dimanche 2 mars 2014

FEUILLETS LITURGIQUES DE LA CATHÉDRALE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX


17 février / 2 mars
Dimanche de l’abstinence des laitages, mémoire de l’exil d’Adam du paradis – dimanche du Pardon

Saint mégalomartyr Théodore Tirone (le conscrit, vers 306) ; sainte Mariamne, soeur de l'apôtre Philippe (I) ; saint hiéromartyr Hermogène, patriarche de Moscou et de toute la Russie, thaumaturge (1612) ; saint Théodore le silencieux, des Grottes de Kiev (XIIIème s.) ; saint néomartyr Théodore (1795) ; saint Nicolas Planas, prêtre à Athènes (1932) ; saint Barnabé de Gethsémani (1906) ; saints hiéromartyrs Michel Nikologorsky et Paul Kosminkov, prêtres (1938) ; sainte martyre Anne Tchetverikova (1940)

Lectures: Rom. XIII, 11-XIV, 4 ; Маtth. VI, 14-21 

DIMANCHE DE L’ABSTINENCE DES LAITAGES

E
n ce dimanche, la sainte Église fait mémoire de l’exil du paradis de nos premiers parents en raison de leur désobéissance et leur absence de tempérance. Par cela est soulignée toute l’importance du labeur du carême qui va commencer. En outre, dans la perte de la béatitude paradisiaque, l’Église veut montrer ce qui est digne de la pénitence et des larmes. « Voici le temps opportun, voici le temps du repentir, écartons les œuvres des ténèbres et revêtons les armes de la lumière : afin qu’en traversant l’océan du carême, nous atteignions la Résurrection du troisième jour de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ qui sauve nos âmes ». Par ces mots, nous sommes appelés à oublier dès ce jour tout ce qui jusqu’à présent occupait nos pensées et nos sentiments et les détournait « de l’unique nécessaire » (Lc X, 42). Dans les lectures de l’épître et de l’Évangile, la sainte Église nous présente ses dernières instructions concernant particulièrement l’ascèse du carême. Le jeûne doit commencer par le pardon aux hommes de leurs transgressions et la renonciation aux œuvres des ténèbres.  Autrement dit, il convient d’accomplir de façon non hypocrite les prescriptions du jeûne et d’adopter une attitude non condamnable à l’égard du prochain. La réconciliation avec tous, le pardon à tous de leurs péchés commis à notre égard, constitue la condition première, principale et indispensable à notre réconciliation avec Dieu. Sans cette réconciliation avec tous, on ne peut s’approcher du Seigneur et s’engager sur le stade du carême et du repentir. De là vient l’usage orthodoxe de demander le pardon mutuellement à la veille du Grand Carême. St Jean Chrysostome enseigne : « nous devons pardonner aux autres non seulement en paroles, mais aussi d’un cœur pur, afin de ne pas, par la mémoire des offenses, diriger le glaive contre soi. Celui qui nous afflige ne nous fait pas autant de mal que nous-mêmes, en nourrissant en soi la colère et nous exposant ainsi à la condamnation de la part de Dieu. Si nous aimons celui qui nous offense, ce mal retombe sur la tête de celui-ci, et il souffre ; mais si nous nous indignons, nous souffrons nous-mêmes et ce à cause de nous-mêmes ».
Tropaire du dimanche, du 3ème ton
Да веселя́тся небе́сная, да ра́дуются земна́я; я́ко сотвори́ дeржа́ву мы́шцею Cвое́ю Го́сподь, попра́ cме́ртiю cме́рть, пе́рвенецъ ме́ртвыxъ бы́сть, изъ чре́ва а́дова изба́ви на́съ и подаде́ мípoви ве́лiю ми́лость.
Que les cieux soient dans l’allégresse, que la terre se réjouisse, car le Seigneur a déployé la force de Son bras. Par Sa mort, Il a vaincu la mort ! Devenu le Premier-né d’entre les morts, du sein de l’enfer, Il nous a rachetés, accordant au monde la grande miséricorde.
Tropaire du saint hiéromartyr Hermogène de Moscou, ton 4
Россíйскiя земли́ первопрестóльниче и неусы́пный о нéй къ Бóгу моли́твенниче, за вѣ́ру Христóву и пáству твою́ дýшу свою́ положи́въ, странý нáшу отъ нечéстiя избáвилъ еси́. Тѣ́мже вопiéмъ ти́ : спасáй нáсъ моли́твами твои́ми, священно-мýчениче Ермогéне, óтче нáшъ.
Primat de la Terre russe et intercesseur infatigable pour elle auprès de Dieu, Toi qui donnas ton âme pour la foi du Christ et ton troupeau, tu as délivré notre pays de l'impiété. Aussi, nous te crions : sauve-nous par tes prières, hiéromartyr Hermogène, notre père.
Kondakion du saint hiéromartyr Hermogène de Moscou, ton 6
Темни́цею и глáдомъ изнуря́емъ, дáже до смéрти вѣ́ренъ пребы́лъ еси́, блажéнне Ермогéне, малодýшiе отъ сердéцъ людéй твои́хъ отгоня́я и на óбщiй пóдвигъ вся́ призывáя. Тѣ́мже и нечéстивыхъ мятéжъ низложи́лъ еси́ и странý нáшу утверди́лъ еси́, да вси́ зовéмъ ти́ : рáдуйся, застýпниче Россíйскiя земли́.
Épuisé par la prison et la faim, tu restas fidèle jusqu'à la mort, bienheureux Hermogène, chassant la pusillanimité du cœur de tes fidèles et les appelant tous à l'exploit. Aussi, tu as renversé les troubles des impies et tu as affermi notre pays, afin que nous te chantions tous : réjouis-toi, défenseur de la Terre russe !
Kondakion du dimanche de l’abstinence des laitages, ton 6
Пpeму́дpocти наста́вниче, смы́сла пода́телю, нему́дрыхъ наказа́телю, и ни́щихъ защи́тителю, yтвepди́, вpaзyми́ cépдце моé Bлады́ко : Tы́ да́ждь ми́ cло́во, Óтчее cло́во, cé бо ycтнѣ́ мои́ не возбpaню́, во éже зва́ти Тeбѣ́ : Mи́лостивe, поми́луй мя́ па́дшаго.
Guide de sagesse, Donateur de l’intelligence, pédagogue des insensés, protecteur des pauvres, affermis et instruis mon cœur, Maître; accorde-moi la parole, ô Parole du Père. Car voici, je n’empêcherai pas mes lèvres de Te crier : Miséricordieux, aie pitié de moi qui suis tombé !

VIE DU SAINT MARTYR HERMOGÈNE, PATRIARCHE DE MOSCOU[1]

Né en 1530 dans une famille d’humble condition de la région de Vologda, saint Hermogène fut élevé dans un petit monastère dédié à la Transfiguration, récemment fondé à Kazan par saint Barsanuphe de Tver. Devenu prêtre séculier dans la paroisse de saint Nicolas, il fut témoin de l’apparition miraculeuse de l’icône de la Mère de Dieu et put la tenir dans ses mains. Quelques années plus tard, après la mort de son épouse, il devint moine puis higoumène du monastère de la Transfiguration. En 1589, il fut consacré métropolite de Kazan et continua l’œuvre de conversion des Tatares, qui avait été entreprise par son prédécesseur, saint Gourias. C’est à grand peine que, par ses prédications et ses écrits, il combattait pour extirper les coutumes païennes de son peuple et pour empêcher les nouveaux convertis de se laisser séduire par les intérêts matériels et d’adhérer à l’Islam, au catholicisme ou au protestantisme. Il montra aussi un grand zèle pour honorer la mémoire des martyrs et des saints évêques qui avaient sanctifié avant lui la terre de Kazan par leur sang et leurs œuvres évangéliques. Doué d’un grand talent littéraire, il écrivit des Vies de saints, des traités théologiques pour la défense de l’Orthodoxie, et éclaira le peuple sur la voie à suivre en ces Temps des Troubles (1605-1613) par une vaste et riche correspondance. La mort de Boris Godounov (1598-1605) avait en effet laissé la Russie dans une grave crise de succession, qui laissait le champ libre aux opportunistes et aux intrigants. En 1605, Grégoire Otrepiev, qui se faisait passer pour Dimitri, le dernier fils d’Ivan le Terrible qui était mort dans des circonstances mystérieuses, usurpa le titre de tsar et décida d’épouser une princesse polonaise catholique. Convoqué à Moscou avec d’autres évêques, Hermogène fut le seul à s’opposer à ce projet au nom de la foi orthodoxe. Il fut pour cela déposé et incarcéré jusqu’à la mort de l’usurpateur, l’année suivante. Lors de l’accession au trône du boyard Basile Chouïsky (1606-1610), et après la déposition du faux patriarche Ignace, saint Hermogène fut élevé à la dignité patriarcale. Aussitôt en place, il restaura l’imprimerie de Moscou, qui avait brûlé, et commença la publication des livres liturgiques, qu’il faisait corriger à partir des originaux grecs et dont il surveillait lui-même l’impression. Malgré son âge avancé (70 ans), il montra alors un zèle ardent pour le soutien de l’Orthodoxie et une grande énergie pour la défense des droits du souverain légitime. Assumer une telle charge en ces temps de changements politiques continuels, de confusion dans la société, d’invasions fréquentes des Polonais et des Lituaniens, et de propagande des jésuites, ce n’était pas choisir les honneurs mais plutôt la croix et le martyre. Dès les premiers mois de son patriarcat, Hermogène dut soutenir de toute son autorité le tsar Basile contre les Cosaques de Bolotnikov et du prince Chakhovskoï qui assiégeaient Moscou. Le patriarche rassembla le peuple, ordonna d’observer un jeûne de trois jours et, grâce à ses lettres encycliques envoyées en différentes cités, des détachements de fidèles patriotes vinrent chasser les rebelles. À peine avait-on célébré la réconciliation solennelle du peuple avec le tsar légitime qu’un autre usurpateur, nommé lui aussi Dimitri, soutenu par les Polonais qui espéraient conduire la Russie au catholicisme, assiégeait Moscou, en promettant de grands avantages à tous ceux qui se rallieraient à lui. En dépit des admonitions du saint patriarche, les rebelles réussirent à obtenir l’abdication du tsar (juillet 1610). Profitant de cette situation, le roi de Pologne, Sigismond, proposa alors aux Moscovites de choisir son fils Vladislav pour tsar, avec la promesse qu’il se convertirait par la suite du catholicisme à l’Orthodoxie. Mais saint Hermogène, discernant qu’il s’agissait là d’une promesse trompeuse, exigea la conversion préalable du prince, par le baptême, avant son élévation sur le trône de Russie, en dépit des menaces de mort qui lui avaient été proférées par les émissaires polonais. Il lança de nouveau un appel pressant à toutes les cités russes, pour qu’elles viennent défendre la capitale désormais occupée par les rebelles et les Polonais. Pendant le Semaine Sainte, ceux-ci détruisirent presque entièrement la ville par le feu, arrêtèrent le patriarche et le jetèrent en prison. Comme une grande armée russe se préparait à faire le siège de Moscou, Hermogène, tiré de sa prison et sommé de la renvoyer, resta inflexible. Cette tentative pour délivrer la ville échoua cependant, et lorsqu’on put rassembler une nouvelle armée à Nijni Novgorod, saint Hermogène trouva le moyen de leur faire parvenir une lettre, envoyée en secret à l’armée et au peuple, dans laquelle il écrit : « Si vous souffrez pour la foi, Dieu vous pardonnera et vous remettra vos péchés dans cette vie et dans l’autre. » Plus les troupes russes approchaient de la ville, plus dure devenait son incarcération. Finalement, il mourut de faim et de soif dans l’horrible cachot où il avait été enfermé, le 17 février 1612, quelques jours avant la libération de Moscou. Au temps du patriarche Nicon (1633), ses saintes reliques, restées intactes, furent déposées dans la cathédrale de la Dormition. Elles étaient l’objet d’une grande dévotion populaire, bien avant sa canonisation officielle en 1913, et de nombreux miracles venaient confirmer sa faveur auprès de Dieu et l’efficacité de son intercession pour le peuple russe.
LES RÈGLES DU JEÛNE
Le typicon – livre qui détermine l’ordo des offices et les règles du jeûne - prescrit pour le Grand Carême l’abstinence de viande, du lait, des œufs et poisson. Il autorise le vin et l’huile le samedi et le dimanche, le jeudi du grand Canon de St André de Crète  et le Jeudi Saint. Le poisson n’est permis que lors de la fête de l’Annonciation de la Très Sainte Mère de Dieu et le dimanche des Rameaux. Le samedi de Lazare, les œufs de poissons sont permis. En tout état de cause, il convient de jeûner avec discernement, selon ses forces, ayant en vue que, selon les Pères de l’Église, il faut tuer les passions et non point le corps. St Païssy Velitchkovsky écrit à ce sujet : « chacun a sa conscience pour mesure et maître intérieur. Il ne peut y avoir une seule règle et une même ascèse pour tous, parce que les uns sont forts et les autres sont faibles, les uns sont comme le fer, les autres comme le cuivre, d’autres encore comme la cire... Un jeûne modéré et raisonnable, c’est là le fondement et le chef de toutes les vertus ». Le carême n’est pas seulement l’abstinence de certaines formes de nourriture, son but est la purification de l’âme. C’est à cela précisément qu’il doit servir.
LECTURES DU DIMANCHE PROCHAIN : Matines : Lc. XXIV, 1-12
Liturgie : Hébr. XI, 24-26, 32 – XII.2 ; Jn. I, 43-51


[1] Tiré du Synaxaire du Hiéromoine Macaire de Simonos Petras (version abrégée).

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