La question
anthropologique dans l'Orthodoxie est [de faire] que l'homme considère
éternellement le Christ comme paradis et non comme enfer; que l'homme participe
à Son “royaume” céleste et éternel. C’est là où l'on voit la différence entre
le christianisme de l'Orthodoxie et les diverses autres religions. Les autres
religions promettent un certain état "bienheureux", même après la
mort. L’Orthodoxie n’est cependant pas une quête de bonheur, mais un remède de
la maladie de la religion, comme le défunt père Jean Romanides l’enseigne d’une
manière patristique. L'Orthodoxie est un hôpital ouvert au sein de l'histoire
(une “infirmerie spirituelle” selon saint Jean Chrysostome), qui offre la guérison
(catharsis) du cœur, pour finalement atteindre la déification - la seule
destination souhaitée de l'homme. Telle est la voie qui a été décrite de façon
exhaustive par le père Jean Romanides et le révérend métropolite de Nafpaktos,
Hiérotheos (Vlachos); c’est la guérison de l'humanité, telle qu’elle fut vécue
par l'ensemble de nos saints.
Tel
est le sens de la vie dans le corps du Christ (l'Eglise). C’est la raison de
l'existence de l'Eglise. C’est ce que visait toute l’œuvre rédemptrice du
Christ. Saint Grégoire Palamas (4e Homélie sur la Parousie) dit que la volonté
du Dieu pré-éternel pour l'homme est de “trouver une place dans la majesté du
royaume divin” - pour atteindre la déification. Tel est le but de la création.
Et il poursuit: "Mais même Sa kénose divine et secrète, Sa conduite
théanthropique, Sa passion rédemptrice, et chaque mystère unique (en d'autres
termes, toute l’œuvre du Christ sur terre) ont tous été providentiellement et d’une
manière omnisciente pré-déterminée à cette fin [pour cet objectif] même.
La
réalité importante, cependant, est que tous les gens ne répondent pas à cette
invitation du Christ, et c’est la raison pour laquelle tout le monde ne participe
pas de la même manière à Sa gloire incréée. Ceci est enseigné par le Christ,
dans la parabole de l'homme riche et de Lazare (Luc, Chapitre 16). L'homme
refuse l'offre de Christ, il devient l'ennemi de Dieu et rejette le rachat
offert par le Christ (ce qui est un blasphème contre le Saint-Esprit, car c’est
dans l'Esprit Saint que nous acceptons l'appel du Christ). Ceci est la personne
“jamais repentie” visée par l'hymne de l’Eglise. Dieu “ n’a pas d’inimitié",
observe le bienheureux Jean Chrysostome; c’est nous qui devenons Ses ennemis;
nous sommes ceux qui Le rejettent. L'homme impénitent devient diabolisé, parce
qu'il l’a choisi. Dieu ne veut pas cela. Saint Grégoire Palamas dit:. "...Car
ce ne fut pas ma volonté préexistante, je ne t’ai pas créé à cette fin; je ne
prépare pas pour toi le bûcher. Ce bûcher éternel a été allumé pour les démons
qui portent le caractère immuable du mal, vers lequel ta propre opinion
impénitente t’as attiré." "La cohabitation avec les anges malfaisants
est volontaire" (4ème Homélie sur la Parousie) En d'autres termes, c’est
quelque chose qui est librement choisi par l'homme.
Tant
l'homme riche que Lazare, étaient à la recherche de la même réalité, à savoir,
Dieu dans Sa lumière incréée. L'homme riche a atteint la Vérité, la vision du
Christ, mais il n'a pas pu y prendre part, comme Lazare l’a fait. Le pauvre
Lazare a reçu une “consolation”, alors que le riche a reçu
"l'angoisse". Les paroles du Christ pour ceux qui sont encore dans ce
monde, selon lesquelles ils “ont Moïse et les prophètes," signifient que
nous sommes tous sans excuse. Car, nous avons les saints, qui ont vécu et qui
nous appellent à adhérer à leur mode de vie afin que nous puissions atteindre la
déification (theosis) comme ils l'ont fait. Nous concluons donc que ceux qui
ont choisi les mauvaises voies (comme l'homme riche) sont sans excuse.
Notre
orientation envers notre prochain est révélatrice de notre état intérieur, et c’est
la raison pour laquelle ce sera le critère de Jugement Dernier durant la
Seconde Venue du Christ (Matthieu, ch. 25). Cela ne signifie pas que la foi, ou
la fidélité de l'homme au Christ soit ignorée; la foi est naturellement une
condition préalable, parce que notre attitude envers l'autre montrera si oui ou
non nous avons Dieu en nous. Les premiers dimanches du Triode précédant le Carême
tournent autour des relations avec nos semblables. Au premier de ces dimanches,
le pharisien extérieurement pieux se justifie et dénigre le percepteur. Le
deuxième dimanche, le frère aîné (une répétition du pharisien apparemment pieux)
est attristé par le salut de son frère. De même apparence pieuse, il avait lui
aussi une fausse piété, qui ne produisit pas d'amour. Le troisième dimanche, cette
condition atteint le tribunal du Christ, et est mise en évidence comme critère
pour notre vie éternelle.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après
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