"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

jeudi 29 janvier 2015

Joel Kalvesmaki: Mon pèlerinage spirituel/ Préface

Protestant Evangélique, l'auteur ayant étudié les Pères et les écrits chrétiens de l'Eglise primitive, s'est converti à l'Orthodoxie.

Joel Kalvesmaki auth

Dix ans, depuis le début de mon cheminement spirituel, ont apporté d'énormes changements. Les trois écrits suivants représentent une réflexion précoce, un peu hâtive, mais sérieuse sur mon interaction avec les premiers Pères de l'Église. J'ai maintenant mis à jour ces écrits, supprimant les maladresses grammaticales et stylistiques, les erreurs factuelles et les redondances. Mais j'ai gardé, je l'espère, tout de leur naïveté d'origine, de leur jeunesse, et de leur vigueur.

À la fin 1995 et au début 1996, lorsque j'ai terminé ces essais, j'étais dans un certain désarroi. Je venais de quitter le champ de la mission, et j'essayais, tout à la fois, d'annoncer doucement à mes collègues missionnaires et à mes supporters de la presse mon intérêt pour l'Orthodoxie orientale; de déménager de Seattle à Londres; de reprendre mes études de premier cycle; de réapprendre ce qu'était la vie aux USA; et, surtout, de savoir si l'Eglise orthodoxe était vraiment ce qu'elle prétend être. Les écrits reflètent cette incertitude, cette excitation, et une [propension à la] généralisation téméraire.

A Pâques 1997, je suis devenu orthodoxe à l'église de la Dormition de Seattle. Je me suis installé dans la vie paroissiale, et j'ai poursuivi mes études afin de finir mon diplôme de premier cycle. Pour aller sur le terrain de la mission, je m'étais débarrassé de ma formation dans la musique; alors, je me suis inscrit à l'Université de Washington pour étudier les classiques et la philosophie. En 1999 j'ai été diplômé avec mention et j'ai choisi de continuer académiquement et professionnellement la littérature qui avait tant agité mon univers théologique. Mon intention était d'être aussi responsable que possible avec les sources dont je disais qu'elles m'avaient conduit à quitter l'évangélisme.

Tandis que j'écris ces lignes, je suis installé dans une vie de paroisse paisible à Washington, DC, où je travaille sur les mêmes Pères qui m'ont tant inspiré il y a dix ans. Pour cela, je travaille sur un doctorat en études chrétiennes primitives à l'Université catholique d'Amérique.

En relisant mes textes, je suis frappé de voir combien j'ai résumé rapidement, du mieux que j'ai pu, les doctrines de l'Eglise primitive. Maintenant, je ne résumerais jamais les croyances de l'Église primitive d'une manière générale aussi désordonnée. Alors, je scrutais mon précieux ensemble de traductions des Pères en anglais du XIXe siècle. Maintenant, je consulte régulièrement les éditions critiques grecques et latines. Ensuite, je fus dévoré par l'envie de m'adresser à un auditoire d'évangéliques nourris par un régime léger pop-apologétique. Maintenant, je suis intéressé à écrire pour un public beaucoup plus large. Ces essais reflètent certainement mon passé.

Pourtant, je maintiens les thèses centrales:

° Les protestants évangéliques devraient commencer à explorer l'ancienne tradition patristique et  l'accepter;

° ils devraient abandonner leur position contradictoire sur l'Écriture,  qui lui enlève son contexte  et sa valeur historiques;

° l'Eglise orthodoxe a été la plus fidèle à la tradition patristique et biblique;

° en toutes choses, nous devrions faire preuve d'une humilité théologique.

Je ne tiens pas à certaines autres demandes formulées dans les essais, même si je les ai retenues parce qu'elles illustrent comment j'ai désespérément essayé de donner un sens au monde qui était mien. Par exemple, je prétends que l'Eglise primitive aurait reconnu et communié avec les anglicans et les luthériens. Maintenant, je doute qu'elle parviendrait à surmonter le choc, vu l'état des églises modernes, pour même examiner la question. 

Je résume aussi ce que les premiers chrétiens croyaient sur le baptême, l'Eucharistie, le salut, etc. Je ne pense pas que j'ai écrit quelque chose d'ouvertement erroné, mais mes descriptions en présentent une image très simpliste, trop généralisée. Même ma façon de présenter et d'organiser la matière montre que je ne faisais que commencer à en apprendre davantage sur le christianisme primitif. 

Pour savoir ce que l'Église primitive croyait sur certains sujets, je recommanderais comme point de départ L'Encyclopédie du christianisme primitif, éd. Everett Ferguson, 2e éd. (New York: Garland, 1997). Je fais aussi une incursion dans l'épistémologie, l'herméneutique, et le cours d'histoire intellectuelle. Tout cela est absurde. Cela doit être ignoré. L'argument que je présente, témoigne de la manière dont j'ai lutté à l'époque pour intégrer les idées postmodernes dans ma lecture des Pères, et pour prendre du recul par rapport aux préjugés que moi-même et d'autres avaient vis-à-vis de la Bible et de l'Église primitive. Mais mon travail en philosophie et en histoire m'a ouvert les yeux sur la notion selon laquelle l'histoire intellectuelle de l'Occident peut être mise dans une telle vision, pratique et unilatérale.

Je crois que les essais servent encore leur public d'origine selon leur destination initiale. Ce n'est pas une œuvre d'écriture académique. C'est polémique. Mais c'est une polémique qui demande à être démolie, à être débarrassée de la présomption de parler pour Dieu, d'admettre volontiers l'erreur et de prendre place sur un siège avec le calme sentiment d'être correct* en adoration devant Dieu. Cela vaut toujours la peine de parvenir à cela.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après



* L'auteur emploie le terme correctability, néologisme américain sans équivalent en français. 

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