Le Président Truman considérait
le Patriarcat œcuménique comme "vital pour la politique étrangère
américaine".
(Matfey Shaheen)
Il fut un temps où le Patriarcat
de Constantinople était dans la fleur de l'âge... sa gloire passée s’est
estompée pour n’être qu’un pâle souvenir, et ce crime schismatique dont il
s'est fait le champion en Ukraine, est devenu l'un des plus grands problèmes de
l'Orthodoxie au XXIe siècle.
Depuis que le Patriarcat
œcuménique a envahi le territoire de l'Église orthodoxe ukrainienne, partie
autonome et autochtone de l'Église russe, beaucoup se sont interrogés :
Est-ce la montée d'une forme
particulière de "papisme oriental", ou le Patriarcat œcuménique
n'est-il pas vraiment souverain dans ses actions, mais sous l'influence de
puissances politiques étrangères, dont les Etats-Unis ?
Cet article n'est pas écrit pour
examiner les questions spirituelles ou canoniques des erreurs de
Constantinople, comme cela a déjà été fait par des experts dans le monde
orthodoxe.
Cet article a pour but de
démontrer la captivité politique du Patriarcat œcuménique aux puissances
étrangères à travers l'histoire, en particulier aux Etats-Unis. Nous
examinerons comment Constantinople a pu faire l'objet d'un chantage pour que
cette crise cache un scandale de détournement de fonds de plusieurs millions de
dollars dans leur GOARCH [Greek Orthodox Archidiocese/ Archidiocèse Orthodoxe
Grec d’Amérique], leur principale source de financement et leur bouée de
sauvetage économique.
Nous examinerons en particulier
un article très choquant d'une source patriarcale pro-œcuménique, qui déclare,
entre autres choses :
"Le Président Truman a
souvent souligné les convictions pro-américaines du Patriarche Athénagoras et
l'importance et l'influence du Patriarcat œcuménique, ainsi que de la
communauté orthodoxe grecque aux Etats-Unis, comme des éléments essentiels des
objectifs de la politique étrangère américaine " [1].
Comment en sommes-nous arrivés là
?
Pour comprendre les origines de
cette crise de l'Église ukrainienne et la tendance libérale et apparemment
anti-russe à Constantinople, nous devons regarder l'histoire. Pour ceux qui ne
connaissent pas l'histoire de l'Orthodoxie en Ukraine, je recommande vivement
cette merveilleuse série [Voir http://orthochristian.com/116251.html.]
en langue anglaise.
Pour simplifier, la Rus’
Kievienne était l'ancêtre de la Russie moderne, de l'Ukraine et de la
Biélorussie. Elle fut divisée par la conquête mongole et polono-lituanienne en
parties orientale (Russie) et occidentale (Ukraine et Biélorussie). En Orient,
l'Eglise de la Rus' était plus libre, parce que les Mongols non-chrétiens
s'intéressaient moins aux détails complexes de l'Orthodoxie que les Polonais
catholiques, les Lituaniens, et plus tard les Autrichiens qui allaient
gouverner l'Occident.
Le premier pivot occidental de
Constantinople
Au milieu du XVe siècle, deux
événements catastrophiques se sont produits pour le Patriarcat de
Constantinople, qui parvinrent à détruire son indépendance politique et détruisirent
presque son indépendance religieuse.
Le premier fut l'Union de
Florence, dans laquelle les hiérarques de Constantinople, espérant sauver la
ville de la destruction ottomane, signèrent une union avec l'Eglise catholique
romaine, acceptant de reconnaître la primauté du pape.
Ce fut un événement
cataclysmique, car ce fut, à bien des égards, le début de l'orientation
libérale et politico-occidentale du Patriarcat de Constantinople.
Le choix de Constantinople était
à l'opposé de celui du saint russe Alexandre Nevsky, Grand Prince de Vladimir
et de Kiev qui, en somme, préférait être un sujet politique pour les Tatars que
spirituel pour les Catholiques. Constantinople pensait utiliser la puissance
politico-militaire de l'Occident déchu pour se sauver et sauver la vraie foi,
mais en faisant cela, il a déjà tout perdu ! Il a oublié la leçon d'Alexandre
Nevsky, qui disait : "Dieu ne se trouve pas dans le pouvoir, mais dans la
vérité !" Telle a toujours été la position de l'Église russe, comme l'a
dit le Patriarche Cyrille de Moscou dans son sermon sur saint Marc d'Éphèse,
opposé à l'Union de Florence :
"Il ne peut y avoir d'union
sous la menace du schisme !"[2]
C'est ainsi qu'à cette époque,
l'Église de Russie orientale de Moscou et le Grand Prince Basile furent
horrifiés par l'idée d'union avec la Rome schismatique, et déclarèrent
l'autocéphalie de Constantinople. L'Eglise russe s'est élevée à l'autocéphalie
pour fuir les erreurs hérétiques et schismatiques de Constantinople !
La chute de Constantinople
Constantinople, évitant de
justesse l'union avec Rome (grâce en grande partie à saint Marc d'Ephèse) tomba
en 1453. Les jours de Constantinople en tant que ville impériale et Eglise prirent
fin, elle était alors désespérée pour survivre, et parfois, prête à se vendre.
La métropole de Kiev
"Les prêtres catholiques
traversent l'Ukraine dans des charrettes tirées par de simples chrétiens
orthodoxes ! C'est ce qui se passe en Ukraine, pendant que vous êtes assis ici
à festoyer, sans avoir ni yeux ni oreilles sur ce qui se passe dans le monde
!" ~ Taras Boulba, N.V. Gogol [3].
Les catholiques polono-lituaniens
ne permettaient pas à leurs sujets de l'Église de la Rus' occidentale - la
métropole de Kiev - de s'unir à l'Église de la Rus' orientale à Moscou, de
sorte que Kiev dut se tourner vers Constantinople.
Constantinople appauvri,
cependant, était en mode de survie, et plus préoccupée par l'obtien d'un
soutien matériel, que par les questions spirituelles complexes de la métropole
de Kiev.
Par exemple, peu avant l'Union de
Brest, le patriarche Jérémie II de Constantinople visita la Rus' occidentale ;
à cette époque, certains clercs qui allaient devenir schismatiques se
comportaient comme les seigneurs de guerre violents de Borgia et craignaient
d'être destitués quand ils l'entendirent arriver. [4] Mais ces seigneurs de
guerre n'avaient rien à craindre, car il s'avère que Jérémie, en route pour
Moscou, mendiait notamment, pour obtenir l’aumône de la riche Eglise Russe
libre. Quand il retourna à Kiev, il semblait aussi plus préoccupé par la
collecte d'argent que par les énormes problèmes auxquels l'Eglise était
confrontée.
Pourtant, certaines hiérarques de
la rive droite de l'Ukraine furent intégrées dans la noblesse polonaise, et
craignant d'être destitués pour leurs divers crimes, ils s’ouvrirent à l'idée
de l'Union de Brest avec Rome. Les dirigeants polonais, bien sûr, ont
favorisèrent politiquement ceux qui rejoignirent l'Union, car elle divisait les
peuples de la Rus, leurs rivaux.
Cet accaparement de terres à des
fins politiques semble similaire à ce que Constantinople fait aujourd'hui en
Ukraine. Ils [le patriarche et les hiérarques de Constantinople] sont moins
préoccupés par la légalisation des schismatiques qui soutiennent l'Union, qui
ont des tendances nazies alarmantes, et peut-être plus intéressés par la collecte
d'argent auprès de ces 20 métochies que le président ukrainien leur a promis.
C'est pendant la période
désastreuse de leur gestion de la métropole de Kiev que l'Union émergea, et par
leur gouvernance apathique et anémique, ils ne firent rien pour l'empêcher.
Ironiquement, l'un des plus
grands partisans du Mouvement Uniate dans les siècles précédents était Grégoire
("le Bulgare"), qui fut
brièvement installé comme métropolite de Kiev par l'ancien patriarche
Grégoire de Constantinople... qui lui-même devint uniate!
Les gens qui seront finalement
appelés Ukrainiens se soulevèrent sous les ordres du cosaque Hetman Bogdan Khmelnitsky
et joignirent l'Ukraine avec la
Russie en 1654. La métropole de Kiev suivit peu après, quittant Constantinople
et rejoignant le Patriarcat de Moscou. Depuis les années 1680 jusqu'à
aujourd'hui, Constantinople n'a jamais indiqué une seule fois qu'il sentait que
l'Ukraine était son territoire, et même pendant la très petite période [par
rapport à toute son histoire] où l'Ukraine était sous Constantinople, le Phanar
ne s'intéressait guère à ses affaires spirituelles internes, s'impliquant
seulement quand cela lui convenait politiquement ou financièrement.
Les peuples des Rus’, baptisés en
988 comme un seul peuple, furent divisés par les années 1360, et réunis par les
années 1680, après être restés ensemble jusqu'en 1991.
Une fois unis, presque tous ces
troubles fondirent comme la rosée au soleil. L'Académie théologique de
Kiev-Moghila, fondée dans la Laure des Grottes de Kiev par le saint hiérarque Pierre
Moghila, fut saluée par Pierre le Grand, et devint le prototype de tous les
séminaires orthodoxes. Les évêques « petits russes » (c'est-à-dire
ukrainiens), favorisés par Pierre le Grand, occupèrent pratiquement le trône
primatial de l'Église russe exclusivement entre 1700 et 1757.
D'une manière générale, il n'y
eut pas de conflits qui ébranlèrent
l'Église de la Rus' jusqu'au XXe siècle.
Le Mystère du XXe siècle
"Le Mystère du XXe
siècle". Artiste : Ilya Glazunov. Glazunov.ru.
Peut-être qu'aucune autre époque de l'histoire de l'humanité n'a jamais autant ruiné et changé le cours de la civilisation que le XXe siècle. C'est aussi à cette époque que le Patriarcat œcuménique a fait son pivot le plus fort en Occident, tant sur le plan théologique, en ce qui concerne l'œcuménisme et la question du calendrier, que sur le plan politique.
La Première Guerre mondiale a
balayé l'esprit de la vieille Europe - d'anciens empires fondés sur l'idée de
"chrétienté" ou d'une certaine forme de foi - et nous avons assisté
en Europe à la montée d'un nationalisme froid et profane.
Ceux qui pensent que le
christianisme ou la religion sont la source de la guerre n'ont qu'à se tourner
vers le XXe siècle, lorsque les pires atrocités de l'histoire humaine ont été
commises par des puissances brutales et sans Dieu.
La pseudo-religion n'a été
utilisée que comme un outil pour les objectifs politiques, et comme nous
l'avons vu dans l'Ukraine moderne, parmi certains schismatiques, avec leurs
peintures murales nazies, parfois leur politique devient leur religion.
Après l'assassinat démoniaque de
la sainte famille Romanov, une guerre a été lancée contre le Sainte Rus', et
l'Eglise russe a commencé son podvig [exploit ascétique/spirituel]de confession,
parmi les plus grands de l'histoire. Le métropolite de Kiev et de Galice fut
emmené à l'extérieur de la Laure des Grottes de Kiev et abattu, le patriarche
Tikhon de Moscou fut emprisonné, d'innombrables millions de personnes souffrirent
durant la guerre civile... et où était Constantinople ?
Constantinople soutenait
activement les bolcheviks....
Le Schisme Rénovationniste [i.e. l'église vivante]
Un fait peu connu par beaucoup,
c'est que pendant que le saint Patriarche Tikhon de Moscou était en prison, et
que l'Eglise en Russie était brutalement persécutée, les bolcheviks créèrent
une église schismatique.
Constantinople
reconnut en fait ce schisme comme légitime, appelant saint Tikhon à
démissionner, le calomniant, tandis que son Église canonique était persécutée,
et des croyants furent même exécutés pour avoir refusé de soutenir "l'église
rénovationniste ou église vivante]".
Cette situation ressemble
fortement à celle des schismatiques ukrainiens modernes, avec le soutien du
Phanar.
Aujourd'hui, Saint Tikhon est
commémoré universellement comme un saint, très populaire en Amérique aussi,
ayant consacré saint Raphaël de Brooklyn - Syrien qui se considérait comme ayant
une " âme russe " - comme le premier hiérarque en terre américaine.
Patriarche Tikhon.
Saint Tikhon est un saint... et
les rénovationnistes... Où sont-ils ? Ils sont passés comme les schismatiques
précédents comme un mauvais souvenir, il n'en reste plus rien.
Donc, cela nous laisse avec une
question. Pourquoi Constantinople ferait-il cela et pourquoi soutiendrait-il à
nouveau les schismatiques en Ukraine ? La réponse est peut-être plus politique
qu'on ne le pense.
Le chaos de l'entre-deux-guerres
et l'échange de population
La Première Guerre mondiale a mis
fin non seulement aux empires austro-hongrois et russe, mais aussi à l'Empire
ottoman. Un grand échange de population eut lieu entre la république turque laïque nouvellement formée et
la Grèce, ce qui fit perdre au Patriarcat œcuménique presque tout son troupeau
[5].
La Turquie n'est plus à la tête
d'un empire multiethnique, dans lequel le patriarche œcuménique pourrait servir
de figure pour unir les sujets chrétiens autour d'elle ; la Turquie ne
s'intéresse désormais qu'à la construction de la nation turque.
Cela amène le Patriarcat
œcuménique à son état actuel, comme l'a fait remarquer le journaliste Kirill
Alexandrov, " le Phanar devait de toute urgence chercher une raison d'être
pour sa propre existence... C'est alors qu'apparaissent les premières
prétentions à régner sur le monde orthodoxe tout entier... [6]
Profitant de la chute de l'Empire
russe et de la persécution de l'Église russe, Constantinople empiéta sur le
territoire du Patriarcat de Moscou comme un corbeau noir sur le corps d'un
cosaque encore vivant. [7]
Tout commença vers les années
1920, alors que l'Eglise russe était sans défense dans l'arène du martyre, nous
avons vu la montée de ce " papisme oriental ". Tout au long
du gâchis du XXe siècle, presque toutes les "tendances libérales" de
l'Orthodoxie ont été promues par Constantinople, par exemple, le passage
scandaleux au nouveau calendrier et l'œcuménisme, surtout avec l'Église
catholique.
N'oublions pas que c'est le
Patriarche Athénagoras de Constantinople qui a rencontré le Pape pour la
première fois et qui "leva" les anathèmes contre Rome. Et c'est ce
qui nous amène peut-être à l'aspect le plus important de tout cela, dans cette
analyse de la politique du Phanar - ses relations avec le gouvernement
américain, en particulier, à commencer par le Patriarche Athénagoras et le
Président Truman.
Le Patriarcat œcuménique et le
gouvernement américain
Photo : Orthodox History
Le Patriarche Athénagoras et le
Président Truman
Il y a un article très
intéressant sur un blog du GOARCH [Greek Orthodox Archidiocese/ Archidiocèse Orthodoxe Grec d’Amérique], qui expose essentiellement dans leurs
propres mots les relations entre la diaspora grecque, le Patriarcat œcuménique
et les plus hauts échelons de la puissance occidentale sous la forme du
président et du gouvernement américain.
L'article de M. Alexandros K.
Kyrou décrit en détail les relations étroites, et peut-être même la collusion
du Patriarcat œcuménique avec le gouvernement américain dans l'arène politique.
Regardez les premières phrases :
Il n'y a pas si longtemps, les
présidents américains ont compris que le soutien actif et la défense du
Patriarcat œcuménique de Constantinople par Washington était non seulement
conforme au principe de la liberté religieuse, mais aussi une ressource
mondiale importante pour mettre en lumière et communiquer les valeurs
américaines dans les deux domaines des relations internationales et de la
diplomatie des grandes puissances. L'histoire entourant cette vision officielle
du Patriarcat en tant que partenaire unique pour mettre l'accent sur les idées
démocratiques à l'étranger et pour promouvoir les objectifs humanitaires dans
le monde entier a cependant largement échappé à la conscience publique tout en
étant constamment érodée par la mémoire institutionnelle de l'élite de la
politique étrangère du pays.
Des documents récemment
déclassifiés du département d'État révèlent une histoire fascinante, un récit
alternatif, de l'intérêt des Américains pour le Patriarcat œcuménique de
Constantinople et de leur engagement avec lui pendant la période peut-être la
plus critique de la politique étrangère américaine. [8]
Au premier abord, cela peut
sembler anodin, après tout, qui n'est pas d'accord avec la liberté religieuse
ou l'humanitarisme ; mais quand on sait que Truman a été la première et la
seule personne à utiliser des armes nucléaires sur d'autres êtres humains, et
que les grandes puissances se préoccupent rarement plus de... enfin.... de pouvoir, on commence à voir ces
belles paroles comme des euphémismes.
Demandez aux chrétiens du
Moyen-Orient, ou d'ailleurs de Serbie, comment la "promotion de la
démocratie" occidentale les a aidés, quand elle a pris la forme de
"bombardements massifs pour la paix mondiale". Ce ne sont là que des
excuses de guerre, des prétextes pour justifier des jeux politiques.
En ce qui concerne le Patriarcat
qui "met l'accent sur les idées démocratiques", on peut se demander
où en est le christianisme, alors que pendant la plus grande partie de
l'histoire, le christianisme est allé de pair avec la monarchie, les monarques
étant oints par Dieu et installés pour régner par Lui depuis les temps
bibliques.
Dans le texte de l’office du
Triomphe de l'Orthodoxie, [9] il y a même un anathème [10] contre "ceux
qui ne croient pas que les monarques orthodoxes sont mis sur le trône (oints)
par Dieu".
Il ne s'agit pas d'argumenter
pour ou contre le monarchisme, mais il suffit de dire, que pour la plus grande
partie de l'histoire, l'Église a béni et soutenu la monarchie.
Depuis quand "mettre
l'accent sur les idées démocratiques", est-elle une mission d'un
Patriarcat orthodoxe ? Pourquoi ne pas plutôt "préserver la plénitude de
l'Orthodoxie", ou "chercher d'abord le Royaume des Cieux" ?
Soutenir le schisme n'est pas une bonne façon d'y parvenir....
Pourquoi tout cet intérêt pour
les idéologies et les objectifs politiques ? Cela semble dangereusement proche
de la théologie de la libération adoptée par l'Église catholique dans les
années 1960, qui signifiait essentiellement que l'Église se concentrait
davantage sur la fixation de la condition humaine sur une terre (déchue) que
sur la réalisation du Royaume des Cieux.
L'article explique ensuite
comment le président Truman a enrôlé le Patriarcat œcuménique parce qu'il
considérait la religion comme un outil puissant pour saper la foi dans le
système soviétique et pour provoquer à terme sa chute.
Encore une fois, un mot clé ici
est outil ; la religion devait être utilisée comme un outil. Il voyait le
Phanar comme un allié utile, un pion, dans sa propre bataille terrestre contre
l'Union soviétique - non pas pour le salut des âmes, mais pour la victoire de
ses propres objectifs politiques.
Le "collationnement
pan-religieux" de Truman, qui inclurait aussi le Vatican, avait un
objectif clé : placer un citoyen américain sur le trône de Constantinople - le
patriarche Athénagoras (Spyrou) - celui-là même qui "lèverait les
anathèmes" contre Rome... Tout cet œcuménisme commence à avoir une origine
et un but clairs maintenant. Comme c'était le cas avec l'Union florentine
auparavant, c'était une fois de plus que Constantinople pensait pouvoir se
sauver en faisant de la politique avec l'Occident.
Le Patriarche Athénagoras était
auparavant l'archevêque grec d'Amérique du Nord et du Sud.
Athénagoras s'adapta
confortablement à la vie en Amérique et semble même avoir tenté de s'enrôler
dans l'armée américaine [11], ce qui est un choix un peu étrange pour un
hiérarque orthodoxe.
La "Vache sacrée" de
Truman - Truman a-t-il propagé l'idée de la primauté de Constantinople ?
Truman était tellement investi
dans la mise sur le trône d'un Américain qu'il a non seulement envoyé
Athénagoras à Istanbul avec sa "bénédiction", mais il l'a
littéralement envoyé à Istanbul dans son propre avion présidentiel, "La
Vache Sacrée " [12“. Le Dr Kyrou affirme qu'il ne s'agissait pas
simplement d'un geste de respect, mais de ce qu'il a appelé "une action
mesurée" d'un président qui "considérait Athénagoras et le patriarcat
comme des partenaires influents et essentiels dans la promotion des intérêts
internationaux des Etats-Unis".
L'article du Dr Kyrou affirme même
que l'élection d'Athénagoras comme Patriarche œcuménique a non seulement reçu
le soutien de Truman, mais aussi, selon de nouvelles preuves, la "
participation possible de l'administration Truman " [13]. D'autres
articles notent l'influence et l'ingérence des États-Unis dans les affaires du
Patriarcat œcuménique, notamment l'élection d’Athénagoras. [14]
L'article de Kyrou admet
directement que cela signifiait que Truman considérait le Patriarcat œcuménique
comme un atout précieux en conflit direct avec l'Eglise russe pour le bien
politique de l'Occident. L'article dit ce qui suit :
"Truman]... a délibérément
souligné le statut œcuménique du Patriarcat de Constantinople - en tant que
premier Siège patriarcal entre égaux, jouissant d'une égide spirituelle sur
toutes les Eglises orthodoxes - comme un moyen de déjouer les efforts
politiques de Moscou pour projeter l'Eglise de Russie comme rivale mondiale de
Constantinople..."
Les puissances occidentales
craignaient apparemment que la Russie n'exerce une influence sur le
Moyen-Orient, y compris la Turquie, par l'intermédiaire des populations
orthodoxes qui y vivent. Historiquement, l'Occident considérait l'Empire
ottoman comme un garde fou contre la Russie.
Prenons la guerre de Crimée au
XIXe siècle, lorsque la France et l'Angleterre craignaient que la Russie ne
s'empare des Ottomans qui torturaient les chrétiens orthodoxes pendant des
siècles, et que le Moyen-Orient ne renaisse sous la protection russe.
Qu'a alors fait l'Occident ? Il a
soutenu l'Empire ottoman dans une guerre sur le sol russe, tuant des Russes
chrétiens pour soutenir un Empire musulman. Une fois de plus, l'Occident voit l’Istanbul
islamique comme un garde fou contre la Russie chrétienne.
Athénagoras rencontra ensuite le
pape et leva les anathèmes contre lui, et il semble qu'à partir de ce moment,
le patriarcat œcuménique restera fermement lié non seulement à la diaspora et
au gouvernement américains, mais à l'œcuménisme pro-Vatican.
Photo : Le Pappas Post.
L'occupation occidentale du
Patriarcat œcuménique
Dans le monde d'aujourd'hui, il
est indéniable que la majorité du financement et de la population du patriarcat
œcuménique provient des holdings nord-américains lucratifs. Pour toutes ces
raisons, de nombreux articles affirment que le patriarche œcuménique est
essentiellement un pion pour ces puissants intérêts et ces "sponsors".
Qui sont donc les parrains du Patriarcat œcuménique ?
L'examen d'un seul d'entre eux
permet de se faire une idée très claire de la situation : Michael Huffington,
le fondateur du célèbre Huffington Post. En bref, Michael Huffington est un
magnat des médias ouvertement bisexuel [15], qui soutient le mariage
homosexuel, ainsi que l'œcuménisme et plus particulièrement l'union avec
l'Église catholique, via sa fondation dans une université jésuite [16].
Michael Huffington, ouvertement
homosexuel (troisième à partir de la gauche) avec les hiérarques grecs Méthode
et l’archevêque primat Demetrios, ainsi que le cardinal catholique Sean
O'Malley à l’'anniversaire de
l'intronisation de Méthode.
Photo : boston.goarch.org.
Autre figure puissante associée à
cela, John Podesta, fidèle serviteur de la famille Clinton, qui peut
s'identifier comme catholique [17], mais dont la mère était grecque orthodoxe.
[18] En général, la relation du Patriarcat oecuménique avec le gouvernement
américain et le mouvement œcuménique a toujours été comme un éléphant dans un
magasin de porcelaine.
Un exemple frappant est celui de
Geoffrey Pyatt, ancien ambassadeur des États-Unis en Ukraine, qui s'est tenu
aux côtés de Victoria Nuland sur le Maidan, soutenant les ultra-nationalistes
ukrainiens violents qui, après un voyage au Mont Athos, a écrit sur Twitter [19]
:
"J'ai eu l'honneur de
rencontrer le métropolite Hiérothée de Nafpaktos à Vatopaidi. Nous avons eu une
importante discussion sur l'Orthodoxie dans le monde et sur le soutien des
États-Unis au Patriarcat œcuménique."
N'oublions pas que Pyatt a été
ambassadeur des États-Unis pendant le coup d'État de Maidan, qui a été négocié
par les Etats-Unis [20].
Victoria Nuland à Maidan. Photo :
Sputnik international.
Au cas où quelqu'un aurait besoin
d'un rappel, c'est le coup d'état de Maidan qui a transformé Kiev et l'Ukraine d'un
endroit européen normal et heureux à... enfin.... ceci....
La Place Maidan (place de
l'indépendance) avant
et après le coup d'Etat soutenu par l'Occident. Photo :
Twitter.
Il s'agit essentiellement du
microcosme de ceux qui financent et soutiennent le patriarcat œcuménique
(c'est-à-dire de ceux dont ils dépendent totalement pour leur survie même), et
dans cette optique, il n'est pas difficile de savoir quels sont les programmes
qu'ils soutiennent en secret, et pourquoi.
Un scandale de détournement de
fonds à New York a-t-il déclenché tout ce conflit ?
C'est un secret de polichinelle
qu'il y a eu un scandale massif, concernant la disparition apparente de sommes
d'argent massives, environ 10 millions de dollars [21] sur les 37 recueillis
pour la construction d'une cathédrale grecque à New York.
Michael Huffington a même demandé
la démission de l'archevêque Demetrios pour tout cela.
La réponse de l'archevêque
Demetrios a été incroyable ; il a dit que les donateurs "n'ont pas le
droit de demander où est passé l'argent, tout comme il ne leur demande pas
comment ils obtenu leur argent". Tout cela semble indiquer à quel point
les cyniques et les politiciens se comportent dans la hiérarchie du GOARCH et
dans le Patriarcat œcuménique.
Dans cet excellent article de
James George Jatras, ancien diplomate américain, en juillet dernier, le
département d'État américain a pris conscience de la mystérieuse disparition de
ces fonds.
Alors que les autorités enquêtent
actuellement sur la situation, il est allégué, et tout à fait plausible, qu'une
personne des plus hauts échelons du pouvoir américain a donné au Patriarcat
œcuménique un accord secret dans cette affaire scandaleuse : "Nous allons
laisser votre principale source de revenus en sécurité, mais vous devez en retour
créer une crise pour l'Église russe en soutenant les schismatiques ukrainiens".
Comme pour tout cela, il faut
lire entre les lignes et relier les points, mais en regardant l'histoire de la
captivité de Constantinople aux caprices politiques des puissances étrangères,
et en particulier ses relations avec les États-Unis au XXe siècle, ce n'est pas
seulement possible, mais plausible.
Le Père Séraphim Gan a noté qu'il
semble que Constantinople n'est pas libre dans ses actions, mais sous
l'influence de puissances non chrétiennes.
Le Métropolite Jonas, hiérarque de l’ERHF et ancien Primat de
l'Eglise Orthodoxe en Amérique (OCA) a écrit dans cet article étonnant (légèrement édité pour le contexte] :
"C'est ainsi que le
département d'État et les agences américaines soutiennent un charlatan
déshonoré et légitimement défroqué qui est dguisé [en Patriarche] [Philarète],
et qui manipule lui-même le pathétique[président ukrainien] Porochenko, pour sa
propre ambition. Ils ont fait chanter le Patriarche œcuménique âgé [Bartholomée]
au sujet de la disparition des fonds de l'archidiocèse [gréco-américain]
américain, et l'ont ensuite soudoyé. Pour se justifier, il a fait valoir une
interprétation de sa propre juridiction qui est rejetée par le reste des
Églises orthodoxes."
Conclusion :
Constantinople est
devenu un outil pour la politique occidentale
Une simple image historique
devient évidente :
°Constantinople était une ville de
grands patriarches, mais aussi de grands hérétiques comme Nestor lui-même.
°Peu avant la chute de Constantinople,
ils ont failli s'unir à Rome.
°Après la chute de 1453, le
Patriarcat est complètement à la merci des Turcs.
°Après la première guerre
mondiale, Constantinople perdit presque tout son troupeau ; à cette époque, il
provoqua le conflit du calendrier et soutint le schisme bolchevique rénovationniste.
Une tendance libérale est apparue au XXe siècle.
°Dans les années 1950,
Athénagoras, puissant allié du président américain Truman, devient patriarche.
Athénagoras devint le premier Patriarche à rencontrer le pape. Athénagoras
conduisit le Patriarcat œcuménique à jouer un rôle majeur dans la promotion de
la politique étrangère américaine dans les pays orthodoxes et contre Moscou.
°En 1971, le séminaire de Halki fut
fermé ; l'avenir du Patriarcat est remis en question.
°En 2018, le Patriarche de
Constantinople a rencontré et prié avec le Pape à de nombreuses reprises, et a
rompu la tradition en permettant aux prêtres de se remarier. Le Patriarcat est
dans son état le plus faible et le plus réduit à ce jour.
°En juillet 2018, le gouvernement
américain aurait exercé des pressions sur le patriarcat par l'intermédiaire de
sa principale source de financement dans le cadre du scandale GOARCH [i.e de l'archidiocèse grec d'Amérique].
°En septembre 2018, Constantinople
envahit le territoire canonique de l'UOC [Eglise orthodoxe ukrainienne
canonique] et du Patriarcat de Moscou.
Notez la tendance : plus
Constantinople se rapprochait des puissances politiques étrangères, par
exemple, l'Empire ottoman ou les Etats-Unis, plus sa pratique s'éloignait de
l'Orthodoxie. Plus Constantinople s'affaiblit au cours de l'histoire, plus elle
penche fortement vers l'influence occidentale.
Constantinople est devenu un
outil pour les puissances occidentales, qui a très probablement commencé ce
gâchis en Ukraine à leur demande. Il suffit de regarder la façon illogique dont
ce mouvement d'autocéphalie a été planifié. Le patriarche Bartholomée n'est pas
un homme inintelligent ; même s'il est aveuglé par les illusions papales, il
devait savoir que cela ne marcherait pas.
Déjà, jusqu'à présent, aucune
Église locale n'a soutenu Constantinople ou les schismatiques, de nombreuses
Églises et hiérarques se sont prononcés contre les actions de Constantinople.
L'un des évêques anglophones les plus célèbres, le métropolite Kallistos
(Ware), évêque du Patriarcat œcuménique lui-même, a déclaré :
"Avec tout le respect que je
dois à mon Patriarche, je dois dire que je suis d'accord avec l'opinion
exprimée par le Patriarcat de Moscou que l'Ukraine appartient à l'Eglise
russe."
Constantinople, qui, quelques
mois auparavant soutenait l'Eglise canonique [d’Ukraine], a alors fait un
virage total de 180 degrés, et commencé à propager la grandeur papale,
envahissant le territoire canonique du plus grand patriarcat orthodoxe du
monde, et déclarant qu'il peut accorder et révoquer l'autocéphalie.
C'était comme si tout cela était
planifié par des gens qui ne comprennent même pas comment l'Eglise orthodoxe
fonctionne, ou ce qu'il y a dans les pouvoirs des Patriarches œcuméniques, mais
qui souhaitent simplement créer des problèmes pour l'Orthodoxie et la Russie en
particulier....
Il semble qu'en étant occupé et à
la merci des puissances politiques étrangères, il est impossible pour
Constantinople de prendre des décisions pour le bien du reste du monde
orthodoxe. Bien que l'orthodoxie n'ait pas de figure papale suprême - seul le
Christ est à la tête de l'Église - s'il doit y avoir un premier parmi des égaux
-, il devrait peut-être habiter dans une puissance orthodoxe assez forte pour
préserver sa propre souveraineté.
Version française
Claude Lopez-Ginisty
d’après
********
NOTES :
1
https://blogs.goarch.org/blog/-/blogs/truman-athenagoras-and-world-orthodoxy-an-historical-alternative-to-current-us-relations-with-constantinople-part-two
3 Légèrement adapté du roman "Taras Boulba" de
Nikols Gogol, chapitre 4.
6 Ibid.
7 Ibid.
9 Le premier dimanche du Grand Carême.
10 Помышляющим, яко возводятся православнии православнии
Государи престолы на на о о о не по особливому помазании о них Божию
благоволению благоволению благоволению при изливаются измену на царство тако
тако дарования Духа к не не не и Святаго великого прохождению сего и против на
них не измену ; и тако дерзающим дерзающим бунт бунт бунт бунт и измену :
анафема.
À ceux qui pensent que les Souverains orthodoxes sont élevés sur le trône non par une bienveillance particulière de Dieu à leur égard et que les dons de l’Esprit Saint ne se répandent pas sur eux lors de leur onction pour leur règne, dans le but de l’accomplissement de cette grande vocation ; et ainsi osent se révolter contre eux et les trahir : anathème !
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