George Alexander MacGuire
Antigua et Barbuda est une nation insulaire dans la
mer des Caraïbes. Parmi ses fils, George MacGuire, le fondateur de «l'Église
orthodoxe africaine» occupe une place importante. Au moment de sa mort,
l'Église comptait environ 30.000 fidèles, 50 membres du clergé et des dizaines
de paroisses aux États-Unis, en Ouganda, au Kenya, au Canada, au Venezuela, à
Cuba et à Antigua. Qui était cet homme, et pourquoi a-t-il dirigé sa recherche
spirituelle vers l'Orthodoxie?
George MacGuire naquit le 28 mars 1866 sur l'île
d'Antigua dans le village de Svits. Il y passa son enfance et sa jeunesse. Il
termina l'école et le collège locaux, puis le séminaire de l'église morave. Il
fut pasteur de cette église pendant six ans, de 1888 à 1894.
En 1894, George déménagea aux États-Unis, où il se
convertit à l'anglicanisme, puis deux ans plus tard, il devint prêtre anglican.
Il fut le recteur de l'église de Saint Philippe à Richmond (1898-1900), à
l'église de Saint Thomas à Philadelphie (1901-1905), et missionnaire auprès des
Afro-Américains en Arkansas (1905-1909). Est témoin de son talent de
prédicateur, le fait qu'après seulement quatre ans à ce poste, il augmenta le
nombre de missions de un à neuf.
En 1910, il reçut une éducation médicale au Boston
College. À cette époque, il fonda à Cambridge une communauté pour les
immigrants noirs des Caraïbes. Cependant, l'église épiscopalienne ne
reconnaissait pas cette communauté et MacGuire était de plus en plus convaincu
que dans une église où son propre évêque soutenait le principe de la
ségrégation, il y avait peu de perspectives pour les Noirs.
Après avoir reçu des nouvelles de la maladie de sa
mère, George quitta tout et retourna à Antigua en 1913. Là, il prit soin de sa
mère pendant cinq ans, servit dans l'église anglicane et donna des soins
médicaux aux nécessiteux.
Après la mort de sa mère, MacGuire retourna aux
États-Unis et y prit une part active dans le mouvement favorisant la
citoyenneté et l'égalité des droits sociaux de la population noire. Étant un
chrétien croyant, il voulut fournir cette égalité dans la vie de l'église. Il
avait l’habitude de dire à ses disciples: «Nous sommes obligés de retourner
dans notre église natale». Et à la recherche de cette Église, George découvrit
la tradition chrétienne orthodoxe. Cela l'inspira tellement qu'en 1921, à la
surprise de beaucoup, il annonça la création de «l'Église orthodoxe africaine»
dont il devint le chef.
Pourquoi George MacGuire a-t-il jugé nécessaire de
tourner le regard des chrétiens noirs américains vers l'Église orthodoxe? Il
nomma deux raisons. D'abord, parce que c'est l'Église originale et authentique
du Christ, qui a une succession apostolique ininterrompue. Deuxièmement, parce
que l'Orthodoxie «n'a jamais été associée au racisme et au colonialisme.»
Vraiment, les chrétiens noirs ont fait partie de
cette Église depuis l'Antiquité et sont même devenus des saints orthodoxes
célèbres. Par exemple, saint Moïse le Noir (ou l’Ethiopien), moine du quatrième
siècle qui vécut dans le désert égyptien, et bénit Elezvoi, roi d'Éthiopie.
On considère que MacGuire fut aidé dans son
introduction à l'Orthodoxie par le Jamaïcain Robert Morgan, qui était avec lui prêtre
de l'église épiscopalienne aux États-Unis et son successeur en tant que recteur
de l'église de Saint Philippe à Richmond. Même au début du XXe siècle, Morgan
avait commencé à étudier l'histoire de l'Église et, par conséquent, il était
convaincu que l'Église orthodoxe était le «pilier et le fondement de la
vérité». En 1904, il se rendit dans l'Empire russe afin de se familiariser avec
l'Orthodoxie non seulement d’après les livres, mais dans la vie. Là, il visita
les monastères et les églises de Moscou, Saint-Pétersbourg, Kiev et Odessa, et fut
même invité d'honneur de l'empereur russe Nicolas II. Bientôt Robert Morgan
reçut l'orthodoxie sous le nom de Raphaël et, en 1907, il fut ordonné par le
métropolitain... comme prêtre de l'Église orthodoxe de Constantinople.
Un tel contraste frappant, le fait qu’un jeune
chrétien noir est reçu avec un grand amour au plus haut niveau dans un pays
orthodoxe alors que dans son propre pays, il n'a même pas le droit de boire de
l'eau de la même fontaine qu'un blanc, convainquit MacGuire mieux que toute
déclaration selon laquelle l'Église orthodoxe est exemptede racisme, et pas seulement historiquement
mais aussi dans les temps modernes.
Mais contrairement à Raphael Morgan, George MacGuire
prit un chemin différent; il ne rejoignit pas personnellement l'Eglise
orthodoxe, mais il décida de fonder sa propre grande église, supposant que dans
le futur il arriverait à un accord avec l'Orthodoxie pour la faire reconnaître.
L'initiative de MacGuire trouva rapidement des sympathisants, tout d'abord
parmi les gens d'Antigua et d'autres îles des Caraïbes vivant aux États-Unis
qui affluèrent vers son église. Grâce à ses talents de prédicateur et
d'organisation, le nombre de fidèles augmenta rapidement et des branches de
l'église commencèrent à apparaître en dehors des États-Unis, y compris en
Afrique.
Dès le début, George MacGuire entama des discussions
avec l'Église orthodoxe russe au sujet de son ordination, mais bien qu'il ait
été accepté avec bonté, il ne put recevoir ce qu'il demandait. La raison en
était qu'il voulait essentiellement recevoir l'ordination d'une Église dont il
n'avait pas l'intention d'être un pasteur, mais plutôt de diriger sa propre
«église indépendante», ce qui contredit les règles et les enseignements
orthodoxes sur l'Église. Néanmoins, il parvint à un accord avec l'archevêque
Vilett, chef de l'église catholique américaine autoproclamée. Vilett ordonna George
MacGuire évêque le 28 septembre 1921.
La même année, MacGuire rencontra personnellement le
Patriarche de Constantinople Meletios et a discuté avec lui de la possibilité
de reconnaître «l'Église orthodoxe africaine». Il convainquit le Patriarche
qu'ils croyaient en la Trinité et aux deux natures du Christ incarné aux sept
Conciles œcuméniques, prêchaient le Credo sans changement (sans l'addition
catholique du filioque), vénéraient la Mère de Dieu, et croyaienent au salut
non seulement par la foi mais aussi par les œuvres. Selon les paroles de
George, le Patriarche convint que leur enseignement sur ces points était
orthodoxe, mais la question de les accepter dans la communion canonique fut
reportée jusqu'à ce que "l'église orthodoxe africaine" "démontre
stabilité et croissance".
En 1924, le Patriarche de Constantinople suivant
Grégoire VII, dans le cadre du dialogue continu, demanda plus d'informations
sur l'église de MacGuire. En fait, bien qu'elle ait accepté à bien des égards
l'enseignement dogmatique orthodoxe, dans tous les autres domaines, y compris
les services divins et la vie paroissiale, l '«église orthodoxe africaine»
continuait à défendre l'ordre anglican. Au cours de la vie de George MacGuire,
son plein recours aux voies orthodoxes n'eut pas lieu et, par conséquent, il ne
devint pas une partie de l'Église orthodoxe universelle.
George mourut le 10 novembre 1934 et fut enterré
dans le Bronx. Après sa mort, la branche de «l'église orthodoxe africaine» en
Ouganda et au Kenya, dont les paroissiens comprenaient plus d'un tiers des
fidèles, entra dans l'unité avec l'Église orthodoxe canonique et devint une
partie de l'ancien patriarcat d'Alexandrie. Ainsi ont-ils amené à sa conclusion
logique le mouvement que MacGuire avait initié. Grâce à ses efforts, en fin de
compte des milliers d'Africains trouvèrent leur chemin vers l'Orthodoxie.
À l'heure actuelle, dans l'île natale de George, à
Antigua, une paroisse de l'Église orthodoxe canonique de la juridiction
antiochienne a ouvert ses portes. Cela pourrait être considéré comme un bel
achèvement symbolique du chemin que ce fils distingué d'Antigua commença il y a
100 ans.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
*
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