne d'une irresponsabilité et ne reflète en rien l'éthique orthodoxe à l'égard de la création.

Mais les mouvements qui soutiennent les droits des animaux vont à l'autre extrême. Ils veulent non seulement mettre les animaux sur un pied d'égalité avec les humains, mais ils veulent souvent déplacer ces derniers afin de garantir les droits des premiers. En d'autres termes, en général, il y a un intérêt pour les animaux qui frise l'excès. En effet, il existe des comportements des défenseurs des animaux qui s'approchent des limites de la perversité. Selon les animalistes extrémistes, les ressources qui pourraient être utilisées pour les personnes qui luttent pour leur survie, en particulier en temps de crise, appartiennent de droit aux animaux errants, position qu'ils justifient en affirmant que les humains sont responsables de leur abandon en premier lieu. Il convient également de noter qu'en raison des interventions des mouvements des défenseurs des animaux, la législation de nombreux pays est devenue très stricte à l'égard des personnes et excessivement favorable aux animaux et à leurs droits.

Nous pourrions dire qu'un signe des temps est la nouvelle loi en Grèce qui impose une stérilisation obligatoire générale à tous les animaux de compagnie contrôlés, comme moyen de faire face au problème chronique des animaux errants. Cela implique la mutilation cruelle des animaux sans aucune nécessité médicale. L'Association panhellénique des vétérinaires a réagi à cela par une déclaration. Mais au-delà des problèmes médicaux et juridiques et constitutionnels qui existent clairement, des questions d'ordre moral, théologique et anthropologique se posent également. Au lieu de piétiner la racine de la méchanceté au sein des gens - la cupidité et la vanité qui conduisent à des formes de comportement irresponsables - la société a fini par abuser de la création, sous prétexte du bien-être animal. Elle sacrifie maintenant l'intégrité corporelle des animaux avec des pratiques qui rappellent l'époque du totalitarisme. Il n'y a pas de respect pour leur fonction naturelle, qui est une expression des pulsions créatives que le créateur Lui-même leur a inculqué.

Dans les sociétés occidentales en particulier, les gens traversent une période d'individualisme et d'isolement. Le nombre de personnes qui mettent fin à leur vie de leur propre chef augmente rapidement. Utiliser la compagnie d'un animal pour combler le vide de la vie avec une autre personne, qu'il s'agisse d'un partenaire ou d'un ami, est une pratique qui dure depuis des décennies dans le monde occidental. Il a été démontré que les animaux sont des agents de sociabilité à tel point que la recherche scientifique s'est impliquée dans la question à de nombreux niveaux. Le phénomène n'a certainement pas que des causes profondes qui peuvent être des sujets d'étude pour les sciences de la psychologie et de la sociologie.

Naturellement, il y a aussi des animaux domestiques qui travaillent et qui aident les gens dans une variété d'activités de leur vie (garder des espaces ou des élevages, des chiens-guides pour les aveugles, la chasse, et ainsi de suite), relation qui existe presque depuis l'apparition de l'humanité sur terre. La coopération entre les humains et les animaux est une image de la relation organique que nous avons avec la création, plutôt que l'exposition idéalisée qui, hélas, a tendance à se généraliser de nos jours.

L'attitude chrétienne envers les animaux, ainsi que notre relation avec eux, découle de l'attitude des chrétiens envers l'ensemble de la création. Le respect et la considération pour la création ont une profonde signification théologique et sociale pour l'Église. Ils sont indissolublement liés au culte et à la valorisation du « Créateur de toutes choses » et à une relation amoureuse avec notre prochain, et ont une dimension verticale aussi bien qu'horizontale. Il n'y a aucune justification pour donner la priorité à la création muette* par rapport aux êtres humains, qui sont faits à l'image de Dieu. La véritable relation entre les gens et Dieu, ainsi qu'avec leur prochain, constitue cependant la base d'une relation saine entre les humains et le reste de la création.

Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

PEMPTOUSIA

NOTE:

* Dans les deux sens : « incapable de parler » ; et « incapable de raisonner ».

Nikolaos Koios est professeur agrégé d'éthique chrétienne et de bioéthique et directeur du programme d'études sacerdotales à l'Académie ecclésiastique universitaire de Thessalonique.

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