mercredi 18 mai 2022

Réminiscences de l'archimandrite Jovan (Radosavljevic) (+2021) à propos du futur Patriarche Pavle de Serbie

Mgr Pavle de Raska et Prizren, 1957 

Patriarche Pavle dans sa jeunesse

                                                             
Dans les années 1950, le hiérodiacre Pavle, futur patriarche de Serbie, vivait au monastère de Raca, dans le sud-ouest de la Serbie, non loin de la ville de Bajina Basta. Père Pavle se distinguait par son éducation. Ses connaissances étaient appréciées, et les gens lui demandaient souvent des conseils et des explications. Mais surtout, il était aimé - à la fois dans le monastère et dans le quartier - pour sa douceur, sa gentillesse et son bon sens de l'humour.

Le jeune hiérodiacre ne faisait pas étalage de ses connaissances, ne faisant jamais penser aux autres : « Regardez à quel érudit nous avons affaire. » Au contraire, Père Pavle préférait prier et faire le travail le plus simple, ce qui avait peu de choses à voir avec ses diplômes universitaires. Cela fut rapidement « corrigé », mais non sans une certaine résistance de la part du futur patriarche.

L'archimandrite Jovan, ami et compagnon d'ascèse du patriarche Pavle, se souvient qu'un jour d'automne, ils étaient assis et parlaient à une grande table en pierre sous un cerisier près de la porte du monastère - c'est ainsi que le hiérodiacre Pavle se reposait après avoir réparé le chemin (Il avait besoin de poser correctement des pavés parce que les anciens gonflaient toujours après la pluie et qu'il était extrêmement inconfortable d'y cheminer). Alors Père Pavle décida de corriger la situation. Au cours de leur conversation, ils remarquèrent un voyageur qui s'approchait de la porte, avec une barbe touffue, une tignasse de  cheveux gris et une énorme valise dans les mains. Il marchait d'un pas fatigué mais ferme. Père Pavle s'écria : « Oh la la ! Quel invité ! Père Steva (Stevan) Dimitrijevic lui-même, un professeur ! »

L'archimandrite Jovan raconte :

« Nous nous sommes empressés de rencontrer le prêtre, nous avons pris sa valise, nous l'avons accompagné au monastère, nous l'avons logé, puis nous l'avons assis à table et nous lui avons offert du jus de pomme frais que nous avions fait nous-mêmes. 

Le père Steva a parlé de manière très amicale et paternelle avec nous, les jeunes moines, avec l'higoumène du monastère et d'autres invités. À ce moment-là, Pavle se remit au travail, posant les pavés et redressant les bordures. L'archiprêtre, qui connaissait bien son ancien élève, apprit que Pavle travaillait également comme plombier, porteur d'eau et faisait de nombreux autres types de travaux. On ne pouvait pas dire que l'invité important était ravi.

« Il s'est avéré qu'il était venu au monastère, entre autres, pour informer le hiérodiacre de sa conversation avec le patriarche Vikentije II de l'époque au sujet d'une nouvelle obédience pour Pavle. À savoir : Une personne qui a une bonne connaissance de la théologie et d'autres domaines peut et doit les utiliser au profit d'autres personnes, et pas seulement pour accomplir les obédiences d'un travailleur de la route ou d'un plombier. L'invité dit ce qui suit, paraphrasant l'apôtre Paul :

« Un maître a trois clous : en cuivre, en argent et en or. Celui en cuivre sera utilisé par le maître zélé pour le travail ordinaire ; il utilisera celui en argent pour une certaine décoration ; et il utilisera le clou en or au meilleur endroit de la maison pour plaire non seulement à lui-même, mais aussi à ses amis. Mais vous, cher Père Pavle, faites le contraire, poussant le clou d'or - vos connaissances et vos compétences - dans des pavés et des puits. Ce n'est pas bon, cher frère. Un tel travail peut être effectué par une autre personne plus appropriée pour cela, qui a les compétences d'un moine qui travaille. A présent, l'Église manque de bons enseignants, de professeurs, d'érudits et de bons évêques ! »

« Ces paroles d'un honorable archiprêtre nous rendirent heureux et tristes en même temps. D'une part, en effet, nous réalisâmes que le père Pavle devait devenir prêtre, évêque - c'était clair pour tout le monde. D'autre part, cela nous fit mal qu'il nous quitte, qu'il n'y ait plus de bonnes conversations et d'enseignements avec lui, ce qui nous avait donné tant de connaissances et de réconfort. Mais il s'avéra que le père Pavle, et plus tard Vladyka Pavle, ne nous oublia pas.

« C'est ainsi que l'histoire de la réparation du chemin du futur patriarche Pavle prit fin. Par la suite, il pava de nombreuses autres routes, non pas des chemins ordinaires, mais des chemins vers Dieu. »

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


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