lundi 28 avril 2014

Père Geoffrey KORZ: Que doivent faire les familles orthodoxes pour que les enfants restent orthodoxes?



Il est fréquent dans les paroisses orthodoxes de trouver des fidèles qui demandent pourquoi il n'y a pas plus d'enfants qui viennent à l'église? C'est une question importante, car elle soulève deux questions plus profondes: tout d'abord , où va être dans vingt ans l'Eglise dans le monde occidental (en dehors des pays traditionnellement orthodoxes), et d'autre part (et peut-être d'une manière plus critique): Qu'ont donc fait les familles orthodoxes au cours des dernières décennies pour que maintenant il n'y ait presque plus de jeunes dans les paroisses?

De toute évidence, quelque part, la transmission de la précieuse foi orthodoxe d'une génération à l'autre n'a pas été accomplie. Bien sûr, la construction de la foi chez les jeunes est un exercice face à face, ce qui nécessite du temps et des efforts concertés des parents, qui portent la responsabilité principale de cette tâche. 
Si les jeunes adultes (ou les "pas-si- jeunes adultes") n'aiment pas l'Église du Christ, la question doit être posée: qu'est-ce qui a exactement été la plus haute priorité de leur vie à la maison? L'éducation scolaire? Avoir un bon emploi? Le sport? La vie sociale? Les distractions?

Saint Paul nous dit ce que nous semons est la chose que nous récolterons (Galates 6:7): Tout ce que nous donnons à nos enfants, l'amour de la musique, les expériences de voyages internationaux, l'ambition effrénée, la préoccupation envers les pauvres... c'est très probablement ce qui façonnera leur caractère. 
De même, comme nous le dit saint Jean Chrysostome, les choses auxquelles nous permettons d'entourer nos enfants, renforceront ou saperont notre principale influence sur la vie de nos enfants (son exhortation aux parents est aussi une lecture extrêmement utile pour toutes les mères et tous les pères). Où pouvons-nous commencer cette tâche immense? Considérez ce qui suit:

1. Faites comme si vous envisagiez de passer l'éternité ailleurs. 
Nous sommes tous tentés de vouloir être comme le monde, d'être aimé par ceux qui nous entourent, et de nous "intégrer". Parfois, le coût de cette acceptation est trop élevé. La façon dont nous utilisons notre argent et notre temps en dit long sur le fait que nous planifiions plus en vue de cette vie, ou plus pour l'éternité. 
Si nous prévoyons principalement pour cette vie, pourquoi nos enfants envisageraient-ils même de se soucier de leur vie spirituelle? Quand nos chéquiers, nos achats en ligne, et des voyages de loisirs au centre commercial l'emportent sur le temps passé à l'église ou à la prière, pourquoi nos enfants se révéleraient-ils être différents?

2. Cessons le travail et les achats le dimanche. 
C'est une façon concrète de consacrer du temps à Dieu. Le Seigneur nous dit que le jour du sabbat (le dimanche pour les chrétiens) a été fait pour nous (Marc 2:27), pour notre repos spirituel et pour notre reconstruction spirituelle, dans la tourmente spirituelle qui nous déchire pendant les six autres jours de la semaine. Si nous manquons de force pour vivre une vie spirituelle, nous devrions-nous demander pourquoi!

3. Fournir l'Orthodoxie comme option identitaire. 
Dans le monde occidental, on fournit généralement aux enfants orthodoxes deux options mutuellement exclusives et spirituellement toxiques: conserver la culture étrangère (Langue, nom, histoire, etc.) comme identité première, afin d'une certaine manière de "garder" la foi orthodoxe dans le cadre de cette culture, ou s'occidentaliser et délaisser votre foi et votre culture. L'idée que l'Orthodoxie fasse "partie" de toute culture est bien sûr absurde, puisque,  il y a deux millénaires, presque toutes les cultures était totalement païennes. Même récemment, de nombreuses cultures "orthodoxes" tombèrent sous l'effet hypnotique du communisme, et aujourd'hui, beaucoup sont en état d'ébriété à cause du matérialisme capitaliste.

Avoir un sens riche de l'héritage culturel, quelle que soit la culture, est une graine formative dans l'âme d'un enfant, puisque une riche appréciation et l'amour de la tradition héritée préparent le cœur de l'enfant pour la vie orthodoxe (puisque notre foi est intemporelle, et nécessite l'inoculation contre les vents de la mode qui passent). 
Mais d'abord, la loyauté de l'enfant, la loyauté qui doit être cultivée et illustrée par chaque parent, est la fidélité immuable au trésor de la foi orthodoxe. Si une jeune personne pense qu'elle a beaucoup en commun avec d'autres personnes orthodoxes parce qu'elles sont orthodoxes, il y a une bonne chance qu'elle restera fidèle [à l'Orthodoxie]. D'autre part, si l'enfant pense qu'il a plus en commun avec d'autres pairs qui partagent sa culture, que ces pairs soient des fidèles orthodoxes ou non, il est probablement trop tard: la jeune personne n'a pas une image de soi chrétienne orthodoxe, et c'est un formidable travail qui doit être fait.

4. Apprendre la foi orthodoxe - Acquérir l'esprit des Pères de l'Église. 
Pour les paroisses qui utilisent la langue anglaise, cela signifie enseigner l'orthodoxie à des adultes (catéchumènes et fidèles de longue date) afin qu'ils puissent la transmettre à la maison, lorsqu'ils l'enseignent à des enfants. La tentation de "rendre l'orthodoxie canadienne [ou de tout autre culture nationale occidentale] ne doit jamais se transformer en une pratique édulcorée; c'est l'une des grandes raisons pour lesquelles les gens orthodoxes ethniques ne font pas confiance aux missions locales qui utilisent la langue vernaculaire pour la tâche de l'éducation religieuse: édulcorée, modernisée, l'Orthodoxie est un scandale pour les gens qui craignent déjà profondément de perdre leur culture importée. 
Malheureusement, de nombreux exemples de missions orthodoxes d'Amérique du Nord sont pleines de tentatives de redéfinir la sainte Tradition, pour réorganiser les traditions liturgiques héritées, et en général pour tenter de "savoir mieux" que tous les saints fidèles qui ont vécu la foi depuis le début [de l'Eglise]. Nous devons apprendre de l'histoire que l'Orthodoxie est une religion universelle, pour tous les temps, les lieux et les peuples, et enseigner cette leçon essentielle à à nos enfants.

5. Cultivez un réseau d'amis orthodoxes de tous âges. 
Imaginez un instant que l'approvisionnement en électricité soit coupé dans votre ville natale. Que feriez-vous? Avez-vous des solutions de rechange à portée de main? Beaucoup de gens, en particulier les jeunes,  trouveraient la vie sans divertissement électronique une réalité insupportable. De même, de nombreuses paroisses orthodoxes supposent que la réalité de l'immigration étrangère continuera à garder leurs paroisses dynamiques, et emplies de gens orthodoxes. Mais que se passe-t-il quand l'immigration s'arrêtera? Que se passe-t-il lorsque la vitalité de la vie orthodoxe ne dépend que d'atteindre ces non-orthodoxes qui sont déjà ici? Malheureusement, nous n'avons pas appris la leçon des générations précédentes d'immigrants orthodoxes: l'immigration se tarit finalement, et nous devons commencer à partager notre vie de foi avec d'autres personnes orthodoxes autour de nous.

6. Arrêtez d'essayer de vous maintenir à niveau des religions occidentalisées (en particulier, "à l'américaine"). 
Il y a une raison pour que la musique joyeuse et les offices où l'on sautille gagnent rapidement les gens: ils font appel aux sens, et sont facilement embrassés par les cœurs bruyants de ceux qui vivent dans le monde occidental. Si nous essayons de transmettre à nos enfants l'Orthodoxie, l'idée d'imiter la vie religieuse moderne est vraiment absurde, car elle ne parvient pas à transmettre les outils uniques que seule l'Orthodoxie a à donner. 
Les yeux orthodoxes qui  voient une vérité intemporelle et immuable vérité;  un esprit orthodoxe qui comprend les enseignements de la foi des Apôtres;  des oreilles orthodoxes qui sont attirées par la beauté éternelle, et un cœur orthodoxe qui est formé dans le silence intérieur de la prière: ce sont ces dons que la foi orthodoxe offre. Nos enfants en ont besoin. Si nous avons accès à eux, et que nous ne parvenons pas à prendre les mesures nécessaires pour les donner à nos enfants, nous avons échoué.

Comme le Seigneur nous le demande: "Si le Fils demande du pain à un père parmi vous, lui donnera-t-il une pierre? Ou, s'il demande un poisson, lui donnera-t-il un scorpion au lieu du poisson?" (Luc 11:11) 

La foi orthodoxe est là pour que nous donnions à nos enfants la nourriture spirituelle dont ils ont faim. 

Que leur dirions-nous s'ils nous demandaient pourquoi nous leur avons donné quelque chose d'autre à la place?

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
citant

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