Dans l'émission Lumière de l'orthodoxie du 11 mai, sur Radio Notre-Dame (podcast audio et textes ici), Juliya Vidovic, doctorante à l'Institut Saint-Serge ainsi qu'à l'Institut catholique de Paris et représentante de l'Eglise orthodoxe serbe à la CEC, a proposé, dans sa chronique, une recension du dernier ouvrage de Jean-Claude Larchet, Le patriarche Paul de Serbie – Un saint de notre temps (L'Age d'Homme, 2014). En voici le texte:
Il nous est parfois difficile de conseiller la lecture d’un livre qui nous a particulièrement marqué de peur qu’il ne soit pas reçu ou compris de la manière que nous aurions souhaitée.
Cependant, aujourd’hui, devant moi, j’ai un livre que je souhaite recommander à tous. Il s’agit du dernier ouvrage paru dans la collection « Grands spirituels orthodoxes du XXe siècle », à l’Age d’Homme, un livre de Jean-Claude Larchet, Le patriarche Paul de Serbie. Un saint de notre temps.
Comme le dit la dernière page de la couverture, « ce livre, qui s’appuie sur différents document et témoignages, présente la vie et la personnalité de cet homme petit et frêle, qui resta toute sa vie un moine pauvre, qui se soumit en tout temps et en toutes circonstances à une stricte discipline ascétique, et qui simple, humble et plein d’amour, resta toujours proche du peuple, faisant de l’Évangile le seul programme de son ministère épiscopal et patriarcal. »
L’ouvrage se divise en quatre parties. La première, la partie la plus longue, relate sa vie, depuis sa naissance en 1914 jusqu’à sa mort en 2009, âgée de 95 ans, en passant par les années de son enfance et de sa jeunesse, la naissance de la vocation monastique, l’élection comme évêque de Raska et Prizren et son accès au trône patriarcal de l’Eglise orthodoxe serbe. L’auteur prête une attention particulière à l’approche qu’il avait envers ses ennemis. Il est important de rappeler ici qu’au temps de son patriarcat l’ex-Yougoslavie se trouvait en pleine guerre interethnique et interreligieuse et qu’il était difficile de ne pas se laisser emporter par la logique déraisonnable de la guerre et de veiller à ce que les valeurs chrétiennes y soient respectées. Ainsi, devant les comportements inhumains des uns comme des autres, il ne cessait d’exhorter : « Soyons des hommes ! », ayant de l’homme, comme le souligne si bien Jean-Claude Larchet, « non une conception humaniste, mais la conception biblique et chrétienne », seule capable à se maintenir inébranlable dans des périodes de si grandes tentations.
En se montrant très humble, et en se mettant toujours en retrait par rapport aux enseignements de l’Ecriture et des Pères, qu’il citait abondamment, sa parole n’en était pas pour autant dépourvue de vie, car il vivait ce qu’il disait et disait ce qu’il vivait. Déjà, de son vivant, il était considéré comme saint et les gens avaient l’habitude de l’appeler « le saint en marche ».
Ceci nous amène à la deuxième et la troisième partie du livre, intitulées « Mode de vie » et « Apophtegmes », où nous pouvons découvrir les traits de sa personnalité et de son caractère. Doté d’un humour très fin, il parvenait à apaiser les conflits, de relâcher les tensions, de dénouer des problèmes, et de donner, sans prétention et sans s’imposer, de riches enseignements.
Ceci est particulièrement visible dans un des rares entretiens télévisé que le patriarche a donné pour l’émission : « Pendant que sommeillent les anges ». L’entretien, très bien mené, donne l’occasion au patriarche Paul de s’exprimer sur des sujets d’une très grande actualité : comment les enfants, des créatures chétives, innocentes et bonnes, se transforment parfois en hommes capables de commettre divers méfaits ? Est-ce que c’est l’action des gènes, ou celles de facteurs extérieurs? Peut-on être bons sans être considéré naïf et sot ? Pourquoi y a-t-il autant de mariages dissous, tant d’enfants malheureux et solitaires, tant de disputes parmi les conjoints et les amoureux ? La femme se voulant égale à l’homme, ce faisant, ne s’est-elle pas perdue d’une certaine manière en tant que mère et en tant que femme ? Qu’est-ce qui nous empêche aujourd’hui de nous réjouir dans le travail que nous effectuons, même lorsque celui-ci représente une activité que nous apprécions ? Quelle est la cause de la névrose chez l’homme de notre époque ? La liberté peut-elle exister sans Dieu ? Et est-elle dangereuse ?
Pour terminer, voici la réponse que le patriarche donna à la question suivante : Lorsqu’il vient au monde, le petit être d’apparence chétive qui s’appelle l’homme, se renfrogne d’abord puis se met à pleurer. La science fournit une explication à ce phénomène. Cependant, nous voudrions connaître votre opinion à ce sujet : faut-il voir un symbole dans ce premier cri qui accompagne l’apparition d’une vie nouvelle ? La réponse ici donné par le patriarche Paul résume merveilleusement la personne et la vie qui fut la sienne : « Je répondrai en utilisant les paroles d’un homme, qui gardent à mon avis leur signification de nos jours comme pour toujours. Il nous dit : ‘Quand tu es né, tout le monde s’est réjoui, alors que toi, tu as pleuré. Tâche de mener ta vie de façon telle que, quand la fin viendra, tu sois plein de joie, alors que les autres seront couverts de larmes. Ils pleureront qu’un tel homme les quitte.’ Voilà le programme de notre vie et celui de tout homme qui réfléchit sérieusement sur son existence. Appliquons-le de telle sorte qu’à la fin de notre vie, nous n’ayons pas à nous repentir de nous être trompés et de l’avoir ruinée. »
source orthodoxie.com
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