vendredi 1 juillet 2011

Archimandrite Georges, Higoumène du Monastère de Grigorios au Mont Athos: (7) Expériences de déification



Les expériences de déification [Théosis] sont proportionnelles à la pureté de l'homme. Plus quelqu'un est purifié des passions, plus haute sera l'expérience qu'il recevra de Dieu, il voit Dieu comme cela fut écrit: "Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu" (Matthieu 5:8).

Quand l'homme commence à se repentir, à se confesser, et à pleurer pour ses péchés, il reçoit les premières expériences de la Grâce de Dieu. Ces expériences sont d'abord des larmes de repentir, qui apportent une joie indicible à la psyché, et puis la paix profonde qui suit cela. Pour cette raison, ce deuil pour nos péchés est appelé "deuil joyeux", comme le Seigneur le dit également dans Ses Béatitudes: "Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés" (Matthieu 5:4).

Ensuite, nous procédons vers des stades supérieurs par l'illumination divine dans laquelle le noûs [intellect] est illuminé et voit les choses, le monde, et les hommes avec une autre Grâce.

Puis le chrétien aime Dieu encore plus, et des larmes nouvelles et différentes viennent, plus grandes, qui sont des larmes d'amour pour Dieu, les larmes de l'éros divin. Alors, il ne pleure plus pour ses péchés, parce qu'il a la certitude que Dieu a pardonné ses péchés. Ces nouvelles larmes, qui apportent à la psyché un plus grand bonheur, la joie et la paix, sont une meilleure expérience de divinisation.

Ensuite, l'homme acquiert l'absence de passion: une vie sans passions trompeuses et faiblesses coupables. Puis il est calme et paisible face à toutes les agressions externes, ayant été délivré de l'orgueil, de la haine, de la méchanceté, et des désirs de la chair.

Il s'agit de la deuxième étape de divinisation, appelé "theoria", au cours de laquelle l'homme, ayant déjà été purifié des passions, est illuminé par l'Esprit Saint, est rendu lumineux sur la voie qui le fera devenir déifié. La "theoria" signifie vision. La theoria de Dieu signifie une vision de Dieu. Pour voir Dieu, il doit être un homme déifié. Ainsi, la theoria de Dieu signifie aussi la divinisation.

Bien sûr, quand il a été soigneusement purifié et s'est offert entièrement à Dieu, alors il reçoit également la plus grande expérience de la Grâce divine pour les hommes, qui, selon les saints Pères, est la vision de la Lumière Incréée de Dieu. Ceux qui sont très avancés dans la divinisation voient cette Lumière, il en est très peu à chaque génération. Les saints de Dieu la voient et apparaissent en son sein, et, accessoirement, c'est ce que les halos des saintes icônes nous montrent.

Ainsi, dans la vie de saint Basile le Grand, il est dit que quand saint Basile était en prière dans sa cellule, ceux qui pouvaient le voir, ont vu que lui-même, et même sa cellule, brillaient dans cette Lumière Incréée de Dieu, la Lumière de la grâce divine. Dans la vie de beaucoup des nouveaux martyrs de notre foi, nous lisons que, après d'horribles tortures, quand les Turcs pendaient leurs corps dans les places de la ville pour intimider les autres chrétiens, pendant de nombreuses nuits une lumière apparaissait autour d'eux. Elle brillait si clairement et si vive que, parce que de cette manière la vérité de notre foi était si brillamment montrée, les conquérants ordonnèrent qu'on les enlève, de sorte qu'ils n'aient pas honte devant les chrétiens, qui voyaient comment Dieu glorifiait Ses saints martyrs.

La grâce de la divinisation préserve les corps des saints incorruptibles, et ce sont les saintes reliques qui exsudent la myrrhe et font des miracles. Comme saint Grégoire Palamas le dit, la grâce de Dieu, ayant d'abord été unie avec le psychisme des Saints, après elle enveloppe leurs corps saints comme un suaire et emplit aussi de Grâce: non seulement leurs corps, mais aussi leurs tombes, leurs icônes et leurs Églises. Voici la raison pour laquelle nous vénérons et embrassons les icônes, les reliques des saints, les tombes, et les églises des saints. Grâce à la divinisation, toutes ces choses ont quelque chose de la grâce de Dieu qu'avait le saint dans sa psyché en raison de son union avec Dieu.

Par conséquent, dans l'Eglise, nous jouissons de la grâce de divinisation non seulement avec notre psyché, mais aussi avec notre corps, parce que le temple de l'Esprit Saint qui habite en elle, et partage ses luttes avec la psyché, le corps est sûrement glorifié.

La grâce jaillissant du Seigneur Saint, le Christ Dieu-homme,  est répandue dans notre Panaghia [Très Sainte, id est la Mère de Dieu], dans les Saints, et elle vient aussi à ceux d'entre nous qui sont humbles.

Il est certainement intéressant de noter que les expériences des chrétiens ne sont pas toujours les expériences de divinisation et ne sont pas toujours aussi spirituelles. Beaucoup de gens ont été trompés par des expériences démoniaques ou psychologiques. Afin qu'il n'y ait pas de danger d'illusion et aucune influence démoniaque, tout ceci doit être humblement mentionné au père spirituel, qui, éclairé par Dieu, discernera si ces expériences sont authentiques ou non, et il vous donnera la direction appropriée à la psyché qui se confesse. Généralement, notre obéissance au Père spirituel est l'un des points les plus fondamentaux de notre chemin spirituel. A travers elle nous acquérons un esprit ecclésiastique de disciple du Christ par lequel la légitimité de nos efforts est confirmée, afin de nous guider vers l'union avec Dieu.

Au sein de l'Eglise, un domaine spécial de divinisation est le monachisme, où les moines, ayant été sanctifiés, reçoivent des expériences élevées d'union avec Dieu.

Beaucoup de moines qui vivent la divinisation et la sanctification aident aussi toute l'Église, car, comme nous, les chrétiens le croyons, en suivant en cela la tradition séculaire de l'Eglise sainte, la lutte des moines a un effet positif sur la vie de chaque fidèle qui se lutte dans les monde. Dans notre Orthodoxie, le peuple de Dieu a une grande vénération pour le monachisme à cause de cela.

Après tout, dans l'Eglise, nous participons à la communion des saints, et nous faisons l'expérience de la joie de l'union avec le Christ. Nous entendons par là que dans l'Eglise nous ne sommes pas isolés, mais membres d'une unité, d'une fraternité, d'une communauté fraternelle... non seulement entre nous, mais aussi avec les saints de Dieu, ceux qui vivent aujourd'hui sur la terre et ceux qui nous ont quittés. Pas même à la mort les chrétiens ne sont divisés. La mort est incapable de séparer les chrétiens, car ils sont tous unis dans le corps ressuscité du Christ.

Par conséquent, chaque dimanche et à chaque fois que la Divine Liturgie est célébrée, nous sommes tous présents avec tous les anges et tous les saints à travers tous les âges. Même nos parents défunts sont présents, si, bien sûr, ils sont unis avec le Christ. Nous sommes tous là et communiquons entre nous mystiquement, et non pas extérieurement, mais en Christ.

Cela est évident au cours de la prothèse, où les portions de la Panaghia, des saints, et des chrétiens vivants et défunts, sont toutes placées sur la Sainte Patène autour de l'Agneau, du Christ. Après la sanctification de la sainte oblation, toutes ces parcelles sont immergées dans le Sang du Christ.

C'est la grande bénédiction de l'Eglise, que d'être ses membres et, en tant que membres du Corps du Christ, de pouvoir communiquer/communier non seulement avec Dieu mais aussi entre nous.

La tête de ce corps est le Christ Lui-même. La vie vient de la tête au corps. Le corps a certainement des membres vivants, mais il a aussi des membres qui n'ont pas la même vitalité, non pas tous les membres ont une santé parfaite. Ceci s'applique à la majorité d'entre nous. La vie vient du Christ Lui-même et les membres de Ses membres vivants; le sang sain est également livré à d'autres membres en moins bonne santé, de sorte que lentement, lentement, ils deviennent également sains et forts. C'est pourquoi nous devons être dans l'Eglise... afin de recevoir de la santé et la vie, parce que à l'extérieur du corps de l'Eglise, il n'ya pas de possibilité que nous puissions guérir et devenir revivifiés.

Tout cela, bien sûr, ne vient pas immédiatement. Tout au long de notre vie, le chrétien orthodoxe doit lutter, de sorte que, lentement, lentement, au sein de l'Église, avec la grâce de Dieu, avec l'humilité, le repentir, la prière et les Saints Mystères, il peut être sanctifié et déifié.

Ceci, cependant, est le but de nos vies; le grand but. Il n'est pas si important de savoir exactement jusques où nous progressons. Notre lutte elle-même, que Dieu bénit abondamment, a une valeur à la fois dans le siècle présent et dans le siècle à venir.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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