"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 11 juillet 2015

Vladimir MOSS: Le pain de l'Eucharistie (3)



Les Latins, menés en 1054 par le cardinal Humbert de Silva Candida, avaient deux arguments principaux pour la défense de leur propre pratique. Le premier était que le mot "levain" dans le Nouveau Testament avait de mauvaises plutôt que de bonnes, connotations, comme lorsque le Seigneur  parla de "levain des Pharisiens", ce qui signifiait l'hypocrisie (Matthieu 16,6). Encore une fois saint Paul exhortait les Corinthiens à "jeter le vieux levain, afin que vous soyez une pâte nouvelle, puisque vous êtes vraiment sans levain. Car en effet le Christ, notre Pâque a été immolé pour nous. Par conséquent nous gardons la fête, non avec du vieux levain, non avec un levain de malice et de méchanceté, mais avec les pains sans levain de la sincérité et de vérité."(I Corinthiens 5,6 à 7). Si le pain sans levain signifiait la sincérité et la vérité, raisonnait Humbert, n'était-il pas plus approprié pour le Corps de la Vérité Lui-même d'être fait de pain sans levain?

     Cependant, le levain a une signification symbolique très différente dans la parabole suivante du Seigneur: "Le royaume des cieux est semblable à du levain qu'une femme a pris et mis dans trois mesures de farine, jusqu'à ce que la pâte soit toute levée. (Matthieu 13,33). Ici le levain indique le Royaume des cieux, qui est, Grâce, et qui, lorsqu'il est mélangé avec la pâte de la nature humaine dans trois mesures, correspondant aux trois Personnes de la Sainte Trinité, lève. 

Et ceci est précisément ce que le pain de l'Eucharistie fait, en  unissant le Feu Divin de la Sainte Trinité et de la virilité parfaite et complète de l'Homme-Dieu, à notre nature humaine, l'élevant ainsi au Royaume d'en haut. Comme l'écrit l'archevêque Averky: "Dans l'âme de chaque membre individuel du Royaume de Christ, la puissance de la grâce invisiblement, mais progressivement et activement commence à posséder tous les pouvoirs de son esprit, et les sanctifie et les transfigure. Certains interprètent les trois mesures comme étant les trois puissances de l'âme: L'esprit, le sentiment et la volonté "[11]

     Confronté au fait du double symbolisme du levain dans le Nouveau Testament, l'argument latin se révèle ne pas être décisif. Nous devons donc revenir sur le fait que le levain a été utilisé dans la Cène selon les évangélistes et saint Paul. Et nous devons supposer que son symbolisme, a été positif...

     Toutefois, à ce stade, le deuxième argument latin de plus de poids entre en jeu. Selon les Latins, "αρτος" dans les Evangiles a dû vouloir dire des pains sans levain, car, selon les mêmes évangélistes, le Seigneur comme gardien fidèle de la Loi et homme parfaitement sans péché, n'aurait pas transgressé l'ordonnance de la loi relative à la célébration de la fête juive de Pâques sur le pain sans levain. En outre, les évangélistes synoptiques (mais pas Jean) appellent ces jours précisément "la fête des pains sans levain."



Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après 
le texte de Vladimir Moss 
publié le 19 juin/ 2 juillet 2015  
en la fête du saint apôtre Jude
et de saint Jean [Maximovitch]

Notes:
[11] Averky, op. cit., p. 135.

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