jeudi 18 octobre 2012

Son Eminence le Novice ( Vladyka Basile [Rodzyanko]) (6)

Bishop Basil (Rodzyanko). Photo by Yu. Kaver

Fr. Basil with his wife
Père Basile et son épouse

Après cela, chaque fois que l'évêque Basile est arrivé en Russie, il m'a toujours appelé à l'avance. J'ai toujours été heureux de l'accompagner dans une de ses étonnantes aventures nouvelles et ou de ses nouveaux pèlerinages. En effet, l'évêque a toujours eu d'innombrables occasions pour accomplir ces derniers. Bien que, et aussi étrange que cela puisse paraître, l'évêque n'ait jamais entrepris un seul de ces voyages de son plein gré.
Il m'a raconté une histoire particulière à ce sujet. En 1978, son épouse Maria Vassilievna est morte. La mort de sa femme fut un coup terrible pour le père Wladimir. Il l'avait adorée et était totalement épris d'elle. Cette perte causa quelque chose qui n'est pas rare chez les russes au grand cœur: le père Wladimir commença à boire. L'évêque me parla de cette triste période de sa vie sincèrement, expliquant que cela avait été son épreuve la plus difficile, la pire qu'il ait jamais été obligé de subir.


Il est devenu un véritable alcoolique. Heureusement, en raison de sa constitution incroyablement forte, de sa grande taille, et d'une grande force, pendant un certain temps sa consommation d'alcool n'eut pas d'incidence sur sa capacité à s'acquitter de ses fonctions sacerdotales ou de ses émissions de radio. Père Vladimir avait l'habitude de boire une forte vodka populaire des Balkans connue en Serbie sous le nom de raki.
Il n'est pas évident de comment tout cela se serait passé, parce que ni son confesseur, ni sa famille, ni ses amis ne pouvaient rien faire à propos du problème d'alcoolisme de père Wladimir.
Les choses auraient été absolument terribles, si l'esprit de sa femme Maria Vassilievna défunte, qui, dans la vie, comme l'on dit, avait été une femme d'une grande force spirituelle et d'une grande prière, n'était apparue depuis l'autre monde dans un rêve pour faire que son époux se ressaisisse. Père Wladimir fut tellement choqué par son apparition, et en particulier par la gravité de ce que sa femme avait à lui dire quand elle apparut, qu'il se ressaisit immédiatement après sa réprimande surnaturelle. Sa maladie particulièrement russe fut guérie instantanément.

Eh bien, il cessa vraiment de boire. Mais il avait aussi quelque raison de vivre. Ses enfants à cette époque avaient déjà grandi. Et naturellement, il ne pouvait être question d'un second mariage. D'après les canons de l'Eglise orthodoxe, les seconds mariages sont interdits au clergé. Dans le cas où un prêtre qui est  veuf se remarie, il est à jamais dépouillé de tout droit de servir dans le sacerdoce. Mais, même en mettant de côté de ces règles, le père Wladimir avait été si attaché à son ex-épouse et l'avait aimée si profondément que la partie de son propre cœur qui avait connu l'amour terrestre resta entièrement consacrée à Maria Vassilievna jusques à la fin des temps. Père Wladimir commença à prier avec dévotion. Et le Seigneur répondit à ses prières.

Après la mort du confesseur de père de Wladimir (l'archevêque Jean Maximovitch), son nouveau père spirituel devint le Métropolite de Londres, Anthony (Bloom) de Souroge, vieil ami de la famille Rodzyanko. C'est lui qui informa le père Wladimir que les hiérarques de l'Eglise Orthodoxe d'Amérique  délicatement et avec insistance lui demandaient d'essayer de convaincre  prêtre Wladimir Rodzyanko, prêtre qui était veuf de prononcer les vœux monastiques, après quoi il devrait être envoyé aux Etats-Unis pour servir comme évêque dans la ville capitale de Washington, DC.

Père Wladimir savait trop bien que le vrai service en tant que hiérarque de l'Eglise n'a rien à voir avec les honneurs et le rang, mais avec une multitude d'incessants soucis quotidiens, et avec l'impossibilité complète d'avoir jamais un moment pour soi, ainsi qu'avec le fait de constamment supporter une charge énorme de responsabilités presque incompréhensibles pour les profanes. En outre, la pauvreté, et même une extrême pauvreté est aussi le lot inévitable d'un évêque russe dans la diaspora. A cette époque, il avait presque atteint l'âge de soixante-six ans, avec quarante ans passés dans le sacerdoce.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Archimandrite Tikhon

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