"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 7 août 2013

Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (7 et fin)


Staretz Tavrion avec les moniales de son couvent à Riga

Dormition du staretz

A Noël 1977-1978 le staretz commença à avaler avec difficulté. Au début, cette maladie sembla répondre au traitement, mais elle devait le conduire à sa tombe. Pendant sept mois, de Noël au 13 août, chaque jour, il ne mangeait et ne buvait rien du tout, si ce n'est une moitié d’oeuf ou bien du jus. A Pâques, le staretz cessa d’officier tous les jours à l'église. Il sortit à l'Ascension, le samedi avant la Pentecôte, quand les défunts sont commémorés, et à la Pentecôte. Lors de la Journée de l'Esprit Saint, il se coucha et ne se releva pas.

À 5h30 le dimanche 13 août 1978, le staretz appela un prêtre, afin qu'il puisse recevoir la Sainte Communion, être oint et avoir la lecture des prières pour le départ de l'âme. 

A  6h 40, pendant les prières, il reposa en paix. Après de longues souffrances et tourments, «sa passion», l'archimandrite Tavrion mourut d'un cancer de l'œsophage. Le staretz avait appelé ces douleurs difficiles qui le tourmentaient comme le cancer, «les plaies du Christ». Son repos le dimanche fut la dernière parole de sa prédication. Le staretz avait toujours appelé les gens à se préparer soigneusement à reconnaître et à respecter le Jour du Seigneur – le Dimanche - comme une Pâques vivante. Car, comme il le disait, si nous vivons cette journée comme un jour dans le Royaume à venir, et que nous recevons toujours la Communion, nous nous préparerons à la mort de la meilleure façon possible.

Après plusieurs jours de pluie désagréables, le jour des funérailles, le 16 août, parut clair et ensoleillé. 

C'était trois jours avant la fête de la Transfiguration, fête patronale du couvent, et de nombreux fidèles en deuil affirmèrent qu'ils avaient vu le soleil danser. Pendant les funérailles, célébrées par un évêque et vingt-deux prêtres, l'Évangile du jour fut lu. Les paroles étaient celles de l'Evangile de saint Jean que le staretz avait l’habitude de répéter très souvent à tous: «Celui qui mange Ma chair et qui boit Mon sang a la vie éternelle et Je le ressusciterai au dernier jour».

Son service commémoratif le quarantième jour fut aussi symbolique et joyeux. C'était la fête de la Nativité de la Mère de Dieu - la fête patronale du monastère de la Nativité de la Mère de Dieu à Glinsk. Là,  l'enfant Tikhon [nom de baptême du staretz] était entré, par son grand amour pour Dieu, de nombreuses années auparavant, quelques septante ans avant que sa vie,  l'une des vies les plus remarquables du XXe siècle tourmenté ait été vécue.

Saint Père Tavrion, prie Dieu pour nous!

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après



mardi 6 août 2013

Père Pavel (Adelgeim) assassiné à Pskov

Pavel Adelgeim

MOSCOU, 5 Août (RIA Novosti) - Les enquêteurs ont ouvert une enquête criminelle sur l'agression mortelle d'un prêtre chrétien orthodoxe célèbre après que son corps ait été découvert dans la ville russe du nord-ouest de Pskov lundi, a rapporté la commission d'enquête.
Le corps du prêtre Pavel Adelgeim, 75 ans, a été retrouvé dans sa maison de Pskov, ont dit les enquêteurs, ajoutant qu'un meurtrier présumé avait été arrêté.
Selon les enquêteurs, le suspect, qui serait de Moscou, connaissait personnellement le prêtre. [...]
Lev Shlosberg, un législateur de la région de Pskov, a déclaré sur la chaîne de télévision Dojd que le prêtre avait été tué par un malade mental qui avait séjourné chez lui pendant trois jours. Shlosberg a déclaré que le tueur est né en 1987.
Le meurtrier présumé avait été "accueilli par le Père Pavel et son épouse Vera à leur domicile à la demande d'une femme de Moscou qu'ils connaissaient," a dit l'officiel. "Il s'agit d'une personne souffrant de troubles mentaux, et peut-être que ses connaissances espéraient que la parole du Père Pavel permettrait de guérir sa maladie."
Shlosberg déclaré que le suspect avait poignardé le prêtre dans l'estomac, puis s'était lui-même poignardé deux fois.
Un porte-parole du Patriarche Kirill, qui dirige l'Eglise orthodoxe russe, a déclaré que le Patriarche pleurait la mort du prêtre et priait pour son âme.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Père Pavel, critique de la corruption dans la société et l'Eglise a connu la prison soviétique pour sa foi, y perdant une jambe et y contractant de nombreuses maladies.

Mémoire éternelle!


Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (6)



Enseignements

L'essence de l'enseignement du staretz portait sur la croix. Très souvent, il aimait à répéter que la place du vrai chrétien est sur le Golgotha, qu'il doit supporter comme  le couronnement de sa vie : mourir sur la croix. « Car si nous mourons avec le Christ, nous ressusciterons avec le Christ. » «Tout le monde doit faire son devoir», disait-il, « Ce sera la croix salvatrice du Christ. Si vous êtes pasteur, paissez votre troupeau avec ferveur, donnant votre vie pour vos brebis. Si vous êtes moine, un ange terrestre, un homme céleste, un moine ne devrait savoir que deux mots... «Pardonne» et «Bénis». « Si vous avez une famille, prenez soin d'elle. La famille est le fondement de la vie: vous êtes une petite église, un pilier de la fondation de l'Église.» Et comme le staretz s’élevait contre toute violation de cette loi! Les prêtres qui changeaient leurs affectations pour avoir plus d'argent,  il les appelait les changeurs. Et en ce qui concerne les évêques, il disait ce qui suit: «Vous avez entendu le sermon de saint Jean Chrysostome. Comment magnifiquement, comment il est écrit d’une manière didactique! Quel genre d'évêques il y avait autrefois!»

Le staretz parlait souvent de la vie de famille: «Certaines personnes disent: « Nous ne pouvons pas avoir des enfants, notre appartement est petit.» Et quel genre de conditions avaient-ils avant? Dans la salle il y avait un grand lit, le père et la mère y dormaient, et les enfants étaient à leurs pieds. Et la nuit, un ange venait réveiller le père et dire: 'Lève-toi, prends ta femme et tes enfants et prie Dieu ». Le staretz ne bénissait jamais les divorces, et les femmes qui se mariaient une seconde fois alors que leurs maris étaient encore en vie, il les appelait «Hérodiade sans foi ni loi.» «Que fit Hérodiade pour que Jean-Baptiste s'élève contre elle? Elle se maria, sans respecter la loi. Et comme elle avait déjà commencé à vivre selon sa propre volonté, elle a eu cette idée, «Donne-moi la tête de Jean le Baptiste sur un plateau! C'est là que la volonté propre conduit. »

Il y avait beaucoup de familles où l'épouse ou les enfants abandonnés étaient presque anormaux, ou étaient physiquement malades, et le staretz les aidait spirituellement et matériellement à tenir debout. Combien de familles, il y avait qui pouvaient à peine supporter leur douleur, avec les enfants malades, et malingres. Le staretz enseignait que ces enfants malades devaient être considérés comme la source du salut de toute la famille. «Rien n'arrive par hasard dans la vie. Dieu fait tout pour notre salut.»

Il y eut de nombreux cas de clairvoyance et le staretz appelait souvent les gens par leur nom en les voyant pour la première fois.  [Un jour, dit une femme qui était allée le voir, j'ai exprimé mon inquiétude auprès du staretz à propos de mon fils aîné qui était attiré par l'art moderne. Il répliqua. «Tout va bien. Il aura un maître qui lui enseignera à la fois l'art et la vie.» Ceci a été accompli, mon fils a étudié l'iconographie avec Père Cyprien, au monastère de la Sainte Trinité à Jordanville (USA).] 

[Autre témoignage: Un jour, je suis allé lui rendre visite avec mes cinq filles, et le staretz est venu à notre rencontre avec une moniale. «Regarde Matouchka, il nous montra du doigt, voilà un petit monastère! » A cette époque-là, aucune d'entre nous ne pensait au monachisme, mais à présent nous sommes toutes dans un monastère. Quand pour la première fois, mes filles furent dans le chœur pour chanter, le Père Tavrion donna sa pleine approbation, disant: «Chantez mes enfants, et vous ne dépendrez de personne dans la vie.» Ceci s'accomplit aussi, quand, étant venues à l'étranger, nous n'avons eu personne pour nous faire vivre.»]

Le staretz avait toujours l’habitude de tracer le signe de la croix sur le front, quand il voulait faire qu’une personne comprenne. Certaines de ses paroles étaient: «La grâce est en train de nous saisir et nous nous y opposons. » «Le cycle annuel des lectures évangéliques est disposé de sorte que tous ceux qui écoutent attentivement les lectures évangéliques entendent précisément ce dont ils ont besoin à ce moment-là». « Aime un homme, même lorsqu'il chute. » 

Le staretz appréciait beaucoup certains auteurs. De Soljenitsyne, il déclara: «C'est un prophète, il est notre Pouchkine. Il aimait aussi Dostoïevski et il disait de lui: «Chez Dostoïevski, il est écrit que si quelqu’un dans son enfance, a reçu seulement une pieuse bonne impression, alors peu importe combien sombre et sale sa vie pourrait être dans l'avenir, cette impression ne lui permettra pas de périr complètement. »



Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
et 
THE ORTHODOX WORD
N°96 
Janvier-Février 
1981

lundi 5 août 2013

Exposition orthodoxe en Belgique



L’association «Patrimoine Russe» et le Monastère De la Mère de Dieu à Diksmuide présentent l’exposition de photos du Père Sabbaty
« À VALAAM »
Du 15 au 29 août 2013

Zaal Ten Berkele à Pervijze 

ouverte de 14h à 17h30


Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (5)






Résistance

Sans jamais ouvertement s’opposer aux autorités soviétiques, le Père Tavrion ne leur cédait en rien. Par exemple, en 1977, pour le soixantième anniversaire de la révolution, on avait ordonné à toutes les églises de célébrer des offices d'intercession pour le bien-être des autorités. Ces offices furent célébrés et des sermons prêchés dans toutes les églises. Le staretz marqua l'événement avec le plus bref des sermons: «Donc, vous voyez combien il est bon, très tôt le matin, que nous glorifiions Dieu à la Divine Liturgie. Mais que font-ils maintenant dans les villes? Ils crient « Gloire ! Mais gloire à qui? » Bien sûr, il ne célébra pas d’offices d'intercession.
Pourquoi le gouvernement toléra-t-il l'existence d'un tel monastère? Il y avait plusieurs raisons:
Tout d'abord, il y avait l'extraordinaire capacité du père Tavrion de parler aux représentants du gouvernement. Un jour, le staretz fut soudainement convoqué à Moscou. Tout le monde était bouleversé et pleurait. Ils pensaient qu'ils ne le reverraient jamais plus. Il fut interdit à quiconque de voyager avec lui. Cependant, une moniale, qui jusque-là avait fortement détesté le staretz et avait même porté plainte contre lui auprès de l’higoumène, était maintenant plus bouleversée que quiconque et secrètement elle partit dans le même train que le père Tavrion.
L'accusation contre le père Tavrion était complètement ridicule. Apparemment, certains pèlerins s’étaient plaints que le staretz avait pris de l'argent de leur part pour des commémorations et ne leur avait pas donné un reçu. L'idée du KGB était que le staretz se troublerait, serait incapable de répondre et qu’il serait alors arrêté. Cependant, comme s'il s'attendait à leur plan, il fit semblant d'être un fonctionnaire soviétique exemplaire: «Bien sûr. J'ai apporté exprès tous les livres de comptes avec moi, s'il vous plaît, vérifiez. » Et ils dûrent le laisser partir.
La deuxième chose qui a préservé le couvent était l'argent. Trois diocèses (Lettonie. Lituanie et Estonie) étaient soutenus financièrement par d'immenses sommes venant de toute la Russie. Les moniales ont raconté que des camions entiers de farine de sarrasin, etc étaient envoyés au monastère voisin de Piukhtitsa en Estonie. Tous les chauffeurs de taxi connaissent le couvent et conduisaient joyeusement «au petit staretz qui donne beaucoup.»
En général, le staretz réussissait à obtenir tout ce dont avait besoin le Couvent des autorités avides d'argent. Par exemple, en Union soviétique, il était interdit de construire des églises ou autres bâtiments dans les monastères et les couvents. Le staretz, selon ses propres termes, «avait l’habitude d’attendre des occasions favorables». Il invitait les fonctionnaires et, tout en leur donnant quelque chose à manger, disait qu'il avait besoin de construire un établissement de bains. Les Lettons, qui étaient très propres et soignés, donnaient l'autorisation pour un établissement de bains et la construction commençait. Inaperçu, un deuxième étage était ajouté à la petite maison de bains, où les pèlerins pouvaient passer la nuit. De la même manière un réfectoire et une cuisine gigantesque furent construits sur le bûcher.
La troisième raison pour laquelle la vie du couvent était paisible était l’exceptionnellement bonne attitude de l'évêque diocésain envers le staretz. Le staretz n’enseignait jamais aux gens la haine des communistes, mais la haine de l'esprit communiste, l'esprit de l'Antéchrist. Ainsi, quand les gens venaient au couvent des paroisses modernistes, il les réprimandait beaucoup plus qu’il ne le faisait pour les communistes, dont les mères et les épouses venaient souvent en visite.
Un jour les deux artistes qui faisaient de l’art abstrait sont venus. Le staretz ne leur dit rien pour eux personnellement, mais dans son sermon du soir (il donnait le sermon deux fois à la Liturgie, une fois après l'Evangile, une fois à la fin du service, puis deux fois dans la soirée), il déclara: «Nous devons garder les règles de l'Église sur la manière de recevoir la Communion, comment jeûner et ainsi de suite. Mais si vous ne voulez pas les garder, alors que dois-je, moi  prophète, vous dire? Et en regardant directement les artistes, il a presque crié. «Hors de l'église. L'un d'eux est parti le lendemain, l'autre resta un peu plus longtemps, mais il respecta toutes les règles du couvent. Lorsque, dans ses dernières années, le staretz reçut des lettres de ces modernistes, il  grogna presque: «Brûlez les lettres, brûlez-les! Ayez pitié de moi, je suis malade, je n'ai pas le temps. » Mais en même temps, pour les lettres de gens simples, croyants ou qui voulaient croire, il avait à la fois la force et le temps de répondre.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


Fresque d'une église de Moscou représentant Saint Jean, Apôtre de la Diaspora, Frère Joseph-Ambroise, Gardien de l'icône de la Mère de Dieu "Portaïtissa", et Père Seraphim (Rose) de Platina.


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Bien que Frère Joseph-Ambroise (Muñoz) et Père Seraphim (Rose) n'aient pas encore été glorifiés officiellement par l'Eglise, leur vénération s'est répandue jusques en Russie. Que Dieu nous protège par leurs prières!



dimanche 4 août 2013

Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (4)


Offices

Le staretz accordait une grande importance à la décoration extérieure de l'église, aux chants et aux offices. Toute l’année des fleurs fraîches ornaient l'église et l'autel. Deux grands vases avec des lys blancs étaient disposés autour de l'icône de la Mère de Dieu entourée de chérubim. Et ces lys blancs, réunis avec les ailes blanches des anges, laissaient une impression indélébile.
Le staretz était un archimandrite avec trois croix, et il avait le droit de servir la Liturgie avec les portes royales ouvertes. Il faisait usage de ce privilège chaque jour. 

Au cours de la Liturgie, Père Tavrion changait trois fois de vêtements. Il commençait à officier dans un vêtement d'une couleur appropriée pour la journée (jaune, bleu, vert, etc), quand à l'Eucharistie il la célébrait toujours en habits rouges, et il donnait la Communion en vêtements blancs comme à Pâques. Il faisait tout cela pour que les différentes personnes qui se tenaient devant lui, et qui ne comprenaient presque rien, soient respectueuses et aiment de la beauté des services religieux.

A Noël, l'église était ornée d'une manière particulièrement solennelle. Deux petits sapins ornés de fils d'argent étaient placés de chaque côté de l'autel et la grande icône à l'arrière de l'autel était remplacée par une icône tout aussi importante de la Nativité du Christ. Cette icône avait été peinte par le staretz qui peignait très bien. La Mère de Dieu et [saint] Joseph étaient représentés en vêtements monastiques noirs sur l'icône. Sur la gauche, derrière le chœur, il y avait une petite icône de la Nativité, et de chaque côté de celle-ci étaient des figures en carton des bergers et des mages, également peintes par le staretz. 

Les offices de Noël avaient lieu à minuit et après la Liturgie tout le monde allait rompre le jeûne. La nourriture était alors composée de pommes de terre, de hareng, d’un morceau de fromage, de beurre et d’un œuf. C’était une fête luxueuse, parce que la veille de Noël personne n'avait mangé ou bu quoi que ce soit.

A la Dormition il y avait toujours une procession autour des deux églises du couvent, avec le suaire de la Mère de Dieu. Quand le suaire retournait à l'église, il était tenu en hauteur à la porte, et tout le monde passait en dessous. La même chose était faite à Pâques. 

A la Pentecôte, les tapis étaient sortis de l'église et des tapis de hautes herbes étaient mis à la place. En lieu et place de passage au centre de l'église, un chemin de fleurs allait de l'entrée jusques aux portes saintes. Ils faisaient également un coussin d'herbe sur laquelle le staretz se mettait à genoux quand il lisait les prières des Vêpres de la Pentecôte.

Malgré tous les efforts de Père Tavrion, le chant au couvent était terrible. Il y avait deux chœurs. Sur la droite étaient les moniales et sur la gauche les moniales secrètes qui avaient suivi le staretz depuis Yaroslavl, avec tous les pèlerins qui voulaient chanter. 

Le problème avec le chœur de gauche, c'est qu'il n'y avait pas de chef de chœur et les chanteurs de la chorale allaient et venaient, et beaucoup de choses sont chantées différemment dans différents lieux. Par conséquent, le staretz devait lui-même souvent se tenir vers le chœur. 

Sur le chœur de droite il y avait un chef de chœur, mais les chanteurs ne l'écoutaient pas beaucoup et ils chantaient tristement, comme le staretz l'a dit, «comme s’ils nous entraînaient dans la tombe».

Les petites particularités des services du staretz étaient particulièrement belles. Celles-ci faisaient la différence avec les services de tout autre prêtre. Par exemple: «Saint Dieu» était chanté par la première chorale à droite, puis Père Tavrion faisait face au peuple et s'exclamait: «Que toute l'Eglise chante», et il dirigeait le chant. Le troisième «Saint Dieu» était chanté par la chorale. L'autre occasion où il disait: « Que toute l'église chante », c'était avant le« Notre Père ».


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

samedi 3 août 2013

Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (3)




Le couvent de la Transfiguration

En Mars 1969, le staretz fut nommé père spirituel du couvent de la Transfiguration près de Riga en Lettonie. Il y arriva avec un grand nombre de femmes qui l'avaient suivi, beaucoup d'entre elles étaient moniales secrètement. En moins de dix ans, qu’il devait y passer, ce couvent devint un lieu de pèlerinage pour toute la Russie.
Là, le staretz établit la coutume que tous les pèlerins au couvent devraient recevoir la Communion tous les jours. Par conséquent, la nourriture était strictement carémique et très pauvre - soupe, gruau et thé, bien que cela ait été administré trois fois par jour. Les moniales, d'autre part, ne recevaient pas la Communion aussi souvent et donc elles mangeaient séparément. 
Bien que de nombreux bâtiments dans le couvent avaient été construits par le père Tavrion, les conditions étaient très difficiles. Les pèlerins étaient mis dans de grandes salles où ils dormaient sur le sol, une quarantaine par pièce. Il n'y avait pas de chaises dans l'église et les offices étaient longs. La Liturgie commençait à 7h00, mais ceux qui devaient recevoir la Communion, lisaient la règle à 4h30 [prières avant la Communion] et il y avait ensuite la confession. Le staretz demandait que même les enfants viennent aussi tôt.
Une pèlerine raconta ce qui suit qui se passa à la fin de sa première visite. «Il m'a demandé gentiment. Eh bien, que dis-tu? Je lui ai dit: 'Père, j'ai sept enfants.» Il était radieux. «Sept enfants! Quelle merveille! Ton époux doit t’aimer beaucoup. » Et il sourit d'un sourire joyeux. J'ai dit: «Non, mon père, mon mari m'a quitté. «Il t’a laissée! Eh bien, ce n'est pas grave. Les enfants sont probablement bien ». Et il est devenu encore plus joyeux. J'ai soupiré: «Non, mon Père. Mes enfants sont désobéissants ». Et le staretz m'a dit, avec encore plus de joie: «Eh bien, c'est bien. Tout ira bien pour toi. Sept enfants – comme c’est merveilleux!» Je me suis encouragée. «Est-il vrai, mon père, que tout ira bien?» Il sourit et dit. «Eh bien, peut-être que non».
À ces mots, je suis devenue encore plus joyeuse que quand il avait dit que tout irait bien pour moi. 
Puis, soudain, il m'a regardé (habituellement il parlait aux gens sans les regarder) et il a dit. «Veux-tu être sauvée? Je vois que tu veux être sauvée. Aime les enfants ! » Et il a répété à nouveau. «Veux-tu être sauvée? Aime les enfants. Dans la vie, tout ne semble pas équitable. C'est parce que tout le monde a pris l'habitude de regarder les choses du point de vue de la vie, et les gens oublient que ce n'est qu'une petite minute, non, juste une fraction de seconde, un instant, en comparaison avec la vie éternelle. » Plus tard, il m'a dit: «Ne pense pas que Dieu est cruel ou désire nous torturer. Dieu est un Père aimant, il fait tout pour notre salut. N'oublie pas que cette vie qui passe est si courte par rapport à la vie éternelle. »

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


vendredi 2 août 2013

Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (2)



Révolution et persécution

En 1920, encore novice à Glinsk, Tikhon fut appelé par le gouvernement soviétique pour le service militaire. Il alla à Koursk et indiqua clairement aux autorités que comme moine, il ne servirait pas dans l'armée. Il fut autorisé à repartir. Sur le chemin du retour, il faillit se noyer dans les eaux printanières en crue, juste à l'extérieur du monastère. Plus tard, il écrivit un compte rendu de cette expérience en gage de gratitude à Dieu d'avoir épargné sa vie.
A Glinsk sa première obédience fur de peindre des icônes. Cependant, en 1921, il fut ordonné hiérodiacre dans le monastère Novospassky à Moscou par Vladyka Paulin (Krishetchkine), avec qui il resta jusqu'à la mort de ce dernier. En 1925, il fut ordonné prêtre et depuis ce temps il servit une Liturgie quotidienne. En 1926 Père Tavrion, était maintenant devenu higoumène du monastère de Saint-Marc à Vitebsk et en 1927 recteur de l'église Saint-Théodore. Dans cette même année, il participa à une tentative secrète échoué pour élire un nouveau patriarche, en recueillant les votes des évêques exilés.
En 1928. Père Tavrion fut nommé archimandrite « pour vos futures souffrances», comme l'a dit l'évêque Paulin, et il fut exilé à Perm avec l'évêque. Peu de temps après, il fut arrêté et condamné au camp de concentration.  Le staretz passa plus de 27 ans en exil, prisons et camps de concentration, où, entre autres choses, il aida à construire un canal. En ce qui concerne sa vie en prison, il raconta ce qui suit: «Combien grand est le sacrement de la confession! Nous étions là, couchés sur nos lits superposés et tout autour de nous, il y avait de la saleté, des jurons et des crachats. Mais pour nous, ceci était aussi brillant que le paradis. Un prisonnier m'a chuchoté à l'oreille: «Que je suis content d’être venu ici, Père! Je sais que demain ils vont me prendre à nouveau pour un interrogatoire, ils vont me torturer, je sais que je ne vais pas sortir d'ici en vie, mais pour la première fois de ma vie, j'ai déchargé mon âme dans le sacrement de la confession. »
En ce qui concerne ses années dans les camps de concentration le staretz dit: «Les gens mouraient comme des mouches. Mais j'avais creusé une petite cellule dans la terre et chaque jour, très tôt le matin, j'avais l'habitude de célébrer la Divine Liturgie. Plus tard, les religieuses à Riga racontèrent comment elles avaient des visiteurs qui avaient envoyé des raisins au staretz dans son camp, avec lequel il avait fait du vin. En 1953, le staretz fut exilé au Kazakhstan, où il endura les années les plus difficiles de sa vie, en travaillant comme gardien dans une école. En 1956, après la mort de Staline, le staretz fut «réhabilité» et nommé prêtre à la cathédrale de Perm.
En 1957, le staretz put retourner à Glinsk, où il avait commencé sa vie monastique comme novice Tikhon, près de cinquante ans auparavant. Il fut nommé higoumène, mais les moines avaient perdu l'habitude de la règle stricte et ils commencèrent à se plaindre: «Nous sommes vieux, nous sommes malades, il est difficile pour nous de nous lever tôt. Le staretz fut transféré à Yaroslavl. Glinsk ferma, et les moines furent dispersés dans différents monastères. En 1958, le staretz passa plusieurs mois dans le monastère de Pochaev. Comme les persécutions sous Khrouchtchev s’aggravèrent, plus tard la même année, il alla à Oufa et devint prêtre de la cathédrale et également secrétaire diocésain. En 1961, il servit dans le diocèse de Yaroslavl, dans le village de Nekrasovo, et en 1964 dans le village de Nekous. Il lui fut interdit de prêcher par le métropolite Jean (Wendland), lorsque le nombre de personnes qui venaient l'entendre contraria les autorités communistes.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

jeudi 1 août 2013

Le Saint Staretz Tavrion de Riga (1898-1978) (1)




Les débuts
Toute la vie du saint staretz Tavrion de Riga fut une vie de persécutions et de souffrances. Né Tikhon Batozsky dans la ville de Krasnokoutsk près de Kharkov, le 10 Août 1898, le staretz a décrit ses premières années dans les termes suivants:
« Nous avions une grande famille de dix enfants et j'étais le plus jeune. Un jour, quand j'étais couché sur le poêle, écoutant mes frères réciter leurs leçons à haute voix, maman dit: «Vous voyez, vous étudiez tout le temps, mais Tikhon sait tout sans cela. Ils m'ont testé, et c'était vrai, je savais tout: l'histoire russe, l'histoire de l'ancien monde et tout ce qu'ils étudiaient. Plus tard, quand je suis allé à l'école, dans mes cours d'histoire, je voulais glisser sous le bureau et dessiner. J'aimais vraiment le dessin. Un jour, le professeur m'a remarqué et m'a sorti en me tirant oreille. «Que fais-tu? Demanda-t-il. Je lui ai répondu: «Je sais déjà toute la leçon ». «Comment est-ce possible? A dit le professeur. Il a commencé à me tester, et c'était vrai: je savais tout, et je connaissais même les leçons à venir. Alors il m'a permis de dessiner pendant ses cours.
Nous avons tous travaillé dur, ma mère travaillait particulièrement dur. Personne ne savait quand elle se levait. Le matin, elle faisait des crêpes et nous les donnait, et nous allions à l'école, en les mangeant en chemin. Nous travaillions toute la journée, et le soir, après le souper, nous nous asseyions pour chanter. Nous étions tous très musiciens et un frère jouait même du violon. Et c'est ainsi qu'il jouait et nous chantions des chants religieux. Tous les voisins enviaient ma mère et lui disaient: «Vous avez de la chance. Personne n'a une famille comme vous ». Parce que mon père voulait que tous les garçons deveniennent officiers, et chacun d'eux le sont devenus, à part moi, il a été arrêté au cours de la guerre civile et mis en prison où il mourut. Certains des enfants ont été tués et d'autres ont été emprisonnés. J'étais dans un monastère, puis dans un camp de concentration. Maman est morte dans la maison de quelqu'un d'autre.

Je me souviens quand j'étais toute petit, ma marraine, une vieille dame pieuse, m'a emmené à l'église. Je me suis assis dans ses bras et tout autour de moi étaient des icônes et les petites flammes des lampades et des cierges. Et c'était si beau, si magnifique. J'ai tellement aimé cela que lorsque j'eus sept ans, je me suis enfui du monastère de Glinsk. Mais ils m'ont renvoyé parce que mon père voulait que tous ses enfants soient officiers. Puis, à l'âge de dix ans, je suis finalement entré au monastère en Glinsk pour de bon. Ma mère m'a dit à propos de ses dix enfants: «Nous devons donner la dîme à Dieu».

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après