samedi 21 juin 2014

Métropolite Antoine de Souroge: L’aveugle-né (Jean 9 :1-35) / Sermon du 19 mai 1974




Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

Avant sa rencontre avec le Christ, l'aveugle n'avait jamais rien vu. Tout était sombre, il devait deviner les choses, les explorer par le toucher, utiliser son imagination. Il n'avait pas d’image authentique et claire des choses. Puis il a rencontré le Christ, et le Christ lui a ouvert les yeux. Et quelle est la première chose que cet homme a vu? Le visage du Christ, son regard, le visage de Dieu fait homme, le regard divin plein d’amour attentif et compatissant reposant sur lui, sur lui seul parmi toute la foule. 

Tout de suite, il se trouva face à face avec le Dieu vivant et rencontra le miracle qui nous étonne tellement: que Dieu puisse concentrer son attention sur chacun de nous - comme sur la brebis perdue - et ne pas voir la foule, mais voir une seule et unique personne.

Après cela, l'homme a probablement tout sondé autour de lui, et ce qu'il avait connu par la description, par ouï-dire, est devenu réalité: "je vois."

Cela arrive à l'heure actuelle aussi; cela peut arriver à chacun de nous. Comme l'aveugle-né nous vivons la plupart de nos vies par l'aumône, nous nous asseyons comme des mendiants sur la route, tendant la main dans l'espoir que quelqu'un va remarquer, sinon nous au moins notre main, et nous donner quelque chose pour nous sustenter pour les prochaines heures à venir en tout cas. 

Une telle nourriture vient pour nous sous la forme d'un regard amical reposant sur nous, d’une parole pour nous, d’une gentillesse faite pour nous. Mais tout cela nous laisse encore sur la route, aveugle et mendiant de l'aide.

Quand le Christ passa près d’un autre aveugle, Bartimée, celui-ci n'attendit pas que le Sauveur vienne vers lui et lui demande s'il voulait être sauvé, s'il voulait recouvrer sa vue. 

Dès qu'il a senti que quelque chose d'inhabituel se passait dans la foule bruyante, et qu’en réponse à sa question, il lui a été dit Qui passait par là, il a commencé à crier à l'aide. Certes, les gens ont essayé de l'arrêter; certes, un léger doute a peut-être glissé dans son esprit, cela valait-il la peine de crier, d’appeler à l'aide, le Seigneur l’entendrait-il, répondrait-il à une demande aussi insignifiante? 

Il a poursuivi en réclamant de l'aide parce que sa souffrance était si grande, sa nécessité était si désespérée… Il était prêt à bousculer les gens, pour se frayer un chemin à travers la foule pour atteindre Dieu et être entendu par Lui.

Si seulement nous pouvions réaliser combien nous sommes aveugles! Si seulement nous pouvions réaliser que notre connaissance de la vie, non seulement éternelle, la vie divine, mais la vie terrestre, dépend presque entièrement des ouï-dire, que la vie autour de nous est sombre et fantomatique, parce que nous sommes aveugles, ou (comme l'autre aveugle dans l'Evangile, qui ne fut pas immédiatement guéri par le Christ) ou bien que nous voyons les choses comme dans un brouillard! Si seulement nous pouvions nous rappeler ce que le Sauveur nous parle de la beauté et de la gloire de la vie, à la fois éternelle et terrestre, et ne pas être satisfait de notre cécité, comme nous essaierions sincèrement essayer de retenir le Christ, afin qu'Il puisse nous percer de son regard et nous adresser Sa parole souveraine et vivifiante de guérison.

Alors, en effet, nous pourrions voir l'étonnante beauté du visage du Christ, la beauté insondable du regard divin reposant sur nous avec miséricorde, compassion et tendresse. Nous utilisons nos yeux si facilement, mais nous voyons peu, et seulement superficiellement.

Cherchons la vision qui peut être nôtre uniquement, quand nos cœurs deviennent lumineux et purs. Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu; et dans l'éclat de la Présence de Dieu, nous pourrions nous voir les uns les autres, chacun, soit illuminé par l’amour de Dieu, brillant de la gloire de la vie éternelle, ou bien blessé, sombre, attendant de nous non seulement des aumônes, mais l’abandon de toute notre vie à l'amour afin qu'il puisse recevoir la vue, afin que, pour lui aussi, le Royaume des Cieux puisse être déjà révélé sur terre.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

vendredi 20 juin 2014

Roman Savtchouk: La fidélité de sainte Xénia à Dieu



Saint-Pétersbourg à la fin du XVIIIe siècle ne pouvait pas être aussi bruyante et peuplée qu’elle ne l’est aujourd'hui, mais même alors, elle aurait difficilement pu être appelée une île paisible de paix salvatrice. En Russie, il y avait encore quelques endroits inhabités et solitaires, qui attiraient les ouvriers prêts à se sacrifier dans le domaine du service pacifique pour Dieu. Il semblait que c’était là des lieux de choix pour ceux qui souhaitaient sincèrement consacrer leur vie au Créateur.

L'image de la bienheureuse Xénia semble d'autant plus étrange dans le contexte de l'agitation et de la vanité de la capitale. Cela semble avoir été oublié par la femme vivant dans les rues bruyantes d'une grande ville, déterminée à vivre sa vie uniquement selon les commandements de l'Évangile, indépendamment de toute opinion humaine. 
Vêtue de vêtements d'hommes, se faisant appeler du nom de son défunt mari, Andréi Féodorovich, la bienheureuse pouvait-elle vraiment s'attendre à la compréhension et à la sympathie de ceux qui l'entouraient? Ou, peut-être voulait-elle intentionnellement augmenter son podvig [labeur ascétique] par son endurance devant l'humiliation des autres? Si oui, alors tout s'est bien passé selon ce plan dès le début. 

En été et en hiver, dans le froid et la chaleur, la sainte errait pendant des journées entières autour de Saint-Pétersbourg; et des gens mauvais, des garnements des rues en particulier, souvent riaient et se moquaient d'elle. Cependant, les gens autour d'elle ne tardèrent pas à remarquer que dans ses paroles et ses actions, il y avait un sens profond caché. Et quand la bienheureuse commença à être respectée en tant que clairvoyante, à peine apparaissait-elle dans les rues et les marchés de la ville que tous ceux qui la connaissaient lui offraient leurs services. 

Indépendamment de la saison ou du temps, chaque nuit, la bienheureuse Xénia allait aux champs et priait jusqu'à l'aube. Là, dans ses paroles, la présence de Dieu était "plus nette". Cela rendait d'autant plus perplexe… pourquoi la sainte revenait-elle alors dans la capitale? Pourquoi ne restait-t-elle pas en permanence dans ce lieu où il était si bon pour elle de demeurer avec Dieu?

Bien sûr, la réponse à cette question se trouve à la frontière des formes rationnelles. Il est difficile de sonder ceci par la seule raison. Cependant, le cœur chrétien diffère du cœur incrédule précisément dans le fait qu'il ne rejette pas des vérités qui ne peuvent être sondées par la raison. Et cette reconnaissance de la force de l'âme capable d'agir contrairement à la raison, nous rapproche de la compréhension du podvig de la sainte. Mais ce n'est pas tout.

Dans l'image de sainte Xénia, tout le monde peut trouver quelque chose de familier et de proche. Il semble qu'il n'y ait pas de barrières entre la sainte et l'âme de toute personne-aucun malentendu, ou différence d'opinions. Il suffit de dire un mot, d'éveiller un sentiment dans le cœur, et vous serez immédiatement entendu, compris, consolé…

D’où vient une telle force, une telle audace et un tel amour?

Dans l'Ecriture Sainte, il y a ces paroles remarquables: Garde ton coeur plus que toute autre chose, Car de lui viennent les sources de la vie (Proverbes 4:23). Sainte Xénia a su préserver son cœur et son trésor le plus important : sa fidélité au Christ. C’est le témoignage de la vie de notre chère petite Xénia, le pouvoir tout-conquérant de la fidélité au Christ. 

Ce fut le don de son cœur, et en suivant son appel, elle a su préserver intacte son âme, malgré la vanité et les opinions, la moquerie et l'attention flatteuse de ceux qui l'entouraient. Elle ne recherchait pas le Christ dans les labeurs ascétiques ou dans l’éloignement de ce monde vain, mais elle est simplement restée fidèle à Ses commandements, n’a pas craint de se plonger dans la mer orageuse du bruit de la ville. 

Vu de l'extérieur, ce chemin de folie que la sainte a suivi, lui a été donné par le Seigneur comme une réponse à son désir sincère de préserver sa fidélité à Dieu et à son amour pour son époux, que le Seigneur avait accordé à son cœur. 

Son podvig reste caché, mais ses fruits rendent encore heureux ceux qui s'adressent à sainte Xénia pour avoir de l'aide. Par sa folie-en-Christ, elle ne faisait que témoigner de la vérité qui était fermement ancrée dans son foyer: la fidélité à Dieu peut nous conserver toujours et partout, en toutes circonstances. Dieu nous garde, et mais nous pas ! 

Par conséquent, là où il est le désir sincère de suivre les commandements de l'Evangile, il n'y a plus de peur face à la réalité. Le cœur fidèle ne voit que Dieu devant lui, et place Sa réalité, exprimée dans les Évangiles, plus haut que tout ce qui est visible. 

Celui qui est fidèle à Dieu n'a pas peur de prendre des mesures décisives, car il se confie le Créateur pour être dirigé... Témoignage également de la force d'un cœur fidèle à son Créateur, est l’incroyable chaleur et de compassion de sainte Xénia, qui la rendent proche et chère à toute âme orthodoxe.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

jeudi 19 juin 2014

Métropolite Hilarion [Alfeyev]: De la componction et des larmes

On Prayer XVII: On Compunction and Tears

Je voudrais dire quelques mots sur l'état spirituel et émotionnel que les gens connaissent dans la prière. Rappelons-nous les vers bien connus de Lermontov:
Prière
Dans une minute pénible de la vie
Si la tristesse emplit le cœur,
Je récite sans cesse par cœur
Une invocation miraculeuse.
Il y a une volonté bienfaisante
Dans la musique des mots vivants,
Et en eux respire
Un délice inconnu, sacré.
Et l'âme se libère de son fardeau,
Le doute est lointain
Et il est facile d’avoir confiance, et de pleurer,
Et je me sens si léger, si léger... 
Dans ces paroles belles et simples du grand poète, est décrit ce qui arrive à beaucoup de gens pendant la prière. On récite les paroles de la prière, peut-être familières depuis l'enfance, et tout à coup on ressent une sorte d'illumination, d’éclair, et [viennent] les larmes. Dans le langage de l'église, cette condition est appelée componction. C'est une condition qui est parfois donnée au cours de la prière, où l'on sent la présence de Dieu plus que d'habitude. C'est un état ​​d'esprit, où la grâce de Dieu touche directement le cœur.
Rappelons le passage du livre autobiographique d'Ivan Bounine, La vie d'Arseniev, dans lequel Bounine décrit ses années d'adolescence et comment, alors qu'il était encore écolier, il a assisté à des offices divins dans l'église paroissiale de l’Exaltation de la Croix du Seigneur. Il décrit le début de l’agrypnie, dans la pénombre de l'église, où il y a très peu de gens:
"Comme tout cela me touche! Je suis encore un enfant, un adolescent, mais cependant, je suis né doté du sens de tout cela, et au cours des dernières années, j'ai tant de fois traversé cette attente, ce silence tendu qui précède l’office, tant de fois entendu les exclamations et le «Amen» qui les suit et les noie, devinant sans faille à l'avance chaque parole de l’office, donne maintenant une double réponse à tout, intensifié par son attente.
"Gloire à la sainte et consubstantielle... " j'entends la voix familière agréable venant légèrement de l'autel, et pour le reste de l’office je me tiens comme ensorcelé. "Venez, adorons Dieu notre Roi! Venez adorons... " "Bénis le Seigneur, ô mon âme," j'entends tout cela, tandis que le prêtre, précédé par le diacre avec un cierge, marche tranquillement dans l'église, la remplissant en silence de bouffées d'odeur d'encens, et s’inclinant devant les icônes; et les larmes obscurcissent mes yeux, car je sais déjà avec certitude qu'il n’y a, et peut être il ne peut y avoir, rien de plus beau ou plus élevé sur terre que tout cela.
Et ainsi continue à couler le saint mystère. Les Portes Royales sont fermées et ouvertes en alternance, symbolisant maintenant notre expulsion du Paradis que nous avons perdu, et maintenant la nouvelle contemplation de celui-ci; de merveilleuses prières de lumière sont récitées, donnant libre cours à notre conscience douloureuse de notre faiblesse terrestre, notre impuissance et notre empressement à être conduits sur ​​le chemin de Dieu.
Et Bounine écrit qu'il a pu visiter de nombreuses églises occidentales où il y avait des orgues, qu'il est allé dans les cathédrales gothiques, mais qu'il "n'a jamais pleuré dans les cathédrales comme [il l’a fait] dans la petite église de l'Exaltation de la Croix, en ces soirées sombres et solitaires."
Ce n’est pas seulement aux grands poètes et écrivains de pouvoir décrire les effets pleins de grâce qui sont liés à la visite d'une église. Tout le monde peut en faire l'expérience. Il est très important que notre âme soit ouverte à de tels sentiments, de sorte que, en entrant dans l'église, nous soyons prêts à recevoir la Grâce de Dieu dans la mesure où elle nous est donnée.
Si un état rempli de grâce ne vient pas à nous, et que nous ne sommes pas gagnés par la componction, nous ne devrions pas nous inquiéter. Cela signifie que notre âme n'est pas mûre pour la componction.
Mais les minutes de cette illumination sont un signe que notre prière n'est pas stérile. Elles témoignent du fait que Dieu répond à nos prières et que la grâce de Dieu touche nos cœurs.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

mercredi 18 juin 2014

LE GRIFFON




Un citadin se promenait dans le centre-ville avec un bon ami venu d’un village très éloigné. Il était midi et les rues étaient remplies de gens. Les voitures klaxonnaient, on entendait les sirènes des ambulances et les bruits des voitures: voilà les sonorités de la cité qui les assourdissaient.

Soudain, le villageois dit à son ami :

-J'ai entendu une cigale !

- Cela n'est pas possible dans ce vacarme! a répondu le citadin.


- Mais j’en suis sûr, j'ai entendu une cigale!

- C'est une folie! a répondu son ami.

Le villageois a écouté un moment avec attention, et puis il a traversé rapidement la rue vers une zone verte avec quelques arbres. Il a cherché autour et sous les branches et il a trouvé le petit grillon! Son ami est resté étonné.

- C'est incroyable! Il faut avoir une ouïe surhumaine!

- Pas du tout. Mes oreilles sont très semblables aux tiennes. Tout dépend de ce que tu écoutes avec elles. -- Mais c'est impossible ! Moi, je ne pourrais pas ouïr un griffon en ce bruit!

- Cela dépend de ce qui est important pour toi, répondit-il immédiatement. Permets-moi de te montrer quelque chose

Il a mis la main dans sa poche et il en a extrait quelques pièces de monnaie et il les a laissé tomber discrètement sur le trottoir.

Alors, en dépit du bruit assourdissant de la cité, ils ont remarqué que tous les gens dans un rayon de cinq mètres ont tourné la tête, en regardant vers le bas
[pour voir] si l'argent tombé était le leur.

- Est-ce que tu comprends-ce que je veux dire? Tout dépend de ce qui est important pour toi-même! Ecoutant jour après jour dans les média des "nouvelles" politiques et/ou diverses tragédies, catastrophes, etc. l’oreille, qui est le prolongement de notre cerveau se fixe sur tout ce qu'il est mauvais (voir l'arbre biblique du bien et du mal). De cette manière on nous induit la PEUR ! Graduellement nous devenons impuissants, craintifs envers l'avion, le froid, le vent, les aliments, les infections, envers les gens d'autour de nous etc. Et, ce qu'il est le plus grave, envers nos sentiments.
La réponse est: en écoutant ces prétendues "informations" qui, en fait sont poussière pour nos oreilles, nous sommes pris au piège ! Nous commençons à croire que l'atmosphère sociale est pesante, que les gens sont méchants, que nous vivons dans un monde plein d'incertitudes, qu'il est difficile d’avoir de la confiance dans les gens, etc. et pendant tout ce temps, les cigales chantent, les feuilles des arbres frémissent, les ruisseaux murmurent et nous... nous ne les écoutons plus !

Merci à Daniel A. 
de m'avoir transmis 
la traduction de ce texte roumain 
reçu de Niculina

mardi 17 juin 2014

Métropolite Hilarion [Alfeyev]: Pourquoi devons-nous aller à l’Eglise ?



On Prayer XVI: Why Do We Need to Go to Church?
Beaucoup de gens qui fréquentent rarement l’église ont une sorte d'attitude de consommateurs envers l'église. Ils viennent à l'église, par exemple, avant un long voyage - pour allumer un cierge pour le simple plaisir de le faire, de sorte que rien ne se passe sur la route. Ils viennent pour deux ou trois minutes, se signent à la hâte et, après avoir allumé un cierge, vont leur chemin. Certains, entrant dans une église, disent: "Je veux verser de l'argent afin que Batioushka prier pour untel ou untel," et ils versent de l'argent et partent. Le prêtre doit prier, mais ces gens eux-mêmes ne participent pas à la prière.
C'est une mauvaise attitude. L'Eglise n'est pas un automate pour acheter des "snickers" [barres de chocolat]: mettez votre pièce et les bonbons tombent!!! L'église est un endroit où aller pour vivre et étudier. Si vous rencontrez certaines difficultés, ou si un de vos proches est tombé malade, ne vous limitez pas à aller mettre un cierge. Venez à l'église pour l’office divin, immergez-vous dans les éléments de la prière, et élevez votre prière pour votre diffficulté avec le prêtre et la communauté.
Il est important que la participation à l'église soit régulière. Il est bon de se rendre à l'église tous les dimanches. La Divine Liturgie du dimanche, ainsi que la liturgie de grandes fêtes, c'est le moment où nous pouvons, en renonçant à deux heures de nos affaires terrestres, nous plonger dans les éléments de la prière. Il est bon de venir à l'église avec toute sa famille, afin de recevoir la Confession et la Communion.
Si on apprend à vivre du dimanche au dimanche, au rythme des offices de l'église, au rythme de la Divine Liturgie, alors toute notre vie va changer radicalement. Surtout, elle va devenir disciplinée.
Le croyant sait que dimanche prochain, il devra donner une réponse à Dieu, et il vit différemment: il ne se permet pas de péchés qu'il se permettrait autrement, s’il n’allait pas à l'église. En outre, la Divine Liturgie elle-même est l'occasion de recevoir la Sainte Communion, c’est-à-dire de s'unir à Dieu, non seulement spirituellement, mais aussi physiquement.
Enfin, la Divine Liturgie est un office complet au cours duquel la communauté ecclésiale entière et chacun de ses membres, peuvent prier pour tous ceux qui les troublent ou leur font souci. Les fidèles pendant la Liturgie peuvent prier pour eux et pour leur prochain, et pour leur avenir, apportant le repentir de leurs péchés, et demandant la bénédiction de Dieu pour la poursuite de leur ministère.
Il est très important d'apprendre à participer pleinement à la Liturgie. Dans l'Église, il y a  aussi d'autres offices, par exemple, l’agrypnie [office de toute la nuit qui enchaîne Vêpres, Matines, Laudes et Divine Liturgie], et l’office de préparation à la Communion.
On peut demander des molebens [Offices de supplication, ou Te Deum de remerciement] de supplication pour la santé d'une personne ou d'une autre. Mais aucun des offices dit "privés," c'est-à-dire des offices demandés pour les besoins spécifiques d'une personne, ne peut prendre la place de la Divine Liturgie, parce que la Liturgie est le centre de la prière de l'Eglise, et elle devrait devenir le centre de la vie spirituelle de chaque chrétien et de chaque famille chrétienne.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Les résultats de l'action criminelle de l'Otan-nazi...

LE MUR DU SILENCE


Les Albanais rêvent d’un Kosovo « ethniquement pur », c’est-à-dire sans les Serbes qui y étaient pourtant majoritaires jusqu’au XIXe siècle.




Le patriarche orthodoxe serbe Pavle, interrogé au sujet des extrémistes albanais membres de l’UÇK naissante, répondait auFigaro Magazine : « On ne va quand même pas installer des barbelés et des remparts autour de la maison du Seigneur ».
Dix-sept ans plus tard, c’est pourtant la décision que vient de prendre, à contrecœur, le père Sava, supérieur du monastère de Visoki Dečani, une petite enclave serbe du Kosovo.
Ce n’est pas la mort qui leur fait peur : « Notre vie, nous l’avons déjà donnée », précise-t-il, mais « si le martyre doit être accepté, il ne peut être recherché : si nous pouvons l’éviter, sans renier notre foi, nous avons le devoir de le faire ».
Mais ce n’est pas tout. La destruction du monastère, classé au patrimoine de l’UNESCO, serait dramatique pour les chrétiens du Kosovo, déjà largement menacés. Ils ont besoin de ce havre de paix et de réconfort pour oublier quelque temps l’hostilité dont ils sont la cible à l’extérieur. Sur le plan spirituel, mais également matériel. Les terres entourant le monastère sont cultivées : les produits servent d’abord à faire vivre les moines mais sont également distribués aux villageois les plus démunis. Si le monastère venait à disparaître, beaucoup de chrétiens seraient forcés à l’exil et le Kosovo-Métochie, vieille terre chrétienne et berceau de la Serbie, livrée aux mains des musulmans albanais, ne serait plus.
La seule solution est donc ce mur. Pourquoi une mesure aussi radicale ? Depuis la fin de la guerre, il y a quinze ans, l’hostilité anti-chrétienne n’épargne pas le monastère, victime d’une vingtaine d’attaques dont plusieurs à l’arme de guerre. Toutes se sont soldées par des dommages matériels, des profanations et des tags du sigle de l’UÇK sur les murs d’enceinte. Des agressions jusqu’à maintenant contenues par les soldats italiens de la KFOR, force armée de l’OTAN postée en permanence aux abords du site.
Mais le commandement de l’OTAN a annoncé leur retrait avant la fin de l’année. L’inquiétude est donc aussi grande que légitime, et ce mur s’est imposé comme seule « solution » pour éviter d’avoir à choisir, comme tant d’autres, entre la valise et le cercueil.
Deux kilomètres et demi de circonférence, trois mètres de haut, soixante centimètres de large… du béton armé surmonté de barbelés. Seule façon d’éviter le massacre de ces chrétiens menacés au cœur de l’Europe dans l’indifférence générale. C’est pourquoi l’association française Solidarité Kosovo, première ONG de soutien aux chrétiens du Kosovo, a répondu à l’appel de ces moines pour permettre l’achèvement du projet.
Les Albanais rêvent d’un Kosovo « ethniquement pur », c’est-à-dire sans les Serbes qui y étaient pourtant majoritaires jusqu’au XIXe siècle. Le silence de l’Europe est assourdissant sur le sujet : elle a endossé la responsabilité de cette région, il serait donc urgent de permettre la survie des Serbes restés sur place, mais également le retour de ceux qui ont été chassés de ce berceau historique de leur pays, déclaré indépendant de manière unilatérale en 2008, dix ans après une indépendance de fait.


lundi 16 juin 2014

Sur le blog du moinillon: Le carême des Apôtres



Image illustrative de l'article Actes des Apôtres


Le carême des Apôtres commence aujourd'hui, lendemain du dimanche de Tous les Saints, et s'achèvera le jour de la fête des Apôtres Pierre et Paul, le 29 juin du calendrier religieux (12 juillet du calendrier civil). Il durera donc presque un mois cette année (pour les orthodoxes qui suivent le calendrier religieux, pardon — le calendrier julien).

Déjà au début du XXe s., le clergé regrettait que certains carêmes soient nettement moins observés que le Grand carême. Le prêtre et liturgiste V.D. Prilutski, dans un exposé lors du Concile de 1917–1918, faisait remarquer que, à la différence du Grand carême, les offices des trois autres carêmes ne se distinguaient pas des offices «ordinaires», car la pratique de chanter l'«alleluia» et la prière de saint Ephrem pendant ces carêmes avait disparu (déjà à cette époque !). Et de supposer que ce non-respect de la pratique liturgique avait entraîné la non-observance du jeûne. [source : Богословские труды. Сб. 34. Стр. 300]Pendant le Grand carême «alleluia» est chanté chaque jour à l’exception des dimanches et certains samedis, alors qu’il n’est chanté que certains jours lors des autres carêmes. Ces jours — principalement lorsqu’il n’y pas de «grands» saints (avec polyeleos) — sont indiqués dans les Ménées.Nous observons cette pratique le premier jour de ces carêmes (s’il ne tombe pas sur un «grand» saint) afin d'entrer dans le nouveau rythme.Rappelons que le jeûne pour ce carême — comme celui précédant la Nativité — n'est pas très astreignant : l'huile et le vin sont autorisés chaque jour à l'exception des lundi, mercredi et vendredi (si un «grand» saint ne tombe pas ces jours-là) ; le poisson est autorisé les samedis et dimanches.

Métropolite Hilarion Alfeyev: La prière à l'eglise



On Prayer XV: Church Prayer
Comme le célèbre théologien du XXe siècle l’archiprêtre Georges Florovsky l'a dit, un chrétien ne prie jamais dans la solitude: même s’il se tourne vers Dieu, dans sa chambre, fermant la porte derrière lui, il prie toujours comme membre de la communauté de l'église. 
Nous ne sommes pas des individus isolés; nous sommes membres de l'Église, les membres d'un seul corps. Et nous sommes sauvés non pas isolément, mais avec d'autres, avec nos frères et sœurs. Par conséquent, il est très important que tout le monde soit connu non seulement dans la prière individuelle, mais aussi dans la prière de l'Eglise, avec d'autres personnes.
La prière à l’église a une signification et un sens particuliers. Beaucoup d'entre nous savent par expérience combien il peut être difficile de se plonger dans les lignes de la prière quand on est seul. Mais quand nous arrivons à l'église, nous sommes plongés dans la prière commune de beaucoup de gens, et cette prière nous amène dans certaines profondeurs, et notre prière se confond avec celle des autres.
La vie humaine est comparable au fait de nager dans une mer ou un océan. Il y a, bien sûr, les âmes courageuses qui, surmontant orages et les tempêtes, traversent la mer seules sur un yacht. Mais, en règle générale, les gens qui traversent l'océan se rejoignent sur un navire en mouvement d'une rive à l'autre. L'Église est ce navire dans lequel les chrétiens se dirigent ensemble le long de la voie du salut. Et la prière commune est l'un des moyens les plus puissants pour avancer sur cette voie.
Beaucoup de choses à l'église, et surtout les offices divins, encouragent la prière. Les textes des offices divins utilisés par l'Eglise orthodoxe sont exceptionnellement riches en contenu; une grande sagesse est cachée en eux. Mais il y a un obstacle rencontré par beaucoup de ceux qui viennent à l'Eglise [en Russie]: le slavon. 
Il y a beaucoup de débats d'aujourd'hui sur l'opportunité de maintenir le slavon dans les offices divins ou de passer au russe. Il me semble que si nos offices divins étaient entièrement traduits en russe, une grande partie serait perdue. Le slavon possède une grande puissance, et l'expérience montre qu’il n'est pas si difficile, qu’il n'est pas très différent du russe. Il faut tout simplement faire un peu d'effort, comme on le ferait pour apprendre une langue ou une science, comme les mathématiques ou la physique.
Ainsi, pour apprendre à prier à l'église, il faut peut-être faire un effort pour aller plus souvent à l'église, et acheter les livres des offices divins de base et, dans son temps libre, les étudier.
Ensuite, toutes les richesses de la langue liturgique des textes et des offices divins vont se dévoiler devant vous, et vous verrez que les offices divins sont toute une école qui, non seulement vous enseigne la prière, mais aussi la vie spirituelle.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Jean-Claude LARCHET: Recension / Recension: Patriarche Cyrille de Moscou, « La conversion au Royaume de Dieu. Méditations de carême » -

Patriarche Cyrille La conversion

Patriarche Cyrille de Moscou, « La conversion au Royaume de Dieu. Méditations de carême », Éditions Sainte-Geneviève, Épinay-sous-Sénart, 2014, 304 p.
L’entrée dans le carême des saints Apôtres rend de nouveau actuel le recueil d’homélies récemment publié par les jeunes éditions Sainte-Geneviève du séminaire russe d’Épinay-sous-Sénart.
Le commentaire de la prière de saint Éphrem le Syrien, qui en constitue les premiers chapitres, est certes plus approprié pour le Grand Carême où cette prière est dite de nombreuses fois chaque jour, mais ses demandes faites à Dieu d’éloigner de nous l’esprit de paresse, d’abattement, de domination et de vaines paroles, et de nous donner un esprit de chasteté, d’humilité de patience et de charité, de nous donner aussi de voir nos péchés et de ne pas juger nos frères, restent valables chaque jour de l’année, et plus encore pendant les temps des quatre carêmes où un effort particulier est demandé à chacun par l’Église. Le jeûne, dont un autre chapitre explique le sens, est quant à lui une pratique qui, dans l’Église orthodoxe, occupe plus de la moitié de l’année. Enfin, les autres thèmes abordés : la prière, la miséricorde, l’espérance, la lecture de la Sainte Écriture, l’apatheia ou quiétude, la synergie entre Dieu et l’homme, l’actualisation des promesses du baptême et l’amour, sont des exigences permanentes de la vie chrétienne sur lesquelles on ne doit pas se lasser de méditer en vue d’une meilleure application quotidienne. Les méditations sur la Semaine sainte qui constituent la dernière partie ont également une portée qui dépasse cette période : le Lundi saint donne lieu ici à une méditation sur la stérilité et la fertilité spirituelles, le mardi sur le jugement de Dieu, le mercredi sur la trahison, le jeudi sur la communion eucharistique, le vendredi sur la miséricorde divine et le sentiment d’abandon, le samedi et le dimanche sur l’espérance et la foi dans le Christ ressuscité.
À travers ses déplacements incessants dans les différents diocèses du pays et ses interventions fréquentes et actives dans les médias, le patriarche Cyrille de Moscou est bien connu en Russie comme un orateur et un prédicateur talentueux. Son sens pastoral s’exprime bien dans ce recueil d’homélies qui restent proches des sources évangéliques tout en abordant un certain nombre de problèmes actuels, qui comportent à chaque fois un enseignement spirituel bien ciblé et directement appliquable, et qui, par la simplicité et la vivacité de leur style, sont accessible à tout public. Ces homélies sont en même temps pour les prêtres un bon modèle de ce que devraient être les homélies dans les paroisses…
Nous donnons ici deux extraits: l’un concerne le jeûne, l’autre la prière.
« LE JEÛNE est une pratique durement mise à l’épreuve à l’époque moderne. Le jeûne a pratiquement disparu de la culture chrétienne occidentale. Dans notre pays, à l’époque de l’athéisme officiel, il n’était pratiqué que par une infime minorité de croyants qui cherchaient à imiter le Sauveur.
Aujourd’hui, le jeûne revient doucement dans notre vie. Cependant, nombreux sont ceux qui jeûnent parce qu’ils croient dans la vertu d’une diète, d’une alimentation allégée pour leur état physique. Certes, le jeûne est bénéfique à tout point de vue. N’importe quel médecin confirmera que l’allégement de notre alimentation agit positivement sur notre organisme et le stimule. En ce sens l’Église de Dieu qui, à la suite du Seigneur, veille au salut des hommes, contribue aussi à leur bien-être physique, notamment en leur conseillant la pratique du jeûne.
Mais les bénéfices du jeûne vont bien au-delà de l’état corporel. Le croyant doit bien comprendre sa signification spirituelle. Étant double par sa constitution – à la foi charnel et spirituel – l’être humain interagit avec son environnement dans ces deux dimensions. Par ailleurs, il y a une forte corrélation entre l’esprit et le corps.
Il est bien connu que par ses facultés intellectuelles et sa volonté l’homme peut contribuer à fortifier son état physique. Par exemple, quand quelqu’un s’affranchit des dépendances et des mauvaises habitudes, notamment de l’usage de l’alcool, du tabac; il lui faut pour cela des forces spirituelles, le résultat, en revanche, bénéficie au corps. Et inversement, en entraînant son corps par des exercices physiques, on contribue à développer la volonté et la force de l’esprit, car cela suppose de vaincre la paresse et le penchant au confort.
Ainsi, nos capacités spirituelles influent sur l’état de notre corps, de même que nos forces physiques se répercutent sur notre état d’esprit. C’est sur ce principe qu’est fondée la pratique du jeûne. En nous limitant et en nous contrôlant dans la consommation de la nourriture, nous entraînons nos sens, nous les rendons plus fins, plus réceptifs, plus sensibles. Notre état spirituel devient ainsi mieux préparé et plus ouvert à l’action de la grâce de Dieu.
« LA PRlÈRE peut transfigurer radicalement la personne humaine.
Certains ne comprennent pas tout à fait ce qu’est la prière. On peut s’interroger: si la prière est une requête adressée à Dieu ou une action de grâce pour ses bienfaits, pourquoi faut-il demander ou remercier aussi longuement et aussi souvent? Pourquoi ne pas faire cela en quelques minutes plutôt que d’y passer des heures?
Peut-on des heures entières, des jours entiers répéter les mêmes paroles, les mêmes prières? C’est au-delà des capacités humaines. On ne peut pas répéter sans cesse la même chose, parce qu’une telle répétition prive les paroles de leur sens; un tel radotage mécanique vide l’homme au lieu de l’enrichir. La prière continue est donc autre chose qu’une simple répétition des mêmes mots.
Aussi bien les liturgies interminables, surtout pendant la période du Carême, que les chrétiens orthodoxes célèbrent des heures durant, ou les exemples de l’oraison continuelle des grandes figures de sainteté, tels Macaire d’Égypte, Marie l’Égyptienne, Séraphin de Sarov, qui passaient des jours, des mois en recueillement, montrent que la prière ne consiste pas dans la reproduction de certaines formules, mais qu’elle est un état particulier de l’esprit humain.
L’Ancien Testament parle des justes et des prophètes comme de ceux qui marchent devant Dieu, qui se tiennent devant sa face (cf. 1 R 9, 4). C’est, bien sûr, une allégorie, mais elle décrit bien l’état d’esprit, très inhabituel, qui caractérise les saints de Dieu: ils se tiennent constamment en présence du Seigneur. Cette exposition au regard de Dieu, l’unité avec lui, qui s’accompagnent d’une joie incomparable, c’est la prière du juste, par laquelle il entre en contact, en communion, avec son Père céleste.
Bien sûr, ce que je viens de décrire est un idéal, difficile à atteindre, mais néanmoins offert à tous, à la portée de tout un chacun. Même si cela ne dure pas des jours et des semaines, mais quelques instants, au cours desquels nous pouvons ressentir vraiment la présence de Dieu, je suis certain que cette expérience bouleverse toujours notre vie; elle la rend meilleure, plus heureuse.
Par quoi faut-il commencer pour marcher devant Dieu, pour aller vers cet idéal de la prière authentique? L’oraison signifie communion avec Dieu, mais elle comporte aussi la dimension d’une conversation: nous pouvons converser avec Dieu, comme nous le faisons avec nos amis, à qui nous racontons notre vi ….. , nos peines et nos joies. Un simple échange avec quelqu’un qu’on aime soulage. C’est le premier degré, le premier pas de la prière: la conversation avec Dieu. Il ne faut pas être gêné de raconter à Dieu notre vie, les événements qui nous ont bouleversés; il ne faut pas hésiter à lui demander l’aide et le conseil. Et quand nous avons obtenu de Dieu ce que nous lui demandions, il ne faut pas oublier de le remercier, d’une manière simple, spontanée, avec les premières paroles qui nous viennent à l’esprit. Ce qui est important, c’est que cela soit fait avec un cœur pur et avec une foi solide. La foi et la confiance en Dieu sont les fondements de la prière.
Qu’est-ce que l’être humain ne demanderait pas à son Dieu! Nous lui ouvrons notre côté le plus intime, nous lui demandons d nous guérir de nos faiblesses spirituelles et physiques, de nous préserver des épreuves, de nous aider dans des circonstances difficiles, de nous guider dans nos rapports avec les autres personnes. Nous parlons avec Dieu de tout ce qui nous préoccupe, de tout ce qui est important pour nous. Cependant, il est évident qu’on ne peut parler, avec des mots ou des idées, pendant des heures!
Le pas suivant dans la pratique de la prière est la louange liturgique, faite en Église. Elle est portée par les paroles des psaumes, des hymnes. C’est la conversation de l’Église, Corps du Christ, avec son Chef, son Sauveur. Cette adresse communautaire à Dieu concentre la sagesse plurimillénaire, l’expérience des générations et des générations de croyants. La liturgie chrétienne révèle le sens de la prière: il est donc important de bien comprendre la signification des textes liturgiques. La liturgie de l’Église est la véritable école de la prière. »
La présentation de l’ouvrage est belle et agréable, et l’édition de bonne facture. On ne peut qu’admirer la traduction du P. Alexandre Siniakov dont le français n’est pas la langue maternelle. Remarquons seulement que pour la prière de saint Ephrem: 1) « esprit de paresse » serait préférable à « esprit d’oisiveté », car l’oisiveté consiste à ne rien faire, tandis que la paresse recouvre aussi le manque de zèle dans les activités spirituelles ; 2) « esprit de goût de pouvoir » est incorrect et redondant, tandis « qu’esprit de domination » est plus correct, a un sens plus large et convient pmieux pour les relations interpersonnelles ; 3) « voir mes péchés » serait préférable à « voir mes fautes », car la notion de péché a une connotation plus spirituelle et une extension plus large que celle de faute (c’est non seulement ce que l’on a fait de mal, mais ce que l’on a mal fait ou ce que l’on n’a pas fait…).

dimanche 15 juin 2014

FEUILLETS LITURGIQUES DE LA CATHÉDRALE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX


2/15 juin
1er dimanche après la Pentecôte
Fête de tous les Saints
St Nicéphore, patriarche de Constantinople, confesseur (828) ; saint Pothin, évêque de Lyon, avec saints Sanctus,, Attale, et sainte Blandine, martyrs à Lyon (177) ; Mégalomartyr Jean le Nouveau, de Suceava (1330-1340) ; Invention des reliques de Ste Julienne, princesse de Vyazma (1819).

Lectures : Hébr. XI, 33 – XII, 2 /Matth. X, 32–33, 37-38 ; XIX, 27-30

LOUEZ DIEU DANS SES SAINTS ![1]
L
es Saints vivent dans le Christ Jésus et le Christ vit en eux. Dans les Saints, Il répète inlassablement, jusqu’à la fin du monde, le mystère unique de sa mort et de Sa Résurrection, de l’incarnation de Dieu et de la déification de l’homme. Sur les fresques représentant les Martyrs et les Saints militaires – celles de certains réfectoires du Mont Athos notamment – on constate que si les Saints ont des postures, des vêtements et des attributs différents, ils ont à peu près tous le même visage, et ce visage est celui du Christ. Tels sont en effet les Saints: identiques en Christ, mais infiniment divers dans leurs caractères personnels et les conditions dans lesquelles ils ont reproduit l’œuvre du Sauveur, dans un lieu et à un moment donnés. Chez les Saints toutefois cette reproduction de la Passion du Seigneur n’est pas morne répétition. Elle est toujours nouvelle, toujours originale, toujours unique et contribue de manière irremplaçable à l’édification de l’Église des premiers-nés. Le Seigneur Jésus a ouvert la voie, Il a sauvé la nature humaine en mettant à mort dans Son propre corps la mort, mais il faut maintenant que chaque personne participe librement à cette œuvre de salut. Ce qui manque aux tribulations du Christ, écrit Saint Paul, je le complète dans ma chair au profit de Son corps qui est l’Église (Col I, 24). Ces paroles de l’Apôtre ne signifient pas qu’il manque quoi que ce soit à l’œuvre du Christ et à notre Rédemption, mais seulement que chacun d’entre nous doit communier volontairement et de manière personnelle à sa Passion, pour avoir part à l’héritage des Saints dans la lumière de Dieu (ibid.).
Unis au Christ par la foi et la grâce, les Saints accomplissent les œuvres du Christ (Jn XIV, 12). Habitant en eux par le Saint-Esprit, c’est le Christ Lui-même qui accomplit par eux des miracles, convertit les païens, enseigne les secrets de la science spirituelle, réconcilie les ennemis et donne à leur corps la force d’affronter avec joie les plus horribles tortures ; de sorte que l’Évangile ne cesse d’être écrit jusqu’aujourd’hui par les œuvres évangéliques des Saints. Voilà pourquoi les Saints, proches et lointains, anciens et nouveaux, sont pour nous des guides sûrs nous conduisant au Christ qui habite en eux. Devenez mes imitateurs, tout comme je le suis moi-même du Christ (I Cor XI, 1), nous disent-ils avec saint Paul. Si nous voulons faire resplendir en nous l’image du Christ, nous devons donc souvent tourner nos regards vers les Saints pour avoir des exemples vécus et pratiques de la marche à suivre. Le peintre qui désire faire le portrait d’une personne qu’il ne voit pas devant lui, se sert de reproductions, les regarde attentivement, les compare pour s’en inspirer, de même nous faut-il regarder vers les Saints, lire leurs Vies, les comparer, pour savoir comment progresser dans la vie en Christ.
En lisant assidûment les Vies des Saints, en vivant avec tous les Saints (Eph III, 18), en nous promenant chaque jour dans ce jardin spirituel qu’est le Synaxaire, nous trouverons peu à peu certains Saints qui attirent davantage notre sympathie, notre émotion, notre affection. Ils deviendront pour nous comme des amis intimes à qui nous aimerions confier nos joies et nos peines, à qui nous demanderions plus spécialement le secours de leurs prières, dont nous aimerions souvent relire la Vie, chanter les tropaires et vénérer l’icône. Ces amis intimes seront pour nous une puissante consolation et des guides privilégiés sur la route étroite qui nous mène au Christ (Mt VII, 14). Nous ne sommes pas seuls sur ce chemin et dans ce combat, nous avons avec nous notre Mère, la Toute-Sainte Mère de Dieu, notre Ange Gardien, le Saint dont nous portons le nom et ces quelques amis que nous aurons choisis parmi la grande Assemblée des témoins de l’Agneau. Et si nous trébuchons sous l’effet du péché, ils nous relèveront ; lorsque nous serons tentés par le désespoir, ils nous rappelleront qu’avant nous, et plus que nous, ils ont souffert pour le Christ et goûtent désormais à la joie éternelle. Ainsi, sur le chemin rocailleux de cette vie, ces saints amis nous feront voir un peu de la lumière de la Résurrection. Cherchons donc dans les Vies des Saints ces quelques amis intimes et, avec tous les Saints, marchons vers le Christ.
Dans notre vie spirituelle, nous pouvons communiquer quotidiennement avec les saints de trois façons : en chantant leurs hymnes et leur office liturgique, en vénérant leur icône et en lisant leur Vie dans le Synaxaire. S’il est difficile à ceux qui vivent dans le monde de se rendre chaque jour à l’église pour chanter les louanges des saints, tous les chrétiens peuvent cependant chez eux, seuls ou en famille, chanter le tropaire des Saints du jour, tous peuvent vénérer leur icône, tous peuvent consacrer quelques instants à lire ou à relire leur Vie dans le Synaxaire. Toutefois, la lecture quotidienne de ces résumés des Vies des Saints ne nous sera vraiment profitable que si nous nous approchons d’eux avec les mêmes dispositions que lorsque nous vénérons une icône. Si imparfaites soient-elles, les notices du Synaxaire sont, en effet, dans le domaine du récit ce que sont les icônes dans le domaine de l’image : elles nous rendent le saint présent et peuvent nous apporter autant de grâce que les saintes icônes. Tout dépend de la simplicité de notre cœur. Ainsi, où que nous nous trouvions, quel que soit l’état de notre avancement spirituel, quel que soit notre désir de consacrer notre vie à Dieu, nous trouverons dans le Synaxaire un renouvellement de nos forces et comme un avant-goût de la vie éternelle, où tous les saints danseront avec les anges autour du trône de Dieu en disant : Saint, Saint, Saint est le Seigneur le Dieu Tout-Puissant, Celui qui était, qui est et qui vient ! (Ap IV, 8).
Tropaire du dimanche du 8ème ton
Съ высоты́ снизше́лъ еси́, Благоyтpóбне, погребе́нiе прiя́лъ ecи́ тридне́вное, да на́съ свободи́ши страсте́й, животе́ и воскресе́нiе на́ше, Го́споди, сла́ва Teбѣ́ !

Du haut des cieux, Tu es descendu, ô Miséricordieux ! Tu as accepté les trois jours au Tombeau afin de nous libérer des passions : ô notre Vie et notre Résurrection, Seigneur, gloire à Toi !


Tropaire de tous les saints, ton 4

И́же во все́мъ мípѣ му́ченикъ Твои́хъ, я́ко багряни́цею и ви́ссомъ, кровьми́ Це́рковь Твоя́ украси́вшися, тѣ́ми вопіе́тъ Ти́́ Xpисте́ Бо́же : лю́демъ Твои́мъ щедро́ты Твоя́ низпосли́, ми́ръ жи́тельству Твоeму́ да́руй, и душа́мъ на́шимъ ве́лію ми́лость.
Ornée du sang de Tes martyrs du monde entier comme de pourpre et de lin, Ton Église Te clame par leur intercession, ô Christ Dieu : étends Ta compassion sur Tes fidèles ; accorde la paix à Ton peuple et à nos âmes la grande miséricorde.



Kondakion de tous les Saints, ton 8
Я́ко нача́тки естества́, Насади́телю тва́ри, вселе́нная прино́ситъ Ти́ Го́споди богоно́сныя му́ченики. Тѣ́хъ моли́твами въ ми́рѣ глубо́цѣ Це́рковь Твою́, жи́тельствo Твое́, Богоро́дицею соблюди́ Много-ми́лостиве.
Comme prémices de la nature, le monde entier T’offre, Seigneur, les martyrs théophores, à Toi l’Auteur de la création ; par leurs supplications et les prières de la Mère de Dieu, garde Ton Église dans une paix profonde, ô Très-miséricordieux.

AU SUJET DU CARÊME DES SAINTS APÔTRES
Le lundi 16 juin commence le carême des saints Apôtres, qui se termine le 12 juillet, jour où l’on célèbre la mémoire de St Pierre et St Paul. Ce carême n’est pas un geste arbitraire de l’Église. Il nous fait imiter les saints Apôtres qui, après avoir reçu l’Esprit Saint et Vivificateur, se sont dispersés depuis Jérusalem, dans le jeûne et la prière, pour prêcher l’Evangile (cf. Actes XII, 2). Ce carême est ancien, son existence étant témoignée dans de nombreux documents des  IVème et Vème siècles, notamment dans les écrits de St Athanase le Grand, St Ambroise de Milan et St Léon le Grand, pape de Rome. Durant ce carême, le typicon concède l’usage de poisson le samedi et le dimanche, ainsi que le mardi et le jeudi si l’on fête un Saint en l’honneur duquel on chante la grande doxologie à matines. S’il n’y a aucune fête, le lundi, le mercredi et le vendredi, il y a jeûne strict, tandis qu’il y a dispense d’huile et de vin le mardi et le jeudi. En tout état de cause, chacun doit jeûner avec discernement, en se souvenant que, selon les Pères de l’Église, le jeûne a pour but de tuer les passions et non point le corps.

LECTURES DU DIMANCHE PROCHAIN : Matines : Marc. XVI,1-8
Liturgie : Rom. II, 10-16 ; Hébr. XI, 33 – XII, 2 : Matth. IV, 18-23 ; Matth. IV, 25 – V, 12 .



[1] Introduction au Synaxaire du hiéromoine Macaire de Simonos Petras (abrégée)