Là, ce n'est pas comme dans le monde. Ici, sur la terre souillée par les péchés, vous pouvez prétendre que Dieu n'existe pas ou qu'Il ne vous voit pas et qu'Il ne vous entend pas, surtout si vous êtes très insensible. Dieu se retire du monde et Il n'est ressenti que par ceux qui pleurent en priant.
À l'Athos, Dieu est une preuve écrasante, une sensation d'une sainte surabondance, un murmure de joie, une source de larmes qui se déversent du Ciel, une présence sublime, d'une finesse infinie qui vous fait respirer l'air avec crainte et tendresse.
Là, tout est devenu prière, sentiment du Ciel, goût du Ciel descendant dans l'âme et débordant dans l'histoire.
Je vais vous donner un exemple.
Quand je suis allé à l'Athos pour la première fois, j'étais étudiant et j'avais quitté le monastère de Philothéou du cœur de la montagne en direction du monastère roumain de Prodromou sur un chemin de plusieurs kilomètres à pied.
J'avais une massue à la main, deux grosses prunes dans mon sac à dos et une pierre peinte avec la Sainte Mère de Dieu que j'ai portée tout le long sur la Montagne comme s'il s'agissait d'une meule de moulin
J'ai mangé les prunes. Le soleil brûlait de plus en plus chaudement, il y faisait plus de 40 degrés à l'ombre et il n'y avait pas du tout d'ombre sur la voie stérile où il n'y avait que de mauvais arbustes épineux. Il n'y avait pas de source, rien du tout, seulement de la poussière lourde sur le chemin et la chaleur insupportable. Lentement, mes forces se sont estompées. Je transpirais beaucoup et le maillot de corps qui me couvrait la tête brûlait.
Tout à coup, j'ai eu la sensation de m'évanouir. Je me suis assis dans la poussière jaune du bord de la route. Je me sentais étourdi. Il n'y avait pas de grand ou d'arbre imposant sur une distance de centaines de mètres
J'ai soupiré : Sainte Mère de Dieu. C'est tout ce que je pouvais dire. Je fermai les yeux un instant. J'ai vu une ombre devant moi. C'était un jeune moine avec une soutane noire poussiéreuse. Il m'a donné une bouteille de 0,5 litre d'eau glacée. Je l'ai bue en une seconde. Je me suis rétabli. Je l'ai remercié. Quand j'ai levé les yeux, il n'y avait personne autour. Le moine avait disparu.
Devant et derrière, sur une distance d'un kilomètre, il n'y avait personne. Je gardais cette bouteille en plastique bleu dans ma main et je pleurais. Je garde toujours la bouteille du moine invisible.
C'est ainsi que Dieu se ressent sur l' Athos.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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