dimanche 9 mars 2014

STARITZA NIKODIMA DE DIVIYEVO † 2/15 mars ( 1990) [12]



12 . La "Trahison" de Mère Susanne

Nun Xenia (Grishanova), later Schemanun Susannah in prison, 1943.
Moniale Xénia (Grichanova), 
plus tard moniale du grand schème Susanne
 en prison, 1943.

Voici comment la prophétie de Père Séraphim selon laquelle Susanne le trahirait arriva. Mère Susanne est allée à Bolshevo, et là, vivait avec eux un autre hiéromoine du métochion de Solyanka, Père Hiérax, qui était un grand ami du Père Séraphim. Les enfants spirituels de Père Séraphim se rassemblaient là. 
Elle y vint donc. Ils évoquèrent Père Séraphim, racontèrent des histoires. Ils étaient tous très proches, mais il y avait un traître parmi eux. Matouchka venait tout juste d'arriver à la maison lorsque le NKVD est venu après elle, voulant savoir où et quand ils l'avaient enterré [Père Séraphim], mais ils savaient déjà tout. 
Toute sa vie leur avait été racontée de façon détaillée. Alors ils ont commencé la recherche. Mère Susanne a été prise tout de suite. C'est ainsi qu'elle le trahit: quand il était vivant, il ne lui avait pas donné sa bénédiction pour y aller. Il lui avait dit : " Il ne faut pas y aller après ma mort." Tout lui avait été révélé. Elle lui a désobéi et a reçu cette affliction pour sa désobéissance. Elle a été emprisonnée pour cela et puis exilée. Matouchka dit que lors de la perquisition, ils ont tout remué jusques à la dernière aiguille et au dernier fil. Ils ont trouvé Père Séraphim immédiatement, l'ont déterré et l'ont emporté.
Il y avait des sources dans la maison et tout autour, l'eau est très proche à Sergeyev Posad, et les sources venaient tout droit dans la cave. L'eau allait et venait. Père Séraphim fut trois ans dans l'eau, c'est-à-dire que le cercueil avait été complètement immergé dans l'eau. Ils l'ont sorti de l'eau, ont ouvert le cercueil, ont pris le Père Séraphim, et il était comme s'il y avait été placé dedans la veille. 
Matouchka l'a vu de ses propres yeux. Il n'y avait pas d'odeur, absolument rien. C'était comme si cet homme était en train de dormir. Et il dormait depuis trois ans. Il y avait des experts médicaux militaires là-bas. Toute une commission d'entre eux travaillait dans la maison. Ils furent stupéfaits, et ils dirent: "Ce n'était pas un homme ordinaire Il est tout simplement impossible qu'il ait pu être si longtemps dans l'eau et pourtant ne souffrir aucune décomposition, pas même une odeur de corruption." 
"Dans ses mains étaient les Évangiles et une Croix. Ils ont immédiatement décidé de tout confisquer. Matouchka fit preuve d'une grande détermination à ce moment. Elle leur prit les Evangiles et la Croix et dit: "Non, ne touchez pas ceci. C'est à lui, n'osez même pas toucher ceci.Comme son visage était découvert, et qu'il était moine, elle tira la couverture sur lui. Plus tard, elle pleurait toujours: "Je ne vais pas voir le visage de Batiouchka dans le monde à venir- je l'ai vu ici-bas."

Mère Susanne fut emmenée, et la maison fut retourné sens dessus dessous. Mais voici comment elle le leur raconta: ils allaient et venaient, en cherchant, et Matouchka était dehors à traire la chèvre. L'un d'eux toussa et s'assit près du hangar, et elle lui dit: "Bois du lait!" Elle lui donna une tasse, il la but avec plaisir et sa toux cessa. Tout le monde était étonné. Ils ont dit: "Ce sont des faiseurs de miracles ici!" Maintenant, bien sûr, ils devaient l'emmener pour interrogatoire. La question était de savoir s'ils l'emmenaient à la prison aussi, mais il y avait ces douze petits bambins. Ils y ont longtemps réfléchi, puis ils ont décidé de la laisser avec les enfants. "Laissez-la élever ces orphelins." 
Mais elle a été appelée très souvent pour un interrogatoire dans les prisons de Petrovka et Lioubianka. Comme elle nous l'a dit , ils savaient tout sur elle et sur la vie de Mère Susanne, dans les moindres détails. C'est ce genre de surveillance qu'ils avaient gardée sur elles. Ils savaient même ce qu'elles avaient pris avec elles du monastère.

Lorsque le monastère fut fermé, on donna aux moniales de l'or et d'autres choses, de sorte qu'elles auraient de quoi vivre. Matouchka dit qu'ils lui ont donné des anneaux d'or. Elle n'avait pas de passion pour l'or, elle les a immédiatement donnés à quelqu'un d'autre, et cette personne les a égarés, presque laissés tomber de ses mains. Maintenant, ils lui demandaient où l'or était, ce qu'elle en avait fait. Elle répondit calmement qu'elle l'avait donné à untel ou untel." "Et maintenant, où est-il?" demandèrent-ils. Elle répondit que l'anneau s'était perdu en quelque sorte." Ils savaient même cela. Ils voulaient juste la mettre à l'épreuve pour voir si elle dirait la vérité. 
Quand ils l'eurent éprouvé sous tous les angles, ils furent seulement étonnés de son honnêteté, et dirent que si tout le monde était aussi honnête, ils n'auraient rien à faire, mais elle était sage en même temps: elle n'avait jamais trahi quiconque de tous ceux de son cercle de fidèles pour ainsi dire, mais en même temps, elle n'avait jamais menti à propos de quoi que ce soit, même à ses ennemis. 
C'était son trait particulier: ne jamais mentir ou tromper de quelque manière que ce soit, car le Diable est le père du mensonge. Les mensonges et la tromperie n'étaient pas caractéristiques d'elle, sous n'importe quelle forme. C'en est même allé à une mesure telle qui serait maintenant appelé stupidité, où elle disait quelque chose que l'on ne peut tout simplement pas dire, mais elle le disait de toute façon, en vérité, comme cela était. Elle n'avait pas du tout de perversité mentale; elle n'a pas vécu sournoisement, mais elle avait une très grande sagesse. Elle savait quand dire un mot, quand se taire, quand donner des conseils, et quand ne rien dire. Ces personnes sont très rares dans ce monde. 
Au NKVD ils l'appelaient "la Juste Prascovia Ivanovna" et ils appréciaient son honnêteté, l'honoraient grandement, et la laissaient partir. Elle a dit, "Bien sûr, c'était terrifiant. Quand je sortais, il semblait qu'ils allaient me tirer dans le dos ou quelque chose comme ça. J'allais à la porte, et tout à coup ils me passaient les menottes. Je sortais, ne me souvenant pas ou ne ressentant rien, je sortais par une porte, puis une autre et une autre. Ils me montraient où aller, et puis j'étais dans la rue...

Puis elle a dû se rendre à divers endroits d'exil pour rendre visite à Mère Susanne. Mère Susanne ne s'en était pas mal sortie au Kazakhstan; c'était plus difficile pour Matouchka, parce que les routes étaient très dangereuses. Mais il y avait beaucoup de croyants en exil là-bas, et ils avaient même leur propre église secrète. Mère Susanne s'occupait en faisant divers objets d'artisanat. C'était un artisan doué et une moniale à la vie spirituelle élevée. On se souvient d'elle avec émotion. Matouchka avait un double fardeau: les orphelins à la maison et une sœur en exil, mais elle ne l'a pas abandonnée, et l'a toujours prise en charge.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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